8. Le monstre de glace

Je suis absolument désolée pour l'absence, j'ai même pas d'excuse valable à part vous dire que les mots ne voulaient pas sortir (j'vous jure c'était bloqué), mais j'espère que vous apprécierez ce chapitre quand même.
D'ailleurs bonne chance à tous les lycéens qui vont pas tarder à plancher sur le bac (mhhh une bonne petite semaine d'épreuve commençant par la philo, le régale mdrr) , croyez en vous, vous allez tout déchirer.

Melek Ozkan

Je pensais simplement venir au lancement d'un album, pas à un mini concert, pourtant c'est ce qui est entrain de se passer. Deen a fait monter quelques uns de ses gars sur scène et c'est parti en live. J'suis pas vraiment une habituée de ce milieu, c'est même tout nouveau pour moi, mais j'avoue que ça me plaît bien.

Sid est sur scène lui aussi. C'est la première fois que je le vois dans son élément. Et j'avoue que je suis un peu scotchée. Il est bon. Ils sont tous bon.

Victoria à côté de moi, danse et crie les paroles, apparemment elle a déjà dû entendre ces sons quelques fois.

- J'adore cet album, Deen a bossé comme un ouf dessus, c'est sa consécration, lance la rouquine.

J'acquiesce, moi aussi j'aime bien.

- Je suis pas trop calée rap français, je connais plus de sons US mais je trouve ça cool, il est bon.

- C'est un acharné, elle répond, c'est même tous des acharnés c'est fou.

J'ai un sourire. J'ai une reconnaissance infini pour les bosseurs, les mecs qui font tout pour atteindre leurs objectifs.

Au même moment, la blonde que Sid a enlacé quelques instants auparavant se fend une place dans la foule avant de remonter les escaliers et marcher dans notre direction.

Comme Victoria, elle est plutôt petite, ou je suis grande, je sais pas trop dans quel sens le prendre. Elle a un visage de poupée, elle est vraiment jolie.

Qui elle est pour Moh?

Putain pourquoi je me pose cette question?

J'ai presque envie de me foutre une baffe, je ne peux pas me transformer en pauvre petite gamine tombant amoureuse de son sauveur. Beurk.

- Vic j'te jure ces chaussures plus jamais, mes pieds c'est même plus de la compote c'est du mouliné de légume. Je vais me taper des ampoules d'un autre monde demain.

Ah. D'accord. Elle est pas bizarre un peu?

- Je te l'avais dit, se marre Victoria.

La blonde soupire avant de retirer ses talons, pour rester simplement en collant. Euh?

Elle s'agace, râle un peu sur ses chaussures, jusqu'à ce que ses yeux se posent sur moi. Elle me fixe plusieurs secondes, et j'ai soudainement peur d'une réaction de fan un peu trop envahissante. Mais non. Elle fait pire.

- Oh.Mon.Dieu! elle s'exclame, mais comment tu fais pour tenir sur des talons pareils? C'est quoi ton secret?

Elle a prononcé la dernière phrase en m'attrapant les mains, comme si j'étais le messie des talons ou je ne sais quoi. Ça me met mal à l'aise. J'aime pas vraiment qu'on me touche depuis gosse.

- Euh...

Je jette un coup d'œil un peu paniqué à Victoria qui, pour seule réaction, hausse les épaules en se mordant les lèvres pour ne pas rire.

Est ce qu'il y en a un de normal dans ce groupe?

- Non non, mieux, reprend la blonde, ou t'as trouvé ces merveilles?

Je sais pas si je trouve son apparente extravagance gênante ou drôle. Mais j'ai toujours ce drôle de truc dans la gorge quand je pense à elle et Sid.

Merde Melek arrête de penser a ça et concentre toi.

La petite blonde me regarde toujours avec ses grands yeux. On dirait qu'elle joue sa vie sur ma réponse. Wah.

- C'est la nouvelle collection de Casadei.

- Il faut absolument que je me les trouve, elles sont sublimes vraiment elles sont exceptionnelles c'est des pépites j'arrive pas à croire qu'elles ex...

- Respire Lou, la coupe Victoria en se pinçant le nez pour s'empêcher de rire.

La blonde se coupe immédiatement, prend une grande inspiration avant de se tourner à nouveau vers moi et m'offrir un grand sourire et une poignée de main.

Wah.

- Désolée, j'ai tendance à m'emballer quand on parle de chaussure, je suis Louna.

- Melek, je répond simplement en serrant sa main.

- Je sais, je te suis sur insta.

Weird.

Je lui adresse simplement un discret sourire, je ne sais jamais réagir face à ça. On me dit souvent que ça ne devrait pas me sentir mal à l'aise, mais c'est le cas.

Enfaite après presque dix ans sous les projecteurs, j'ai besoin de redevenir une fille ordinaire. Mais ma conscience me souffle toujours que je n'ai jamais été ordinaire et que je fais partie à part entière de cette spirale infernale.

Je sais plus en sortir.

Peut être que je ne saurai même pas vivre sans.

- Oh Ken vient de m'envoyer un message, ils veulent bouger chez Deen, s'exclame la blonde. Attend je lui répond qu'on les rejoint dehors.

Ok, ça c'est ma porte de sortie. Je jette un coup d'œil à la salle, elle commence à doucement se vider. J'aimerai bien voir Sid, juste lui dire que je me tire, histoire de ne pas passer pour une sauvage.

- Tu viens avec nous? demande la rouquine en me fixant.

Par réflexe je jette un coup d'œil à ma droite.

- C'est à toi que je parle Melek, elle rit.

- Oh, hum je vais rentrer plutôt.

La petite blondinette lève soudainement les yeux de son téléphone en les écarquillants. Je la trouve de plus en plus bizarre.

- Pas question, tu dois absolument venir avec nous.

Elle m'a déjà agrippé par le bras et traîné dans les escaliers, sans vraiment comprendre comment je me retrouve à l'arrière d'une Audi, entourée par les deux filles dont je viens à peine de faire la connaissance.

Tout va bien.

Tout va très bien.

Le conducteur fronce les sourcils en me remarquant, ouais je sais mec, moi non plus je sais pas pourquoi je suis là.

- Qu'est ce qu'elle fout là elle?

Il a la voix super grave. On dirait un peu celle de mon père.

- Haks parle mieux, râle Louna.

Il la foudroie du regard et la blonde lui répond avec un grand sourire. Une autre fille, au trait assez typé asiatique s'installe à la dernière place.

- Tu foutais quoi encore? T'es chiante à toujours traîner.

Ça lui arrive d'être sympa à celui là?

- J'aidais ton débile de frère à retrouver son téléphone, il l'a laissé dans la salle, je sais pas par quel miracle il l'a retrouvé.

Son frère c'est Idriss je crois. Le copain à la rouquine.

Ouais je fais marcher ma mémoire à 10000 pour essayer de tout retenir. Je galère un peu.

- Allez roule.

Je me sens mal à l'aise. Pourquoi je suis là sérieux? J'espère vraiment que Sid fait parti de la soirée.

Durant tout le trajet les trois filles chahutent, chantent les paroles des chansons passant à la radio. Hakim lui reste silencieux, par moment il jette un coup d'œil dans le rétro, on se fixe quelques secondes puis il se concentre à nouveau sur la route.

Par réflexe, ou peut être par angoisse, je ne peux m'empêcher de me gratter l'intérieur de la paume des mains.

Je crois que j'ai beau avoir vécu entouré de centaines de personnes là pour moi, ou plutôt pour ce que je peux produire, je ne sais pas réagir entouré de jeunes de mon âge. Ça me fait même flipper.

Et quand je flippe, je deviens froide.

Et là, le monstre de glace est enclenché.

Rapidement je me retrouve assise sur un canapé, entouré de mecs que je n'ai jamais vu de ma vie, qui me questionne sur mon taf et sur mes parents.

Ozkan c'est pas un nom qui passe inaperçu ici a Paris. Et apparement la bande de Sid n'a pas dérogé à la règle.

- Du coup Murat Ozkan c'est bien ton daron?

Je sais pas comment il s'appelle celui là, mais il commence à me taper sur les nerfs avec ses questions. Je lui demande moi qui sont ses parents? Non.

Pour éviter de lâcher mes nerfs sur ce pauvre type je me lève. L'appartement est bondé, il y'a a vraiment beaucoup de monde. Je me demande si ils sont tous des proches, ou si comme moi ils se retrouvent là sans vraiment savoir pourquoi.

Un verre à la main et une clope plus tard, je laisse le calme de cette nuit de début d'automne m'envahir.

- Pas fan des soirées?

À ma droite, les bras posés sur le balcon, la rouquine, Victoria, regarde les bâtiments.

- Pas fan du monde, je répond simplement.

- C'est pas étonnant pour une personnalité public. Les garçons sont comme ça aussi, enfin surtout Ken.

- Pourtant ils le supportent, je dis en me tournant vers la baie vitrée.

J'arrive pas à être entouré de personne que je ne connais pas. Ça me tend.

Je crois que j'arrive pas à être entouré tout court.

- Ils se connaissant tous depuis des années, c'est pas la même chose. Puis ils vivent tous là même chose, à différents degrés bien sur. Dans cette pièce, ils sont tous dans le milieu, alors ça réduit pas mal les problèmes et les traitres.

- Ça doit être agréable, je répond.

La rouquine me laisse continuer, les yeux elle aussi fixé sur ses amis.

- Ça doit agréable d'avoir des gens sur qui compter.

Moi j'ai grandi chez les requins. Et un petit poisson chez les requins, ça fait jamais bon ménage.

Victoria ne répond rien, je crois qu'elle comprend mon besoin d'être seule, ou du moins de silence. Je ne la connais pas, je n'ai aucune idée de son histoire, à part les quelques bribes que Sid m'a raconté, pourtant j'ai la puissante impression qu'elle me comprend.

Elle finit par quitter le balcon, appelée à l'intérieur par son petit copain. J'en profite pour me rallumer une seconde clope.

- Je savais pas que tu fumais.

Pas besoin de me tourner pour reconnaître le propriétaire de cette voix.

Il s'appuie à son tour à la rambarde, avant de me tendre son verre.

- C'est quoi?

- Un coca, je bois pas d'alcool.

J'acquiesce et attrape son verre. Moi je bois. Et je fume. Et ça m'est déjà arrivé de prendre d'autre truc dont je ne suis pas spécialement fière. Ça me faisait un peu oublier à une période.

Maintenant ça me détraque plus qu'autre chose.

- Je pensais pas te voir ici, mais je suis content.

- Tes potes m'ont prise en embuscade, j'avais pas vraiment le choix.

- Ça c'est ma Vicky, il rigole.

L'image de la petite blondinette le serrant dans ses bras me revient en tête. Putain dégage.

Je me masse les tempes.

- T'as pas bonne mine chat.

- Tu crois que t'as bonne mine toi? je demande en haussant un sourcil.

Il a probablement l'air aussi crevé que moi. C'est quelque chose que je n'avais pas spécialement remarqué avant, mais il a de belles cernes.

- Et toc, Melek est de retour, il sourit.

Je roule des yeux en lui rendant son verre.

On ne s'est pas vu depuis que je suis rentrée quelques jours plus tôt. Il était en déplacement pour le tournage d'un film, moi j'étais à droite à gauche à faire des interviews et des shoots.

Je crois que sa vieille tête m'avait peut être un peu manqué.

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