Chapitre 18

2 ans plus tôt- Idris

Rafael se planta devant son frère, un sourire aux lèvres.

- Salut moustique!

- Dégage Raf ! J'suis pas d'humeur !

Le jeune garçon perdit son sourire à la vue du visage triste de son frère. Il s'assit à côté de lui.

- Qu'est-ce qui se passe ?

- Rien !

- C'est ça oui, je te crois !

Max haussa les épaules.

- Tu t'es fait engueuler par les parents ? Lui demanda Rafael.

- Non ! Laisse tomber !

- Mais vas-y, dis-moi ! Pourquoi tu veux pas me dire ?!

- Parce que ça ne te concerne pas !

- T'es mon petit frère, donc si, ça me concerne !

Il essuya une larme qui coulait sur le visage du plus jeune.

- Dis-moi !

- J'aime pas être ici !

- Il y a encore quelqu'un qui a ouvert un peu trop sa bouche ?!

- Pour eux je suis un monstre de toute façon !

Rafael lui donna une tape derrière la tête.

- Raconte pas n'importe quoi !

- C'est pas n'importe quoi ! T'as vu comment ils me regardent ?!

- Parce qu'ils sont débiles !

- Je les déteste !

- Tu leur accordes trop d'importance... Murmura Rafael.

- C'est facile à dire pour toi ! Tu n'as pas ce problème!

- Parce que tu crois que ça me fait plaisir quand ils s'en prennent à toi ?! Quand ils disent qu'on n'est pas une famille ?! Les regards qu'ils posent sur moi sont peut-être différent, mais ils sont loin d'être amicaux, je peux te le garantir !

Max resta silencieux un moment.

- Je veux rentrer... Finit-il par dire.

- Max...

Rafael prit le visage de son frère entre ses mains, et plongea ses yeux dans les siens : yeux bleus océan contre marron sombre.

- Peu importe ce qu'ils disent, tu es mon petit frère ! Rien ni personne ne pourra jamais changer ça ! Et je veillerai toujours sur toi !

- C'est pas vrai... Un jour tu ne seras plus là...

- Je trouverai un moyen, Max, je te le promets ! Puis les parents seront toujours là !

- C'est pas pareil ! Puis tu les vois beaucoup, toi, depuis qu'on est ici ?! Ils sont jamais là !

Rafael baissa les yeux. Son frère n'avait pas tort. Depuis leurs arrivés à Idris, une semaine plus tôt, il n'avait que très peu vu leurs pères. Il s'occupait alors comme il pouvait de son petit frère pendant l'absence de leur parent.

- Ouais, je sais... Mais dans deux jours, on sera à la maison, et tout reviendra à la normale ! Essaya-t-il de rassurer Max.

- A la maison non plus ils ne se sont jamais là... Jamais là tous les deux en tout cas... Soit dad est en mission, soit c'est papa qui est pas là parce qu'il travaille dehors !

Il est vrai que leur dernière soirée passée tous les quatre datait d'un certain temps...

- Et papa et dad n'arrêtent pas de se disputer... Rajouta tristement Max.

- Ils se sont tous le temps disputés ! Il ne faut pas t'inquiéter pour ça, tu sais très bien comment ils sont !

- Non, ce n'est pas comme d'habitude ! C'est plus grave... Tu t'es déjà demandé ce qui arriverait s'ils ne voulaient plus de nous ?

- Oui... Avoua Raphaël. Mais ils ne nous abandonneront pas ! Et même s'ils le faisaient, toi et moi on resterait ensemble quand même, et ça c'est plus important que tout le reste !

Max leva des yeux pleins d'espoir vers son frère.

- Tu promets ?

- Oui, je promets...

Présent-Brooklyn

Un verre de whisky à la main, Magnus avait le regard perdu dans le lointain. Sur la terrasse de son appartement, il fixait un point imaginaire, dans le lointain. Alec passa ses bras autour de sa taille. Il avait les traits tirés, et des poches sous les yeux. Il ferma les yeux, s'enivrant de l'odeur rassurante de son amant.

- Alors ? Lui demanda Magnus.

- Rien de plus...

Le sorcier serra le verre dans sa main.

- C'est de ma faute !

- Bien sûr que non !

- Si ! Il était avec moi ! J'aurais dû le retenir ! J'aurais dû essayer de le retrouver plus tôt, au lieu de... Je pensais qu'il avait juste besoin d'être seul...

- On était inquiet pour Rafael, on avait tous passé une soirée difficile, et...

- Non ! On n'a aucune excuse ! Nos enfants ne sont pas rentrés et nous on ne s'inquiétait même pas ! On s'envoyait en l'air alors que Rafael et Max faisaient n'importe quoi ! Quel genre de parents font ça, hein ?!

Des flammes bleues apparurent dans ses mains, et le verre qu'il tenait, éclata, répandant au sol des débris de verre.

- Merde ! S'exclama Magnus avec colère.

Alec le retourna vers lui et prit les mains du sorcier, dont la peau blessée par le verre cicatrisait à vue d'œil, dans les siennes.

- Calme-toi ! On n'a pas merdé, on leur a fait confiance ! Rafael nous a menti, Max l'a couvert ! Ce n'est pas la première fois, et ce ne sera pas la dernière !

- Et tu trouves ça normal toi ? Il n'y a rien qui te dérange ?!

- De quoi tu parles ? J'ai toujours fait ça avec Jace, et...

- Exactement, c'est bien ça mon problème !

- Je ne comprends pas...

- Ta relation avec Jace va bien au-delà de l'amour fraternel...Ça a toujours été plus que ça...

- Mais enfin de quoi tu parles ?! Du fait que j'ai cru pendant quelques années être amoureux de lui ? Parce que je peux te rassurer, ce n'est pas le cas de nos enfants !

- Bien sûr que non ! Ce n'est pas ce que j'ai dit, mais leur relation va au-delà de l'amour d'un frère pour son frère ! Tout comme toi et Jace, ils risqueraient leur vie l'un pour l'autre !

- Comment tous les frères et sœurs... Regarde avec Izzy, je...

- Non, c'est différent... Ils se comprennent en un seul regard, ils...

- Comme des frères ! Il n'y a rien d'autre ! Magnus...

Alec l'attrapa par le coude et l'attira vers lui.

- Qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce qui te tracasse ?

- Et si... Et si cette prophétie était vraie, et si... Si Max était le mal...

- Non ! S'exclama aussitôt Alec ! Comment peux-tu dire une chose pareille ?!

- On ne sait rien de ses parents ! C'est vrai, comment a-t-il pu arriver sur les marches de l'académie d'Idris si sa mère était une terrestre ?! Hein ? Tu peux me l'expliquer ça ?! Puis je n'ai jamais vu un sorcier aussi jeune avec autant de pouvoir ! Tu ne l'as pas vu toi !

- Tu délires !

- Et toi tu te berces d'illusions !

- Putain, mais... C'est notre fils, Magnus ! On...

- Non, il ne l'est pas !

- Pardon ?!

- Il ne l'est pas, Alec ! Dans notre cœur, oui, rajouta-t-il sous le regard noir de son amant, mais biologiquement, non ! On ne sait pas d'où il vient, et...

- Ton père est la pire ordure que j'ai vue, et pourtant j'en ai vu, à commencer par l'assassin de mon frère, mais toi tu es quelqu'un de bien, non ? Ou alors ça fait 17 ans que je me trompe sur ton compte ?!

- Peut-être, oui ! Lui répondit-il en tournant les talons.

Alec resta seul quelques minutes. Il voulait le laisser se calmer. Et se calmer lui aussi par la même occasion. Malgré l'aide de tous les chasseurs d'ombres de l'Institut et des créatures obscures de New York, ils demeuraient toujours sans nouvelles de Max. Il était hors de question, bien évidemment, d'en alerter l'Enclave. S'ils pouvaient les tenir éloignés de tout ça le plus longtemps possible, ils le feraient. Le néphilim finit par se décider à rejoindre son amant. Celui-ci s'était enfermé dans leur chambre. Il se tenait au bord du lit, la tête dans les mains. Alec s'assit à ses côtés, et posa sa tête contre ses épaules.

- Je ne veux pas le perdre... Lui confessa Magnus.

- Je sais... On ne le perdra pas, on va le retrouver !

- On n'aurait jamais dit dû accepter de faire ce stupide pacte avec Azael !

Alec releva la tête.

- Ce stupide pacte, comme tu dis, nous a permis de nous assurer qu'on passe l'éternité ensemble !

- Pas tous ensemble, non... Tu oublies Rafael...

- On trouvera une solution pour lui ! Je le jure sur ce que j'ai le plus cher !

- Si tu pouvais éviter... Je n'ai pas envie de mourir !

- Tu pourrais positiver ?! Ou au moins faire semblant ?!

- Je te trouve bien optimiste, Alec !

- Je suis inquiet autant que toi ! Je sais pertinemment que s'il est entre les mains de ton père, chaque seconde qui passe nous éloigne un peu plus de lui ! Mais j'essaye de rester fort ! Je préfère économiser mon énergie pour le retrouver, au lieu de la dépenser inutilement en pleurant sur mon sort !

- Je dois y voir un message, là ?! Lui lança Magnus, froidement.

- D'après toi ?! Ça ne te ressemble pas d'agir comme ça ! Je ne comprends pas ce qui t'arrive !

- Tu ne comprends pas que je me sens coupable ?! J'aurais dû le tuer mais j'en suis incapable ! Lui hurla-t-il en se levant, arpentant nerveusement la chambre.

- Tuer qui ?

- Tu le sais très bien...

- Asmodée, hein ?

- J'aurais dû lui donner mon immortalité ce jour-là...

Alec se leva à son tour, et prit le visage du sorcier en coupe.

- J'ai risqué ma vie pour venir te sauver et toi tu aurais voulu la sacrifier ?! Je serais mort avec toi ! Jamais je n'aurais pu continuer ma vie sans toi !

- Ouais, ben on voit où ça nous mène !

- On va invoquer Azael, et...

- Et quoi, Alec ?! Il nous a trahis !

- On n'en est pas sûr !

- Alors comment tu expliques que mon père ait été libéré, hum ?!

- Je ne sais pas, mais on va le découvrir !

- Il faut qu'on retrouve Max...

- On va le retrouver !

- J'espère que ce ne sera pas trop tard...

- Fais confiance à Max ! Il ne fera pas n'importe quoi !

- Il est puissant, Alec...

- La prophétie ne parle pas de notre fils ! Arrête avec ça !

- Si tu le dis...

- Mag..

- Papa ?

Les deux hommes se retournèrent. Rafael se tenait devant eux, les sourcils froncés.

- Max ne ferait jamais de mal à qui que ce soit !

- On n'a jamais dit ça ! Lui fit Alec.

- Si ! Si c'est exactement ce que vous avez dit ! Mais je le connais mieux que vous, je sais de quoi il est capable ! Oui, c'est un sorcier puissant, mais il n'a jamais fait de mal à personne ! Et pourtant, certains l'auraient mérité...

- Qu'est-ce que tu veux dire ? Lui demanda Magnus.

- Rien...

- Rafael, si tu veux qu'on puisse retrouver ton frère, il faut que tu nous dises tout ce que tu sais !

Le jeune garçon hésita, puis consenti à se confier à ses parents.

- Quand on allait à Idris, à chaque fois, c'était un enfer pour nous. Et surtout pour Max... Vous, vous n'étiez jamais là... Vous n'avez cessé de nous répéter que vous seriez toujours là pour nous, mais au final quand on a eu besoin de vous, vous n'étiez pas là !

Il se tourna ensuite vers Alec.

- J'ai essayé de t'en parler... Tu te souviens quand je t'ai dit un jour que c'était difficile pour nous d'être vos enfants ? Soit les gens vous haïssent, soit ils vous admirent... Mais dans les deux cas, c'est nous qui en subissons les conséquences, alors qu'on n'a rien demandé ! Mais ce n'est pas seulement nous, pour Lena aussi c'est dur ! Elle est encore petite, mais elle le ressent déjà. Ses parents sont vus comme des héros, et les gens ont leurs yeux rivés sur elle, attendant qu'elle réalise un acte héroïque à son tour. Le problème c'est qu'on n'est pas vous : on ne veut pas être des soldats au service de l'Enclave, ni être le Grand Sorcier de je ne sais quelle ville ! On veut simplement être nous ! Être des enfants normaux ! Alors, oui je sais que ce n'est pas possible, et que nous ne pouvez rien contre ça, mais on aurait voulu que vous soyez là quand on a eu besoin de vous ! Mais au lieu de ça vous passez votre temps à vous disputer ! Max a même cru que vous alliez vous séparer... Il le pense toujours d'ailleurs... Il a cru que vous alliez nous abandonner...

- Non ! Jamais ! S'exclamèrent Magnus et Alec, d'une seule et même voix.

- Rafael... Repris Magnus. Ton père et moi, nous nous aimons, nous n'allons pas nous séparer ! On...

- Vous allez vous marier, oui, je sais... Mais Max, lui, ne le sait pas ! Il ne sait pas non plus que vous avez changé d'avis sur Idris ! Il pense que vous m'avez séparé de lui ! Et ça, c'est pas franchement envisageable ! Il a besoin de moi, et moi j'ai besoin de lui ! Et s'il y a bien quelqu'un qui puisse le retrouver, et qu'il écoutera, c'est moi !

- Tu as raison... Nous n'avons pas été suffisamment là à cette époque, mais... Rafael, on vous aime de tous notre cœur, je t'assure ! Lui fit Alec. On va le retrouver, ensemble !

- Non... Max ne veut pas vous voir, ça j'en suis certain. J'ignore où il se trouve, mais je le connais, je sais parfaitement ce qu'il ressent !

- Rafael, ton frère n'a pas juste fait une fugue, on a de très bonnes raisons de penser qu'Asmodée le tient ! Tu ne peux pas l'affronter seul ! D'ailleurs je t'interdis de l'approcher !

- Alors occupez-vous de lui, et laissez-moi m'occuper de mon frère !

Alec tourna la tête vers son amant, qui était resté étonnamment silencieux.

- Dis quelque chose ! Lui fit Alec.

Le sorcier ne répondit pas. Il se contenta de s'avancer vers son fils, et de poser deux doigts sur son front. Un instant plus tard, Rafael s'écroulait dans ses bras. Il le coucha ensuite sur le lit, et se tourna vers Alec.

- Prépare ce dont on a besoin... On va convoquer Azael...

Pandémonium

Max parcourut des yeux la salle du « palais », comme aimait l'appeler Asmodée. Le jeune sorcier en avait entendu parler des centaines, si ce n'est des milliers de fois, à travers les récits que lui racontaient ses professeurs du Labyrinthe en Spirale. Cet endroit lui faisait froid dans le dos. Il n'était pas non plus très à l'aise avec le maître des lieux. Il s'avança dans les couloirs sombres. Ses parents, sa famille, les avaient traversés il y a une dizaine d'années. Il marchait sur leurs traces, et pourtant, en cet instant, il n'était pas certain que ces derniers seraient fiers de lui. Pourtant il faisait le bon choix, non ? Il allait réunir un père et son fils, il allait sauver le monde, sauver son frère... Il n'y avait que ça qui comptait d'ailleurs. Sauver Rafael... Il ne pouvait pas le perdre. Il était son seul repère, son pilier. Personne ne le comprenait mieux que lui. Rafael l'avait toujours protégé, maintenant c'était à son tour. Arrivé au bout du couloir, il tourna à droite, et percuta quelque chose qu'il n'identifia pas tout de suite. Lorsqu'il leva la tête, il ouvrit de grands yeux effrayés, et recula en hurlant. Il trébucha, et tomba au sol.

- Du calme, jeune sorcier, tu risques de te faire mal !

- Qui... Qui êtes-vous ? Demanda-t-il d'une voix tremblante.

- Lilith... Lui répondit-elle.

Elle se pencha au-dessus du jeune garçon, et prit sa main dans la sienne. En tombant, Max s'était ouvert la main. Elle passa un doigt sur la plaie, avant de le passer sur ses lèvres, léchant le sang qui s'y trouvait. Dégoûté, il essaya de retirer sa main, mais elle le retint.

- Tut, tut, tut... Le sang d'un sorcier ne se gâche pas, chaque goutte doit être récolté avec le plus grand soin !

Elle lui fit un sourire cruel, et les serpents autour de sa tête s'agitèrent, avant de se jeter sur le jeune sorcier, qui hurla de terreur, sous l'œil satisfait de la démone...

A suivre


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