CHAPITRE 5.
C'était ce moment de la nuit où les gens dormaient. On ne percevait aucune lumière aux fenêtres des maisons et les rues étaient désertes. S'il n'y avait pas eu le bruit du vent, glacial et soufflant en bourrasques puissantes, Minneapolis aurait été ce soir-là déserte et silencieuse. Malgré l'heure avancée Noah, lui, ne dormait pas. Les yeux rougis par la fatigue et la mâchoire douloureuse à force de bailler, la faible luminosité de son téléphone portable l'aveugla malgré tout lorsque, discrètement, ce dernier vibra sur son ventre.
SMS, DE : Isaac.
03:45 AM — L'université a l'air géniale. Ça me donnerait presque envie de continuer mes études.
Les lèvres de Noah s'étirèrent en un petit sourire lorsqu'il lut le message. S'imaginer sur les bancs de l'université de Boston aux côtés d'Isaac lui était agréable ; même s'il savait que cela n'arriverait jamais et que rien au monde ne ferait changer son petit-ami d'avis à ce sujet.
SMS, DE : Noah.
03:45 AM — J'ai hâte d'y être. J'ai commencé à chercher des studios sur internet. Tu as une préférence, toi ?
La lettre était arrivée la veille dans la boite aux lettres des Banks. Lorsqu'il était rentré du lycée, Noah s'était empressé de relever le courrier avant que ses parents ne s'en chargent, à leur retour du travail. Ayant été averti que les résultats tomberaient ce jour-là, Noah s'était précipité sur la boite aux lettres et avait déchiré l'enveloppe sans le moindre soin. Un bref instant de stress plus tard, il avait pu lire la mention inscrite en gras dans le courrier : accepté. L'université de Boston lui ouvrait ses portes.
Tout en s'imaginant déjà vivre une nouvelle vie avec Isaac, Noah envoya son SMS et l'accompagna même de quelques captures d'écran provenant de sites internet. Il verrouilla son téléphone, le cœur battant la chamade, mais le ralluma très vite lorsqu'Isaac lui répondit presque aussitôt :
SMS, DE : Isaac.
03:46 AM — J'aime beaucoup le premier, il a l'air petit mais confortable. T'en penses quoi toi ?
Noah partagea avec Isaac ses préférences. L'échange dura bien dix minutes supplémentaires au moins avant que, le cœur gonflé d'amour et d'espoir, il ne demande :
SMS, DE : Noah.
03:58 AM — Tu es sûr que tu as envie de me suivre... ?
Malgré la réaction qu'avait eue Isaac lorsqu'il lui avait annoncé avoir postulé pour l'université de Boston, Noah l'avait entendu lui affirmer – par téléphone – qu'il le suivrait là-bas. Seulement, Noah était le genre de personne dont le besoin d'être rassuré, sur bien des sujets, était constant voire envahissant.
SMS, DE : Isaac.
04:01 AM — Je te l'ai dit, Noah. Je te suivrai. Tu as raison lorsque tu me dis que je ne pourrai pas vivre éternellement sous l'influence de mon père. Ce qui me rend heureux, c'est toi et le hockey. Je peux avoir tout ça à Boston.
Comme si le simple fait qu'Isaac balaye ses doutes d'un simple SMS, Noah sentit le sommeil le gagner, désormais apaisé et bien moins inquiet qu'il ne l'avait été depuis la réception de la lettre. En guise de réponse, il envoya un simple « je t'aime », suivi d'un emoji croissant de lune afin de signifier à Isaac qu'il allait dormir et que, par la même occasion, il lui souhaitait bonne nuit.
Morphée l'emporta dans ses bras avant même que le SMS d'Isaac, identique au sien, ne lui parvienne.
X X X
— Monsieur Banks, je ne vous dérange pas ?
Noah sursauta et il lui fallut un bon moment pour réaliser qu'il n'était pas au chaud dans son lit – accompagné d'Isaac – mais bien sur une chaise en salle de classe. Des équations recouvraient le tableau blanc et les regards de ses camarades hilares étaient braqués sur lui. Les yeux collés, les joues rosées et la trace de la manche de son pull en travers du visage, il leva les yeux vers son professeur de maths.
— Je, heu...
— Je commence à croire que mes cours ne vous intéressent pas, Banks.
— Non, je... c'est pas ça... hem...
Les élèves se mirent à rire et Noah, même si cela n'eut pas l'effet escompté, leur lança un regard qui se voulut noir. Le rouge lui monta malgré lui aux joues, mort de honte, et baissa les yeux sur sa copie ; une petite goutte de bave y était étalée, signe de sa sieste clandestine en fond de classe.
— Sortez, ordonna le professeur. Emily, vous l'accompagnez chez le proviseur.
En silence et sous les rires, Noah enferma ses affaires dans son sac. Bien que l'envie de contester cette décision lui brûlait la langue, il savait qu'il n'était pas digne de faire une quelconque remarque à ce sujet : ce n'était pas la première fois qu'il s'endormait dans ce cours. Et, ce, même s'il aimait les maths et les comprenait. Il fit alors profil bas lorsqu'il sortit de la salle, suivi de près par Emily qui tenait à la main un mot du professeur adressé à son supérieur hiérarchique, et se terra dans le silence jusqu'à son arrivée au bâtiment administratif.
— Je vais convoquer ton père, Noah. Ça ne peut plus durer, lui annonça le proviseur après avoir lu le mot.
— Faites ce que vous voulez.
Noah pensait qu'il n'aurait pas pu tomber plus bas. Seulement, lorsqu'Adam Banks passa les portes du bâtiment administratif une heure et demie plus tard, Noah eut malgré tout l'impression de tomber un peu plus au fond du gouffre qu'il creusait depuis près de six mois. Depuis sa rencontre avec Isaac. Lorsqu'il s'installa dans le bureau du proviseur, face à ce dernier et aux côtés de son père, Noah déglutit.
— Merci d'être venu, monsieur Banks.
— C'est normal. Qu'est-ce qu'il se passe ?
L'air inquiet sur le visage d'Adam sauta aux yeux de Noah. C'était la première fois qu'un établissement scolaire convoquait l'un de ses parents. Il imagina bien vite tous les scénarios auxquels son père pouvait bien penser.
— Noah, l'interpella le proviseur.
— Je me suis endormi en cours, marmonna Noah.
— Oui, entre autres, confirma le proviseur. Seulement c'est la sixième fois en deux semaines. Tes notes sont en chute libre et tu n'as pas rendu certains devoirs.
— Pardon ?!
Noah baissa les yeux, tandis que son père manquait de s'étouffer avec sa propre salive. Ses jolis yeux bleus, si différents de ceux de son fils, semblèrent être sur le point d'exorbiter tant il les écarquilla de surprise.
— Oui, monsieur Banks, confirma tristement le proviseur. Noah, tu es un bon élève. Qu'est-ce qu'il se passe ?
— Je suis juste fatigué, c'est tout.
Il aurait aimé en dire plus. Il aurait aimé lâcher tout ce qu'il avait sur le cœur ; parler d'Isaac, des nuits qu'ils passaient à s'échanger des textos car c'était là leur seul moyen de communication, le seul moment de la journée où ils étaient en paix. Il aurait voulu dire à quel point il étouffait, à quel point la situation le rongeait. Seulement, il n'en fit rien – par manque de courage, certainement, et car ce n'était surtout pas le lieu ni le moment.
— La fatigue n'excuse pas tout, Noah, constata froidement Adam.
— Ton père a raison, Noah, il faut que tu te reprennes.
Comment pouvait-il se reprendre ? Isaac était devenu sa priorité. La seule chose qui lui importait, à laquelle il pensait à longueur de journée. Aurait-il dû éteindre son téléphone portable la nuit, sachant pertinemment qu'il manquerait une occasion de lui parler, simplement pour être en forme au lycée ? Cela aurait semblé évident aux yeux de n'importe qui, mais cela ne le fut pas pour lui : Isaac comptait plus que tout.
— Je sais. Désolé.
Bien que son comportement n'était pas grave en soi, le proviseur préféra marquer le coup et Noah écopa d'un jour d'exclusion. Lorsqu'il sortit du bureau, accompagné de son père et bien après l'heure de fin des cours, ils déambulèrent dans les couloirs déserts et s'arrêtèrent sur le parvis du lycée.
— Noah, qu'est-ce qu'il se passe ?
Adam aurait préféré attendre leur retour à la maison, seulement il en fut incapable : il avait besoin de savoir. Son fils ne semblait être que l'ombre de lui-même depuis des jours et, même si la colère grondait en lui, il fut incapable de hausser le ton. La lueur dans les yeux noisette de sa progéniture, de son garçon qu'il aimait plus que tout, lui fit oublier toute sa rancœur. L'inquiétude prit place dans son ventre.
— Rien, papa. Je suis juste... fatigué, c'est tout. Ça va passer.
Le trajet retour jusqu'à la maison se déroula dans le silence. Bien que des questions lui brûlaient les lèvres, Adam Banks n'en posa aucune. Il connaissait suffisamment son fils pour savoir que, tout comme ses coéquipiers qui l'avaient tanné pour savoir « pourquoi il avait quitté la fête », il ne tirerait rien de lui. Noah était borné et, lorsqu'il décidait de ne rien dire, personne ne pouvait lui tirer les vers du nez. Pas tant qu'il aurait décidé lui-même de parler. Et même si se sentir aussi impuissant lui fit mal, Adam fit la seule chose qu'il pouvait faire : attendre. Attendre que Noah vienne à lui, lui parle, lui ouvre son cœur. Il regrettait même que Charlie soit parti, lui qui, il en était certain, avait réussi à le faire parler. Parfois, il détestait ce lien qu'ils avaient tous les deux ; son meilleur-ami et son fils lui cachaient des choses, et il ne le supportait pas.
— Je vais me reposer, annonça Noah en arrivant à la maison.
— D'accord. Sois à l'heure à l'entraînement, hein ? Je dois aller à la patinoire en avance, on se retrouve là-bas ?
— Oui, OK.
Noah ne dit rien de plus et grimpa à l'étage, bien décidé à attraper quelques minutes de sommeil avant son départ pour un entraînement qui, il en était sûr, serait plus qu'intensif. La finale approchait – elle aurait lieu dans trois jours – et il savait qu'Adam leur en ferait voir de toutes les couleurs ce soir.
Lorsqu'il s'écroula sur son lit, reconnaissant que son père n'ait pas insisté et se soit même montré conciliant, Noah ne prit pas la peine de se déshabiller. Il rabattit une couverture sur lui, planta la tête dans son oreiller, et s'endormit en pensant à Charlie.
X X X
— Ça va mec ?
Dylan posa la question que tous les garçons se posaient mais qu'aucun n'osa prononcer. Il s'installa sur le banc près de Noah qui, les cheveux dégoulinants de sueur et les joues rougies, retirait son maillot et son plastron. L'air dépité sur son visage, son manque de dynamisme sur la glace et ses erreurs crosse en main n'avaient passé inaperçue ; tous s'inquiétaient désormais d'avoir vu leur capitaine aussi mauvais. Tous avaient en tête le combat qui les attendait face aux Moose et pensaient tous ainsi : si Noah Banks foirait, ils n'avaient aucune chance. Bien que Noah répétait à longueur de saisons que personne était indispensable – car il détestait être mis sur un piédestal – ce n'était pas la vérité absolue : il était le coeur de cette équipe, le joueur le plus doué, le garçon le plus intelligent. Sans lui, sans son talent et son caractère posé, l'équipe était différente. Les Mullets avaient besoin que leur capitaine soit en pleine forme pour gagner et, surtout, pour s'amuser et proposer un magnifique jeu lors de cette finale.
— Ouais ça va, mentit Noah. Je suis juste fatigué, j'ai mal dormi l'autre nuit.
— Bien sûr, sourit Dylan. Et la vérité ?
De l'ensemble de ses coéquipiers, Dylan était celui que Noah connaissait le plus et depuis plus longtemps que les autres. Ils avaient appris le hockey dans le même club et avaient évolué dans les mêmes équipes. Au collège, ils s'étaient même retrouvés dans la même classe deux années de suite. Et même s'ils ne s'étaient jamais considérés comme meilleurs-amis, la relation qu'ils entretenaient s'en rapprochait ; Dylan connaissait suffisamment Noah pour savoir qu'il lui mentait et que, surtout, il ne s'agissait pas que d'une simple fatigue. Il y avait autre chose ; quelque chose qui faisait que Noah semblait dans la lune depuis quelques temps, qu'il ne s'était pas joint à eux lors de la fête, et qu'il semblait malheureux comme les pierres.
— C'est vrai, mentit Noah avec aplomb. Je suis vraiment naze en ce moment.
— Noah..., tenta Dylan.
— T'inquiète, ça ira dimanche.
Ce fut le ventre douloureux et désolé que Noah mit fin à la conversation. Il se focalisa sur ses patins, qu'il dénoua méthodiquement, et sur son sac dans lequel il rangea précautionneusement son équipement. Il ne se préoccupa pas du regard de Dylan qu'il sentit peser sur lui, car ce dernier ne s'était pas levé et le fixait d'un air curieux, et récupéra ensuite sa serviette de bain dans son casier. Nu, comme tous ses coéquipiers l'étaient, il traversa le vestiaire et se glissa sous la douche.
L'eau chaude qui imbiba ses cheveux et glissa sur sa peau lui fit aussitôt du bien. Ses muscles douloureux se détendirent et des articulations semblèrent devenir moins lourdes, plus aériennes. L'odeur du savon trois en un qu'il utilisait toujours pour le sport, lorsqu'il frotta ses cheveux, lui rappela de bons souvenirs ; cette séance de câlins improvisée sous la douche après une partie de hockey clandestine, jouée avec Isaac au beau milieu de la nuit. Ce soir-là, ils s'étaient retrouvés à la patinoire municipale de Saint-Paul et y étaient entrés en douce par la porte de secours. Depuis, se retrouver là-bas était devenu une habitude.
Bien qu'agréables, Noah chassa ces pensées de son esprit afin de penser à Charlie. Aussitôt, une douleur angoissante lui tirailla le ventre et l'impression d'étouffement, qui lui avait gâché son entraînement, pesa à nouveau de tout son poids sur ses épaules. Le stress le gagna tandis qu'il dressait le bilan de sa journée : il avait parlé avec Isaac de leur avenir jusqu'à tard dans la nuit, s'était levé avec la nausée tellement il se sentait fatigué, s'était endormi en cours et s'était fait exclure du lycée. Adam, malgré sa colère, ne lui avait pas jeté la pierre comme il s'y était attendu. Les événements, ajoutés aux souvenirs de ses échanges avec Charlie, avaient permis à Noah de prendre une décision : il devait tout dire à son père. Même s'il était terrifié à l'idée de le perdre, de le mettre en colère, de le décevoir. Il ne pouvait garder tout pour lui une journée de plus ; il gâcherait sa finale s'il ne se libérait pas de ce poids.
Entortillé dans son immense serviette de bain, Noah sortit des douches et s'assit sur le banc, devant son casier. Épuisé et terrifié, il passa plusieurs minutes à fixer le sol tout en réfléchissant à une manière d'annoncer la chose à son père. En vain.
— Bye Noah, lui dit Kyle.
— Bye.
Le vestiaire se vida petit à petit et, lorsqu'il fut désert, Noah extirpa son portable de son sac. Il téléphona à Isaac, dans l'espoir d'entendre sa voix qui lui donnerait du courage, mais tout ce qu'il entendit fut son répondeur automatique. Il raccrocha, attristé, et enfila son jean et son hoodie. Contrairement à ce qu'il aurait fait d'habitude, il ne passa pas ses chaussures mais renfila ses patins. Il en fit les lacets avec automatisme, vérifia que ses protèges-lames étaient bien fixés, et extirpa de son sac la paire de patins qu'il avait extirpés du garage. Ces derniers à la main, il déambula dans les couloirs de la patinoire et grimpa les quelques marches qui menaient au bureau des coaches.
— Hey, dit-il à l'attention de son père.
— Hey.
Assis à son bureau, de la paperasse éparpillée devant lui, Adam esquissa un sourire et sentit un chaleur réchauffer son coeur : l'espoir. Il repéra aussitôt les patins que tenait son fils – les siens – mais ne posa pas de questions. Il attendit, patient comme il fallait l'être avec Noah, et l'entendit lui dire :
— Tu viens patiner avec moi ?
Coach Banks referma ses dossiers et lança à son fils un sourire radieux, tout en s'efforçant de ne pas sembler trop surexcité : il ne voulait pas que Noah se sente pris au piège. Il sentait bien qu'il allait lui parler, car ils n'avaient plus patiné ensemble depuis longtemps et que cela ne pouvait être anodin, mais savait que Noah pouvait très vite changer d'avis face au doute.
Ils regagnèrent la piste et, installés sur le banc de touche, Noah regarda Fiona passer la surfaceuse pendant que son père chaussait ses patins. Lorsque la jeune fille s'engouffra dans le garage sur sa machine, Noah ouvrit la porte de la rambarde et s'engagea sur la piste. Contrairement à ce qu'il avait ressenti durant l'entraînement, et malgré la peur, il eut à nouveau l'impression de voler sur la glace. Adam, qui attendit que son fils ait fait un tour de piste, s'engagea à son tour sur la glace et le suivit. Même s'il n'avait plus patiné depuis bien longtemps, se retrouver sur la glace aux côtés de Noah – malgré le silence et l'impatience – lui fit un bien fou. Il fut attristé de prendre conscience qu'il avait oublié le bonheur que procurait la glisse.
— J'suis pas heureux, papa.
Noah sentit aussitôt les larmes lui monter aux yeux. Ses lames crissèrent sur la glace lorsqu'il vint s'arrêter au centre de la piste, suivi de près par Adam. Ce dernier de planta devant lui, sourcils froncés et le coeur d'ores et déjà brisé, et écouta son fils sans prononcer le moindre mot :
— J'ai un secret... et ça me ronge. Au début je pensais pouvoir gérer – et c'était vrai – mais c'est plus le cas aujourd'hui. Plus les jours passent, plus j'ai l'impression d'étouffer... et j'en peux plus. Ça me ronge de l'intérieur, papa, ça me tue.
Noah craqua ses doigts contre ses cuisses après avoir soufflé ce début de déclaration. Mort d'inquiétude, Adam s'efforça de ne rien laisser paraître ni de poser les questions qui lui brûlaient les lèvres. Il attendit, conscient que Noah ne ferait plus marche arrière et qu'il aurait, d'ici peu, des réponses à ses questions.
— Je... j'ai un copain, papa. Un garçon.
Malgré lui, lorsqu'il ferma les yeux pour se donner du courage, Noah revit le sourire d'Isaac, ses boucles épaisses et ses lèvres pleines. Il lui sembla aussi entendre son sourire, sa voix, sentir son odeur et ressentir ses douces caresses. Et même s'il avait pensé à une époque qu'Isaac n'était qu'une brute sans cervelle, Isaac lui avait prouvé le contraire. Et il était aujourd'hui le plus merveilleux des petits-amis.
— Noah...
— Je sais.
—... tu me connais. Tu connais ta mère. Pourquoi as-tu eu peur de nous le dire...?
— Parce que c'est pas ça qui me rend malheureux... c'est pas ça qui me pèse. Je sais très bien que ma sexualité c'est pas un problème pour toi et maman.
— Alors quoi...?
Adam passa sa main sur la joue de son fils, et chassa quelques unes des larmes qui y avaient coulé du bout de son pouce. Le regard empli de détresse que posa Noah sur lui lui coupa le souffle : pourquoi semblait-il si triste, si brisé, si apeuré ? Que cachait-il de si horrible ?
— Tu te souviens du jour où tu m'as dit que tu ferais tout pour que je sois heureux...?
Noah souffla, la voix brisée, et Adam hocha la tête. Oui, il s'en souvenait, et cela n'augurait rien de bon.
— Je suis malheureux papa. Et ce n'est pas pour te jeter la pierre, parce qu'au final tu ne m'as rien fait, mais c'est en partie de ta faute si je suis pas bien... si je vous mens depuis longtemps.
— Comment ça, de ma faute ? Noah explique-moi...
La tristesse dans la voix de son père fit mal au ventre de Noah. Adam, lui, eut l'impression qu'on venait de le poignarder en plein coeur ; comment ça, de sa faute ? Comment avait-il pu faire souffrir son fils sans même s'en rendre compte.
— J'ai parlé avec Charlie. Il sait tout. Et si j'ai le courage de te dire la vérité aujourd'hui c'est parce que... parce qu'il m'a compris et m'a dit ce que j'avais besoin d'entendre. Il m'a dit... qu'on choisit pas de qui on tombe amoureux. Ça arrive comme ça... on a le droit d'aimer qui on veut. Il m'a dit... que le passé c'est le passé et que... que tes problèmes doivent pas être les miens...
— Noah, parle, ordonna Adam.
— Je suis amoureux, papa. Vraiment amoureux. Et il en vaut la peine.
— Qui, « il » ?, s'inquiéta Adam.
— Isaac.
Noah pensa, face au silence de son père, que ce dernier n'avait pas compris où il voulait en venir. Seulement, lorsqu'il vit son visage se fermer et la lueur de déception passer dans ses yeux, il comprit bien vite qu'il avait été bien plus perspicace qu'il ne l'avait imaginé.
— Isaac, répéta Adam d'une voix grave. Isaac McGill ?
— Je l'aime, papa.
Noah sentit qu'il était en train de la perdre ; sa compassion, son attention, son inquiétude. Son père lui sembla soudainement froid, distant, presque écœuré de lui et, surtout, déçu ; comme s'il avait choisi d'aimer le fils de son ennemi juré, comme s'il l'avait fait exprès pour l'ennuyer. Comme si ce n'était pas déjà suffisamment compliqué.
— Je... j'ai pas choisi..., couina Noah. C'est juste... c'est arrivé, c'est tout. Il est pas comme tout le monde le croit, il est gentil, doux et att...
— Non, le stoppa Adam. Je ne veux pas en entendre plus. C'est... putain, Noah !
— Papa !
Sans même jeter un regard à son fils, Adam fit volte-face et quitta la piste. Sidéré et anéanti, Noah resta planté au beau milieu de la piste. Lorsqu'il entendit la porte de la patinoire claquer derrière son père, il éclata en sanglots et tomba à genoux sur la glace. Et malgré les bras doux de Fiona qui se refermèrent autour de lui, dans une tentative désespérée pour le consoler, ses sanglots redoublèrent d'intensité.
. . .
Hey. Bon alors encore une fois je poste à l'arrache avant d'aller me coucher, épuisée de mon week-end. Dîtes moi ce que vous avez pensé de ce chapitre ! Je répondrai à vos commentaires dès que j'aurai un petit moment ! À bientôt pour la suite xo
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top