10.
Je plisse les yeux, aveuglée, et me redresse dans un sursaut. Il n'y a strictement rien sur moi.
Je lève la tête vers le ballon d'eau et aperçoit le carton de jouets. Toutes les poupées sont bien sagement entassées à l'intérieur. Je ne comprends plus rien, pourquoi ça refonctionne tout à coup ?! Haletante, je jette des coups d'œil paniqués. Rien, il n'y a absolument rien.
Je ramasse mon portable près de moi. Il fonctionne encore mais l'écran est tellement fissuré que je ne parviens plus à distinguer ce qu'il affiche. Je jure : c'était un nouveau portable. Une pensée me traverse alors l'esprit.
— Léa ? crié-je.
Le silence me répond et je frissonne. Tous mes membres sont terriblement douloureux, mais j'arrive à tituber jusqu'à l'escalier, où je m'appuie contre le mur.
— Léa !?
Toujours aucune réponse. Je suppose qu'elle a dû avoir peur en m'entendant crier, ou bien qu'elle a dû partir chercher sa poupée, maintenant que le courant est revenu.
Mais je me rappelle ensuite du claquement de porte que j'avais entendu. Grimaçant, j'entame ma lente ascension de l'escalier, qui semble durer des heures. Quand j'arrive en haut, je ne bouge plus. La porte est ouverte.
J'entends d'ici la télé qui s'est remise à fonctionner. J'appelle encore la petite fille en entrant dans le couloir. Aucun bruit de pas, juste la télé et le grésillement de l'électricité. Je passe par le salon. Les couvertures sont toujours entassées par terre, mais il n'y a personne. Je continue d'avancer.
— Léa ! Où est-ce que tu es ?!
Quand je passe devant le miroir du salon, je ne peux m'empêcher de sursauter : du sang me coule du nez et des lèvres, et une tache violette s'étend le long de ma mâchoire jusqu'au menton. Je ne sais pas encore comment je vais expliquer les bleus impressionnants que je vais avoir demain.
J'essuie le sang du revers de la main, et boîte jusqu'à l'escalier. Le moindre mètre représente un marathon pour moi. Atteignant le palier, je tends l'oreille mais n'entends rien. J'appelle à nouveau Léa. Et à nouveau personne ne me répond. Il va falloir que je monte. Je jure.
Qu'est-ce que j'aurais pas fait pour elle ce soir, franchement !
Une éternité plus tard, je suis enfin en haut. Mes nerfs se détendent un peu quand je vois de la lumière dans la chambre de la petite fille. Je me décide à presser le pas en l'appelant de plus belle.
— Léa ! Pourquoi est-ce que tu...
Je ne fais pas un pas de plus. La chambre est vide.
Je pousse le battant de la porte en grand pour mieux voir, mais c'est une petite pièce, et il n'y a pas trente-six mille cachettes possibles. Mes yeux parcourent l'endroit désespérément. C'est un cauchemar ! D'abord la panne, puis le sous-sol, et maintenant ça !
Je me remets à penser à ce que Mme Banch m'a dit au téléphone : le couple va rentrer d'ici vingt minutes. En panique, j'allume mon téléphone pour essayer de distinguer l'heure. Ça fait combien de temps qu'elle m'a dit ça ?! Il était quelle heure au moment de son appel ?!
Avec toutes les peines du monde, je tente d'aller dans l'historique de mes appels pour voir combien de temps il me reste, mais un logo s'affiche alors sur l'écran. Plus que 20 % de batterie. Je lâche un énième juron. Quand je range mon téléphone dans ma poche, mon regard tombe sur une feuille de papier, posée sur l'oreiller de Léa. Je fronce les sourcils : je suis presque sûre qu'elle n'y était pas il y a trente secondes !
Cependant, je profite de l'occasion pour m'affaler mollement sur le lit et soulager un peu mes jambes qui n'en peuvent plus. Je saisis la feuille. Quelqu'un a écrit dessus au feutre, et en très gros. Comme un enfant. « Ne jamais rester seule dans le noir. » Une vision me vient alors, celle de Léa, assise en haut des marches, toute seule et terrifiée, sa petite veilleuse comme seul rempart face aux ténèbres. La culpabilité qui m'envahit est pire que toute la terreur que j'ai pu ressentir jusqu'ici.
Je ferme les yeux et soupire.
— Je suis désolée...
Je le pense sincèrement. Ça ne change rien, mais j'éprouve vraiment de la honte et du chagrin en repensant à ce que j'ai fait. Je l'ai laissée toute seule. Dans le noir. J'entends un bruit de pas dans le couloir, et rouvre alors les yeux.
À travers l'ouverture de la porte, je vois Léa, debout et immobile.
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