Chapitre 12

Je rejoins les autres, encore engourdie par tout ce que j'ai appris. Les révélations de Malicia, la vision de ma mère... Tout semble si irréel, comme si ma vie entière jusqu'à aujourd'hui n'avait été qu'un puzzle incomplet, une façade fragile cachant une vérité bien plus complexe et effrayante.

Carlos est libre. Ces mots tambourinent dans ma tête, un écho incessant qui refuse de s'apaiser. Il veut se venger des gardiens de lumière, de ceux qui l'ont jugé et enfermé. Mais pourquoi Élira ? Pourquoi une enfant innocente à l'époque, incapable de se souvenir de quoi que ce soit ? Et cette autre idée... Qu'il pourrait vouloir que je le suive. Rien que d'y penser, je frissonne. Cela me révolte, me met hors de moi. Mais, en même temps, je sens une peur sourde s'insinuer. Et si Malicia avait raison ? S'il pensait réellement que j'avais une place à ses côtés ?

Et cette vision... Une image si vive, si troublante. Ma mère, une maîtresse de lumière... Comment est-ce possible ? Moi, une gardienne des ombres. Tout en moi rejette cette contradiction. C'est contre nature. Cela défie toute logique, toute explication que l'on pourrait donner. Une part de moi se débat, en quête de réponses. Mais une autre hésite, craignant les vérités que je pourrais découvrir.

La seule personne qui puisse me répondre, c'est Kora. Elle seule sait ce qui s'est passé ce jour-là, quand elle m'a trouvée. Mais cette fois, je dois lui parler seule. Je ne veux pas de demi-vérités ni de silences maladroits. Je dois comprendre, pour moi, pour ma vie, et pour ce que je suis censée affronter.

Mon souffle se fait plus profond tandis que ces pensées s'entrechoquent dans ma tête, alimentant un feu d'émotions que je peine à contrôler. Ma décision est prise : je dois agir. Même si cela signifie rouvrir des blessures, même si cela risque de tout bouleverser encore davantage, il n'y a plus de temps à perdre.

Je prends les garçons à part, profitant du fait que Kora discute avec Élira, et que Malicia échange avec Mason. Leur regard inquiet me pousse à tout leur expliquer. Je leur raconte la situation : Carlos, ses motivations, et ce que cela signifie pour Élira, pour nous, et pour moi.

À ma grande surprise, ils prennent plutôt bien la nouvelle, ou du moins, mieux que je ne l'avais imaginé.

Jack croisa les bras, son regard dur fixé sur un point invisible devant lui. Sa mâchoire serrée et l'éclat de colère dans ses yeux me rappelaient à quel point il pouvait être rancunier, surtout quand il s'agissait de sa mère.

- Wow, et ils le savent depuis longtemps ? demanda-t-il finalement, rompant le silence tendu. Je veux dire, on parle du plus grand criminel de l'histoire.

Je haussai les épaules, cherchant mes mots.

- Aucune idée... Et toi, Jack, t'en penses quoi ? ajoutai-je, espérant qu'il se confie.

Sa réponse fut directe, mais teintée d'amertume :

- J'en pense que ma mère le savait et ne m'a rien dit.

Il avait prononcé ces mots d'une voix posée, mais le ton cachait une rage sourde. Son visage se ferma davantage, et il baissa légèrement la tête, comme s'il essayait de contenir une explosion intérieure.

Je fronçai les sourcils, incertaine de la marche à suivre. Jack avait toujours été quelqu'un de direct, parfois brutal, mais cette fois, sa colère semblait différente, plus profonde, plus personnelle.

- Jack, tu sais que ta mère a ses raisons. Peut-être qu'elle voulait te protéger, hasardai-je, bien que moi-même, je trouvais cette excuse bancale.

Il releva la tête, plantant son regard froid dans le mien.

- Me protéger ? Elle me cache toujours tout. Ce n'est pas la première fois, Kally. Elle fait passer son rôle de conseillère avant tout le reste. Même avant moi. Et je devrais comprendre ça ?

Sa voix s'était élevée, et Eric posa une main sur son épaule, un geste calme pour apaiser son ami.

- Hey, Jack. Respire un peu. C'est peut-être plus compliqué que ce qu'on imagine, tenta Eric, toujours la voix de la raison.

Je n'étais même pas convaincue de mes propres paroles, mais je détestais le voir se noyer dans cette colère, surtout pour quelque chose qu'il pourrait regretter plus tard. Il n'a plus qu'elle, après tout.

Il releva brusquement la tête, son regard dur croisant le mien.

- Et moi, je suis sûr que non. Mais t'occupe pas de ça, Kally, c'est entre moi et ma mère.

Je fis un pas en avant, prête à répliquer, mais il leva une main pour m'interrompre.

- Jack, tu—

- Ça va aller, Ka, m'interrompit-il d'un ton plus calme, mais toujours froid. Je vais bien. C'est juste que... Il détourna les yeux, croisant à nouveau les bras comme une barrière. J'en peux plus de ma mère et de ses nombreux défauts.

Ses derniers mots étaient empreints d'une tristesse qui contrastait avec sa colère initiale. Je savais que Jack n'était pas seulement en colère : il était blessé. Sa mère était peut-être son seul parent, mais leur relation avait toujours été compliquée.

- Écoute mon pote tu peux en vouloir à ta mère mais mes parents ne m'ont rien dit non plus, lui rappela tout de même Eric. C'est peut-être quelques chose de plus secret que ça, que seulement quelque uns connaissent et que le Conseil à préféré taire pour le moment.

- Merci Eric mais tes parents tu ne les vois pas aussi souvent que je vois ma mère, souligna le brun avec raison.

- C'est vrai mais ça change rien du tout, mes parents ne me cache rien, à moi comme à Oli.

Jack me dévisagea, une expression entre l'incrédulité et une pointe d'admiration.

- Bon, je pense qu'on devrait parler avec le Conseil, proposai-je finalement, espérant désamorcer la tension avant que Jack ne laisse échapper des mots qu'il pourrait regretter.

Il plissa les yeux, croisant ses bras une fois de plus, mais cette fois avec une étincelle de malice dans son regard.

- Tu comptes demander une audience ? Toi ? Kally Flory ?

Son ton mêlait sarcasme et amusement, mais je pouvais sentir la légère provocation dans sa voix.

Je pris une inspiration profonde, tentant de contenir l'irritation qui montait en moi. Jack savait exactement comment appuyer sur les bons boutons pour provoquer une réaction, et il semblait particulièrement s'amuser cette fois-ci. Je soutins son regard, relevant légèrement le menton.

- Oui, répondis-je d'une voix calme mais ferme. Je vais demander une audience, Jack. Et je sais qu'ils ne me portent pas dans leurs cœurs, merci de me le rappeler. Mais je pense que j'ai le droit de savoir, tout autant que n'importe qui ici.

Son sourire s'élargit, un mélange d'admiration et de scepticisme dans son expression.

- Eh bien, Kally Flory, la grande héroïne de l'ombre. T'es sûre de vouloir affronter ces vieux croûtons ? Ils ne sont pas vraiment connus pour leur hospitalité, tu sais.

- Je suis sûre, insistai-je, mon ton se durcissant légèrement. Après tout, on parle de gardiens de l'ombre comme moi. Et je suis la seule encore en vie. Ça devrait suffire pour qu'ils m'écoutent, non ?

Jack arqua un sourcil, mais avant qu'il ne réplique, j'ajoutai :

- Et ce n'est pas comme si j'allais y aller seule. Vous êtes là, vous deux. Les meilleurs élèves de l'académie, fils de conseillers influents. Si ça ne pèse pas dans la balance, je ne sais pas ce qui le fera.

Je jetai un regard vers Eric, cherchant son soutien. Il hocha doucement la tête, son expression sérieuse.

- Elle a raison, Jack. Si quelqu'un a le droit de poser des questions, c'est bien Kally. Et on sait tous que le Conseil doit entendre ce qu'elle a à dire, même s'ils préfèrent l'éviter.

Jack soupira, ses épaules s'affaissant légèrement. Il n'abandonnait jamais une dispute sans résistance, mais il savait reconnaître un point valide, même s'il rechignait à l'admettre.

- Très bien, finit-il par concéder. Mais ne viens pas te plaindre si on te met en pièce là-bas. Ces types ne rigolent pas.

- Je suis prête à prendre ce risque, répondis-je avec un sourire en coin. Mais merci pour ta sollicitude, Jack. C'est presque touchant.

Jack éclata de rire, un rire sincère et chaleureux qui détendit un peu l'atmosphère.

- T'as pas froid aux yeux, toi, Ka. Bon, je te suis, mais ça risque d'être... intéressant, c'est le moins qu'on puisse dire.

Son ton était sarcastique, mais je pouvais voir dans ses yeux qu'il était sincère. Malgré ses provocations constantes, Jack était quelqu'un sur qui on pouvait compter. Et à cet instant, cela me rassurait plus que je ne voulais l'admettre.

Eric, qui était resté silencieux jusque-là, hocha lentement la tête, un sourire discret aux lèvres.

Je pris une profonde inspiration. L'idée de confronter le Conseil me terrifiait, mais je savais que c'était la chose à faire.

- D'accord. Alors on fait ça ensemble.

Jack posa sa main sur mon épaule, une lueur familière de malice dans ses yeux. Son sourire espiègle était revenu, mais cette fois, il portait aussi une sincérité qui me toucha plus que je ne l'aurais imaginé.

- Ensemble, hein ? Pas question que tu te retrouves à faire tout le boulot toute seule. On est là, Kally, lança-t-il avec un ton moqueur, mais bienveillant.

Je ne pus m'empêcher de sourire en retour, sentant une chaleur rassurante dans ses mots. Ce moment d'unité, aussi rare soit-il, me donnait le courage dont j'avais besoin pour ce qui allait suivre.

- Merci, Jack, murmurai-je, puis tournai mon regard vers Eric, qui était resté silencieux mais attentif. Et merci, Eric.

Eric, fidèle à lui-même, hocha simplement la tête, un demi-sourire étirant ses lèvres. Ses yeux reflétaient une détermination tranquille qui contrastait avec l'énergie plus vive de Jack.

- On est avec toi, Kally. Peu importe à quel point ça devient compliqué, confirma-t-il doucement.

Leurs mots, bien que simples, portaient un poids immense. Je savais que l'idée d'affronter le Conseil ne leur plaisait pas plus qu'à moi, mais leur soutien faisait toute la différence. Jack, toujours prompt à alléger l'atmosphère, me donna une petite tape amicale sur l'épaule avant de reculer.

Mais mon attention fut rapidement détournée par un mouvement derrière eux. Malicia avançait d'un pas mesuré, accompagnée de Mason et Kora. Cependant, quelque chose me parut étrangement incomplet dans cette scène. Élira. Elle n'était pas là.

Mon regard se fit plus attentif, scrutant les alentours, et mes sourcils se froncèrent d'inquiétude.

- Où est Élira ? demandai-je en m'adressant directement à Kora, le ton plus abrupt que je ne l'aurais voulu.

Kora releva la tête, mais son regard semblait hésitant, comme si elle pesait chaque mot avant de parler. Finalement, elle répondit avec une douceur inhabituelle, presque maternelle, qui contrastait avec son comportement habituel.

- Elle est partie s'allonger. Elle ne se sentait pas très bien.

Son ton se voulait rassurant, mais je ne pouvais m'empêcher de noter le petit détail qui trahissait ses émotions : ses yeux, qui évitaient les miens, glissant brièvement vers le sol avant de revenir me fixer avec une pointe de mélancolie. Son sourire, bien qu'apaisant en apparence, portait une note subtile de tristesse.

Je l'observai un instant, incertaine. La réponse était logique, mais l'ambiance ne l'était pas. Pourtant, je décidai de ne pas insister. Si Élira avait besoin de repos, il valait mieux la laisser se remettre. Kora, de son côté, semblait encore troublée par notre précédente conversation, et je n'avais pas envie de rouvrir cette plaie pour le moment.

- D'accord, murmurai-je, presque pour moi-même.

Un léger silence s'installa, mais il ne fut ni oppressant ni désagréable. Juste une pause, un instant suspendu, où chacun semblait prendre le temps de respirer avant de plonger dans l'inconnu.

C'est alors que Malicia, toujours empreinte de cette aura majestueuse qui imposait respect et admiration, s'avança d'un pas vers moi. Elle saisit mes mains dans les siennes avec une délicatesse qui tranchait avec la gravité de la situation. Ses yeux, brillant d'une lueur déterminée, semblaient me sonder, comme pour s'assurer que je comprenais pleinement le poids de ses paroles.

- Kally, sache que moi et tout mon peuple te soutiendrons auprès du Conseil, déclara-t-elle d'un ton grave, mais teinté d'une chaleur sincère. Tu as le droit de savoir. C'est ton droit le plus légitime.

Chaque mot résonnait avec force, dissipant peu à peu les doutes et l'appréhension qui pesaient sur mes épaules depuis des jours. Ce n'était pas seulement une déclaration de soutien : c'était une promesse, une certitude que je n'affronterais pas cette bataille seule.

Je sentis mes lèvres s'étirer en un sourire timide, bien que mon cœur soit encore un peu agité par l'émotion. La pression légère de ses mains sur les miennes, à la fois réconfortante et encourageante, m'aidait à retrouver un semblant de calme.

- Merci, Malicia, murmurai-je, ma voix presque brisée par l'émotion.

Elle hocha doucement la tête, un sourire bienveillant sur les lèvres, avant de reculer légèrement, laissant à mes pensées l'espace pour s'apaiser.


Mason se tenait juste derrière Malicia, ses yeux pétillants d'un mélange de malice et de sérieux. Il me gratifia d'un sourire rassurant, l'un de ceux qui avaient le don de faire fondre une part de mon inquiétude. Même Kora, malgré l'ombre d'émotions conflictuelles que je percevais dans son regard, semblait résolue à me soutenir. Cette constatation allégeait un peu le poids de cette quête sur mes épaules. Je n'étais pas seule. Et cela, au moins, me donnait du courage.

Malicia, droite et imposante comme toujours, se redressa après un bref moment de silence. Elle posa un dernier regard sur moi, empreint de cette sagesse bienveillante qui semblait tout deviner. Ses lèvres esquissèrent un sourire doux, mais teinté de gravité.

- Nous devons rentrer, mais on se revoit vite, déclara-t-elle avec calme.

Elle posa une main légère sur mon épaule. Ce simple geste, protecteur et réconfortant, semblait transmettre une partie de sa force et de son assurance. Puis, se penchant légèrement, elle ajouta d'une voix plus grave, presque un murmure destiné uniquement à moi :

- Et Kally, surveille les ombres et fais attention aux vibrations, surtout. Elles te parleront plus que tu ne le crois.

Ses mots résonnèrent en moi, porteurs d'un sens qui m'échappait encore, mais que je savais important. Un léger frisson remonta le long de ma colonne vertébrale, à mi-chemin entre appréhension et excitation.

Je hochai la tête, les yeux dans les siens, et répondis d'une voix presque solennelle :

- C'est promis.

Son sourire s'élargit à peine avant qu'elle ne recule d'un pas, prête à partir. Je restai là, son avertissement résonnant encore dans mon esprit, tandis que le poids de la responsabilité semblait à la fois plus lourd et plus clair.

Puis, sans un mot de plus, Malicia fit un pas en arrière, levant légèrement la main comme pour offrir un dernier adieu silencieux. Une brume légère commença à l'envelopper, scintillant doucement, chaque particule imprégnée de la magie lumineuse qui définissait si bien les mages de lumière. La lueur dansait autour d'elle avec une élégance presque surnaturelle, illuminant son visage d'une aura éthérée.

En un souffle apaisant, elle disparut, ne laissant derrière elle qu'un murmure de sa présence. L'air autour de nous sembla se charger d'une douce chaleur, comme une étreinte invisible, un écho bienveillant de sa magie. Ce fut un instant de sérénité fugace, un rappel que, même dans l'incertitude, le soutien et la lumière pouvaient toujours exister.

Mason, quant à lui, se tenait à l'écart, prêt à disparaître lui aussi. Mais à ma surprise, il hésita. Plutôt que de suivre sa mère dans l'éther magique, il fit un pas vers moi, son expression plus douce qu'à l'accoutumée. Ses yeux bruns, chaleureux, me fixaient avec une intensité particulière.

Mason esquissa un sourire malicieux en me lançant :

- Sorceline, dommage que nous ne puissions pas sortir un peu ce soir. Un petit passage dans un cabaret aurait été le bienvenu.

Je levai les yeux au ciel, un sourire involontaire flottant sur mes lèvres alors que je me rappelais cette fameuse première rencontre à laquelle Mason faisait allusion. J'avais alors 15 ans, une jeune recrue pleine de détermination, envoyée sur ma toute première mission, une mission qui allait me marquer à jamais.

Faute d'effectifs, on m'avait assignée à infiltrer un cabaret humain pour traquer un vampire vedette qui se nourrissait de ses admirateurs. À l'époque, je n'étais pas vraiment équipée pour ce genre de mission, mais c'était une tâche comme une autre. Je m'étais donc faufilée dans les coulisses, tapie dans l'ombre, observant discrètement les loges où le vampire semblait fréquenter ses proies.

Et c'est alors qu'il était apparu. Mason. Il était plus âgé que moi, et il avait tout de suite pris l'initiative. Un sourire rayonnant collé sur le visage, une énergie débordante qui contrastait avec la discrétion de ma mission. Il s'était avancé sans attendre la moindre invitation, se présentant comme s'il était déjà certain que je serais intriguée par sa proposition.

"Mason," m'avait-il dit, avant même que je ne puisse répondre.

Sans plus de cérémonie, il avait proposé de m'aider à entrer dans les loges, suggérant que je me fasse passer pour une nouvelle chanteuse venue passer une audition. J'avais protesté, bien sûr. Je n'étais pas venue ici pour chanter, mais pour attraper un vampire. Mais Mason ne m'avait pas laissée le temps de discuter. Il avait la tête pleine de ses idées, et, résignée, je m'étais retrouvée sur scène, à improviser un numéro devant une foule d'humains. Heureusement, mes talents de chant et de danse n'étaient pas aussi mauvais que je l'avais cru – un fait qui m'avait sauvé la face à cet instant.

Grâce à ma prestation, le vampire m'avait effectivement invitée dans sa loge. Il comptait me mordre, évidemment. J'étais prête à passer à l'action, à le neutraliser avant qu'il ne fasse son coup. Mais avant même que je ne puisse bouger, le vampire s'était effondré, frappé par derrière, et là, Mason était apparu, tout sourire, visiblement ravi de sa propre intervention.

Quelques jours plus tard, il m'avait avoué être un mage – une évidence, si on prêtait attention à l'aura qu'il dégageait. Mais la véritable surprise était venue quand il m'avait révélé qu'il était l'héritier du royaume des mages. Ce détail avait tout changé dans ma perception de lui. Depuis ce jour-là, notre relation n'avait cessé de se renforcer. Une amitié solide, bâtie sur des bases peu communes, mais qui nous avait permis de naviguer ensemble dans un monde où la magie et les créatures surnaturelles régnaient en maîtres.

Aujourd'hui, il était là, souriant encore, et je savais que, peu importe où la vie nous mènerait, cette amitié resterait intacte.

Revenant au présent, je le regardai tandis qu'il reprenait sur un ton plus sérieux :
- Enfin bon, une prochaine fois peut-être. Fais juste attention à toi, je te prie.

Je souris doucement en répondant :

- C'est juré.

- Tu es faite pour vivre ne l'oublie pas et protège les tiens, me conseilla-t-il souriant.

- Je le ferais, lui promis-je à nouveau.

- Bien au-revoir à tous, déclara-t-il à l'attention de tous.

Il jeta un dernier regard en direction d'Eric, un sourire espiègle s'étirant sur ses lèvres. Puis, il accompagna ce sourire d'un clin d'œil parfaitement calculé, comme si c'était un geste spontané, mais qu'il savait exactement l'impact qu'il allait avoir. Avant que l'un de nous ne puisse réagir, il s'évanouit dans un tourbillon de brume magique, disparaissant aussi soudainement qu'il était apparu.

Pourtant, quelque chose dans l'air semblait différent cette fois. Une légère tension flottait dans l'atmosphère, et c'était difficile à ignorer. Pourquoi cette impression de décalage ? La réponse, je l'avais déjà en moi : Eric était gêné. Et pas de manière subtile. Pas comme d'habitude.

D'ordinaire, face aux provocations de Mason, Eric était d'un calme imperturbable. Il levait les yeux au ciel, feignant de n'en avoir rien à faire, ou il répondait par un commentaire sec, mais jamais, jamais, il ne laissait voir la moindre émotion sur son visage. Mais là... là, c'était différent. Un léger rouge avait envahi ses joues, trahissant un malaise évident. Ses yeux ne parvenaient pas à se fixer sur Mason, et encore moins sur moi. Il fuyait mon regard, comme s'il avait été soudainement pris dans une situation où il ne se sentait pas à l'aise, presque vulnérable.

Je me surpris à l'observer silencieusement, intriguée. Ce petit changement, cette gêne palpable, me semblait tout à fait nouveau chez lui.

Intriguée par la scène qui venait de se jouer devant moi, une question me brûlait les lèvres : que pouvaient-ils bien avoir échangé ? Mason, avec son caractère impétueux et son sourire toujours en coin, n'était pas du genre à abandonner une discussion sans en laisser derrière lui un tourbillon de mystères. Et Eric... Éric semblait vraiment perturbé cette fois. Ce contraste entre leurs comportements me fascinait, et une pensée se glissa dans mon esprit : je ne tarderais pas à découvrir ce qui se cache derrière tout cela. Oh, croyez-moi, cette affaire ne resterait pas dans l'ombre très longtemps. Je comptais bien mettre mon nez dans cette histoire, avec une curiosité non dissimulée. En fait, cela devenait presque une mission personnelle.

Mais, bien que la situation avec Mason et Eric m'échauffât l'esprit, il y avait bien plus pressant qui m'attendait. La réalité m'éclata en plein visage : je devais me préparer à affronter le Conseil. Un frisson me parcourut à l'idée de cette rencontre. Juste l'évocation de cet instant fit naître une boule d'angoisse dans mon estomac, une sorte de tourment qui m'envahissait. Pourtant, je savais qu'il n'y avait pas d'échappatoire. L'idée même que ma vie, mon passé, et peut-être même mon avenir, soient liés à cette audience me serra la gorge. Je ne pouvais pas me permettre de flancher. Je devais être prête, coûte que coûte. Il en allait de trop de choses, de trop de secrets enfouis, et cette fois, il était temps d'affronter la vérité, quelle qu'elle soit.

— Jack, tu crois que je pourrais voir le Conseil dans combien de temps ? demandai-je, revenant à ma conversation après quelques instants de réflexion.

— Je dirais qu'on devrait partir très vite pour espérer obtenir une audience le plus tôt possible, répondit-il avec sérieux.

— Dans ce cas, nous devrions arrêter cet entraînement pour aujourd'hui, intervint Kora d'une voix douce mais ferme. Allez vous coucher. Nous partirons dans la nuit pour arriver au plus vite. Cette histoire ne peut pas attendre.

— Tu nous accompagnes ? demandai-je, surprise mais aussi soulagée.

— Qui d'autre pourrait veiller sur toi, ma chérie ? affirma-t-elle en me gratifiant d'un sourire sincère, un de ceux qui semblaient enfin retrouver un peu de lumière après cette journée éprouvante.

— Tu n'as pas tort. Ils auraient vite fait de crasher la voiture juste pour ne plus m'avoir dans les pattes, ajoutai-je avec un petit sourire ironique. Je suis insupportable, après tout.

— Ça, c'est certain, lança Eric d'un ton amusé, mais il ne s'attendait pas au coup de coude discret que je lui assénai dans les côtes. Il grimaça légèrement, mais son sourire malicieux ne faiblit pas.

Après ces échanges légers, nous nous souhaitâmes tous une bonne nuit.

L'atmosphère qui régnait dans le château était lourde, comme si chaque coin de la pièce portait le poids des événements à venir. Un étrange mélange de tension et de soulagement flottait dans l'air, tous conscients que l'action était imminente, mais chacun savait que rien ne serait plus jamais pareil après cette nuit. Fatigués, mais animés par une détermination silencieuse, nous nous dispersâmes, chacun se dirigeant vers ses quartiers.

Je me glissai dans ma chambre, un sentiment de lourde attente m'envahissant. Cette nuit serait la fin d'un chapitre, un tournant décisif vers ce qui nous attendait. Mais c'était aussi l'inconnu qui se profilait à l'horizon, un inconnu auquel je devais me préparer.

Lorsque je poussai la porte de ma chambre, je fus accueillie par une vision inattendue : Élira, déjà allongée sur le lit qui semblait avoir été préparé pour elle par Kora. La majesté tranquille de la princesse d'Hélios dans ce décor simple me surprit, un contraste saisissant avec l'image royale qu'elle incarnait. Je n'aurais jamais cru me retrouver à partager une chambre avec elle, mais, après tout, les circonstances avaient changé.

Elle était là, paisible dans son sommeil, son visage délicatement éclairé par la lumière douce qui filtrait à travers les rideaux. Une aura de tranquillité l'entourait, presque irréelle, comme si cette innocence était un bouclier contre tout ce qui se tramait autour d'elle. Pourtant, cette quiétude était en décalage complet avec la gravité de la situation.

Une vague d'inquiétude m'envahit. Si Carlos la retrouvait, il n'hésiterait pas une seule seconde à l'éliminer. Cette pensée était un coup de poignard, mais je ne pouvais l'ignorer. Le danger qui pesait sur elle m'était insupportable, et l'idée de la laisser sans protection m'était tout simplement intolérable. Mais je devais garder mon calme, tout comme elle semblait le faire. Nous devions rester fortes, pour elle et pour nous-mêmes.

Je laissai échapper un soupir, léger mais plein de pensées complexes, pour ne pas perturber le sommeil paisible d'Élira. J'étais prise dans une tourmente intérieure, mais je m'efforçai de la garder pour moi, ne voulant pas briser l'instant de calme qui régnait dans la pièce. La lumière tamisée de la chambre me sembla plus douce, presque apaisante, mais la tension dans mon esprit restait palpable.

Je pris une douche rapide, l'eau chaude effaçant en partie les courbatures et la fatigue accumulée au fil de journées lourdes de révélations et d'incertitudes. Le bruit de l'eau était un réconfort, un instant de solitude dans lequel je pouvais me perdre, loin des attentes, des responsabilités, de cette guerre qui approchait inéluctablement.

Une fois changée et prête pour la nuit, je me glissai enfin sous les draps de mon propre lit. Le matelas, ferme et accueillant, me donna une sensation de réconfort, mais il ne suffisait pas à apaiser les tourments qui se bousculaient dans mon esprit. Les événements de la journée, les discussions avec Malicia, les décisions difficiles à prendre, tout cela m'empêchait de trouver la paix.

La promesse que j'avais faite à Élira résonnait en moi comme un écho incessant. La protection de la princesse d'Hélios n'était plus simplement un devoir, mais un engagement personnel, profond. Carlos n'était pas un simple ennemi. La menace qu'il représentait allait bien au-delà de ce que nous avions affronté jusqu'à présent. Mais cela ne changeait rien : je tiendrais parole. Je me battrai pour elle, pour sa survie et pour la liberté de ceux qu'elle chérissait.

Ces pensées tournoyaient encore dans ma tête, mais mes paupières se fermaient peu à peu, emportées par la fatigue. Le sommeil finit par m'engloutir, lourd et réparateur, me permettant d'échapper, ne serait-ce que pour quelques heures, à l'inquiétude qui m'étreignait.



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Et  voilà c'est fais un chapitre de plus encore un.

Je poste plus parce que je suis en vacances et que l'imagination fusse dans ma tête alors j'espère que vous aimez.

Aller je continue d'écrire moi A+


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