Chapitre 10
Lorsque nous franchîmes enfin les grandes portes de l'église, le silence pesait lourd dans l'air. Il devait être autour de 5h22 d'après l'horloge murale, un rappel cruel que cette nuit ne nous laisserait aucune place pour le repos. Les gardiens présents avaient tous l'air accablé ou, pour certains, complètement désorientés. Certains reprenaient leurs tâches avec une vigueur nerveuse, d'autres semblaient simplement incapables de lever la tête, submergés par le poids des récents événements.
La conseillère, toujours droite et imposante, nous attendait à quelques mètres de l'entrée. D'un simple geste, elle nous ordonna de la suivre, son expression sévère et indéchiffrable trahissant un sentiment d'urgence.
— Suivez-moi, annonça-t-elle sèchement, avant de se diriger vers l'une des salles de réunion privées.
Cette pièce, généralement réservée aux discussions de la plus haute confidentialité, était insonorisée et équipée de vitres teintées. Tout ce qui se passait là demeurait à l'abri des regards indiscrets.
À ma surprise, la conseillère avait également convoqué Kora et Élira, en plus de Jack, Éric, et moi-même. Cela ne faisait qu'accentuer la gravité de la situation.
— Qu'est-ce qu'elle veut nous cacher à ce point ? murmurai-je à voix basse en suivant le groupe, mes pensées tourbillonnant.
Élira, toujours curieuse et inquiète, me jeta un regard interrogateur, mais je me contentai de hausser les épaules, tout aussi perdue qu'elle. Kora, quant à elle, restait silencieuse, le visage fermé, ses pas rapides trahissant une certaine nervosité.
Une fois dans la pièce, la conseillère referma la porte derrière nous avec un claquement sec, coupant tout lien avec l'agitation extérieure.
— Prenez place, ordonna-t-elle, son ton plus grave qu'à l'accoutumée.
Je m'installai à une des chaises, le regard fixé sur elle. Il était rare que l'on me convoque pour ce genre de réunions, ce qui ne faisait qu'attiser ma curiosité et mon appréhension. Que pouvait-elle bien vouloir nous révéler qui nécessitait autant de discrétion ?
Kora s'arrêta un instant, son regard perçant rivé sur moi, attendant une réponse claire. Elle semblait essayer de saisir chaque nuance dans mes propos, cherchant des indices qui pourraient l'éclairer.
- Vous êtes sûr que c'est l'ombre qui a pris possession de ce gardien ? me redemanda Kora une troisième fois faisant les cents pas en pleine réflexion.
- Je l'ai vu de mes yeux Kora, lui affirmai-je donc pour la troisième fois.
- Tu as dis que cette ombre était étrange, poursuivit-elle.
- Oui ?
- Étrange dans quel sens exactement ? Tu peux préciser ta pensée ?
— Je saurais pas trop l'expliquer... Tu sais, ce que je perçois, c'est plus comme une sensation qu'une observation. Mais cette ombre... elle n'était pas comme les autres.
Kora s'arrêta dans ses allées et venues, me fixant avec intensité.
— Continue, Kally. Qu'est-ce qui la rendait différente ?
— Elle était... instable, dis-je après un moment de réflexion. Son énergie fluctuait. Ce n'était pas un simple flux comme d'habitude. C'était comme des vagues. Et à un moment, cette énergie a explosé, elle est devenue immense d'un seul coup, sans prévenir.
Kora fronça les sourcils, visiblement perturbée par mes paroles.
— Tu veux dire qu'elle a grandi en intensité ?
— Oui, exactement, répondis-je en hochant la tête. Et elle a même absorbé ma dague, comme si elle s'en nourrissait. Après ça, elle est devenue... vivante, d'une certaine manière.
Kora porta une main à son menton, réfléchissant intensément. Elle échangea un regard rapide avec Jack, qui l'observait attentivement.
— Ce que tu décris ne ressemble pas du tout à une ombre normale, finit-elle par dire.
— C'est bien ce que je dis depuis le début, insistai-je, un peu exaspérée.
Kora soupira, reprenant son rythme de réflexion.
— Une ombre qui se nourrit d'énergie et devient consciente... C'est soit une mutation, soit une chose qu'on n'a jamais vue avant.
— Ou une chose qu'on n'était pas censés voir, ajouta Jack en se redressant.
Kora lui lança un regard surpris, mais ne dit rien. Ses yeux trahissaient une inquiétude profonde, comme si quelque chose de bien plus grave venait de germer dans son esprit.
- Mais est ce que tu as vu quelque chose ?
Je me calai un peu plus dans ma chaise, essayant de remettre de l'ordre dans mes pensées tout en observant les visages tendus autour de moi.
— Pas vraiment vu quelque chose, repris-je en fixant un point imaginaire sur la table devant moi. Mais plutôt senti.
La salle sembla retenir son souffle.
— Une présence, ajoutai-je en pesant mes mots. Pas physique... c'était plus... une sensation. Quelque chose de lourd, oppressant. Et, je ne sais pas comment expliquer ça, mais c'était étrangement familier.
Kora cessa ses va-et-vient incessants et planta son regard dans le mien.
— Continue, dit-elle doucement.
— Ensuite, l'ombre a commencé à bouger, racontai-je en gesticulant légèrement de mes mains comme pour illustrer. Comme si elle avait une intention. Une volonté.
Jack, assis non loin de moi, se redressa légèrement, son attention visiblement captée.
— Et c'est là que je me suis jetée au sol avec Jack, continuai-je en esquissant un léger sourire en direction du concerné. Tout est allé très vite. Après ça... eh bien, vous connaissez la suite.
Un silence pesant s'installa dans la pièce, seulement troublé par le léger bruit de Kora qui tapotait nerveusement sur le dossier de sa chaise.
— Une présence, dis-tu ? demanda-t-elle, brisant le silence.
— Oui, répondis-je, légèrement hésitante. Pas une présence physique... c'était plus subtil, comme une pression. Quelque chose de lourd et oppressant, mais aussi étrangement familier.
La conseillère Soros croisa les bras, fronçant les sourcils avec une expression d'agacement.
— Ce n'est pas très clair, grogna-t-elle. Et cela ne nous avance pas.
— Au contraire, madame, intervint Jack, avec un calme étonnant. Si Kally a senti quelque chose, cela signifie que cette ombre n'était pas "seule".
Kora acquiesça lentement, les mots de Jack semblant valider ses propres pensées.
— C'est plausible, dit-elle enfin. Si cette ombre était différente des autres, elle pourrait avoir été influencée par une force extérieure. Un maître plus puissant... ou une entité inconnue.
— Une entité inconnue ? répétai-je, soudain inquiète.
— Oui, Kally, continua Kora d'un ton grave. Les ombres, telles que nous les connaissons, sont limitées dans leurs actions et leur autonomie. Elles obéissent à des ordres simples et retournent à leur maître une fois leur tâche accomplie. Mais ce que tu décris...
Elle fit une pause, cherchant ses mots.
— Ce que tu décris ressemble davantage à une ombre ayant acquis sa propre volonté.
Un frisson parcourut la salle.
— Une ombre avec une volonté propre ? souffla Éric, qui jusque-là s'était tenu en retrait. C'est même possible, ça ?
— Pas à ma connaissance, répliqua Kora. Mais si cela s'est produit, alors nous sommes face à une anomalie qui dépasse nos connaissances actuelles.
La conseillère Soros claqua sa langue, visiblement agacée par l'incertitude de la situation.
— Nous devons en informer immédiatement les hautes instances, décréta-t-elle. Une telle aberration ne peut être ignorée.
Kora hocha la tête, mais je pouvais voir dans son regard qu'elle réfléchissait encore intensément, cherchant à résoudre cette énigme avant que d'autres ne s'en mêlent.
La conseillère Soros se tourna brusquement vers moi, un pli dédaigneux au coin de ses lèvres.
— Bien, et vous, mademoiselle Flory ? Quelque chose à ajouter ?
Je me retins de rouler les yeux, inspirant profondément pour contenir l'agacement qui montait en moi. Pourquoi cette femme avait-elle toujours besoin de s'acharner sur moi ? Elle ne me demandait jamais mon avis dans l'intention de l'écouter, mais simplement pour trouver une nouvelle occasion de me rabaisser.
Je la fixai calmement, bien que mes mains serrées sous la table trahissaient ma nervosité.
— Non, tout ce que Kora sait lui vient de moi et de mon expérience, déclarai-je d'une voix ferme. Je ne lui cache rien.
Un silence tendu s'installa tandis qu'elle continuait de me fixer de cet œil mauvais, chargé de jugement, qui m'avait suivi toutes ces années. Je savais qu'elle ne me croyait pas totalement, mais je ne comptais pas me défendre davantage.
— Eh bien, dans ce cas, le Conseil se réunira bientôt. Je vous préviendrai.
Elle balaya la pièce du regard. Kora, Jack, Eric, et moi acquiesçâmes un à un pour signifier notre compréhension.
— Bien, je m'en vais, conclut-elle avec un sourire forcé. Au plaisir de vous revoir, Eric et Kora. Jack, prends soin de toi, mon fils.
Puis, comme si j'étais invisible, elle évita soigneusement mon regard et quitta la pièce d'un pas décidé, laissant derrière elle une atmosphère lourde de tension non dissipée.
Je laissai échapper un soupir discret et levai les yeux au ciel, m'efforçant de ne pas laisser ses mots ou son comportement m'atteindre plus que nécessaire.
Kora, toujours dans son rôle de guide, nous rappela notre emploi du temps avec un sourire en coin.
— Bon, je vous laisse, vous avez un entraînement, non ?
Cette remarque, bien que banale, souligna une réalité que j'avais tendance à oublier : les garçons étaient encore officiellement scolarisés, tandis que moi, je ne suivais que les préceptes et conseils de Kora. En y réfléchissant, aucun d'entre eux ne m'avait véritablement appris à me battre. Mes souvenirs flous m'amenaient parfois à une scène où un homme — une figure vague et indistincte — me répétait de garder mes appuis et de toujours ouvrir l'œil.
— Oui, tu as sans doute raison, Kora, répondis-je avant de me tourner vers les garçons. Allez, on y va !
Je les poussai légèrement vers la sortie, prenant les devants avec un certain entrain. Pourtant, à peine avais-je franchi le seuil que je me figeai, une réalisation soudaine me traversant l'esprit : j'avais oublié quelqu'un.
— Élira, tu viens aussi, l'appelai-je en me retournant. On ne va pas te laisser toute seule, quand même.
J'accompagnai mes mots d'un sourire sincère, espérant la mettre à l'aise. Élira, rayonnante et souriante, hocha la tête avec enthousiasme avant de nous rejoindre.
Ensemble, nous nous dirigeâmes vers la salle d'entraînement. À notre arrivée, l'atmosphère familière des lieux nous enveloppa : les tapis en mousse usés mais confortables, les sacs de frappe suspendus et légèrement marqués par les coups répétés, et l'armurerie adjacente, débordant d'armes en tout genre, du simple bâton d'entraînement aux épées étincelantes.
Les jeunes déjà présents cessèrent leurs activités pour nous dévisager. Quelques instants plus tard, ils commencèrent à quitter les lieux, mais pas sans me bousculer au passage ou me lancer leurs habituels commentaires acides, qui oscillaient entre insultes et piques mesquines.
Eric les fusilla du regard, sa mâchoire serrée traduisant clairement son agacement. Jack, quant à lui, semblait sur le point d'exploser, ses poings crispés trahissant sa retenue. Élira, perdue, suivait la scène avec un mélange de surprise et de confusion, visiblement déstabilisée de voir de tels comportements dirigés contre moi.
Après ce qui est devenu une routine — une routine que j'aimerais pouvoir briser un jour —, nous reprîmes le cours habituel des choses. La salle, désormais vidée de ces nuisances, était à nous seuls, un petit avantage dans tout ce chaos.
Comme à notre habitude, nous nous préparâmes. Les garçons retirèrent leurs t-shirts, dévoilant leurs musculatures athlétiques prêtes pour l'entraînement. Pour ma part, je troquai ma tenue classique contre une brassière de sport, appréciant la liberté de mouvement qu'elle offrait.
La salle privatisée nous convenait parfaitement, offrant un espace calme et à l'abri des regards. Une fois à l'aise, nous entamâmes un échauffement rigoureux, chacun suivant ses propres exercices pour mobiliser ses muscles et éviter toute blessure. Élira, toujours discrète, s'était assise sur le sol près des tapis, ses yeux attentifs suivant chacun de nos mouvements.
Enfin échauffés, nous passâmes aux choses sérieuses. La tension montait légèrement, mais dans cette atmosphère intime et concentrée, un certain équilibre semblait régner. Ici, au moins, il n'y avait pas de place pour les jugements ou les critiques : il n'y avait que nous, nos capacités, et l'envie de progresser.
Éric, fidèle à ses habitudes, se dirigea sans attendre vers l'armurerie, en ressortant avec un arsenal réduit mais efficace : deux arcs et une dizaine de dagues, parfaitement équilibrées pour son travail sur la précision. Il s'installa dans un coin de la salle, prêt à se concentrer sur sa routine d'entraînement.
Élira, curieuse et impressionnée, ne put s'empêcher de poser une question.
— C'est quoi tout ça ? demanda-t-elle en désignant les armes qu'il venait de poser.
— Ce sont nos armes. On doit s'entraîner, tu te rappelles ? lui répondis-je, un peu mécaniquement, sans trop d'émotion. Peut-être commençais-je à regretter d'avoir voulu l'intégrer si vite à ce monde.
— D'accord... Mais comment vous faites ?
Je levai les yeux au ciel, un sourire amusé étirant légèrement mes lèvres.
— T'en poses, des questions.
— Je veux juste en savoir le plus possible. Tout ça est si nouveau pour moi, expliqua-t-elle avec une sincérité désarmante.
— Eh bien... d'habitude, Éric s'entraîne avec ses dagues ou avec le mannequin, là-bas, répondis-je en pointant du doigt notre ami, déjà absorbé dans son duel silencieux avec le mannequin de plastique. Ses mouvements étaient précis, ses lancers mesurés.
Je pris une pause, observant Jack qui vérifiait la tension de son arc dans un coin avant de poursuivre :
— Jack et moi, on utilise les cibles juste là, dis-je en désignant les rangées de cibles circulaires fixées au mur. Ou alors on se bat au corps à corps, ajoutai-je en désignant la zone dégagée au centre, où nous avions suffisamment d'espace pour nous affronter.
Élira nous regardait tour à tour, les yeux brillants d'intérêt. Il était évident que ce monde l'attirait autant qu'il la déconcertait.
— Je vois... Et je peux regarder ? demanda Élira, ses yeux pétillants d'une curiosité presque enfantine.
Avant que je ne puisse répondre, Jack s'approcha, un sourire malicieux étirant ses lèvres alors qu'il me tendait mon arc. Ses yeux brillants glissèrent vers Élira.
— Elle est vraiment curieuse, cette princesse, dis-moi, Kally, fit-il avec un ton taquin.
Je haussai les épaules, un sourire en coin.
— Ouais, mais ça me dérange pas plus que ça. Et toi ?
— Non plus. Tant qu'elle ne se met pas entre nous deux pendant un duel, répondit-il, un éclat de défi dans le regard. Allez, on y va, ajouta-t-il en se mettant en garde face aux cibles, son arc déjà tendu entre ses mains expertes.
C'était notre habitude, ce petit jeu qui mêlait compétition et camaraderie. Jack était prêt à se lancer, son sourire ravageur toujours accroché à ses lèvres, tandis qu'il m'attendait pour débuter ce qui ressemblait de plus en plus à un rituel entre nous. Élira, quant à elle, s'installa tranquillement sur un tapis, les genoux ramenés contre sa poitrine, prête à ne rien manquer de ce duel.
Jack et moi nous tenions côte à côte, prêts à lâcher nos flèches. Les cibles devant nous étaient parfaitement alignées, chacune marquée d'un petit cercle centré comme un défi silencieux. Sans un mot, nous nous synchronisions, l'instinct guidant nos gestes plus que la réflexion. Nos arcs étaient tendus, les flèches sifflaient dans l'air et frappaient au cœur des cibles, marquant une précision parfaite. L'impact des projectiles dans les planches résonna comme un écho de victoire.
— Wuhou, c'est super, bravo ! s'écria Élira, frappant dans ses mains avec une énergie rafraîchissante. Sa voix claire apporta une légèreté bienvenue dans l'intensité de l'instant, et même si elle ne faisait que commenter un entraînement, son enthousiasme apporta une touche de chaleur.
— Merci, princesse, répondit Jack d'un ton plus détendu qu'à l'habitude, tout en la gratifiant d'un regard satisfait. Il semblait apprécier la reconnaissance plus que de raison, sa posture se redressant un peu comme un paon exhibant ses plumes.
Cependant, ce fut son geste suivant qui attira mon attention. Il tourna son regard vers moi, son expression s'adoucissant tandis qu'il se penchait légèrement pour me murmurer quelque chose. Il m'effleura presque de sa proximité, une habitude qui s'était glissée dans nos échanges au fil du temps. Son souffle effleurant mon oreille me fit frissonner légèrement, mais je restai de marbre, bien décidée à ne pas me laisser distraire.
— Je crois que je vais bien l'aimer. Elle, elle sait me féliciter comme je le mérite, contrairement à d'autres.
Les mots, bien que simples, étaient chargés d'un sous-entendu qui me fit lever les yeux au ciel. Je n'avais pas besoin de me retourner pour deviner la lueur malicieuse dans ses yeux. Ce n'était pas la première fois qu'il glissait ce genre de remarques et, à force, j'avais appris à les ignorer. Mais il fallait admettre que ses commentaires sur le fait qu'il soit toujours sous-estimé, ou qu'il attende une reconnaissance qu'il pensait manquer de la part des autres, commençaient à devenir légèrement agaçants.
C'était comme s'il cherchait constamment une validation qu'il savait déjà avoir de la part d'Élira, mais qui semblait me fuir à moi. Et bien que je n'aie pas besoin de ses compliments pour savoir de quoi je suis capable, sa fierté m'étonnait toujours un peu. J'avais fait mes preuves, j'avais prouvé ma valeur à maintes reprises, et pourtant il fallait toujours qu'il fasse cette petite réflexion. C'était comme si, en un sens, il avait l'impression qu'il était le seul à mériter cette reconnaissance.
Je me forçai à ne pas réagir. À vrai dire, son ego me semblait à la fois divertissant et dérangeant. C'était une sorte de double tranchant. Parfois, son assurance m'amusait, mais d'autres fois, elle me donnait envie de lui coller une claque. Je laissai échapper un soupir presque inaudible avant de me remettre en position, oubliant un instant son petit jeu pour me concentrer sur ce qui comptait vraiment : l'entraînement.
Je tirai une autre flèche, parfaitement centrée à son tour, cette fois un peu plus rapide, plus fluide. Le bruit de l'impact me résonnait dans les oreilles, mais c'était une sensation étrange, familière, comme une habitude bien ancrée dans mon corps. Mais Jack n'avait visiblement pas perdu son attention sur moi, malgré l'archerie qui se poursuivait.
Il me lança un regard satisfait, mais quelque part derrière, il y avait cette étincelle d'approbation qu'il recherchait. Une sorte de validation silencieuse qu'il n'avouait pas. Je n'étais pas sûre d'apprécier ce genre de manipulations subtiles, mais je n'avais pas l'énergie de me battre contre. Pas aujourd'hui.
— Allez, on continue, dis-je à haute voix, presque à moi-même, tout en me recentrant sur le but.
Nous continuons à tirer, chaque flèche pénétrant les cibles avec la précision d'un instant bien maîtrisé. Les coups résonnaient dans la salle, et à chaque tir parfait, Élira applaudissait, manifestant un enthousiasme sans faille. Ses mains claquaient dans un rythme bien cadencé, et sa voix haute s'élevait comme un écho de son admiration.
— Tu sais Élira, pas besoin de nous applaudir tout le temps, on met dans le mille à chaque fois de toute manière, lançai-je en souriant légèrement, mais sans me laisser distraire. C'était un peu une manière de la taquiner, un peu pour détendre l'atmosphère, bien que je fusse fière de la précision de nos tirs.
— Wow, pour moi c'est trop compliqué, comment vous faites ? répondit-elle, son regard admiratif toujours fixé sur nous, une pointe d'émerveillement dans ses yeux.
Je haussai les épaules, décidant de répondre en me tournant vers Jack, qui était à mes côtés, l'arc toujours prêt à l'emploi. Je savais que ses leçons m'avaient fait progresser, et je lui devais beaucoup pour cela.
— C'est juste une question de confiance en soi et de lâcher prise, n'est-ce pas, Jack ? me tournais-je vers lui en répétant ses propres leçons, un sourire amusé flottant sur mes lèvres. Après tout, c'était lui qui m'avait appris tout ce que je savais, lui seul avait eu l'idée de m'enseigner l'art du tir à l'arc lorsque j'étais encore novice.
Jack, qui venait de décocher une nouvelle flèche avec la même assurance que d'habitude, tourna son regard vers moi. Il esquissa un petit sourire, mais ses yeux reflétaient une lueur d'ironie, comme si mon commentaire était une invitation à une petite moquerie. Son regard glissa ensuite vers Élira, puis revint vers moi.
— Ouais, c'est ça, moque-toi de moi, rétorqua-t-il, en secouant la tête dans un faux geste de protestation. Il savait bien que je n'étais pas sérieuse. Nous avions toujours ce genre d'échange, un jeu de mots qui avait pris place dans nos habitudes. Il y avait un fond de camaraderie dans sa réponse, mais aussi cette touche d'humilité qu'il savait si bien dissimuler derrière ses sourires et ses blagues.
Je haussai un sourcil, amusée par sa réaction. À chaque fois, il me rappelait que, même s'il était le plus expérimenté, il n'hésitait jamais à faire preuve de cette légèreté qui le rendait attachant. Pourtant, je savais aussi que derrière sa façade décontractée, il y avait une réelle expertise et une confiance inébranlable en ses capacités. Ce n'était pas pour rien qu'il m'avait prise sous son aile en me montrant les ficelles du tir à l'arc.
Élira, elle, ne semblait pas comprendre tout le sous-texte de notre échange, mais elle souriait en voyant la dynamique entre nous deux. Elle s'était assise sur un coin du tapis d'entraînement, observant avec admiration.
Un frisson glacé parcourut mon échine, mes sens en alerte. Sans réfléchir, je me baissai d'un mouvement vif, instinctivement, comme si mon corps savait déjà ce qui allait se passer avant même que mon esprit n'ait eu le temps d'analyser la situation. À peine avais-je pris cette position qu'une explosion de force magique frôla mon dos, m'envoyant une sensation de chaleur intense à l'endroit même où j'avais été juste un instant avant.
Je redressai la tête, les yeux scrutant l'horizon, cherchant la source de cette attaque mystérieuse. Jack et moi nous étions déjà mis en garde, les arcs prêts, mais la puissance de ce qui venait de se produire n'avait pas encore révélé son origine. Un silence lourd s'installa autour de nous, avant qu'Eric ne fasse irruption à nos côtés.
— Ça venait d'où ça ? demanda-t-il, son ton une combinaison de confusion et de vigilance. Ses yeux parcouraient l'espace, comme pour repérer toute menace supplémentaire.
Je me relevai lentement, gardant un œil sur les alentours. Mon cœur battait plus fort, non seulement à cause de la surprise mais aussi à cause de la nature de ce qui m'avait frôlé. Une énergie brute et sauvage que je connaissais trop bien. Je jetai un coup d'œil rapide au mur qui avait été brûlé par cette force, l'empreinte de l'attaque encore visible, des fissures noires qui s'étendaient comme une toile de l'ombre.
— C'est quoi ça Kally ? Eric insista, visiblement inquiet. Il s'approchait lentement, scrutant chaque recoin, comme si la réponse à sa question allait surgir d'un instant à l'autre.
Je restai figée un instant, le souffle court. L'orbe d'énergie qui avait effleuré mon dos n'était pas inconnue. Au contraire, elle m'était familière
- Les sorciers...chuchotai-je pas réellement certaine qu'ils m'ai entendu tellement j'avais parlé bas.
- Je vois que tu ne m'as pas oublié Kally, c'est très bien, ma jolie, m'interpella une voix reconnaissable entre toute.
Je me figeai, le cœur battant dans ma poitrine. Cette voix... elle était inconfondible, marquée par une autorité glaciale et une touche de mépris. Je me retournais lentement, mes yeux cherchant à s'ajuster à la silhouette qui se dessinait devant moi, émergeant des ombres avec une prestance qui ne laissait aucun doute sur son statut.
La silhouette se précisait, une femme grande et élancée, vêtue d'une robe d'une sombre élégance, ses longs cheveux noirs tombant en vagues soyeuses autour de son visage impassible. Ses yeux, d'un vert perçant, brillaient d'une malice calculée. C'était elle, la reine des mages et des sorciers, une figure qui suscitait à la fois crainte et respect dans le monde entier. Reine Malicia, son nom résonnait dans l'air comme un avertissement, une menace silencieuse.
— Reine Malicia, répondis-je d'une voix serrée, mes yeux cherchant à maintenir mon calme malgré l'aura oppressante qu'elle dégageait. Je jetai un regard rapide à mes compagnons derrière moi, encore dans l'ombre de l'incertitude. Ils étaient figés, incertains, mais curieux.
La Reine des sorciers esquissa un sourire, un sourire qui ne laissait entrevoir aucune véritable chaleur, seulement l'arrogance d'une personne qui savait qu'elle avait le pouvoir de manipuler les autres à sa guise.
— C'est bien moi en chair et en os, très chère, répondit-elle avec une voix douce, mais pleine de menace. Comment vas-tu ?
Sa question était délibérément innocente, mais derrière elle se cachait un défi silencieux, comme si elle m'invitait à révéler mes émotions, mes peurs, mes faiblesses. Elle savait exactement quel effet elle avait sur moi, et elle prenait un plaisir évident à me voir me débattre avec la réalité de sa présence.
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Badaba,
Une nouvelle arrivée et pas que...
Que veux cette femme ?
Pourquoi l'ombre est elle si mystérieuse et compliquer ?
Et je sais pas trop quoi dire d'autre alors bye les chouquettes.
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