CHAPITRE XXXV
Mars1712, Palais-Royal, Magistère...
Hector était en pleine recherche dans les Archives du Magistère lorsqu'un elfe l'interrompit pour lui porter un message. Il était demandé de toute urgence par les Surintendants Bradefer. Intrigué, Hector rangea le dossier qu'il avait dans les mains et se rendit chez ses supérieurs. Jamais il n'avait encore été convoqué de la sorte. Tout cela était trop officiel et cérémonieux pour augurer du bon. Il frappa et ouvrit la porte dans un même mouvement, comme à son habitude lorsqu'il parvint à destination. Quel ne fût pas sa surprise de voir les Bradefer, debout, encadrant le Roy-Mage.
Basiléûs d'Aquitaine, troisième du nom, avait l'air grave. D'un simple regard il referma la porte et d'un clignement de paupière, il la verrouilla. Les Bradefer demeuraient silencieux. Hector ne les avait jamais vu comme ça. Il claqua des talons, salua avant de s'incliner très légèrement pour baiser la main du souverain comme il était d'usage. Lorsqu'il se redressa, les Bradefer attendirent que Basiléûs s'asseye pour l'imiter.
- Commandant, commença le Roy-Mage sur un ton solennel, nous avons pour vous une mission d'une importance capitale.
- Mage-Jesté ? Demanda Hector tandis que le monarque observait un silence.
- Vous allez vous rendre à Versailles, au palais de Louis XIV et vous allez trouver la raison qui explique la mort de presque toute sa descendance dans des circonstances pour le moins troublantes.
- Nous avons tout lieu de penser, Hector, ajouta Bertrand, que les enfants et les petits-enfants du Roy de France et de Navarre ont été empoisonnés.
- Leurs décès passent pour ce qui semble être une affection mortelle, une maladie. Mais nos espions sur place, et en particulier la Duchesse de Vendatour, nous à rapporté des phénomènes obscur qu'il serait sage d'éclaircir, compléta Isidore. Vous partez immédiatement, commandant Balthazar.
- Inutile de vous dire, que cette mission, cette conversation, et tout ce qui va se passer ensuite, n'a jamais eu lieu. Si vous êtes capturés, découvert, ou compromis, le Magistère ne pourra rien pour vous, cru bon de préciser Bertrand. Vous serez seul avec la Duchesse.
- Ainsi soit-il, dit Hector en regardant tour à tour les frères jumeaux.
- Commandant, lança le Roy-Mage avant qu'Hector ne quitte la pièce, vous devez bien comprendre que si vous n'arrêtez pas rapidement l'assassin, la crise qui touchera le Royaume de France affectera nos deux mondes plus que la guerre qui fait encore rage pour le trône d'Espagne.
- Je comprends, votre Mage-Jesté. Je trouverais cet assassin, et je vous le ramènerai, vivant.
Basiléûs eût un geste pour congédier Hector qui sortit après un bref signe de tête à ses supérieurs.
Voilà qui expliquait l'agitation de ces derniers jours au sein du bureau des Bradefer. Depuis quelques temps, un calme relatif planait sur la France, mais il ne s'agissait que d'une apparence qu'Hector connaissait trop bien. Il avait apprit à se méfier de ces jours tranquille où rien n'arrivait et savait reconnaître au son et bruits du palais ce qui n'était pas dit. Ainsi donc il devait se rendre à Versailles pour y trouver un meurtrier et sans rien avoir comme indice de base. Cela n'allait pas être une partie de plaisir.
- Les ordres sont les ordres, marmonna-t-il en montant sur un cheval qui l'attendait dans la cour du Palais-Royal. Il talonna sa monture qui s'élança vivement vers le cœur battant du Royaume de France.
Charlotte-Éléonore Magdeleine de La Mothe-Houdancourt, Duchesse de Vendatour, reconnut immédiatement son homme. Perché sur son cheval, il semblait ne pas savoir où aller. Ses habits n'avaient rien de communs et la mode des sorciers se voyait pour qui la connaissait. Il avait même un pli qui laissait deviner sa baguette magique sous son manteau, quelle imprudence ! Elle quitta les appartement du jeune Louis de France en laissant le garçon à Madame de La Lande, sa seconde et sous-gouvernante des Enfants de France. Elle descendit aussi rapidement qu'elle le put et traversa la cour de marbre puis la cour royale pour arriver à la grille d'honneur. Elle se fit ouvrir et fît signe à Hector de démonter de cheval pour entrer. Descendant de sa selle, Hector laissa sa bête au soin d'un palefrenier que la duchesse rétribua gracieusement. Elle tira Hector par le bras qui, tout à sa découverte d'un pareil lieu, se laissa entraîner jusque dans le chambre de petit Louis de France. Vendatour congédia Madame de La Lande puis ferma la porte en s'assurant que personne n'écoutait.
- Vous en avez mis du temps ! Et par Merlin ce que vous êtes indiscret ! Dois-je seulement vous rappeler où nous sommes ?
Hector, désarçonné par cette façon cavalière qu'avait cette femme de le réprimander ne réussi qu'à hausser un sourcil.
- Rassurez-moi, vous n'êtes ni sourd ni muet au moins ?
- Non, répondit Hector en jetant un œil au jeune garçon qui écoutait non loin de là. Qui est-ce ?
- Le futur Roy de France, si vous faites correctement votre travail.
Hector se pencha pour regarder le jeune Louis de France et renifla de dédain, dans un geste qui lui fit ressembler à sa grand-mère maternelle.
- Qu'avez-vous à me donner ? Demanda Hector avec raideur.
- Pardon ?
- Qu'avez-vous à me donner, que je commence quelque part, répéta-t-il avec une impatience mal dissimulée.
- Je n'ai pas grand-chose à vrai dire. Il y a une silhouette qui rode dans le château. Je l'aperçois du coin de l'œil à chaque fois et elle disparaît sitôt que je tourne la tête. Il y a aussi une odeur de pourriture infâme qui n'a rien d'Insorcellé, et enfin j'ai surtout vu des symboles tracés sur certains murs du château. Des symboles que je ne connais pas et qui ne me disent rien de bon. Il y en avait un dans cette chambre, mais il n'y est plus.
- Pouvez-vous me le décrire ?
- Je peux vous le tracer, à peu près.
La Duchesse s'empara d'une plume et dessina une figure faite de lignes et de points. Hector attendit qu'elle ai fini puis hoqueta lorsqu'il reconnu des lettres vampiriques. Une bordée de juron s'échappa de ses lèvres et la colère lui voilà les yeux. La Vendatour recula légèrement lorsque des étincelles se mirent à jaillir des doigts d'Hector.
- Barricadez-vous dans cette pièce. N'en sortez plus, sous aucun prétexte.
- Pourquoi ? Interrogea la Duchesse avec dans la voix un aplomb mis à mal par une peur naissante.
- Parce que Vitaly Sharpov est un vampire singulièrement difficile à capturer. Tout compte fait, je ne le ramènerai peut-être pas vivant...
Avant de quitter la pièce Hector se coupa volontairement pour ouvrir une plaie dans sa main droite et lorsque le sang scintilla à la surface de sa peau, une lettre se dessina en énorme sur un des murs. Cette apparition terrifia la Duchesse et le jeune Louis de France qui se mit à pleurer. Hector quitta la pièce en se désillusionnant et commença sa traque.
Pendant des jours, la Duchesse fit croire que le jeune Louis était à son tour malade et interdisait quiconque de l'approcher, pas même le Roy Louis XIV. Pour le convaincre elle usa d'un sortilège qu'Hector n'aimait pas beaucoup, malgré son efficacité : l'Impérium.
Plusieurs fois, Hector aperçu dans les couloirs, les grandes salles et même dans le parc, la silhouette filiforme et fuyante de sa cible, mais sa vélocité le mettait hors d'atteinte de l'Auror qui ne s'autorisait pas à user de magie, de peur d'être vu. Vitaly et Hector jouèrent ainsi une partie de cache-cache où la défaite d'Hector mènerait tout simplement le monde des sorciers et des Insorcellés à la ruine. Vitaly ne tenta pas de s'introduire dans la chambre de jeune garçon, Hector l'y attendait. Il se privait de sommeil pour surveiller la Vendatour, mais aussi pour éviter de se faire tuer à son tour. Qui savait ce que Vitaly avait besoin de vraiment dormir ? Un soir, le vampire manqua de peu de tuer Hector en lui faisant tomber une statue depuis le toit du château, tandis qu'il sortait. Si Hector n'était pas tombé en manquant une marche, il aurait prit la statue sur la tête.
Leur duel invisible dura encore quelques jours. Mais par une nuit d'orage, Hector coinça enfin le vampire. Il était dans les cuisines, vidées de tout personnel.
- J'aurais du me douter que c'était toi... Tu n'as réussi à geler le Roy alors tu es venu finir la besogne après t'être fait oublier ! Lança Hector laconiquement tandis que Vitaly reculait en mettant autant de distance que possible entre lui et Hector.
- J'aurais du te trancher la gorge quand tu gisais à la Cour des Miracles, répondit Vitaly et non attendre que tu en sorte !
- Tu as survécu la première fois, mais maintenant, tu vas mourir pour de bon, dit Hector en sortant sa baguette. Je t'offre un duel à la loyal, je suis dans un jour de bonté, ajouta Hector en se fendant d'un salut martial exagéré.
Vitaly ne manqua pas cette chance et d'un claquement de doigts, tous les couteaux de la pièce fusèrent vers Hector. Il transplana à l'autre bout de la pièce et lança vers le vampire des chaînes d'argents. Vitaly les retourna à l'envoyeur et les transforma en serpents. Hector les détruisit d'un coup de baguette et dut ensuite parer une série d'attaque magique puissante qui le mirent en difficulté. Une table, animée par Vitaly chargea Hector, les vitres se brisèrent et les éclats de verre lui lacérèrent le visage, un tisonnier vint lui frapper le dos, mais sa cape le couvrit. Le vampire tenta de faire tomber le plafond, mais Hector l'emmura dans une colonne. Quand il en sortit par le plafond, Vitaly tomba sur Hector de tout son poids. Hector perdit sa baguette et il dut se battre à coup de poings. Vitaly lui griffait chaque partie du corps qu'il pouvait atteindre. Ses long doigts furent bientôt autour du cou d'Hector et les longues canines qui dépassaient de sa bouche se rapprochèrent dangereusement.
- Omne suus praetium habet, Hector, susurra le vampire.
A cet instant, Hector vit sa vie défiler devant ses yeux. Une terreur sourde s'empara de lui et le paralysa. Il ne dût son salut qu'à la Vendatour qui intervint, baguette tirée au clair et qui fit voler Vitaly au travers de la pièce. Hector se redressa, récupéra la sienne et les deux sorciers se tinrent prêt à se battre côte à côte, mais Vitaly avait disparu. Hector lâcha une bordée de jurons avant de se laisser tomber par terre, épuisé. La Duchesse le releva tandis qu'un hurlement terrifiant résonna dans tout le château, jusque dans le fond des jardins.
Dans sa chambre, Louis de France, effrayé, avait devant lui une apparition digne des récits bibliques décrivant le diable. Vitaly, dans toute son horreur, le fixait de ses yeux luisants. Les mains tendus, Vitaly s'approchait doucement du lit pour mordre sa proie.
La porte vola en éclats, et deux éclairs verts fusèrent en direction du vampire qui en réchappa grâce à une chance improbable. Les visages de la Duchesse de Vendatour et d'Hector, tous les deux ayants criés de concert la formule « Avada Kedavra », étaient éclairés par le double sortilège qui illumina la pièce. Une rage sans équivalent déformaient leurs traits. Dans une explosion terrible, les éclairs s'entrechoquèrent à quelques centimètres du visage de Vitaly. Profitant du chaos provoqué par cette explosion, Vitaly fit ce qu'il faisait mieux que les sorciers : disparaître. Hector hurla de dépit et la Duchesse se précipita vers le petit Louis.
- Il n'a rien ? S'enquit Hector au comble de la colère.
- A part une tâche d'urine sur lui, non, grâce au ciel, répondit la Duchesse de Vendatour presque en pleurant et en riant en même temps. Je suis là, je suis là, disait-elle au petit Louis qui pleurait de tout son petit être.
- Dans ce cas, vous m'excuserez, j'ai des ordres.
Et Hector transplana sans ménagements pour tenter de retrouver Vitaly Sharpov...
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