CHAPITRE XVIII

Juin 1700, Académie de Magie Beauxbâtons...

- Donc tu partira pour Paris juste après les examens, demanda Achille allongé contre le torse d'Hector. Ce dernier, une main lui caressant les cheveux, ne répondit que par un hochement de tête. Achille se tortilla, et se retourna, posant son menton sur la poitrine d'Hector.

- On ne se verra presque plus... dit Achille avec une moue triste.

- Ne t'en fais pas, lui dit Hector en lui caressant le front. On ne sera pas sans se voir. Je descendrais à Toulon aussi souvent que faire se pourra et je t'enverrai Harald tous les jours si il tiens la distance.

Le corbeau, endormi sur le rebord de la fenêtre ouvrit un œil à la mention de son nom. Il déplia ses ailes, s'ébroua comme un croup et claqua son bec contre le carreau. Hector ne prit pas la peine de se lever. Il tourna son poignet en remuant ses lèvres et la fenêtre s'ouvrit. Le volatile adressa un clin d'œil aux deux amants encore allongés et s'envola dans le soleil levant.

- Il a raison, dit Hector en se redressant. Il faut qu'on se lève, où les autres vont remarquer notre absence.

Achille grommela, s'agrippant à Hector pour l'empêcher de se lever. Hector lui sourit, le chatouilla et se dégagea. Il se leva et vint respirer l'air frais du matin à la fenêtre.

- Tu vas te faire voir... dit Achille

- Dit plutôt que tu as peur que quelqu'un me voit nu à cette fenêtre, rétorqua Hector sans le regarder. Achille grogna et Hector éclata de rire.

- Qui veut-tu qui nous voit ? Personne n'est encore réveillé. Il ne doit guère être plus de six heure moins le quart.

Hector se tourna dos à la fenêtre pour chauffer son dos aux premiers rayons du soleil. Achille, toujours allongé dans le lit qu'ils avaient fait apparaître avec un sortilège le regardait en se mordant la lèvre inférieur.

- Je sais, dit Hector en souriant. Il s'approcha d'Achille, lui déposa un baiser sur le front et attrapa ses habits qu'il enfila. Achille se leva enfin et vint enserrer de ses bras son bien-aimée.

- Je devrais me passer de ça combien de temps ? Demanda-t-il en passant ses mains sous la tunique d'Hector.

- Je ne saurais te dire. Quelques jours, quelques semaines tout au plus.

Achille bougonna et serra son ami un peu plus fort. Hector lui rendis son étreinte puis lui tendis ses habits.

- Allez, rhabille toi mon amour. J'aimerais bien qu'on réintègre le dortoir avant le réveil des autres.

Achille s'exécuta en soupirant. Tous les matins depuis plus de deux ans ce même manège se répétait. Le soir ils allaient se coucher dans leur dortoir, attendaient que leurs condisciples s'endorment et montaient au cinquième étage pour dormir ensemble, dans un lit qu'ils faisaient disparaître tous les matins avant de redescendre en catimini réintégrer leur lit pour se lever en même temps que tout le monde, et ainsi éviter d'éveiller des soupçons. Ils avaient failli se faire surprendre plus d'une fois par des professeurs levés plus tôt que d'habitude. Les fantômes, armures et tableau ne leur avaient jamais posé de problèmes. Léonard de Vinci s'étant assuré de leur silence par un biais mystérieux que les deux jeunes hommes ignoraient.

Ainsi, en prenant leurs précautions habituelles, Hector et Achille regagnèrent leurs pénates sans problèmes et profitèrent de la demi-heure de sommeil restant pour vraiment dormir.

Les examens approchaient. Achille le soulignait tous les matins, et Hector savait que son amant avait peur de la séparation qu'occasionnerait son départ pour Paris. Ils en avaient parlé maintes fois, mais Hector n'avait pas su trouver les mots justes pour réconforter Achille. Lui aussi il se faisait du soucis. Il savait qu'Achille retournerait à la ferme de ses parents, dans l'attente d'une opportunité dans la musique. Cependant Hector ne doutait pas du talent de harpiste d'Achille et savait que ce dernier n'aurait aucun mal à trouver sa place grâce la gloire éternelle gagnée avec le trophée des Trois Sorciers.

- Ce sont les privilèges du vainqueur, avait-il dit prophétiquement à un Achille en proie au questionnement alors que sa renommée ne retombait pas malgré le passage des ans.

Chaque génération qui entrait à l'école connaissait son nom. Son portrait trônait fièrement dans la Galeries des Illustres, un couloir rempli des portraits des vainqueurs de Beauxbâtons au Tournoi, et d'autres sorciers devenus des légendes. Même des rues commençaient à porter son nom et des statues du jeune homme fleurissaient ça et là. On racontait et chantait ses exploits, et sa musique, déjà magnifique, semblait avoir été sublimée par la magie de cette gloire éternelle. Mais pour l'heure, la gloire devrait attendre le passage des examens.

La veille, ils passèrent leur derniers moment de temps libre ensemble, à se balader dans le parc, au cinquième étage dans leur repaire de la bibliothèque abandonnée, à profiter d'une intimité qu'ils allaient devoir sacrifier pour un temps. Ils ne prirent même pas la peine de descendre pour le souper, ni la précaution d'aller faire semblant de se coucher.

Le lendemain, ils se levèrent de bonne heure, dans le plus grand silence, et descendirent prendre un repas. Aucuns de deux garçon ne pipa mot de tout le déjeuner. Quand ils eurent finis, ils se prirent dans les bras et se séparèrent pour aller affronter leurs jurys et leurs épreuves respectives.

Quand il arriva à son épreuve de duel, Hector ne fût guère surpris de voir Florian de Monblason accompagné de son père, Gladius de Monblason, toujours maître d'arme du Magistère. Il fût cependant frappé de stupeur quand il aperçu dans un coin de la salle le Surintendant de la Sûreté, Bertrand Bradefer, qu'il avait rencontré trois ans plus tôt. « Sans doute était-ce lui qui était chargé de juger cette épreuve » se dit Hector. Chassant cette question de son esprit, il remit sa baguette pour inspection au maître des baguettes de l'Académie. Quand ce dernier la reconnue, sa bouche se tordit et il enfila précipitamment ses gants avant de la toucher. Il l'examina rapidement, et la rendis à son propriétaire sans faire de commentaire. Hector se mit alors en garde, l'épreuve pouvait commencer...

Ça y est, les examens étaient officiellement terminé. Hector les avaient passé, bon gré mal gré tandis qu'Achille avait réussi les siens avec brio. Lorsqu'ils reçurent leurs résultats en fin de semaine, avec les félicitation de circonstance et une poignée de main de Bertrand Bradefer pour Hector, Achille descendit dans le dortoir qui l'avait accueilli pendant une longue décennie et prépara ses affaires. Hector lui, était affairé avec Bertrand Bradefer, avec qui il eu une longue conversation. Quand ils se quittèrent, le Surintendant devant rentrer à la capitale, ils avaient convenu qu'Hector se rende à Paris le lendemain.

Alors qu'Achille rangeait ses affaires dans son sac, Hector entra discrètement et se faufila derrière lui, lui plaqua les yeux avec ses mains et lui tomba dessus. Achille se retourna avec un sourire triste, une larme roulant sur sa joue.

- Tu pars à Paris alors... dit Achille en baisant la tête.

Hector caressa la joue d'Achille pour en chasser la larme et lui redressa la tête.

- Est-ce que je te reverrai un jour ? demanda Achille en réprimant un sanglot.

- Que réponds ton cœur à cette question ? Répondit Hector avec ce sourire dont il avait le secret.

- J'espère. Oui, je crois, répondit Achille rassuré.

- Alors tu peux être sûr que l'on se reverra, dit Hector avant de l'embrasser.

Ils passèrent leur dernière soirée ensemble à discuter, à rire, à pleurer, à s'embrasser et finirent par gagner le cinquième étage pour y passer une ultime nuit. Le lendemain matin, Hector se leva de bonne heure, descendis au dortoir rassembler ses maigres affaires et remonta pour dire au revoir à l'homme qu'il aimait. Ce dernier dormait encore. Hector se pencha et déposa un baiser sur son front. Achille ne dormait pas, il pleurait. Il sanglota :

- Tu vas me manquer Hector...

- Toi aussi Achille.

Les deux jeunes hommes s'étreignirent longtemps. Puis, avec un déchirement au cœur, et un regard de la part d'Achille qui se grava à jamais dans sa mémoire, Hector se détacha d'Achille et saisi son sac. Il en sortit un paquet et le donna à Achille.

- Où que je sois, je serai toujours avec toi. Prend le, ne l'ouvre que quand je serais parti. Sans ajouter quoi que ce soit, il quitta la pièce.

- Hector ! Achille se précipita vers lui et l'embrasse fougueusement. Je t'aime.

Hector répondit à son baiser, puis il lui adressa un clin d'œil et ouvrit la porte. D'un coup, comme s'il n'avait été qu'un tas de sable et de cendres, Hector disparut. Achille eût un hoquet de surpris en voyant son ami disparaître ainsi. Il réprima un sanglot et rentra dans la bibliothèque pour ouvrir le paquet qu'Hector lui avait donné. Il retira le tissu qui l'emballait en observa l'objet. C'était un cadre ouvragé dans lequel était dessiné à la main un plan de Paris. De l'autre côté du cadre, était écrit :

« Pense à moi, et tu me verra apparaître. J'en possède un similaire pour savoir où tu te trouve. »

Achille sourit. Cela ressemblait bien à Hector. Il serra l'objet contre son cœur et un petit point se dessina sur le plan. Un petit point qui se situait place du Palais Royal, au Magistère...

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