CHAPITRE XV

Mai 1696, Académie de Magie Beauxbâtons...

Clegane McGregor s'était réveillé à l'infirmerie, trois semaines après la seconde tâche. Les elfes avaient fait des merveilles, lui rendant une nouvelle jambe gauche et une main droite de nouveau fonctionnelle. Ivan Karkaroff, que sa petite taille et sa légèreté avaient aidé, avait terminé l'épreuve éreinté, mais entier. Sa joie d'avoir prit sa revanche sur l'écossais égalait son sentiment de triomphe. Achille lui, avait perdu trois doigts à sa main gauche, qu'il retrouva bien vite, mais il dut dormir deux jours et boire un certain nombre de potions infectes. Les scores étaient serrés. Achille menait, avec 80 points, suivi de près part Ivan avec 77 points et enfin Clegane avec 73 points, enragé par sa défaite cuisante.

L'indice de la tâche suivante avait été donné quand ce dernier sortit de l'infirmerie. C'était une énigme. Une drôle d'énigme même. Tellement étrange que personne n'y avait rien comprit, pas même Hector. Un matin de bonne heure, il monta au cinquième étage en quatrième vitesse pour chercher le portrait de Gutemberg.

- Que puis-je faire pour vous, mon jeune ami ? Demanda-t-il quand Hector le trouva en grande conversation avec Merlin et Nostradamus.

- Je voulais vous poser une question. Une énigme, plus précisément, dit Hector dans un souffle.

- Je vous en prie, faites, répondit le portrait avec un grand sourire.

Hector ne se fit pas prier. Il inspira et lut le parchemin :

« Si vous demandez, jamais vous ne saurez. Si vous savez, il suffit de demander. »

Gutemberg, Merlin et Nostradamus se concertèrent un long moment en grattant leurs barbes respectives, avant de hausser les épaules.

- Croyez-nous bien navrés Hector, mais je crains que nous ne puissions vous aider.

- Cela ne fait rien, dit Hector en rangeant le parchemin dans sa poche, je me doutais que vous ne trouveriez pas. En revanche, peut-être pourriez-vous quérir quelque aide parmi les autres peintures ?

- Je ne vous promet rien, mais je questionnerais mes voisins de cadre pour vous.

- Merci, maître, dit Hector en se retournant pour gagner son cours d'Histoire de la magie avant que ne sonne la cloche.

Jamais il n'avait entendu pareille formulation. Tournant les mots dans sa tête, il prit place à côté d'Achille en classe et l'informa de sa tentative ratée en lui rendant son énigme.

- C'est à n'y rien comprendre... murmura Achille. Personne dans toute l'école n'a trouvé de solution.

Hector ne répondit que par un haussement d'épaule. Il ensorcela discrètement sa plume pour qu'elle retranscrive les paroles de leur professeur tandis qu'il continuait de réfléchir. Achille lui jeta un regard de côté en essayant de lire dans son esprit mais Hector le surprit et fronça les sourcils.

- Je t'ai déjà dit que je n'aimais pas ça.

- Je voulais juste savoir à quoi tu pensais. Au cas où cela me donne une piste.

- Puis-je vous aider messieurs ?

Le professeur Fabulus dont les lunettes encadraient un regard plus que réprobateur venait d'élever la voix et les fixait, les bras croisés et ses parchemins flottants devant elle.

- Toutes nos excuses Madame, dit Hector. Nous cherchions a percer le mystère de l'énigme concernant la troisième tâche.

Le professeur Fabulus joignit ses doigts et lança d'un ton sans réplique :

- Vous aurez l'obligeance de ne point étudier autre chose chose que l'Histoire que je m'efforce de vous enseigner.

- En parlant d'Histoire, professeur, osa Hector en se levant, pourriez-vous nous raconter les origines du Tournoi ?

Le professeur Fabulus, désemparée par la question, se figea un instant. Jamais personne n'avait un jour interrompu son cours.

- Je crois me souvenir, continua Hector, qu'il fût créé en 1291...

- 1293. Intervint le professeur Fabulus que les erreurs horripilaient. En 1293, la création du Tournoi fût décrété par le Concile des Directeurs. A cette époque, les directeurs des école d'Europe se sont réunis pour tenter une expérience de collaboration internationale entre sorciers. Le processus de création fut long et pénible, car le directeur de Durmstrang avait beaucoup de condition à l'époque. Mais au final, le Concile s'accorda pour essayer l'année suivante. Dans un premier temps, il n'avait s'agit que d'un échange d'élève, au seins des autres écoles. Dans chaque établissement, les élèves se voyaient confrontés à leurs condisciples étrangers pour choisir le meilleur d'entre eux. Mais après cette première édition, de nouvelles règles furent proposées car chaque école revendiquait la victoire...

Hector avait réussi. Un imperceptible sourire aux lèvres, il se rassit et écouta ce que le professeur Fabulus leur racontait. Il regarda Achille, lui adressa un clin d'œil et ce dernier porta alors son attention sur leur enseignante.

Malheureusement, quand l'heure fût écoulée, Achille et Hector n'avaient rien appris d'utile. Il rangèrent leurs affaires en silence et quittèrent la salle de classe, tout à leur pensées. Soudain, ils furent rattrapés dans le couloir par la voix du professeur Fabulus :

- Coridel, Balthazar, venez ici je vous prie !

Se retournant, ils avancèrent avec appréhension dans le couloir en se demandant quelle punition l'impertinence d'Hector allait leur coûter. Lorsqu'ils parvinrent à la hauteur du professeur Fabulus, celle-ci les invita d'un geste sec a entrer dans la classe. Elle referma la porte et leur fit la moral. Penaud, les deux garçons baissèrent les yeux, en prenant soin de ne rien dire. Quand elle eût terminé, elle se baissa alors à la façon d'une comploteuse et murmura :

- Vous êtes sur la bonne piste, mais vous ne posez pas les bonnes questions.

Sans attendre de réponse, elle les mis dehors et leur claqua la porte au nez. Hector et Achille se dévisagèrent un instant, perplexe...

- Elle sait ! Elle sait ! Criaient Julius et Gontran en arrivant à table. Ils se précipitèrent à côté d'Achille et lui expliquèrent en même temps qui savait quoi.

- Du calme, dit Achille, je ne pourrait pas comprendre si vous parlez ensemble. Alors, Gontran, de quoi s'agit-il ?

- C'est Lestrange, elle sait pour la troisième tâche !

- Elle parle à qui veut l'entendre d'un concours d'énigme avec un sphinx. renchérit Julius.

- Elle dit que c'est son frère qui le lui a révélé ! dit Gontran en frétillant sur son assise, faisant trembler tout le banc.

- Elle a un frère !?  Cela avait échappé à Achille. Il concevait un dégoût si profond pour elle qu'il grimaçait désormais dès qu'on parlait d'elle. Il ne prononçait plus son nom et évitait de la croiser pour ne pas s'énerver. Il ne savait pas ce qu'Hector avait fait après qu'elle l'ai empoisonné, il refusait d'en parler. Mais visiblement, ça n'avait toujours pas suffit à la calmer. Elle avait bien vite retrouvée sa cour, en particulier chez les élèves de Durmstrang.

- Plusieurs même ! Mais lui, il travaille au Magistère, il est son aîné de presque dix ans apparemment, précisa Julius.

Hector regarda attentivement la table où Jade était assise puis se tourna vers Achille et murmura :

- Tu sais à quoi je pense ?

Achille grogna mais hocha la tête, sachant qu'il n'y avait qu'un seul moyen de vérifier. Il ferma les yeux,  dirigea toute son attention télépathique vers Jade et entra dans son esprit, avec difficulté, tant de pensées traversaient la salle du Grand Couvert.

- Alors, demanda Hector. C'est la vérité ?

- Tais-toi, j'essaye d'entendre, répondit Achille avec une grimace de concentration.

Quelques instants plus tard, il rouvrit les yeux et acquiesça lourdement.

- Elle dit vrai...

Sans en demander d'avantage, Hector se leva, et fonça à toute vitesse vers la bibliothèque. Achille et les deux autres n'eurent même pas le temps de lui demander où il allait qu'Hector avait déjà disparu.

Le mois de Juin s'annonçait pluvieux. Le temps était maussade depuis une semaine pleine et ne semblait pas vouloir s'arrêter. Pourtant, malgré la météo, l'ultime tâche du Tournoi des Trois Sorciers se déroulerait sans conteste dans le parc.

Depuis que Jade Lestrange avait commencé à dire de quoi il allait retourner pour la troisième tâche, beaucoup de soutiens étaient allés à la bibliothèque pour trouver des réponses pour leurs champions. Le pauvre maître Scribus ne savait plus où donner de la tête.

Alors que des rumeurs couraient sur les potentiels énigmes et sur les conséquences de la défaite face au sphinx, Achille semblait trop serein pour les autres champions, qui tentèrent par deux fois de lui mettre des bâtons dans les roues. McGregor l'avait abordé lors d'un souper en le menaçant de lui fendre le crâne si il ne lui disait pas ce qu'il fallait faire. Hector avait simplement sorti sa baguette magique et l'Écossais avait alors déguerpi sans demander son reste. Karkaroff avait été plus subtil. Il avait d'abord commencé en disant qu'il savait comment il allait s'y prendre puis avait fait mine de demander à Achille de lui révéler son plan en échange du sien. Achille, qui avait deviné le piège, lui avait retourné la question. Bredouille, le bulgare était reparti en maugréant.

Quand vint l'heure de l'épreuve, Achille s'y rendis en souriant, assuré et déterminé. Les deux autres, un air farouche sur le visage, ne semblaient pourtant pas en mener large. La pluie ayant détrempé le parc, il avait été décidé de réaliser l'épreuve dans le cloître attenant à la salle de repos des professeurs. Protégé de l'averse par un sortilège d'imperméabilité, les élèves le remplirent peu à peu. Au centre, barbotait dans la fontaine, un sphinx grecque. La créature sortit de l'eau et s'ébroua avec grâce. Les trois champions faisaient désormais face à la créature. Celle-ci les fixait avec intérêt pendant que la foule retenait son souffle.

- Trois victoires, et vous remportez cette épreuve. Trois échecs, et je boirais votre sang jusqu'à la dernière goutte. Nous pouvons commencer, dit le sphinx avec une voix fluette de petite fille. Je marche à quatre pattes le matin, deux le midi, et trois le soir. Qui-suis-je ?

- L'homme ! Achille n'avait laissé aucune chance à ses concurrents. Il avait répondu sitôt la dernière syllabe de l'énigme prononcée. Il expliqua sa réponse et remporta cette manche sous les applaudissement de la foule.

Le Sphinx posa sa seconde énigme avec une voix tout à fait différente :

- Elle court toujours, mais ne saurait marcher. Elle a une bouche mais ne saurait parler. Elle a parfois des éclats, mais ce ne sont point de rire. Elle gît au fond de son lit, mais sans pour autant dormir. Qui est-elle ? Cette fois-ci, sa voix était plus adulte, moins amusée, presque menaçante. Mais cela n'impressionna pas Achille. Il répondit encore avant les autres :

- Une rivière. C'est une rivière.

La foule applaudit encore et le sphinx, changeant encore de voix, posa sa dernière énigme :

- Sans voix, pourtant il hurle. Sans ailes, pourtant il voltige. Sans dents, pourtant il mord. Sans bouche, pourtant il murmure. Qui est-il ?

- Le vent !

Cette fois, ce n'était pas Achille qui avait répondu en premier, mais Karkaroff. Le bulgare eut un sourire carnassier quand la manche lui fut accordée. Achille le fusilla du regard l'espace d'un instant, mais quand il vit Hector lui faire un clin d'œil il ne put s'empêcher de sourire. Mais il lui faudrait encore remporter une manche pour gagner, et si il se laissait surprendre de nouveau, la victoire aurait tôt fait de lui passer sous le nez. Il écouta alors attentivement le sphinx qui reprenait avec une voix de grand-mère :

- Pourquoi un corbeau ressemble-t-il à un bureau ?

Perplexe, ni Karkaroff, ni McGregor ne trouvèrent de réponse. Achille chercha pendant un bref moment avant de répondre :

- Cette énigme n'a aucun sens, donc aucune réponse.

Le silence le plus total suivi sa déclaration, puis, une détonation puissante résonna dans le cloître. Les supporters d'Achille hurlaient leurs joies, car le sphinx avait opiné du chef. Achille avait gagné. Il avait tout gagné. L'épreuve, mais aussi le Tournoi. Il fût bien vite porté en triomphe par tous les élèves de Beauxbâtons.

La liesse et la fête du héros durèrent trois jours pleins, si bien que les enseignants eurent du mal à assurer leurs cours. Achille n'eût plus un seul moment pour lui. Il finit, poussé par la fatigue, par se réfugier au cinquième étage, après avoir échappé à un groupe de filles qui le suivaient depuis le matin. Quand il passa la porte de la bibliothèque, il trouva Hector assis dans un fauteuil, sa baguette dans les mains. Les portraits qui l'avaient félicité dans le couloir semblaient avoir désertés leurs cadres dans cette pièce.

- Je savais que tu y viendrai, dit Hector en fixant la fenêtre. C'est pénible d'être sans cesse suivi, non ?

- Oh que oui ! Concéda Achille en riant.

- Soit dit en passant, tu fait très bien semblant de réfléchir. Je suis sûr que le jury a été impressionné.

- Tu parles, je n'ai reçu que des compliments.

- Et qu'y as-tu répondu ?

- Que maître Scribus m'avait été d'un grand secours ! Dit Achille en éclatant de rire, suivi par Hector.

Ils se tinrent les côtes pendant de longues minutes, leurs éclats de rires résonnant dans toute la bibliothèque abandonnée.

- La Légilimancie, ça a quand même du bon... lança Achille, une larme de rire à l'œil en songeant que l'esprit d'un sphinx était aussi lisible que celui de n'importe quel sorcier.

- Tu aurais vu la tête de McGregor, dit Hector en riant. Elle aurait du être mise sur toile !

- Et Karkaroff, tu as vu son expression quand le sphinx a hoché la tête ?

Hector opina du chef en riant. Les deux amis passèrent ainsi leur soirée, fiers de leur manœuvre et heureux d'être tranquille...

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