CHAPITRE XIV
Février 1696, Académie de Magie Beauxbâtons...
Réconciliés, Achille et Hector ne se lâchaient plus, et désormais, Hector se montrait plus protecteur que jamais. Il supportait même la présence de Julius et de Gontran à leur table, pour les avoir à l'œil bien entendu. Ces derniers furent d'ailleurs très utiles pour obtenir des informations sur l'état d'avancement des autres champions.
Dans toutes les coursives de Beauxbâtons, des espions couraient, des adversaires se battaient et les tensions s'exacerbaient au fur et à mesure que se rapprochait la seconde tâche. Celle-ci n'avait pas encore été dévoilée, et les maigres indices qu'avaient reçus les champions ne les avaient mené nulle part. Pour toute indication, chacun des trois concurrent s'était vu remettre une bûche cramoisie et un tout petit morceau de tissu triangulaire. Les théories les plus farfelues avaient germées dans bien des esprits sans que personne ne trouve quoi que ce soit. Et c'est au souper, par un froid soir de Février, qu'elle fût annoncée.
Dans la salle du Grand Couvert, où il régnait une agitation et un raffut tout à fait ordinaire, le professeur Major frappa son verre en cristal avec sa baguette lorsque se présenta une accalmie. Il se leva, fit le tour de la table des professeurs pour ne pas disparaître derrière et se mit face à ses élèves. Tout le monde s'était tût. Les chandelles s'éteignirent soudain, et dans chacune des cheminées de la pièce, une bûche cramoisi, identique que celles délivrées aux champions, prit feu. Le professeur Major avait un grand sourire aux lèvres et le regard posé dans l'une des cheminée. Tour à tour, les têtes se tournèrent vers les foyers et un spectacle assez étrange commença alors. Dans les flammes, dansaient de minuscules êtres, coiffés de petits bonnets triangulaires en tissu. Ils dansaient en se tenant la main, passant d'une cheminée à l'autre, comme si elles étaient toutes reliées. Les êtres de flammes tournaient de plus en plus vite, emmenant petit à petit des élèves dans leur danse endiablée. Bientôt, toute une table fut vidée, ses occupants entraînés dans l'infernal tourbillon. Une chanson s'éleva soudain dans l'air, résonnant de plus en plus fort.
Danse, danse, petit humain,
Viens, viens, donne nous tes mains !
Apprends à connaître ce refrain,
Si tu danse tout ira bien !
Nous, nous, sommes les plus malins,
Alors, alors, ne t'arrête point !
Si tu tiens jusqu'au p'tit matin,
Nous, ne te dévorerons point !
Un rire aigu éclata, et les danseurs enflammés disparurent. Les chandelles se rallumèrent et les élèves entraînés dans la ronde sortirent des cheminées, regagnant leurs places tant bien que mal.
- Que tout le monde se lève, et me suive, lança le professeur Major en descendant de l'estrade des professeurs.
Les élèves, se levèrent, se mirent en rangs par classe puis toute la salle du Grand Couvert s'ébranla, suivant le directeur. Le cortège quitta le château pour gagner le parc. Il faisait nuit noire dehors, les étoiles parsemaient le ciel et la lune brillait par son absence. De la buée sortait de la bouche des élèves et le gel crissait sous leurs bottes trempant le bas de leurs capes. Grelottants, mais excités, ils se dirigèrent vers un immense brasier, dressé au cœur du parc et entouré par les mêmes gradins que pour la joute, mais disposés en cercle. Tous les élèves y prirent place, très vite réchauffés par l'imposant feu de bois autour duquel dansaient déjà les petits êtres, de chair et d'os cette fois. Le corps professoral et les jurys s'installèrent à leurs places et bientôt, il ne resta devant le feu que les trois champions. Le commentateur de la joute se leva, et pointa sa baguette sur sa gorge.
- Vox sonori, dit-il à voix basse.
Sa voix se mêlait à la musique comme si elle allait de pair avec elle. Il parlait doucement cette fois, si bien que certains élèves, hypnotisés par la danse et les flammes n'entendirent même pas les consignes.
- La seconde épreuve de laquelle vous devrez triompher est une épreuve de danse avec des Korrigans. Vous devrez dansez avec eux toute la nuit, faute de quoi ils seraient en droit de vous dévorer un bras, ou une jambe. Vous ne devrez pas montrer la moindre fatigue, la moindre faiblesse, avant que ne pointe l'aube. Sinon... Il laissa sa voix s'éteindre et fit signe aux trois champions de se retourner vers la ronde des Korrigans. Ils s'étaient tous arrêtés, laissant trois espaces pour que les champions se joignent à eux. Quand ils furent tenus par les mains, une douce musique venue de nulle part résonna et ils commencèrent à tourner.
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