CHAPITRE IX
Janvier 1692, Académie de Magie Beauxbâtons...
- Chercheriez-vous quelque chose, jeune homme ? Demanda le bibliothécaire de sa voix douce à un Hector particulièrement absorbé.
- En effet, Monsieur Scribus. Et il se pourrait que vous puissiez m'apporter de l'aide. Répondit Hector en se tournant vers lui, un livre dans chaque main.
- En quoi puis-je vous être utile, monsieur Balthazar ?
- Voilà, dit Hector en rangeant les deux volumes à leur place, il se trouve que je cherche à reconnaître un sort dont je ne connais que les effets. J'ai parcouru la plupart des grimoires traitant du sujet sans rien trouver...
- Auriez-vous l'amabilité de m'éclairer sur lesdits effets, interrogea le bibliothécaire en souriant.
- J'aurais bien du mal à vous décrire cela, répondit Hector en revenant à une table ou s'étalai déjà quelques pages de notes. C'est comme si une chaleur se répandait dans votre crâne, et que vous vous sentiez léger mais observé de loin. Cela vous évoque-t-il quelque chose ?
- Certes oui, répondit le bibliothécaire en se grattant le bouc les yeux au plafond, mais si ce que vous me décrivez vous arrive, il va falloir en toucher un mot au professeur Major.
- Pourquoi cela, monsieur ? Questionna Hector avec curiosité.
- Parce que, mon jeune ami, vous me décrivez-là les effets que produisent la Légilimancie naturelle. Or, aucun élève de ce château n'a été présenté comme tel... Savez vous de qui il pourrait s'agir ?
- Je n'en ai aucune idée, monsieur. Pourriez-vous m'en dire plus sur la Légilimancie ?
Monsieur Scribus se pencha de nouveau vers Hector et lui sourit :
- La Légilimancie est une forme de magie de l'esprit particulièrement rare et extrêmement puissante. Elle permet, entre autres, de pénétrer dans l'esprit d'autrui et d'y lire ses pensées. Mais si vous souhaitez en savoir plus sur ce sujet, je vous suggère l'ouvrage du Maître Gutemberg : Les Grands Pouvoirs de l'Esprit. Vous le trouverez dans la section consacrée aux traités des magies de l'esprit. Deuxième étagère en partant du haut, quatrième rangée, dix-septième ouvrage en partant de votre gauche.
Ces informations en tête, Hector se dirigea vers la section indiquée par monsieur Scribus et monta sur l'échelle pour chercher l'ouvrage en question. Mais après de longues minutes à fouiller l'étagère toute entière, Hector se rendit à l'évidence : le bibliothécaire s'était trompé de rayonnage. Redescendant de son perchoir, il traversa l'allée centrale d'un pas vif en regardant de tous côtés pour trouver monsieur Scribus. Il le trouva en pleine rédaction d'un billet qu'il eût tôt fait de cacher quand le jeune homme se présenta devant lui.
- Avez-vous trouvé ? demanda-t-il avec un sourire.
- Je crains monsieur que vous ne vous soyez fourvoyé. L'ouvrage n'est pas dans l'étagère.
- Peut-être m'a t-il été emprunté. Auquel cas, nous le saurons bien vite. Se levant de son fauteuil, il se dirigea vers un pupitre, de l'autre côté de son bureau, où trônait le grimoire des emprunts. Le bibliothécaire le parcourut un instant des yeux et tourna une page en arrière avant de s'exclamer :
- Ah ! Le voilà. Les Grands Pouvoirs de l'Esprit, emprunté il y a deux semaines par monsieur Coridel. Voilà qui règle la question, monsieur Balthazar. Aussi vous ferais-je savoir quand votre condisciple aura rapporté cet ouvrage.
En remerciant monsieur Scribus, Hector retourna dans les tréfonds des rayonnage pour se consoler avec Druides, une histoire de Traditions de Gwydion Heritum.
Quelques jours plus tard, Hector reçut au déjeuner un parchemin roulé, apporté par un elfe essoufflé qui venait visiblement de courir depuis la bibliothèque pour porter sa massive. Sachant déjà ce qu'elle contenait avant même de l'avoir ouverte, Hector se leva et courut jusqu'à la bibliothèque suivi par l'elfe qui lui couinait de l'attendre.
- Vous avez récupéré le livre ? demanda Hector sans préambules, empli d'excitation.
- Et vous, vous n'avez pas lu mon parchemin. dit monsieur Scribus en souriant, le regard tourné vers l'elfe qui venait tout juste d'arriver.
- C'est que je ne voulais pas perdre un seul instant, monsieur.
Le bibliothécaire eut un petit rire et débarrassa l'elfe du message avant de le congédier. A cet instant, un bruit de pas se fit entendre et un groupe d'élèves entrèrent dans la bibliothèque en bousculant la créature. Quand ils passèrent la porte, Hector sut tout de suite que le Légilimens était de ceux-là. La douce et tendre chaleur s'infiltra dans son esprit avec une force et une vitesse plus prononcée que d'ordinaire. Il essaya de repérer lequel d'entre ses condisciples se trouvait être le responsable, mais quelqu'un le sortit de ses pensées.
- Tiens, je crois que tu voulais ce livre, non ?
Hector tourna la tête se retrouva nez à nez avec Achille, l'ami de Jade. Hector remarqua qu'elle ne l'accompagnait pas, fait assez rare pour être souligné.
« - C'est donc lui qui a emprunté cet ouvrage... Pourquoi ?» songea-t-il en le prenant des mains d'Achille qui le regardait fixement. Ce dernier semblait attendre quelque chose. Il ne disait rien, se contentant de regarder Hector avec un sourire aimable. Mais ce quelque chose ne vint pas. Hector inclina la tête pour le remercier, cala le grimoire sous son bras et sortit de la bibliothèque après avoir inscrit son nom sur le registre des emprunts.
Malgré le poids et la voluminosité du livre, Hector le commença en marchant. Tout en parcourant ses pages, il gravit les étages du château jusqu'à ce que la sensation chaude et douce laisse place à la froideur habituelle de son cerveau. Les yeux invisibles qu'il sentait sur lui avaient déjà disparu quand il s'arrêta pour relever la tête. Regardant de tous côtés, Hector s'étonna de ne pas reconnaître le décor. Ce couloir lui était étranger. Le château était plutôt grand, mais il n'avait pas l'impression d'avoir changé d'aile en chemin. Observant les alentours, Hector remarqua que ce couloir semblait plus sale que les autres, et beaucoup moins vivant. Rien ni personne ne troublait le silence qui y régnait. Les portes des salles de classes étaient toutes verrouillées et quand il s'en rendit compte, Hector comprit qu'il n'était pas censé se trouver là...
Refermant son livre et le calant sous son bras, il avança rapidement pour retrouver l'escalier et redescendre dans les étages inférieurs. Mais il ne trouva aucun escalier. Il se dirigea vers une fenêtre pour évaluer la situation et constata qu'il était plus haut que d'habitude.
- Je suis au cinquième étage... marmonna-t-il en apercevant les silhouettes de ses camarades dans le parc. Mais comment... Il est en principe impossible d'y accéder... Ses marmonnements se tarirent mais un flot de pensées le submergea. Comment avait-il réussi à grimper un étage introuvable sans s'en rendre compte ?
Retournant à la fenêtre il se figura, grâce à des repères visuels, au-dessus de quelle salle il se trouvait.
- Si j'arrive à savoir où je suis par rapport à l'étage d'en dessous, peut-être trouverais-je un escalier... marmonna-t-il en fermant les yeux quelques secondes. Soudain, alors qu'il se concentrait sur l'étage d'en dessous, il la ressentit. Cette douce chaleur. Lointaine, diffuse, mouvante presque. Il pouvait presque s'orienter grâce à elle. Ouvrant les yeux, il fonça droit devant lui pour essayer de se rapprocher du Légilimens. Après tout, ce pouvoir le tirerait probablement de cette inextricable situation. Courant vers cette chance de salut, il heurta de plein fouet une armure en prenant un virage trop serré. Il tomba à la renverse, lâchant son livre et sa baguette dont il s'était saisi. Toute l'armure était disloquée et le heaume roula jusqu'à ses pieds en déversant un torrent d'injures médiévales.
- Pardonnez-moi, dit Hector contrit en rassemblant toutes les pièces en un tas qu'il tenta de réassembler.
- Coquebert ! Chiabrena ! Faquin ! Truandaille ! Sottard ! Maroufle ! Malivolent ! Tonnait le heaume sans discontinuer, ne faisant aucun cas des excuses d'Hector.
Il aurait pu continuer longtemps si une voix, plus forte encore que celle du heaume ne l'interrompit pas :
- Silence Fortevoix ! Taisez-vous donc ! A cet ordre, le heaume se tut et se contenta de grommeler. Navré jeune homme, le Sire de Fortevoix est très irritable et d'une vulgarité sans précédant dans l'histoire de notre noble chevalerie.
Hector se tourna pour voir d'où venait la voix et remarqua dans un tableau un personnage qui lui souriait.
- Maître Gutemberg, pour vous servir. A qui ai-je l'honneur ?
Hector se redressa, épousseta son uniforme et s'inclina.
- Hector Balthazar, Monsieur. En baissant la tête, il remarqua son livre, tombé ouvert sur le plancher. Il s'empressa d'aller le ramasser et de vérifier qu'il n'était pas abimé. Soulagé de le trouver en bon état, il remit ses notes en ordre et les glissa à l'endroit où il avait arrêté sa lecture.
- Mais, dit Hector en se tournant vers le portrait qui avait appelé deux autres armures pour remettre le Sire de Fortevoix en place, vous êtes l'auteur de cet ouvrage !
Il s'avança vers le portrait et lui présenta le grimoire. Maître Gutemberg eut un immense sourire et tendit sa main pour serrer celle du jeune homme. Il semblait avoir oublié sa condition de portrait mais le regard intrigué d'Hector la lui rappela bien vite.
- Vous êtes de ceux qui lisent mes traités ? Je suis touché de l'honneur que vous me faites. Surtout que celui-ci compte parmi mes favoris. Ajouta t-il en faisant une petite courbette.
- Je cherche des renseignements sur la Légilimancie, afin de m'en protéger. Répondit Hector quelque peu gêné.
- Étudier un tel domaine à l'âge qui semble être le vôtre, vous sera compliqué je le crains. Dit Gutemberg. Mais avec une lecture aussi avisée que celle-ci, je suis certain que vous y parviendrez ! Si vous avez besoin, je puis également vous procurer une salle afin de vous entraîner. Plus loin dans le couloir...
Mais le Maître Gutemberg fut interrompu par la cloche qui retentit dans tout le château. Hector se retourna et chercha des yeux une sortie. Le portrait passa dans une autre toile en lui criant :
- Par ici, maître Balthazar !
Sans hésiter, Hector courut pour suivre le portrait qui filait à toute allure. Soudain, il s'arrêta, il était dans un cul de sac.
- Ce mur n'est qu'une illusion. Traversez-le et vous arriverez dans un un escalier qui dessert les autres étages du château.
- Merci, Maître Gutemberg !
- Et si vous souhaitez revenir, adressez-vous au maître De Vinci, au troisième étage. Il viendra me chercher !
- Merci, au revoir ! Dit Hector en s'inclinant avant de traverser le mur et de disparaître dans l'escalier.
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