Bombes d'amour


         La nouvelle session de l'hebdocriture a commencé le 10/07, le nouveau sujet est donc tombé :

          * Narrez le contexte ou ce que représente la photographie (en pièce jointe). Inspirez-vous de la photographie pour créer un texte, vous n'êtes pas obligés de la décrire par exemple, ni même de l'inclure. Vous êtes libres d'utiliser le temps, le point de vue et le genre que vous souhaitez.                                     

PS : l'artiste est Pexels sur Pixabay.

ATTENTION : Ce texte contient une scène de grande violence.

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         Lucille Lacombe est une femme merveilleuse. Elle est l'ange gardien du village. Qui peut bien la détester, elle qui se dévoue tant aux autres ? Depuis aussi longtemps qu'on puisse se souvenir, cette vieille dame se rend chaque jour à l'orphelinat à l'autre bout du village, le panier en osier rempli de confiseries concoctées la veille au soir, à la lueur de la lune. À son arrivée dans la cour de l'établissement, les rires et les acclamations sont toujours au rendez-vous.


_ Madame Lacombe ! s'écrient tous les enfants, alertant les autres de la venue de leur mentor et courant vers elle pour l'aider à marcher.



         L'âge grignote peu à peu son corps endolori, mais jamais elle n'abandonnera son passage quotidien. Cette femme courageuse a prêté serment. Tant que son cœur battra, elle viendra.

          Bien que les villageois admirent sa ténacité, ils ont de la peine. Son corps doit la faire souffrir, mais peuvent-ils l'en empêcher ? Évidemment que non, elle est bien trop déterminée pour cela, et puis... Aider les autres, c'est ce qui fait d'elle ce qu'elle est, sans cela, elle est malheureuse. Ils ne peuvent pas lui prendre ce bonheur au nom de leur sensibilité. Peuvent-ils l'aider ? Non plus ! Lors de sa promenade, elle refuse assurément l'assistance proposée. Elle ne veut pas être un fardeau pour les autres. Elle est forte. Elle veut leur montrer que ça n'est pas demain la veille que la Faucheuse et elle prendront un thé ensemble.

         Cependant, une fois arrivée, elle accepte l'aide donnée, mais uniquement celle des enfants ! Il faut les éduquer, ces jeunes sans parents. Leur montrer la vulnérabilité des êtres humains, leur apprendre à prendre soin de leurs semblables, à développer leur empathie. Elle en avait fait son devoir. Et cela fonctionne. Les enfants sont aimants, la prennent comme exemple.

         En réalité, ils la considèrent comme leur mère, mais jamais ils ne lui diraient. Lorsque la petite Ranna avait osé lui en parler, Lucille les avait grondés.


_ Mes enfants, je ne suis pas votre mère ! Je suis la vieille femme du village qui vous donne des confiseries. Je ne vous ai pas adoptés. Je vis seule. Je n'ai pas de famille. Je vous aime, mais je ne suis pas votre maman. Je suis là pour vous offrir le meilleur, mais ça n'est que temporaire. Ne vous attachez pas à moi car, lorsque nous serons séparés, votre cœur se déchirera. Je ne veux pas que cela arrive. Je veux que vous soyez heureux. Ne versez jamais de larmes pour une vieille dame telle que moi. Attendez sagement, et une mère viendra. Mais je ne serais pas cette personne.


        Les enfants avaient étaient attristés d'entendre de telles choses, et en avaient même voulu à Lucille pendant un temps. Heureusement, ils l'avaient rapidement pardonnée.

         Aujourd'hui ils gardent secret leur amour inconditionnel, le partageant discrètement. Mais n'est-ce pas la chose la plus dure pour un enfant que d'endiguer ses sentiments et ses émotions ? N'est-ce pas trop demander ? La vieille femme n'a pas conscience de créer des bombes d'amour à retardement.

         Les enfants se réunissent le soir, créant ainsi un groupe dans le but de partager et d'extérioriser leur amour, leur dévotion envers Lucille Lacombe, jusqu'à l'idolâtrer. Mais cela ne leur suffit pas. Ils ne peuvent pas le lui dire directement, ils le savent. Ils ne peuvent pas pleurer pour elle, ils en ont conscience. Mais que faire ? Ils ne pourront jamais accepter d'être séparés d'elle. C'est impossible. Ils doivent trouver une solution ensemble. Elle doit rester avec eux pour toujours.

        Une nuit, ils se rendent chez elle. Ils la trouvent endormie, l'odeur du sucre flottant dans l'air. Ils se dirigent vers la cuisine et s'équipent des couteaux les plus aiguisés qu'ils puissent trouver. Ils se placent de part et d'autre du lit, entourant Lucille. Ranna, la jeune fille qui avait trouvé la solution, attrape un mouchoir en soie et l'enfonce grossièrement dans la bouche de la vieille femme tandis que quatre autres de ses camarades maintiennent ses membres contre le matelas.

        Lucille ne comprend pas ce qui se passe, elle hurle mais sa voix n'atteint même pas la salle avoisinante, étouffée par le tissu. Les enfants enfoncent leurs lames dans son corps, tranchent des bouts et les mettent précieusement dans leurs poches. Rapidement, elle se tait. Son cœur ne bat plus. Sa mission est finie. Elle n'aura plus besoin de faire toute la route de sa maison jusqu'à l'orphelinat. Désormais, elle accompagnera les enfants partout où ils iront. Elle ne sera plus fatiguée, elle n'aura plus mal. Les bombes d'amour ont explosé. 

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