♪ Poison - Loic Nottet ♪

Joy se leva, séchant d'un revers de manche rapide les larmes sur son visage, ne prenant pas la peine de s'arrêter devant le miroir de sa chambre pour regarder à quoi elle ressemblait : elle le savait, elle avait l'air d'une épave. Mais a quoi vouliez vous ressembler en perdant la dernière chose qu'il vous restait sur cette terre ?

Elle maudissait quiconque avait décidé de la déranger à ce moment là, un moment qu'elle voulait passer seule en tête à tête avec elle même et ses pensées, les plus sombres d'entre elles.

Elle ouvrit la porte d'un coup sec, le mouvement faisant entrer de l'air qui fit voler ses cheveux. Sa colère s'estompa légèrement lorsqu'elle se retrouva face à Mia, une infirmière fraichement arrivée depuis quelques semaines. Elle avait tout juste dix huit ans, un visage rayonnant et des yeux si expressifs, qui ne tarderaient pas à perdre leurs étoiles au fil des mois passés ici. Joy s'identifiait un peu à elle, dans ses débuts. Elle était tout ce qu'elle avait été : calme, pétillante, pleine de joie. Et maintenant, elle était une personne ternie par la noirceur que renfermaient ces murs.

Le visage de la jeune brune semblait paniqué, inquiet même. Joy se demandait bien quelle était la raison de la venue de Mia. Ce genre de chose était rare tout de même, surtout dans ces moments là.

- Euh.. bafouilla la jeune infirmière, je sais que je ne devrais pas te déranger.. d'ailleurs je suis tellement désolée pour ta mère, mais.. elle sembla hésiter quelques instants.

- Mais quoi Mia ? demanda Joy, d'un ton doux avec légèrement de fermeté. Joy n'arrivait pas à en vouloir à Mia, sa bouille angélique et si innocente faisait d'elle une personne à protéger à n'importe quel prix.

- Il y a un nouveau patient et il est.. il est vraiment bizarre et très violent, déballa Mia d'une traite, les filles sont toutes parties je ne sais où il n'y a que quelques personnes mais malgré ça c'est impossible de rentrer dans sa cellule pour le briefer, il ne veut rien entendre..

Joy fronçait les sourcils, elle ne comprenait pas où sa collègue voulait en venir en lui racontant cela.

- Je pensais que tu pourrais venir nous aider, murmura Mia, tu t'entends généralement bien avec les patients et tu sais comment leur parler pour qu'ils t'écoutent.. mais si tu ne peux pas je comprendrais...

Joy sembla hésiter. Elle aurait pu tuer pour rester seule dans cette chambre pendant des heures et vaquer à ses pensées. Mais en regardant sa collègue et amie, elle se sentait coupable de la voir dans cet état là, elle qui désirait toujours bien faire.

- Je veux bien essayer, déclara Joy, mais je ne suis pas vraiment sure qu'il m'écoute.. En général, il faut leur laisser quelques jours..

Mia haussa les épaules, elle n'en savait rien à vrai dire. Ses tâches principales consistaient à préparer les plateaux repas pour chaque patient en fonction de ses allergies alimentaires et préférences. Il lui arrivait quelques fois de pratiquer des soins, mais c'était rare, elle n'avait pas assez d'expérience pour cela.

- Merci Joy, murmura la jeune femme avec un sourire reconnaissant.

Joy lui sourit faiblement en guise de retour, se regardant cette fois ci dans le miroir pour se recoiffer légèrement et enfiler juste sa blouse de travail. Ceci fait, elle ferma la porte de la chambre derrière elle et emboita le pas de Mia jusqu'au quartier des résidents.

Toutes les cellules étaient fermées, à cette heure là, c'était l'heure du repos pour les patients. Ils bénéficiaient de deux heures de calme où ils pouvaient dormir, lire, ou faire n'importe quoi tant qu'ils ne faisaient pas de bruit. C'était en théorie un moment de calme complet, de silence total. Mais une voix grave venait briser ce moment de sérennité. Des cris venaient de la cellule la plus au fond du couloir. C'était des personnes qui semblaient se disputer, ce qui causait un vacarme inimaginable.

Joy prit une grande inspiration, jetant un dernier regard à Mia avant d'avancer, se retrouvant face à la cellule. Elle se retrouva confrontée à l'homme qu'elle avait rencontré plus tôt dans la journée, celui qu'elle avait bousculé. Il était toujours entouré du personnel de sécurité, qui tentait tant bien que mal de le maintenir à la chaise malgré ses insultes et ses coups à répétitions. Une collègue de Joy se trouvait à ses côtés, tentant elle aussi de le maintenir pour accrocher ses poignets aux bracelets de cuir de la chaise. C'était le seul moyen de lui administrer les premiers soins d'arrivée dans l'établissement. Ce moyen était peu utilisé, mais dès qu'il l'était, Joy et son équipe savaient que le patient leur donnerait du fil à retordre.

L'homme releva les yeux, remarquant enfin la présence de Joy, avant de rire gravement, ce qui fit frissonner cette dernière.

- Vous allez me ramener tout l'hôpital ou quoi ?

Joy leva les yeux au ciel avant de s'approcher du bureau sur lequel se trouvait le dossier du patient. Elle attrapa les quelques pages, s'empressant de découvrir leur contenu. Nate Morris, vingt-sept ans, originaire de Floride. C'était la seule chose qu'elle trouvait sur ces feuilles. Elle était déçue, elle qui s'attendait à plus de renseignements.

- Que fait-il ici ? demanda t-elle à l'intention d'un des hommes de la sécurité

- Il a été transféré d'un hopital du nord qui a pris mystérieusement feu la semaine dernière. Il a fait quelques hopitaux avant de rejoindre celui ci.

Joy hocha la tête, travaillant sa prochaine question. Elle voulait cerner le personnage avant de s'adresser à lui à proprement parler.

- Et quel est son problème ? Schizophrénie, bipolarité ?

- Un peu de tout, murmura l'autre agent, ce gars là est un malade.

- Pourquoi vous parlez de moi comme si je n'étais pas là ? s'indigna faussement le dénommé Nate, continuant de gigotter dans tous les sens.

Joy comprit son jeu, il voulait être le centre de l'attention. Il voulait attirer les projecteurs sur lui. Elle était habituée à ce genre de comportement.

- Alors Nate, dites moi, quelles sont les raisons de votre internement ? demanda Joy en s'approchant de lui, ce qui sembla le calmer.

Néanmoins, la noirceur qui s'empara de son regard à ce moment là lui prouva tout le contraire, il était bien loin de se calmer. Un rictus carnassier prit place sur ses lèvres, ce qui intimida Joy.

- Crois moi ma belle, tu ne veux pas le savoir..

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 ❝ So convinced that now I'm fighting my own self inside ❞