Chapitre 24
- Allez, balance ton idée folle qu'on en termine, geignit DoYoung.
- Tu n'as aucun sens du spectacle.
- Heureusement, j'aurais demandé le remboursement sinon plutôt que de sagement attendre que tu te décides à nous dévoiler l'idée du siècle.
Chittaphon croisa les bras sur sa poitrine, offusqué du manque de tact de son ami. Il avait fait des efforts pour maximiser l'impact de sa mise en scène mais le plus jeune était décidément insensible à tout ce qui ne ressemblait pas de près ou de loin à une console. La prochaine fois il irait louer un déguisement de cartouche de jeu vidéo, il était sûr d'avoir son attention plus de cinq minutes. Il passa une main dans ses mèches argentées, les remettant dramatiquement en arrière tout en relevant le menton.
- Bien, puisque tu es si impatient voilà mon plan.
Le jeune homme surprit le regard curieux de Yuta suspendu à ses lèvres et il sourit, le Japonais était de loin le plus expressif de ses deux amis et il était heureux de le voir aussi concerné par ses affaires, même s'il le lui rendait bien. Chittaphon laissa un large sourire s'étendre sur son visage.
- Je vais camper devant le bar où je l'ai croisé la première fois en espérant retomber sur lui !
Il vit le regard du Japonais se faire sceptique pendant que le plus jeune levait les yeux au plafond, dépité.
- Quoi ? Qu'est-ce qui ne vous plait pas ?
- T'as conscience qu'il était peut-être juste de passage ? Rien ne te dit que tu le reverras là-bas.
- Si tu as une meilleure option je t'écoute, grommela l'argenté.
- Chi, t'es vraiment sûr de vouloir te focaliser sur un mec que tu ne connais même pas ? s'inquiéta Yuta. C'est qu'un défi, n'importe qui ferait l'affaire, t'es pas obligé de te compliquer la vie comme ça.
Chittaphon s'assit sur son sol et tritura le bas de son tee-shirt. Son ami n'avait pas vraiment tort, il en existait des tas d'autres de garçons, mais il ne pouvait s'empêcher de rester focaliser sur celui-ci. Il était du genre à s'attacher très facilement, ce n'était un mystère pour personne, mais cette fois ça allait au-delà d'un simple attachement physique. Il avait vibré lorsque ses yeux s'étaient posés sur la silhouette athlétique de l'homme et son cœur s'était emballé comme un moteur fou. Ce n'était pas faute d'avoir essayé de penser à autre chose, ses pensées revenaient automatiquement au tatoué.
- Rien ne m'y oblige, c'est sûr mais... je crois que j'ai eu le coup de foudre, avoua le styliste.
Il appréhendait un peu la réaction de ses amis, même s'il tentait de le cacher derrière une fausse désinvolture. Il savait par avance que DoYoung n'allait pas comprendre ce qu'il ressentait, le noiraud ne croyait pas à l'amour au premier regard, il avait déjà du mal à croire à l'amour tout simplement. Pour ce qui était du rouge il ne savait pas vraiment non plus, ils n'en avaient jamais parlé et il craignait un peu que les deux se moquent de lui et de son attachement immédiat.
- Le coup de foudre, carrément, s'étonna le Japonais. Je suppose que tu n'as pas vraiment le choix alors, après tout on ne choisit pas pour qui on craque.
- Moi je comprends pas, comment tu peux aimer un mec que tu connais pas ?
La réponse de Yuta le fit sourire et il se sentit plus serein. Il avait au moins le soutien d'un des deux, il ne restait plus qu'à essayer de répondre au plus jeune et essayer de retransmettre correctement ses sentiments. Chose peu facile avec DoYoung qui avait la capacité émotionnelle d'un morceau de granit.
- Ce n'est pas quelque chose qu'on peut expliquer ou comprendre, c'est un truc que tu ressens, tenta d'expliquer Chittaphon. Un jour tu croises une personne et tu te dis que c'est elle, c'est tout. C'est une évidence, tu n'as pas à réfléchir au pourquoi du comment, c'est comme ça.
Il remarqua sans mal que son ami avait du mal à concevoir le concept mais le noiraud n'insista pas et replongea le nez dans son jeu, signe qu'il acceptait l'explication même s'il n'en comprenait pas les subtilités. Devinant qu'il avait perdu l'attention de son cadet et qu'il n'était pas près de la récupérer, tout du moins tant que l'autre n'aurait pas terminé sa partie, Chittaphon se releva pour aller s'installer à côté de Yuta. Sa tête bascula sur l'épaule de son meilleur ami et il se complut dans la sensation de bien-être qu'il ressentait. Le Japonais dégageait quelque chose de rassurant qui le débarrassait de la solitude qui l'étreignait parfois.
Le noiraud ferma les yeux un instant, appréciant pour une fois le silence simplement entrecoupé par les grognements mécontents de DoYoung qui avait des difficultés sur une de ses parties. Il n'était habituellement pas fan du silence, il le mettait mal à l'aise, mais entouré par ses meilleurs amis il se sentait bien. Il ne fallut que quelques secondes avant qu'une image floue ne se profile dans son esprit, s'affirmant par endroit tandis que certaines zones restaient mystérieuses. Si seulement il n'avait pas autant bu ce soir-là, il aurait été en mesure de visualiser parfaitement la beauté fatale qui avait ravi son coeur en un instant.
Malheureusement il était à moitié saoul et occupé à gérer DoYoung qui était pour la première fois de sa vie sous l'emprise de l'alcool, une expérience radicale qui avait l'air d'avoir confirmé le cadet dans sa volonté de ne pas toucher à ce genre de boissons. Chittaphon tenta de se concentrer pour combler les lacunes de ses souvenirs sans réel succès. Il revoyait parfaitement l'enchevêtrement de lignes sombres qui couraient sur les avant-bras dénudés de son bon samaritain, celles de son cou et même le motif qui avait semblé couvrir une large partie de son torse. Il se souvenait aussi parfaitement des boucles noires comme la plus sombre des nuits, brillantes et douces. Chittaphon mourrait d'envie d'y passer ses mains, il était sûr que ce serait comme plonger dans de la soie liquide.
Le Thaïlandais rouvrit les yeux en poussant un soupir d'envie. Il voulait revoir son inconnu et enfin mettre un nom sur le mirage qu'il était. Son cœur battait plus rapidement rien qu'en y songeant et le jeune homme porta une main à sa poitrine, perturbé. Il avait eu des coups de cœur, comme lui faisait remarquer ses amis il en avait dix à la minute sans distinction de genre mais... cet homme, il lui avait jeté un sort. Il ne pouvait en être autrement, jamais auparavant il n'avait été obsédé par une personne qu'il n'avait côtoyé que l'espace de vingt minutes.
- Qu'est-ce qu'il y a Chi ?
L'appelé tourna la tête vers le Japonais avant de soupirer à nouveau.
- Je veux le revoir, avoua le jeune homme dans un soupir désespéré.
Il se laissa tomber sur le matelas en geignant et en agitant ses bras et ses jambes. Yuta finit par s'asseoir sur lui après s'être pris un coup malencontreux et Chittaphon grommela, incapable de bouger.
- Arrête donc de gesticuler, tu me donnes le tournis, maugréa DoYoung en quittant deux secondes son jeux du regard.
- Tu pourrais avoir de la compassion pour moi ! s'offusqua l'argenté. Je souffre, j'ai un énorme trou dans la poitrine là.
- J'peux rien y faire, va voir un médecin.
- J'vais le fumer ce petit...
- Tout va bien se passer Chi, le calma Yuta en lui caressant les cheveux. Tu veux qu'on aille au bar voir s'il y est ?
Chittaphon cessa de se plaindre pour lever ses yeux pleins d'étoiles vers son meilleur ami. Il avait toujours su qu'il était un vrai lui, pas comme ce gosse de riche désagréable et insensible. Il tira la langue au cadet qui ne comprit pas la raison de cette soudaine grimace mais se contenta de hausser les épaules, imperturbable.
- Tu ferais ça pour moi ? minauda le jeune homme.
Il vit le garçon assis sur son dos se fendre d'un rire sincère avant de le libérer et il put se réinstaller correctement sur le matelas. Yuta lui frotta les cheveux et Chittaphon sourit naturellement, il aimait bien quand les gens faisaient ça. C'était certainement l'une des marques d'affection qu'il préférait et une chance pour lui la plupart des personnes qui l'entouraient n'étaient pas avares en démonstrations affectives. A l'exception de SiCheng qui ne tolérait que Yuta et de DoYoung qui ne tolérait juste personne, sauf rares exceptions.
- Si je te le propose c'est que ça me va, au pire on a juste à trainer bébé Do ni vu ni connu, plaisanta le rouge.
- Je vous entends.
- On sait le rabat-joie, râla Chittaphon. Tu ne m'en veux pas d'avoir interrompu ta soirée avec mon frère ?
- Bien sûr que non, c'était prévu en plus alors te stresse pas, le rassura Yuta. Par contre on se verra pas beaucoup la semaine prochaine, je préviens avant que tu ne prévoies des trucs.
DoYoung releva la tête et s'immisça dans la conversation, devançant la question de l'argenté.
- Boulot ?
- Entre autres, j'ai trois mariages en fin de semaine, ça va être chaud et j'ai réservé le seul jour où je serai libre à SiCheng donc...
- Et voilà, noisette est prise du coup ses vieux potes n'existent plus, pleurnicha faussement Chittaphon.
Le rouge lui enfonça un oreiller sur le visage, débutant une bataille générale mêlant effusions de joie et offusquées. Le Thaïlandais vit du coin de l'œil la porte de sa chambre s'ouvrir et le minois curieux de son petit frère se glisser dans l'entrebâillement. Il ne prit qu'une demi-seconde avant de se décider à mêler Shotaro à la guerre sans merci qu'ils se livraient avec les deux autres.
- Mon téléphone ! glapit le noiraud alors que le précieux objet lui échappait dramatiquement des mains.
Chittaphon ne lui laissa pas le temps de demander une pause, l'assaillant sans aucune pitié à l'aide de son arme duveteuse. Il forma une alliance avec Shotaro qui s'était laissé embarquer jusqu'à ce qu'ils demandent tous grâce, épuisés et haletants. Etalé en étoile de mer sur le sol, DoYoung vautré en travers de son bassin, l'argenté leva péniblement une paupière pour savoir ce que faisaient les deux autres. Il remarqua Shotaro en train de lui vider discrètement sa bouteille d'eau pendant que Yuta répondait à un message, les joues rouges.
- Vous en faites un de ces raffuts les garçons, tout va bien ?
Le Thaïlandais tourna la tête en direction de sa mère qui les regardait depuis le pas de la porte et il leva le pouce en l'air, le souffle trop court pour répondre oralement.
- Bon ça va alors, mais faites moins de bruits je vais aller me coucher. Tu devrais en faire autant jeune homme, tu as école demain et il est hors de question que tu roupilles pendant les cours, sourit la mère de famille.
Chittaphon souhaita une bonne nuit à sa mère, de même que les trois autres, et en rassemblant ses forces il fit basculer la masse inerte qui le recouvrait. DoYoung s'échoua dans un bruit mat sur le sol sans que cela ne semble le déranger.
- Maman n'a pas tort, grimaça l'argenté, t'as cours demain.
- Comme si ça t'avait gêné quand t'avais mon âge, bouda Shotaro.
- Je suis pas sûr que ton frère soit un exemple dans tous les domaines, gloussa Yuta en esquivant une nouvelle attaque surprise.
Le plus jeune de la pièce soupira, les sourcils froncés et la bouche affaissée. N'aimant pas voir son petit-frère triste, Chittaphon se releva et entoura ses épaules de son bras.
- Allez, je te raccompagne à ta chambre. Faut que j'aille remplir ma bouteille puisque quelqu'un s'est cru chez lui.
Shotaro sourit innocemment ce qui lui conféra l'aura d'un ange tout juste tombé des cieux. Chittaphon détourna le regard en pestant, il ne savait résister à ces deux grandes billes innocentes. Il abandonna le plus jeune devant la porte de son domaine privé mais se stoppa en entendant ce dernier l'appeler. Shotaro paraissait embarrassé, ses joues étaient rouges et son regard ne décollait pas du sol.
- Chi ?
- Hum ?
- On pourrait parler tous les deux quand t'auras un moment ? Je voulais demander quelque chose et tu es le seul qui peux me donner une réponse je pense...
- Pas de soucis, tu veux en parler maintenant ?
Shotaro secoua négativement la tête et entra dans sa chambre.
- Non c'est bon, maman a raison. Il est tard, je vais dormir, sourit le Japonais avant de disparaître dans sa chambre.
Chittaphon fit la moue, intrigué, et il se força à respecter la décision de son petit-frère malgré la curiosité qui le tenaillait. Shotaro avait l'air d'y tenir alors il fit un effort, son esprit se demandant bien de quoi le plus jeune voulait discuter. S'ébrouant comme à la sortie d'un rêve particulièrement prenant, il se remit en marche pour aller chercher de l'eau. Il sentait qu'il allait avoir du mal à dormir à présent que son cerveau était occupé à spéculer sur deux choses : son bel inconnu et les cachotteries de Shotaro.
Nda :
Et hop, voici le petit chapitre du vendredi, en espérant que vous l'avez aimé :)
Dalion~ Kiss :3
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