Chapitre 53

Yuta se frotta les yeux en se levant. Il n'avait pas très bien dormi la nuit dernière, cherchant à comprendre pourquoi Taeil était aussi réticent à communiquer avec son petit ami. Le japonais s'habilla, jeta un coup d'œil à son téléphone et se rendit dans la cuisine pour préparer le petit-déjeuner.

Il déposa le tout sur un plateau et attendit un peu, regardant les messages que lui avaient envoyés ses fans sur les réseaux sociaux. Il souriait bêtement en lisant des choses positives à son sujet, quand il entendit Sicheng tousser dans la chambre. Il récupéra le plateau et se dirigea jusqu'à la porte, qu'il ouvrit lentement avec le pied.

« Bonjour... ? » dit-il à voix basse. Il vit alors les petits yeux brillants de sommeil de son colocataire le fixer. Yuta lui sourit et posa le plateau sur le lit. Sicheng s'assit lentement et alluma la lampe de chevet avant de poser sa tête sur ses genoux.
Yuta s'installa en face de lui et lui demanda : « Alors, tu te sens mieux ? » Le chinois secoua la tête négativement. « Je suppose que tu ne veux pas essayer de manger quelque chose ? » ajouta le japonais en montrant du doigt le plateau qu'il avait préparé. Et comme il l'avait prédit, son colocataire reproduisit le même geste. « Je ne pensais pas que c'était possible que tu sois encore moins bavard. » Cette plaisanterie ne fit pas rire Sicheng qui se contenta de relever des yeux noirs vers le japonais. Ce dernier déglutit difficilement et conclut : « Je vais aller te préparer ce dont je t'ai parlé hier. Tu verras, ça ira sûrement mieux après. »

Le japonais se mit à cuisiner la recette de sa grand-mère et revint auprès du chinois, qui fixait la photo de ses frères, et lui dit : « Voilà. Bois-ça. » Sicheng reposa la photo à côté de lui et tendit la main pour prendre la tasse.

« - J'appellerai Monsieur Andō dans la soirée si jamais tu ne te sens pas mieux. Il te laissera sûrement te reposer quelques jours.

- D'accord, merci. »

Sicheng porta la boisson à sa bouche. « Je suis censé retrouver le groupe aujourd'hui pour répéter. Ça ne t'embête pas si je te laisse seul l'après-midi ? » Le chinois secoua une nouvelle fois la tête. « Si tu me cherches, je suis dans le salon pour l'instant. » Yuta allait pour partir quand la petite voix de Sicheng l'interpella :

« - Yuta... ?

- Oui ? répondit le japonais en se retournant.

- Tu ne rentreras pas trop tard, hein... ?

- Non, ne t'inquiète pas.

- Merci... Et merci pour ça aussi, ajouta le chinois en reposant ses yeux sur la tasse.

- Ce n'est rien ! »

Yuta avait sourit, heureux d'entendre à nouveau la voix pleine de gentillesse de son colocataire.

Mais quand il sortit de la chambre, il eut une sorte de mauvais pressentiment. Il était soudainement inquiet de laisser son colocataire seul dans l'appartement alors qu'il ne se sentait pas bien. Et le fait qu'il ait regardé avec insistance la photo de ses défunts frères l'avait fait frissonner. Il prit alors un sac plastique dans sa chambre, se rendit dans la salle de bain pour récupérer tous les médicaments qu'il pouvait y trouver, ainsi que tous produits nocifs ou objets coupants. Il fit de même dans la cuisine et descendit son sac au garage.

Il passa sa matinée à travailler sur le concert, pour être sûr de ne pas s'éterniser avec son groupe sur des détails, tendant l'oreille pour vérifier que Sicheng ne faisait pas de bêtises. Il proposa au chinois de manger avec lui le midi, mais celui-ci refusa. Le garçon déjeuna donc seul et annonça à son colocataire qu'il s'en allait, insistant une nouvelle fois sur le fait qu'il ne rentrerait pas tard.

~

Il se dirigea jusqu'à la grande demeure de Xiaojun où son groupe l'attendait déjà. Quand son meilleur ami lui ouvrit la porte, Yuta s'excusa pour son retard et ils se rendirent dans la salle d'entraînement.

« - Je te dis que c'est une mauvaise idée ! s'énerva Jaehyeong.

- Que se passe-t-il ? demanda Yuta en prenant un tabouret pour s'installer à leur côté.

- Seongjin dit qu'on devrait faire le concert le soir des vacances. Mais je pense que ce n'est pas une bonne idée car tout le monde va vouloir quitter la fac rapidement et on aura beaucoup moins de public.

- Pourquoi vous vous prenez la tête sur ça maintenant ? demanda Yuta. On a encore le temps avant de trouver la date. Il vaut mieux qu'on s'occupe d'abord des chansons que l'on jouera et de savoir comment on transportera le matériel. Je verrais la date avec les organisateurs des événements plus tard. »

Tous les garçons hochèrent la tête suite aux paroles de Yuta et le japonais tapa sur ses cuisses en se levant. « Au boulot ! Voyons les chansons qui sont déjà au point et on verra ensuite celles à retravailler. » Les membres acquiescèrent sans discuter et se mirent à travailler trois bonnes heures. Et alors qu'il corrigeaient une de leurs erreurs, la sonnette de l'entrée se fit entendre.

« - Tu attends quelqu'un ? demanda Yuta à l'hôte.

- Pas que je sache. »

Xiaojun quitta la pièce, laissant les membres du groupe continuer à travailler. Il revint quelques minutes plus tard, coupant le japonais dans sa discussion avec Dowoon. « C'est pour toi, Yuta. » Le garçon en question se retourna, étonné, et vit Rosé dans l'encadrement de la porte.

« - Qu'est-ce que tu fais là... ? dit-il en s'approchant d'elle.

- Je lui ai dis de s'en aller mais elle a insisté pour te voir, se défendit Xiaojun.

- Est-ce qu'on peut rester un peu ensemble... ? ajouta la jeune femme d'une petite voix.

- Je suis en train de travailler là. Ça ne peut pas attendre... ?

- S'il te plaît... »

En lisant le regard de détresse de la jeune femme, Yuta souffla et lui fit un sourire : « D'accord, princesse. Mais je ne dois pas rentrer trop tard. » Rosé acquiesça et Yuta se tourna une dernière fois vers son meilleur ami en lui lançant : « Je t'emprunte ta chambre ! »

Quand la porte se ferma, Xiaojun grogna et s'assit sur le fauteuil, les sourcils froncés.

« - C'est un peu tendu entre toi et Yuta ces derniers temps, non ? commenta Wonpil en jetant un coup d'œil au chinois.

- Il m'énerve en ce moment, répondit le garçon.

- C'est depuis l'arrivée de Sicheng, je me trompe ? ajouta Younghyun.

- Ça avait commencé un peu avant, précisa Xiaojun. Depuis que Yang' n'est plus là, il se comportement en idiot. Mais c'est vrai que ça a empiré.

- Il faut se mettre à sa place aussi... voulut ajouter Dowoon.

- Sa réaction n'est pas normale et il va se gâcher la vie s'il continue ainsi. Je cherche à l'aider, mais vous connaissez Yuta. Il joue le mec qui va bien constamment et ne dit jamais ce qu'il ressent vraiment. Bref, j'ai hâte que cette situation change. Soit que Yuta craque, soit que Sicheng retourne en Corée pour toujours. »

Les garçons discutèrent une bonne demi-heure, jusqu'à ce que le japonais fasse son grand retour.

« - Les gars, je suis désolé, je vais rentrer. Je n'ai plus trop la tête à travailler et Sicheng doit m'attendre. Mais si ça vous va, on peut remettre ça le week-end prochain ?

- Pas de problème, Yuta, répondit Seongjin. Tu peux y aller.

- Merci ! On se rappelle dans la semaine ! »

Yuta fit un sourire aux garçons avant de quitter la demeure. Xiaojun serra les dents et regarda le reste du groupe : « Je vous l'avais dis. Vivement que cette situation change. »

~

Yuta ouvrit la porte de l'appartement et se dirigea directement jusqu'à la chambre de son colocataire, où il fut rassuré de le voir en train de bosser sur son ordinateur. En le voyant arriver, Sicheng releva la tête vers lui. « Comment vas-tu ? » lui demanda le japonais. Le chinois haussa les épaules. « Je suis toujours un peu barbouillé mais ça peut aller... Ça s'est bien passé de ton côté ? » Yuta sourit en voyant que le plus jeune se remettait à parler et vint s'asseoir à ses côtés sur le lit.

« - Je t'avais promis de ne pas rentrer tard, tu as vu ? Et ça s'est super bien passé. On progresse vite. J'ai hâte qu'on soit au concert ! Tu viendras nous voir, d'ailleurs ?

- Je verrais..., répondit le plus jeune d'une voix monotone. »

Yuta perdit son sourire et baissa les yeux avant de les relever vers son colocataire, qui avait le regard vide. Il se pinça l'intérieur de la joue et dit, prudemment : « Tu sais, Sicheng. Je pense que tu n'es pas malade. » Le concerné lui lança un regard interrogateur. « Je pense que tu gardes trop de choses en toi et que ton corps est en train de te faire comprendre que tu dois arrêter de faire ça. »

Les yeux du chinois se remplirent de larmes et le japonais poursuivit : « Tout ce que tu intériorises finira par ressortir un jour ou l'autre. Tu ne pourras pas indéfiniment mettre de côté ce que tu ressens, comme si ça n'existait pas. Ça risque de te détruire à petit feu. » Le chinois ferma les yeux et se mit à pleurer silencieusement, sous le regard compatissant de son aîné, avant de bafouiller :

« - C'est dur de garder ça au fond de soi, mais c'est aussi tellement dur d'en parler...

- Je sais, trésor, je sais, dit Yuta d'une voix calme. Mais je suis là si tu as besoin. Tu sais bien que je ne te jugerai jamais.

- Tu veux bien me réconforter... ? »

En disant cela, Sicheng se décala dans le lit, posant l'ordinateur sur le sol, pour faire de la place à son colocataire. Le japonais se glissa à ses côtés et passa son bras autour de ses épaules tandis que le plus jeune posait sa tête contre lui.

« - On est juste ami, Yuta, hein... rappela Sicheng en effectuant son geste, comme si le japonais avait tenté quelque chose.

- Je n'ai jamais eu d'arrières pensées, ne t'inquiète pas. Je veux juste que tu ai une personne avec qui partager le lourd poids que tu as sur le cœur. Les scientifiques pensent que parler à quelqu'un de ses malheurs n'aide pas à se sentir mieux sur le long terme, mais je n'y crois pas vraiment. Une partie de moi reste convaincu que c'est libérateur. Bien sûr, ça ne résout pas le problème, mais ça évite ce genre de choses, conclut Yuta en désignant la bassine maintenant vide. »

Les deux garçons restèrent silencieux, blottis l'un contre l'autre, chacun d'eux perdus dans ses pensées. Un fois que Sicheng se sentit un peu calmé, il dit d'une petite voix tremblante :

« - J'ai tellement de haine en moi, mais je suis incapable de l'exprimer... J'ai mal et j'ai l'impression que rien ne s'arrangera jamais. J'aimerai pouvoir avoir le cœur léger comme à l'époque, simplement profiter des petites choses agréables de la vie. Maintenant, il n'y a plus rien qui me donne envie de sourire...

- C'est sûrement parce que les mauvaises choses t'empêchent de les voir. Il y a forcément des éléments anodins qui te font sourire.

- Tu as raison... approuva le chinois, après réflexion. J'adore voir Yunoh tout excité lorsqu'il a une bonne nouvelle à annoncer. Il a cette petite étincelle dans le regard qui prouve qu'il est fier de lui. Dongyoung est le genre de gars très grognon mais qui peut se montrer très attentionné. Il a peur de s'attacher aux autres, donc il adopte un comportement froid, mais je trouve que c'est ce qui fait son charme. Un Dongyoung de bonne humeur, ça n'aurait aucun sens. J'aime beaucoup aussi le rire de Ten. Il a toujours l'air malicieux, comme s'il préparait une bêtise. Et Taeyong m'impressionne par sa patience et sa sagesse. Je ne lui ai pas souvent parlé, mais lorsque c'est arrivé, il se montrait vraiment rassurant avec moi, et ça me faisait chaud au cœur. Je dois t'embêter avec mes histoires...

- Pas du tout, répondit Yuta. Au contraire ! Tu penses à des choses positives, je ne vais pas t'arrêter.

- Je dois avouer que ton sourire et ta bonne humeur font aussi partie des choses qui m'aide à me sentir bien.

- J'en suis vraiment touché. »

Sicheng ne dit plus rien et sentit les battements du cœur de Yuta s'accélérer légèrement.

« - Taeil a une voix incroyable. Quand il se met à chanter, le monde disparaît totalement autour de nous. Il n'y a plus que lui et moi. Plus rien n'a d'importance. Même quand j'ai vraiment le blues, l'entendre me redonne du courage. Je me sens comme invincible... Ça t'embête si je mets son album, justement... ?

- Non, non, vas-y, l'encouragea le japonais. »

Sicheng s'écarta de l'aîné et se dirigea jusqu'au poste de radio pour y glisser le CD. Puis, lorsque la voix de Taeil résonna dans la chambre, le chinois retourna dans les bras de Yuta.

Ils restèrent de longues minutes à écouter la voix du coréen sans l'interrompre quand Sicheng reprit la parole, d'une voix très basse et tremblante : « J'avais peur de faire ma première fois. Je crois que j'avais tellement lu d'histoires d'amour que j'étais effrayé à l'idée que ça ne se passe pas comme je l'avais imaginé. Mais Taeil a su me donner ce courage. Je voulais vaincre cette peur et je savais que je pouvais me jeter dans ses bras les yeux fermés. Et en même temps, j'allais lui prouver que je me sentais en sécurité à ses côtés, pour qu'il n'ait plus jamais à en douter. Ce soir-là, je l'attendais dans mon lit, dans le noir. J'ai attendu longtemps, très longtemps. Je ne savais pas ce que faisait Taeil, mais je ne voulais pas abandonner. Il avait fait suffisamment d'efforts pour moi. C'était à mon tour. Et là, Taemin est arrivé. Je n'ai vu que sa silhouette, qui était parfaitement identique à celle de mon petit ami. Je n'ai pas osé allumer la lumière. Je pense que j'avais peur de lui faire face, de voir son regard sur mon corps. J'ai entendu qu'il sanglotait alors j'ai essayé de le consoler mais il n'a pas ouvert la bouche une seule seconde. Je lui ai dis que je me sentais prêt et Taeil, euh Taemin m'a embrassé... »

Le chinois s'arrêta dans son récit, hésitant à raconter la suite. Mais il sentit la main de Yuta se glisser dans ses cheveux, lui montrant qu'il l'écoutait et cherchait à le rassurer.

« - Je ne voulais pas décevoir Taeil donc je me suis contenté de l'embrasser en retour. Il m'a ensuite guidé, m'a déshabillé et a glissé ses lèvres sur mon corps. Je n'arrivais pas à me concentrer sur ce qu'il se passait. J'étais à la fois effrayé, nerveux et en train de passer un moment merveilleux et unique... Taem... Il...

- N'ai pas peur de dire ce que tu as à dire, Sicheng.

- Je ne vais pas tout de même te donner les détails...

- Si ça peut te faire du bien, je ne vais pas jouer l'homme choqué.

- Il... m'a fait une fellation... et s'est arrêté un peu avant que je vienne. Je lui ai donné le lubrifiant et un préservatif et il m'a... pénétré... »

Les phrases avaient du mal à sortir de la bouche de Sicheng, qui tremblait et pleurait à nouveau.

« - Comme j'avais mal, il m'a rassuré et a fait des mouvements lents... Il faisait ce truc avec son pouce que Taeil ne faisait jamais. Il le glissait sur mes doigts pour me rassurer et me montrer qu'il était doux. Je ne lui ai pas dis d'arrêter. Je l'ai même encouragé à continuer après... Il... a éjaculé en moi et s'est retiré avant de... remettre mon sexe dans sa bouche pour... Enfin, tu sais... C'est immonde... Ces images dans ma tête sont immondes... Comment j'ai pu me faire avoir aussi bêtement... ?

- Parce que Taemin aurait fait n'importe quoi pour obtenir ce qu'il voulait de toi, Sicheng. Il avait préparé ça justement pour que tu ne te rendes compte de rien. Même s'il le nie, il l'a fait inconsciemment.

- Je me sens coupable...

- Tu n'as pas à l'être, trésor. Ce qu'il t'a fait est dégueulasse. Même si ça ne s'était pas passé ainsi, peut-être que Taemin ne t'aurait pas laissé le choix. Et de toute manière, tu ne peux pas changer le passé. Il faut simplement que tu apprennes à vivre avec. Je ne dis pas que c'est facile, loin de là, mais je suis persuadé que tu y arriveras parce que tu es un battant.

- Comment peux-tu en être si sûr... ?

- Parce que tu es toujours là malgré tout ce qu'il t'es arrivé, et que tu n'es pas seul... »

~

Notre petit Sicheng commence réellement à s'ouvrir ; c'est un premier pas vers la reconstruction ^^

Je vous préviens que le prochain chapitre sera assez sombre mais promis, après, ce sera plus joyeux !

Et merci milles fois pour les 6K, ça signifie énormément pour moi concernant cette fiction ♡♡♡

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