Chapitre 18

Je décide de le rejoindre, je l'ai fait assez patienter. Sur la pointe des pieds, je descends les escaliers. Il est en grande discussion, je tends l'oreille.

- Pourquoi m'appelles-tu ? Dit-il d'une froideur que je ne lui connais pas. Je n'ai rien à te dire... Et que veux-tu que ça me fasse ? Tu n'as jamais été là pour moi, tu m'as toujours poussé à faire les mauvais choix et maintenant que je suis libre, tu voudrais que je fasse machine arrière ? Que je m'emprisonne ? Jamais de la vie, tu m'entends !

Ensuite, il y a un silence.

- Je ne pourrai jamais te pardonner...

Je fais irruption dans la pièce. Je vois contre son corps sa main pendante qui tremble. A l'intérieur, je peux voir le GSM qui subit une pression puisque son poing est serré et ses doigts deviennent rouges.

- Est-ce que ça va ? Dis-je tentant de désamorcer la bombe en lui qui risque à tout moment d'exploser.

- Oui, ne t'en fais pas. Me dit-il avec un simplement mouvement de main.

Puis, il se dirige vers la cuisine. J'aimerais voir son visage, je n'aime pas de le voir si mal. Lorsque je rencontre son regard, je peux voir de la tristesse...Beaucoup de tristesse....

- Tu voudrais m'en parler ? Dis-je essayant de l'aider.

- Non ça ira, merci...

- Tu sais avec mon passé, je suis sûr que ...

Il me coupe la parole.

- Nahèle c'est très gentil de ta part mais je n'ai pas besoin qu'on m'aide. En fait, je n'ai pas envie d'en parler.

En gros, comment dire poliment de ne pas me mêler de ses affaires. Message reçu. Je m'installe sur l'une des chaises qui fait face à la baie de fenêtre. L'endroit est magique presque irréel.

Je me demande comment un policier peut se payer une maison pareille avec un salaire aussi dérisoire. Enfin c'est ce que je pensais car j'entends souvent dans les médias qu'ils sont sous payé, à croire que non. Je repense à ce cauchemar où Elyas me dit qu'on l'aurait probablement tué...

Vu que Caleb est flic, il pourrait peut-être m'aider ? On rouvrirait le dossier, on l'examinerait pour voir si mon intuition est fondée. Après réflexion, je ne vais peut-être pas lui en parler aujourd'hui puisqu'il a l'air tendu.

Avant ça, il faut que je trouve un nouvel appart et que je change mon adresse de là. Je soupire. Cette situation prend une tournure dont je ne connais pas l'issue et j'en suis effrayée.

Se peut-il qu'en fait je sois dans le coma et que tout ceci soit faux ? Non, bien sûr que non, il ne faut pas rêver ; la poisse me colle aux baskets et rien que pour ça, je sais que je nage en pleine réalité.

J'aimerais me bercer d'illusions, de croire que mes actes n'ont pas de conséquences mais je ne peux pas, je dois affronter cette dure réalité qui ne fait qu'empirer de jour en jour.

J'aurais voulu que tout soit si simple, qu'il n'y ait pas d'embûches ou de mort qui jonchent mon parcours chaotique. Mais on ne choisit pas sa vie, peut-être les chemins qu'on emprunte et encore, je n'en suis pas si sûr. Tout est toujours écrit, d'une façon ou d'une autre.

Je me maudits de broyer du noir or que Caleb a besoin de mon soutien. Je tâte le terrain essayant une diversion pour lui redonner le sourire. Après tout ce qu'il a fait pour moi, je lui dois bien ça.

- Qu'as-tu concocté qui sent si bon ?

Il lève son regard ardent vers moi. J'ai l'impression de me liquéfier sur place.

- C'est une surprise.

- J'aime les surprises, dis-je en souriant.

- Alors tu vas être servie avec moi ! Dit-il en me faisant un clin d'œil.

Je n'en doute pas vu le personnage auquel j'ai affaire mais je sens que ce sera révalateur... A moins qu'une nouvelle fois, je fasse erreur...

Je chasse rapidement cette idée de ma tête, je n'ai pas envie de me torturer l'esprit. Cependant, quelque chose d'étrange en moi s'insinue comme une conviction. Peut-être que si je dénoue toute l'histoire avec Elyas, je pourrai enfin me libérer de ce poids et ouvrir mon cœur à nouveau ?

Seule, je méditerai sur le sujet.

- Comme ça tu es un cordon bleu ? Dis-je essayant de chercher un sujet de discussion.

- Tu sais quand on vit seul, on finit par se débrouiller. J'avoue que j'aime la cuisine donc ça m'a un peu aidé... Dit-il en souriant. Je suis sûr que je fais mieux à manger que toi, dit-il en riant.

- Espèce de vantard !

- On pari ?

- Ca suffit avec tes paris, tu ne m'auras plus.

- Allez, soit un peu joueuse, dit-il en me faisant les yeux doux.

Je roule des yeux, il m'exaspère mais il n'a pas tort, j'ai envie de jouer, de me tester.

- Demain je ferai à manger.

- Yes ! Si tu perds, tu restes trois jours supplémentaires.

- C'est d'accord, dis-je en tendant la main.

Il serre la mienne. Lorsque nos doigts se touchent, j'ai l'impression de quitter terre, quelque chose entre nous se passe mais c'est bien trop puissant, bien trop destructeur pour que je le saisisse.

Subitement, j'enlève ma main de la sienne puis me racle la gorge.

- Je vais dresser la table, dis-je histoire d'échapper à son regard ardent.

Il me montre où se trouvent les assiettes, les couverts et les verres. En silence, je dresse la table. J'ai peur que nos regards se croisent et que je baisse la garde.

Demain, j'ai intérêt à gagner, pensais-je, sinon je ne sais pas si je vais tenir trois jours supplémentaires

Je m'installe à table, l'attendant. Il se déplace sensuellement avec les deux assiettes dans ses mains, il se penche bien trop près de moi à mon goût, effleurant mon bras avec son torse, pour déposer l'assiette devant moi.

Je jette un coup d'œil essayant par la même occasion de ne pas penser à ce bras musclé qui m'a frôlé mettant en alerte tous mes sens. Il s'installe en face de moi.

- Tout va bien ? Me dit-il avec un sourire satisfait.

- Oui, oui m'empressais-je de répondre.

- Tu es sûr ? Car tu es vraiment très, très rouge, dit-il en insistant bien sur le « très ».

Je m'empourpre de plus belle.

- J'ai juste chaud.

- Juste ça ? Dit-il avec un sourire coquin.

- Bien sûr, à quoi pensais-tu ?

- A rien...

Je reporte toute mon attention sur le plat qu'il m'a concocté.

- C'est une ratatouille, me dit-il.

Mes yeux passent du plat à lui. Devrais-je lui dire que je n'aime pas trop les légumes ? Non, il risquerait d'être vexé. Je vais prendre sur moi et manger cette...horreur.

- Ca à l'air très bon ! Mentis-je.

Il prend une première bouchée. Je le vois la savourer, ça doit être bon. A mon tour, je prends une fourchette. Certes, je dois dire que c'est mangeable cependant une chose me perturbe...J'ai légèrement l'impression que les légumes ne sont pas cuits...

- Est-ce que tu aimes ?

- J'adore ! Dis-je un peu trop enjouée.

Il plisse les yeux. Je pense qu'il a compris.

- Tu n'aimes pas ?

- Ce n'est pas que je n'aime pas mais...c'est cru...

- Quoi ? Dit-il surprit.

Je lui tends une fourche. Il dépose délicatement et sensuellement ses dents, j'ai un coup de chaud d'un coup. Je le vois mastiquer, il semble partagé.

- Bon, j'avoue c'est...dégelasse ! Je n'ai sûrement pas dû laisser assez mijoter.

- Ce qui est sûr c'est que Remy l'aurait mieux faite que toi ! Dis-je en riant.

- En même temps, c'est un Disney ! Et ça m'étonnerait qu'une souris te fasse une ratatouille, elle mangerait première les légumes puis crotterait dedans !

- Tu es répugnant ! Dis-je tout de même en riant.

- Quoi, c'est vrai !

- De tout façon avec ce qu'on s'est mangé avant, je n'ai plus faim. Je vais aller me reposer.

- Comme tu veux. Dit-il visiblement triste.

Je me lève et commence à débarrasser.

- Non, laisse-moi faire, va te reposer. Avec une journée pareil, tu en as bien besoin.

- Merci.

Je m'approche de lui. Il s'arrête et me regarde. Je peux voir comme de la lave incandescente dans ses yeux. C'est très troublant. Je lui dépose un délicat et chaste baiser sur la joue.

Je peux sentir mon cœur qui bat frénétiquement dans ma poitrine.

J'ai l'envie folle de l'embrasser mais ma conscience n'est pas du même avis, elle sait qu'au final je le regretterai. Docile, je me recule, lui dit un « bonne nuit » rapide et file à l'étage.

Dans mon dos je l'entends soupirer. Serait-ce de joie ou de frustration ? Sûrement unpeu des deux. Je ne peux me résoudre à lâcher prise, j'ai toujours tout calculé, planifié pour qu'il n'y ait aucun imprévu...Et lui, il est arrivé sans crier gare, comme une météorite rebouchant le trou dans mon cœur.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top