Chapitre 5 (9)

TW : Dessin avec du sang, mention de décapitation et grosses blessures

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Anoushka fit un pas dans la pièce, le sang gouttant en petits filets écarlates au sol et le long de ses jambes, formant une flaque à ses pieds. Le sang coulait principalement depuis un sac tenu fermement dans son poings. Elle fit un autre pas, s'immobilisa.

Son regard noir était vide, il n'y avait aucune expression sur son visage. Elle portait une robe lilas dont la tulle s'enroulait en une grande fleur, quelque chose de si élégant et féminin comparé à d'habitude, mettant en avant ses bras fins et forts, et ses longues jambes couvertes de rouges comme le tissus. Ses cheveux rebelles, vaguement coiffés à l'aide d'une épingle en forme de fleur, était agités par le vent glacé du dehors.

Soudain elle jeta le sac au milieu de la pièce. L'esquisse d'un sourire courba ses lèvres sans faire bouger ses yeux le moins du monde. Le silence qui s'était répandu dans la pièce était surréel. Elle inclina la tête :

- Alors, qui va regarder dans le sac ?

Personne n'esquissa un geste, alors elle poussa un petit soupir, si délicat, si léger. Elle s'avança au centre de la pièce, reprit son sac et le tient à l'envers. Un objet sombre et rond tomba au sol avec un bruit sourd et spongieux.

Une tête.

Elle observa les expressions sur nos visages. Surtout le mien.

- C'est Mizuki, hein. Au cas où vous ne l'auriez pas reconnu.

Une énorme balafre coupait son visage en deux la rendant à peine reconnaissable, découvrant de façon obscène les mâchoires et les dents, coupant le nez en deux, éventrant un œil. Le rouge qui s'écoulait de partout faisait de la scène une peinture abstraite macabre, le froid qui m'avait saisit disparut d'un coup. Je ne sentais plus rien, j'étais anesthésiée d'horreur.

Anoushka reporta son expression sur moi.

- Tu es drôlement pâle Lyslas, ça va aller ? Il ne faudrait pas que tu tombes avec ta cheville.

Elle avait l'air tellement... détendue. Comme d'habitude, si à l'aise, si normale.

Violaine qui avait visiblement dégrisé d'un coup, s'écria :

- Mais bordel qui tourne pas rond avec toi !!!


Elle s'avança d'un coup, visiblement prête à en découdre, à la mettre en pièce, une rage sans nom brilla dans ses yeux bruns, mais Cassiopée se jeta à sa taille pour la retenir avec sa maigre force.

- Non Violaine attends !

- Lâche-moi Cassiopée !!

- Elle a un couteau, elle te tuera !

J'ai vite compris que Cassiopée n'avait pas tort. Anoushka releva la main et montra son arme d'un air presque surpris :

- Ah ça ? Je n'ai pas besoin de ça pour tuer Violaine à vrai dire.

Je n'arrivais plus à détacher les yeux du métal dégoulinant.

Son couteau, son couteau, son couteau.

Cela faisait des mois qu'elle se baladait en permanence avec, qu'elle jouait avec. Elle l'avait déjà pointé vers moi à plusieurs reprise sans que je me crois en danger une seule fois, comme s'il ça n'était qu'un jouet inoffensif. J'avais finis par le voir comme tel.

J'avais oublié ce que c'était vraiment. Une arme, un objet de violence, de mort.

Je n'arrivais plus à en détacher les yeux. Est-ce qu'elle avait mutilé, poignardé, décapité Mizuki avec ce couteau ?

Comme pour répondre à ma question silencieuse elle dit :

- Je n'ai pas le droit de le dire mais vous savez tous ce que je viens de faire.

Elle lâcha un petit rire en baissant les yeux sur elle-même.

- Je ne le cache pas très bien en même temps.

Elle essuya le sang sur son visage d'un revers de la main mais celle-ci étant encore plus trempée, elle ne fit qu'en rajouter davantage.

- Je ne me suis même pas débarbouillée.

Royale nous avait rejoint et demanda avec un sérieux effrayant :

- Pourquoi ? À quoi ça sert si tu te dénonces ?

Elle hésita plusieurs secondes, sembla y réfléchir un moment, puis répondit en haussant les épaules.

- On va mourir de toute façon, je n'ai plus envie de me retenir. Je n'ai plus aucun intérêt à le faire.

Sur la dernière partie de sa phrase, elle me jeta un long regard qui me glaça le sang. Un regard qui voulait tout dire « puisque que c'est mort avec toi à quoi bon essayer d'être gentille ».

Puis elle leva les yeux au ciel tout en décrivant un petit mouvement circulaire avec le couteau :

- Et puis soyons honnête, elle nous cassait les pieds celle-là.

- Donc tu l'a tué quitte à te faire éxécuter de façon horrible juste après pour t'amuser ?!

Je n'arrivais pas à y croire, et je n'avais pas envie non plus. Malgré la boucherie sous mes yeux, ça n'était tout simplement pas possible.

Elle renifla toujours aussi nonchalante et expliqua très simplement comme s'il ne s'agissait que d'une banalité :

- Oh je trouverais bien une solution à ce sujet.

J'ai vu Violaine manquer de s'étrangler, elle était à deux doigts d'aller lui faire la peau malgré le couteau de boucher dans la main ensanglantée d'Anoushka.

- Bref, il faut bien que je passe mon heure obligatoire à la fête non ?

Elle jeta un regard interrogateur à Cyclope, indifférent, comme à son habitude. Il lâcha alors :

- La fête est annulée.

- Parfait ! Bon ben je me casse. Vous pouvez venir me chercher mais c'est à vos risques et périls. Je ne vous le conseille pas. Horrible choix de robe d'ailleurs Monokuma.

Sur ces mots elle laissa le sac et la tête sur place, fit demi-tour, et nous laissa en plan.

C'est seulement quand les portes se refermèrent derrière elle que mes jambes ont décidés d'arrêter de me soutenir. Je me suis effondrée comme une poupée de chiffon, incapable de formuler une pensée cohérente. Violaine me rattrapa de justesse, et Cassiopée passa mon bras par dessus son épaule pour me soutenir.

J'aurais voulu pleurer, j'aurais voulu crier, mais rien ne voulait sortir. Je me sentais accablée, amorphe, vidée. Comme si ça n'était pas réel, juste un cauchemar. Mais la tête saccagée de Mizuki et la flaque de sang m'empêchait de me réveiller.

J'avais perdu pied avec ce qui m'entourait, jusqu'à ce que je comprenne que Cassiopée était en train d'appeler mon nom.

- Lyslas, Lyslas !

J'étais assise au sol, toujours sur la piste de danse, elle était agenouillé devant moi, dans sa grande robe verte, ses cheveux détachés, et me secouait, m'appelait, les yeux sur le point de déborder de larmes.

- Quoi...

Je n'ai pas pu formuler autre chose. Le regard de Cassiopée s'illumina.

- Tu es de retour !

- De retour ?

C'est Remington, qui était debout à ma gauche qui expliqua :

- Ça fait presque 20 minutes que tu ne dis rien et que tu fixes dans le vide.

- Ah...

Que dire d'autre ? Je n'avais plus rien à dire. Ma tête était vide. Il valait mieux être vide que l'inverse. Si j'avais été l'inverse j'aurais pu tout aussi bien mourir. Au moins si je restais vide je ne poserais pas de problème. Je ne ferais pas de bruit, je casserais rien, je continuerais vivre sans rien influencer. Comme une ombre. Je serais une ombre.

Soudain Cassiopée se jeta contre mon torse pour me serrer avec toute sa force, elle se mis à presque crier dans mes bras.

- ARRÊTE DE FAIRE ÇA ! S'il te plait !

- Quoi ?

Elle me serra encore plus fort.

- Pitié s'il te plait Lyslas reste avec moi, arrête de... d'arrêter.

Un vague malaise me traversa, comme un courant profond. Je n'aimais pas cette sensation désagréable, voir Cassiopée comme ça me donnait comme un mal de mer, une nausée latente. Ma gorge se noua, et j'ai rendu son étreinte à la jeune femme avant de lui chuchoter, désemparée.

- Je ne sais plus quoi faire Cassi...

- Reste avec moi c'est tout.

Je n'ai rien répondu, je me suis juste accrochée à elle en silence. Peut-être elle aussi, comme Anoushka, était en fait un monstre. Peut-être qu'elle me poignarderait dans mon dos.

Je n'avais plus envie d'essayer de le savoir. Si elle devait m'arracher le cœur je la laisserais faire.

Les autres parlèrent de moi mais je n'ai pas vraiment écouté. Ils réfléchissait à quoi faire. Cassiopée ne lâchait pas ma main. Je n'arrivais pas à détacher mes yeux du centre de la pièce où reposait encore la preuve macabre du meurtre d'Anoushka. Personne n'osait y toucher.

La main de la coiffeuse vint se poser devant mes yeux.

- Arrête de regarder ça. Ce n'est pas à toi de te charger de ça, d'accord ? On connaît le coupable.

Pourtant pour la première fois j'avais vraiment l'impression que c'était mon rôle. Je ne pouvais pas leur dire mes intentions. J'étais sûre que ça ne faisait pas sens. Se dénoncer après un meurtre, commis sur un coup de tête, de façon aussi violente ?

Je ne pouvais pas y croire. J'ai fait le tour des options. Impossible de dire qu'elle se soit suicidé, ça n'est pas des blessures qu'on s'inflige à soit-même. Il me faudrait accès au rapport de Monokuma pour m'en assurer.

Tout le monde était là à la fête mais il aurait été possible de commettre le meurtre, puis se pointer à la fête mine de rien, et peut-être Anoushka avait-elle été forcée de porter le chapeau ?

Je ne savais pas encore pourquoi ou comment, mais après tout pourquoi pas ? Quelqu'un aurait pu faire pression sur elle, la menacer ?

Soudain j'ai réalisé quelque chose. Non tout le monde n'était pas là à la fête. Mis à part Mizuki et Anoushka, une troisième personne n'avait pas fait acte de présence... mais cette personne.

Mais je ne pouvais pas croire non plus que Nikolaï ait pu commettre un tel acte. J'ai tenté de me reprendre.

Non en vérité, « je ne pouvais pas croire » n'était pas une excuse valable, il fallait que je la sorte de ma tête, car il n'y avais personne ici que je croyais capable de faire ça mis à part Mizuki elle-même, et on ne se décapite pas soit même.

Mais malgré tout c'était trop étrange, trop inexplicable pour que ça soit Anoushka. Pas vrai ?

On ne se révèle pas être un horrible tueur de sang froid comme ça sans raison, et si on tue on doit bien avoir un motif ? Et qui donc se révélerait comme ça, de façon aussi volontaire et évidente.

Non non non, c'était quelqu'un d'autre.

Alors qui ? Peut-être Nikolaï.

Cassiopée était avec moi tout du long et elle n'aurait pas pu se battre avec Mizuki. Léo n'en était également probablement pas capable... Et puis il y avait aussi Remington, qui était un peu plus fort physiquement... alors peut-être lui ?

Violaine, Violaine.... C'était possible, mais improbable. Elle était déjà un peu pompette en arrivant à la fête, et elle était arrivée en première. Il faudrait vérifier avec les informations qui seront données par Monokuma.

Il restait juste moi, mais je ne l'avais pas fait....Ou Royal ?

Royale était arrivée en retard, et... Elle aurait sûrement été capable de le faire, elle pouvait tout faire.

Et c'est vrai qu'elle n'était pas toute blanche. Elle avait ses propres crimes dans son passé. Elle était imprévisible...

Mais elle n'avait absolument aucune raison de le faire, elle ne pouvait même pas sortir d'ici en ne se faisant pas prendre...

- Lyslas tu es toujours avec nous ?

J'ai relevé la tête pour tomber sur un groupe soulagée. Peut-être avaient-ils eu peur que je me replonge dans mon apathie.

- Je réfléchissais c'est tout.

Cassiopée s'empressa :

- Non tu n'as pas besoin de réfléchir à ça. Pense à autre chose.

Cette phrase bienveillante me brossa dans le sens contraire du poil.

- Pourquoi ? Tu as peur que si j'y réfléchis je découvre quelque chose ?

Elle eu un mouvement de recul devant le venin dans ma voix. Je me suis immédiatement sentis désolée, mais c'était trop tard. Je voyais dans tout leur regard un mélange de surprise, d'inquiétude, et de choc.

- N-non c'est-c'est juste que je ne veux pas que, enfin, je veux dire-

Remington déclara :

- C'est bon Cassiopée ne t'en fait pas Lyslas est juste sur les nerfs. Peut-être que tu devrais aller te reposer un peu.

Je n'en avais pas du tout envie. J'avais envie de m'excuser, de consoler Cassiopée, mais je savais que je risquais de faire encore plus de dégât par accident. Je n'étais pas dans mon état normal. Et puis c'était une très bonne excuse pour aller enquêter sans qu'il n'en savent rien. Je savais qu'ils n'approuveraient pas que je cherche une autre piste, et que s'ils le découvraient avant que je n'ai de preuve concrète, ils ne me prendraient pas au sérieux au procès.

J'ai laissé retomber mes épaules dans un signe d'abandon et j'ai accepté.

Violaine se porta volontaire pour me raccompagner.

Sur le chemin elle resta silencieuse, mais juste avant que je n'entre dans mon chalet, elle m'interpella :

- Au fait, je voulais te dire...

je me suis retournée vers elle.

- Je suis pas douée pour discuter, mais en ce qui concerne écouter... si t'as besoin de parler à quelqu'un n'hésite pas, okay ?

Je l'ai observé. La fière tatoueuse, sa peau comme une œuvre d'art, celle qui refusait en permanence de laisser marcher sur les pieds, grande gueule, un peu maladroite ou agaçante parfois, avait perdu de son éclat. Sa masse musculaire avait diminué. Ses cheveux avaient poussé, laissant voir sur plusieurs centimètre une chevelure châtain un peu terne. Elle ne les lissait plus aussi consciencieusement et je pouvais voir sous les petites ondulations une chevelure naturellement bouclée. Elle semblait épuisée. Je savais qu'elle luttait pour ne pas complètement plonger.

Au fond je me demande si ce n'est pas elle qui avait besoin de mon aide, besoin de se sentir utile.

Je lui ai faiblement sourit.

- J'y penserais. Merci beaucoup Violaine.

Elle sembla soulagée de ma réponse et repartie en me souhaitant une bonne nuit. Je suis rentrée et j'ai fermé la porte derrière moi. Je suis restée là en silence dans le noir un long moment. Et puis je suis allée dans ma chambre, et je me suis effondrée sans même enlever mes chaussures, épuisée.

Les images tournaient en boucle dans ma tête, le ciel noir et rouge, le froid, le sang, la robe lilas.

Combien ?

Combien de temps encore ici ? Combien de mort encore ?

Quand est-ce que ça serait mon tour ?

Petit à petit la voix du début en moi, celle qui me disait de continuer, de tenir bon, que je sortirais d'ici se faisait de plus en plus faible. Comment continuer d'y croire sans aucune perspective ?

C'était un piège sans porte de sortie.

Royale pouvait continuer d'inspecter, fureter, interroger Monokuma. Le jeu était fait pour ne nous laisser aucune chance.

Je ne savais plus à quoi me rattacher mis à part la peur de blesser Cassiopée.

Toc toc.

Le bruit à la fenêtre me fit relever la tête. J'ai crus que mon cœur s'était arrêté quand j'ai reconnu la silhouette menue d'Anoushka. Elle s'était changée, lavée, et elle était vêtue tout en noir, un manteau épais sur les épaules et des bottes fourrées aux pieds.

Mais si mon cœur s'arrêta un bref instant, ça n'était pas de peur. C'était l'espoir qu'elle vienne tout me raconter, m'expliquer, me dire que c'était faux.

Je me suis rapproché de la vitre. La lune était dégagée et nous éclairait faiblement.

J'ai posé la main sur le rebord de la fenêtre prête à l'ouvrir, et je l'ai regardé un long moment à travers la vitre. Ses yeux noirs d'encre se posèrent sur moi, insondables. Je n'arrivais pas à lire ce qui s'y trouvait et cela me déconcerta. Je n'avais pas l'habitude d'être autant incapable de lire les intentions ou les émotions de quelqu'un sur leur visage.

J'ai déglutit et puis j'ai ouvert la vitre. Elle se glissa à l'intérieur en poussant un petit rire.

- Je le savais. Tu m'ouvrirais.

Mais soudain elle me poussa. Avec ma cheville je perdis l'équilibre et je tombai sur mon lit. Elle ne me laissa pas le temps de réagir avant de me bloquer avec son genoux et de poser doucement, presque tendrement sa lame sur mon cou.

- Je serais toujours impressionnée par à quel point tu es bête et intelligente en même temps.

J'ai serré les mâchoires.

- Tu peux me tuer si tu veux je... je m'en fiche.

Ça n'était pas complètement vrai. Je savais que si Cassiopée me trouvait morte ici demain matin elle ne s'en remettrait jamais, cette idée me brisait le cœur. Les lèvres d'Anoushka se déformèrent en un rictus dégoûté.

- Je sais que tu penses à elle.

- Pourquoi tu fais ça Anoushka, je n'arrive pas à y croire.

Elle releva la couteau, mais n'enleva pas son genoux.

- Je suis venue justement parce que je savais que tu n'y croirais pas. Pourtant c'est bien moi qui l'ai fait.

- Menteuse.

Elle sembla amusée par ma remarque.

- Si prévisible. Je serais bien tentée de te tuer mais bon, j'hésite, la nostalgie me rend trop tendre.

- Pourquoi ?

Elle soupira agacée.

- « Pourquoi, pourquoi ? » Parce que voilà. Parce que si personne ne me choisit alors je me choisis moi-même. Je voulais le faire discrètement, sortir d'ici selon les règles, mais j'ai changé d'avis.

Elle se pencha soudain, replaçant le couteau sur ma gorge.

- Enfin je ne suis pas là pour ça de toute façon. Je suis là pour profiter un peu avant de m'enfuir d'ici.

- Comment tu comptes faire ça ?

- Quoi ? Profiter ou m'enfuir ?

Je n'ai rien répondu. Je n'étais plus sûre de vouloir savoir. Elle me faisait peur, elle me faisait mal.

- M'enfuir, et bien je vais juste tenter par la montagne. J'ai déjà bien assez exploré. Je suis prête. Je suis une survivante. C'est mon truc. Je survis. Et je survivrais. J'ai passé ma vie à survivre malgré tout. Malgré ce que tout le monde voulait. Seule contre tous ça ne m'a jamais dérangé. Seule contre la montagne aujourd'hui.

- Il te poursuivra avec les drones.

- Alors seule contre les drones et la montagne ça sera.

J'ai tenté de la renverser, je ne sais même pas pourquoi. Pour me débattre contre la pure tristesse qui m'envahissait, contre l'horrible sentiment que la personne avec qui j'avais passé des soirées entières n'avais jamais existé, que ça n'était qu'une illusion, un mensonge.

Elle ria et me bloqua encore un peu plus.

- Parfaitement inutile. Mais bref, en ce qui concerne profiter... hm, j'hésite encore. Je pourrais te tuer certainement, ce serait si ironique de finalement le faire après avoir tant blagué à ce sujet.

J'étais si bête, si bête, je me sentais si ridicule, si faible, si stupide.

J'ai serré les dents, j'étais trop fatiguée, je n'en pouvais plus, je ne pouvais pas me débattre plus. J'ai ouverte la bouche pour crier, pour laisser sortir tout ce qu'il me restait.

Je ne voulais pas mourir, pas vraiment. Il restait encore en moi ce refus catégorique. Je ne veux pas mourir. Pas maintenant.

Elle plaqua fermement sa main et écrasa un peu la gorge avec son autre bras pour m'empêcher de faire du bruit.

- Calme-toi ou je vais vraiment le faire.

La froideur dans ses yeux noirs me fit arrêter. Mon instinct de survie me dit de ne pas continuer.

Elle sourit en constatant que je ne n'essayais plus rien.

- C'est bien.

Elle frôla ma joue avec son arme, comme si elle hésita encore. J'avais le souffle court, le cœur qui tambourinait dans ma poitrine. Et puis elle rit encore doucement, et se pencha. J'ai retenu ma respiration, prête à sentir la douleur, mais elle passa doucement la main pour découvrir mon front et y posa les lèvres, presque religieusement, et me libéra.

- Je t'épargne pour avoir été gentille avec moi, m'avoir donné ton temps, ta patience et ta confiance. Au revoir Lyslas.

Un instant plus tard elle avait disparut dans la nuit. La dernière image que j'eus d'elle fut sa silhouette vêtue de noir, sautant de ma fenêtre, libre et sauvage. Inarrêtable.


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