Chapitre 1 (10)
Ma réaction fut exactement la même que celle de Léo, je me suis figée, comme changée en pierre, ou plutôt comme un animal traversant la route qui s'immobilise sous les phares d'une voiture lui fonçant dessus, et c'était réellement la manière dont je me sentais : une bête traquée, acculée. Anoushka eut la réaction inverse. Elle a tout de suite rebondit et s'est écrié :
- On a une explication, laissez-nous parler !
Je me suis mordue la langue, Min-ho avait du avoir un problème, il aurait me rester minimum 10 minutes par rapport à ce qu'il m'avait annoncé. Mais à peine Anoushka avait prononcé cette phrase que Mizuki apparaissait derrière Léo et entrait dans la pièce. Elle nous regarda avec ses yeux durs et elle dit sans hésiter une seconde :
- Min-ho, tu avais raison...On a bien fait d'aller voir...
Min-ho s'avança et se mit à côté de Léo. J'ai ouverte la bouche, et j'ai bredouillé de façon pitoyable :
- M-mais non, c-c'est... Min-ho, t-tu vas leur expliquer pas vrai !
Mais il ne réagis pas, et j'ai tendu les vêtements dans une pauvre tentative de rétablir le malentendu :
- On a trouvé la preuve qu'il fallait, regarde !
Mais son visage se plissa dans un air à la fois triste et blessé, et il répondit :
- Je ne comprend pas Lyslas... S'il te plait, je t'en prie, dis-moi que tu as vraiment une explication à ça....
La réalité, que j'avais déjà pressentie, finit de s'inscrire dans mon esprit, et j'ai réellement accepté ce que jusqu'ici j'essayais encore de repousser loin de mes pensées : Min-ho m'avait piégé, trahi, et il était également très probablement le meurtrier d'Anjali. La froideur dans ses yeux indifférent, presque ...amusés, quand je lui ai rendu un regard suppliant me confirma tout cela. C'était un masque que j'avais vu jusqu'ici...
Mizuki s'est rapprochée et m'a agrippé le bras. Elle était peut-être plus petite que moi, mais elle était bien plus forte, et je n'ai pas tenté de résister quand elle m'entraina dehors. Anoushka me suivie, et l'ultime démineuse, en s'adressant à ses deux camarades, demanda :
- On devrait probablement réunir les autres pour parler de ça. Il y a de bonnes chances qu'elles soient coupable mais ça ne coûte rien de prendre ses précautions et de bien vérifier les faits... non ?
Léo approuva sa phrase, et Min-ho, avec un visage dégoulinant de fausse tristesse, donna lui aussi son accord.
Mizuki allait me reprendre et nous pousser en direction de la salle de spectacle, quand soudain une autre main, bien plus menue, attrapa ma main et me tira dans la direction inverse. Emportée par l'élan je me rattrapai, posant un pied devant l'autre, et par réflexe pour éviter de m'écraser par terre, je me suis retrouvée à courir derrière Anoushka qui m'avait entrainé dans sa fuite.
Dans le feu de l'action, je n'ai pas eu la présence d'esprit de m'arrêter, la retenir et retourner vers les autres ce qui aurait été probablement plus sage. On a alors zigzagué entre les chalets, poursuivie par Mizuki, qui après un temps de surprise s'était lancée à notre poursuite.
Je n'étais pas la meilleure coureuse du monde, et l'altitude n'aidait pas vraiment, mais Anoushka était un feu follet, irrattrapable, elle prenait des tournants complètement inattendus, réagissait avec une vitesse étourdissante, que je peinai à suivre alors même qu'elle m'emportai dans sa suite, sa main dans ma mienne.
L'adrénaline de la poursuite fit monter en moi un vent de panique. Encore une fois je me sentie comme un animal farouche, traqué. La peur s'instilla dans mon crâne et me retira mes dernières traces de rationalité. Je n'aurais sans doute pas du réagir avec autant de violence à cela, mais depuis... depuis toute petite, j'ai un problème avec... ce genre de... situation. Je perds mes moyens et m'affole beaucoup trop vite. Rien que d'y penser fait monter la panique en moi. Je ne peux me laisser tomber là dedans. Je me concentre aussi fort que possible pour rester connectée à ce qui m'entoure.
Après un moment, je ne saurais vous dire combien de temps, Anoushka a finit par s'arrêter derrière le mur d'un des grands chalets. J'étais complètement à bout de souffle alors qu'elle ne semblait quasiment pas essoufflée, sa poitrine s'agitant de manière brève et rapidement, mais discrète, et elle n'avait pas besoin de respirer bruyamment pour la bouche. Elle a regardé discrètement à l'angle du mur, puis s'est tournée vers moi et a chuchoté :
- Je crois que c'est bon. Peu de chance qu'on nous cherche ici... enfin j'espère...
Je ne savais même plus où nous étions, la ressemblance et la symétrie des bâtiments m'avait complètement perdu.
- On est où ?
- Derrière la salle de spectacle. Ils devraient se retrouver ici, j'espère que du coup ils en oublieront de vérifier cet endroit...
Un peu de mon air retrouvé, je m'exclamai à voix basse :
- Mais qu'est-ce que t'as fait Anoushka ?
Elle me regarda étonnée :
- Nous sortir d'une situation très compliquée ?
Je récupérais petit à petit mon souffle, et sur un ton mi-paniqué, mi-énervé j'ai rétorqué :
- Pour nous mettre dans une qui l'est encore plus !
- Mais non enfin, comme ça, on va pouvoir contrôler un peu le moment où on se montre et...
- On a été prise en plein milieu d'un acte extrêmement louche, et quelle est notre réaction ? Fuir ! Tu connais quelque chose de plus suspect que ça ?!
Elle fronça les sourcils et eu un petit mouvement de tête, l'air surprise devant ma réaction, et dit sur la défensive :
- Ils ne nous auraient pas laisser parler ! Tu as bien vu après le meurtre, Remington et moi, ils nous ont menottés, interdits de parler, s'ils avaient trouvé des foulards ils nous auraient ballonnés, et je suis sûre qu'en cherchant un peu mieux on peut trouver des foulards ! Cette Violaine c'est une tyran, elle va imposer toutes ses décisions et...
- Et maintenant ils nous écouteront encore moins ! Tu te rends compte d'à quoi on ressemblance maintenant ! Et Min-ho va avoir le champs libre pour nous enfoncer encore plus, c'est finis ! On est mortes ! Mortes ! Et tout le monde avec !
Je commençais à perdre le peu de calme qu'il me restait et ma voix montait de plus en plus dans les aiguës et en volume. Anoushka sauta en avant d'un coup et plaqua sa main contre ma bouche. Des voix et des bruits de pas éclatèrent à ...quoi, dix mètres ? Les autres s'étaient effectivement donné rendez-vous dans la salle de spectacle.
Comme elle était bien plus petite que moi, ses boucles délavées me chatouillèrent le nez. Mon cœur battait à la chamade – à cause de la peur bien sûr – et j'ai écouté le bruit des gens se rassemblant à quelques mètres de nous, immobile. Elle sentait le feu et la cannelle, Mike et Violaine parlaient fort, son odeur était très faible mais impossible à confondre, d'autres voix s'y ajoutèrent et j'ai entendu Min-ho parler sans comprendre ses mots, la main d'Anoushka était glacée contre mon visage. Le mélange de sensations était écrasant et j'étais tiraillée entre ce qui se passait à quelques centimètres de moi et de l'autre côté du mur.
Finalement les voix diminuèrent tandis que tout le monde rentrait. On est restée comme ça encore quelques secondes, pour s'assurer qu'ils étaient vraiment rentrés. Puis elle retira sa main et repris, toujours à voix basse, et plus calmement :
- D'accord, je comprends, tu t'inquiètes, mais tout ne nous accuse pas. Regarde
Elle montra les vêtements trouvés chez Léo :
- Si on avait voulu les cacher pour faire accuser quelqu'un, on l'aurait fait chez quelqu'un qui pourrait les porter, logique, non ?
J'ai hoché la tête :
- Or tu es passée chez Mizuki avant, si tu peux décrire son intérieur, c'est une preuve que c'est le cas. Et au choix, autant mettre ces vêtements chez Mizuki ou chez Léo ?
- Chez Mizuki.
- Exactement, donc ça ne fait pas sens, et Min-ho devient bien plus louche soudain.
Ses mots me rassurèrent un peu. Mais j'ai objecté :
- Mais Min-ho était avec Mizuki et Léo... quand est-ce qu'il aurait pu les mettre chez Léo ?
- Ça je ne sais pas, il faut le demander au concerné, mais si Min-ho a inventé ce plan, et le nie maintenant, c'est qu'il avait prévu le coup et qu'il savait que les vêtements étaient là, il a du trouver un moyen de le faire.
Je me suis passée les mains sur le visage. On était en pleine journée et le ciel était plutôt dégagé, et pourtant il faisait très froid. J'ai remarqué qu'Anoushka avait à peine une fine polaire sur les épaules. On n'allait pas pouvoir rester comme ça très longtemps.
- Qu'est-ce qu'on fait alors ?
- Je t'avoue que je ne suis pas sûre. Il faut qu'on puisse parler sans qu'ils nous sautent dessus, nous attachent et nous empêchent de nous exprimer....
- Tu crois vraiment qu'ils ne nous laisserait même pas parler... ?
Elle a haussé les épaules.
- Je pense que si on y va comme ça, on va s'embourber dans une conversation où certains feront tout pour nous décrédibiliser, et qu'on perdra si on est pas prêtes.
Je n'ai pas répondu tout de suite, et elle n'a rien ajouté. Finalement j'ai brisé le silence en proposant :
- Et si on... Et si on trouvait quelqu'un qui nous croit pour nous abriter jusqu'au procès, et qu'on en profitait pour... tu sais... comprendre tout ce qui s'est vraiment passé, et se préparer à nous défendre ?
- Elle m'a regardé et a levé un sourcil fin sous les mèches blondes qui lui couvraient le front.
- Tu veux encore faire confiance à quelqu'un après ce que Min-ho vient de faire ?
Je me suis mordue la langue et j'ai regardé mes pieds :
- On ne vas pas rester là dans la neige...
- Je pensais retourner dans un de nos chalets...
J'ai pouffé :
- Mais enfin, c'est là qu'ils nous chercheront en premier !
- Pourquoi tu rigoles !
- Parce que c'est mignon ! Tu es tout le temps hyper méfiante et en même temps tu sors les trucs les plus innocents !
Elle a froncé les sourcils, comme si elle voulait avoir l'air vexé, mais un léger sourire se dessinait sur ses lèvres, qui commençait d'ailleurs déjà à bleuir.
- je crois que je sais chez qui on pourrait aller....
Elle a penché la tête :
- Qui donc ?
- On pourrait aller chez Axel.
Elle a fait un petit mouvement de surprise :
- Axel ? Le blondinet à lunettes ? Pourquoi lui ?
- Il m'a dit que lui, Mélanie et Cassiopée ne me soupçonnaient pas... et que j'étais la bienvenue parmi eux...
Anoushka fit un petite mou, l'air d'y réfléchir :
- Et tu crois que ça tient toujours ? Et que ça s'applique à moi aussi ?
- On peut toujours essayer...
Après un petit moment de réflexion, Anoushka finit par accepter. Ce qui posait un peu problème, c'est que je n'étais pas certaine du chalet d'Axel. Je savais simplement qu'il était entre le chalet restaurant et le chalet de vêtements...
On a fait le grand tour, en avançant tant bien bien que mal que mal dans la neige pour se cacher, s'arrêtant derrière les bâtiments quand on avait peur de se faire découvrir, mais tout le monde, ou presque, semblait être occupé à se disputer dans le chalet principal.
Alors qu'on avait presque atteint l'abri que constituait le chalet restaurant, un bruit attira mon attention, et j'ai tiré Anoushka en arrière.
C'était Aimana, qui passait dans l'allée entre les chalets en courant. Nous étions derrière l'habitation 1. Une fois qu'elle fut passée, alors qu'on s'apprêtait à franchir l'espace entre ce mur et le prochain, qui nous cacherait aux yeux de potentiel passant, j'ai croisé un regard.
Un regard bleu pâle, juste de l'autre côté de la fenêtre du chalet qui nous abritait. Je me suis figée. Anoushka elle, n'avait pas remarqué et fonça jusqu'au mur prochain. Puis elle se retourna et m'interrogea du regard. Mais je fixai le regard de l'autre côté de la fenêtre, n'osant pas bouger d'un cheveux.
C'était la silhouette imposante de Nikolaï qui était posté là, de l'autre côté de la vitre. Ce chalet était le sien et visiblement, il ne semblait pas vouloir prendre part à la réunion avec les autres.
J'avais peur qu'il ne nous dénonce, qu'il ne sorte de chez lui pour nous attraper et nous livrer à la foule accusatrice. Je ne savais pas ce que faisait Anoushka pendant ce temps, mais je pense qu'elle avait compris ce qui se passait, et qu'elle attendait de voir sa réaction, comme moi, pour aviser la suite des actions.
Mais au lieu de ce que je craignais, il ouvrit juste la fenêtre, s'y appuya et me demanda calmement, avec sa voix râpeuse et grave :
- Ça va ?
Il ne savait pas ce qu'il se passait ? J'ai tenté de bluffer et j'ai fait un sourire aussi relaxé que possible :
- Oui, oui tout va bien ahahah....
J'aurais voulu ajouter une explication sur ma présence sous sa fenêtre, mais rien ne me vint. Il répondit alors avec une phrase qui me fit écarquiller les yeux de surprise :
- Il n'y a pas de cachette ici. Juste beaucoup de neige... je peux aider ?
Alors il savait ce qu'il se passait... Mais visiblement, il ne nous croyait pas coupable puisqu'il offrait de l'aide. Je me suis alors permise de jeter un très bref coup d'oeil à Anoushka. Elle attendait l'air inquiète à l'angle du mur du bâtiment d'à côté, éloigné de plusieurs mètres.
J'ai été un peu tentée d'accepter, mais c'était déjà risqué de faire confiance à Axel, alors à lui, dont je ne savais vraiment rien.... Et sans même avoir consulté ma camarade. Alors j'ai décliné poliment :
- C'est très gentil ! Merci beaucoup, mais ça va aller.
Il ne protesta pas, ne dit pas un mot tendit son bras dans ma direction. Je n'ai pas réagis, surprise, et il posa se grosse main sur ma tête pour me tapoter doucement les cheveux.
- Bon courage alors.
J'avoue avoir un peu rentré la tête dans le cou, alors que pourtant il avait été très délicat dans son geste, plutôt à cause du manque d'habitude de contact physique avec les autres. Mais j'étais plus concernée par le sens de celui-ci. Est-ce qu'il me voyait comme une sorte de petit animal ? Ou une enfant ?
Je n'ai pas eu l'occasion de m'interroger plus sur le sens de cela, Anoushka voyant qu'il ne faisait rien pour me dénoncer avait surgit pour me tirer promptement vers l'abri suivant. Je remarquai qu'elle en profita pour jeter un regard étrange à Nikolaï. J'avais toujours un mal fou à déchiffrer ce qui se passait dans ses iris anormalement sombres, mais j'y vis surtout beaucoup de méfiance et peut-être... une pointe de défis ?
Toujours est-il qu'une minute ou deux plus tard, nous étions derrière le chalet numéro 13. Anoushka me chuchota très doucement.
- Le 13 c'est Mike, le 14... Mélanie je crois. Ton ami est dans le 15 ou le 16.
J'ai observé les deux chalets devant nous en hésitant. Aucun signe ne les différenciaient de l'extérieur, et je ne connaissais pas son numéro... J'ai songé une seconde au fait qu'on aurait pu aller chez Mélanie. Mais cela demandait de beaucoup s'exposer, et pas sûre qu'elle y soit.... Axel non plus maintenant que j'y pensais.... Mais il fallait essayer.
- On a qu'à commencer avec le 15, il est mieux protégé...
On a avancé jusqu'à celui-ci en s'assurant que personne ne nous voit. Anoushka était trop petite, alors je me suis je me suis hissée sur la point des pieds pour tenter de voir à travers la petite fenêtre.
Le rideau cachait un peu la vue, mais j'ai réussis à distinguer l'intérieur. Axel... oui c'était bien Axel était à l'intérieur, une autre silhouette était également présente, la chevelure brun foncé, presque noire, et ondulée de Cassiopée était facilement reconnaissable. Ils avaient l'air de discuter, et le morale de Cassiopée semblait au bas fixe, tandis qu'Axel était bien plus énergique.
Soudain l'ultime coiffeuse releva les yeux et nos regards se croisèrent. J'ai sentis mon cœur s'affoler un peu devant le fait d'être surprise ainsi, en mode voyeuse, à la fenêtre. J'ai alors immédiatement fait un coucou de la main. Elle cligna des yeux interloquée, puis elle tira la manche d'Axel d'un coup en disant quelque chose, probablement que j'étais à la fenêtre.
Axel se retourna d'un coup et me regarda lui aussi avec surprise. J'ai recommencé mon coucou de la main, ne sachant quoi faire d'autre. Il se précipita vers la fenêtre et l'ouvrit. Puis se pencha, alors que Cassiopée le rejoignit.
- Mais qu'est-ce que vous faites là ? Tout le monde vous cherche partout !
Cassiopée fit pointer sa tête derrière l'épaule d'Axel, je ne pus m'empêcher de trouver cela mignon alors qu'elle s'exclamait :
- Lyslas ! Lyslas ! Tu n'as rien fait de mal pas vrai !
- Non, je le jure, et Anoushka non plus, c'est un malentendu !
Anoushka ajouta immédiatement sur un ton amer :
- Un piège surtout ! Une manipulation du tueur !
Axel nous proposa :
- Mais venez, entrez !
Il allait se diriger vers la porte pour nous ouvrir, mais Anoushka sauta d'un bond, s'accrocha au rebord de la fenêtre et se hissa à l'intérieur comme si de rien était, puis se retourna et me tendit la main :
- ...je crois que je vais utiliser la porte...
Elle me fit un petit sourire :
- On ne va tout de même pas prendre le risque d'être découverte, la porte est bien trop à découvert. Aller prend ma main !
Et elle plia et déplia un peu ses doigts plusieurs rapides fois dans une invitation. J'ai grommelé, assez peu séduite par l'effort, mais je m'y suis pliée. Je pensais avoir à lourdement me tirer à l'intérieur, mais Anoushka avait plus de force qu'il n'y paraissait et Axel et Cassiopée l'aidèrent et je me suis écrasée sur le plancher vernis de l'intérieur quelques secondes plus tard.
Puis, la fenêtre refermée, on s'est installés et Axel a proposé de faire du thé, café, ou chocolat chaud. On a accepté, et il est parti dans la cuisine. Anoushka était congelée, et avait bien besoin d'une douche chaude, elle a demandé à utiliser la salle de bain et a emprunté quelques vêtements à Axel. Je me suis donc retrouvée assise sur le canapé du salon, à côté d'une Cassiopée à la fois légèrement mal à l'aise et soulagée de nous avoir retrouvé. Elle me demanda avec une voix un peu timide :
- Qu'est-ce qui s'est passé alors ? Les autres nous on raconté qu'on vous avait trouvé dans le chalet de Léo avec une boule de vêtements plein de cendres et de sang... Ils ont annoncé une réunion. Mélanie est partie et elle nous racontera, mais nous on avait pas trop le cœur à les entendre se disputer...
Je lui ai alors raconté de manière aussi concise que possible les évènements. Elle m'a écouté sans rien dire, ses yeux émeraudes fixés sur moi. J'étais encore un peu décontenancée par son apparence, mais chaque fois que je la voyais, je m'y accoutumais un peu plus. Pas que je la trouve moins jolie, mais disons que cela me faisait moins perdre mes moyens.
- C'est Min-ho alors... Je n'arrive pas à y croire !
Elle se rongea un ongle en faisant tressauter son genou, visiblement les nerfs à vif. Même en disant ces mots là, elle ne remis pas en cause ma version de l'histoire et je ne sais pas comment exprimer à quel point cela me réchauffa plus que le feu qui crépitait dans la cheminée en face de nous.
Sans y penser, j'ai attrapé son poignet pour délicatement enlever son ongle d'entre ses dents. Je n'avais pas fait attention à mon geste, ayant agit par réflexe. En constatant ce que je venais de faire, j'ai retiré brutalement ma main en m'excusant. Elle répondit avec un petit sourire désolé :
- Ne t'excuse pas, tu as raison, il faut que j'arrête de faire ça, c'est juste.... tout ce stress... Ce n'est pas que je n'ai pas l'habitude, mais là c'est un autre niveau.
Cela se voyait, son visage était crispé, ses traits tirés, ses ongles quasiment inexistants, et elle faisait encore tressauter son genoux, malgré tout elle me fit un pâle sourire. Elle avait l'air épuisée, à bout de nerf, et terrifiée. Elle reprit :
- Pardon Lyslas si... si des fois j'ai l'air distante...Ce n'est pas que je suis hypocrite. Je ne voulais pas te donner l'impression que je me fichais de toi ou que je ne te faisais pas confiance, je ne suis juste... pas très courageuse...
Elle a baissé la tête.
- Je n'ai pas fait dans ma vie tout ce que je voulais faire... en fait je n'en aie même pas effleuré le début, alors tu sais... j'ai peur de mourir comme ça, dans cette montagne, loin de tous mes proches, avant d'avoir accomplit quoi que ce soit... j'aurais trop honte.
- Honte ? Mais de quoi ? Ce n'est pas toi qui nous a réunis ici pour nous forcer à faire ce... ce... Jeu de taré.
Elle lâcha un rire très léger, mais pas vraiment joyeux, plus nerveux qu'autre chose :
- Non mais... Tu crois en Dieu Lyslas ? la vie après la mort ?
J'aurais voulu lui faire plaisir en lui disant que oui, car visiblement elle en parlait car elle y croyait, mais je lui ai dit la vérité :
- Pas vraiment... non.
- Moi si, et j'ai honte à l'idée de gâcher la vie qu'Il m'a offert. Comment est-ce que mon âme pourrait être en paix si je mourrais dans des conditions aussi...aussi....
Elle n'arriva pas à terminer sa phrase, sa voix se craquela et je la vit tenter de retenir ses larmes.
- Pardon, je ne fais que pleurer, c'est pitoyable, je sais....
J'ai tenté de la réconforter :
- Mais non, c'est normal de pleurer dans cette situation...On va s'en sortir, on va y arriver...
- C'est ce qu'on dit, mais tu sais très bien que les chances sont extrêmement tenues... Ce n'est pas la première fois que quelque chose comme ça se produit tu sais...
- Comment ça quelque chose comme ça ?
- Je veux dire ce jeu sadique... L'affaire n'est pas encore très connue, c'est trop récent, mais ça ne saurait tarder... Crois-moi, ça ne s'est pas bien passé, et il y a eu plus de morts que de survivants...Et de ce que j'ai vu, je ne sais pas le sort desquels j'envie le plus... Enfin, je n'en sais pas beaucoup plus...
Elle inspira profondément :
- J'espère qu'on s'en sortira mieux... mais je ne crois pas qu'"on s'en sortira" tous, ni sans séquelle, et j'ai....
Sa voix commençait à se hacher de sanglot :
- ....J'ai vraiment vraiment peur...
Ne sachant quoi faire, j'ai juste posé ma main sur son épaule, je l'a vit hésiter à peine une seconde, puis elle m'entoura de ses bras à la cherche d'un câlin, que je lui offrit en silence.
Soudain le canapé rebondit un peu quand Anoushka qui revenait de sa douche se laissa tomber lourdement à côté de nous. Elle avait un pull dans une teinte cannelle (qui collait assez bien avec son odeur, me suis-je fait la remarque), trop grand pour elle, qui baillait un peu au niveau du col, et dont elle n'avait remonté qu'une seul manche. En dessous elle avait un pantalon marron foncé en toilé épaisse, avec des coutures bleu ciel et rose dessinant des motifs de fleurs sur le tissu, lui aussi trop grand mais qu'elle avait ourlé. Ses cheveux mouillés avaient l'air plus sombre et collaient sur sa nuque et son front, dégageant plus son visage que de coutume.
Sans nous jeter un regard ou faire un commentaire, l'air calme et indifférent qui la caractérisait si bien, elle lança sur un ton ferme et déterminé :
- Bon, c'est pas tout ça, mais je crois qu'on a un procès à préparer. Et ça va pas être évident de se défendre, alors on ferait mieux de s'y mettre.
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