Chapitre 26
"Les pensées peuvent vivre longtemps comme les nébuleuses qu'un rien, un jour, cristallise." - Pierre Dehaye
Hier, après notre rendez-vous, j'ai tenu à raccompagner Taylor jusqu'à la porte de chez elle, me disant que peut-être, trouverais-je sur le chemin le courage de faire que que je n'ai osé faire plus tôt, c'est-à-dire l'embrasser.
Je ne sais pas ce qui me prend, ce n'est pas compliqué, pas besoin de cours pour ce genre de choses. J'avais juste à me pencher légèrement, poser ma main dans le creux de son dos, déposer délicatement mes lèvres contre les siennes et nous nous serions tranquillement laissés aller, livrés l'un à l'autre.
Mais c'est Taylor et le fait de me dire qu'elle aurait dû être la Jen que j'ai connu me bloque. Parce que oui, je suis maintenant certain que Taylor est la fille génétique des Hardee, je ferais en sorte de lui demander son groupe sanguin, afin d'avoir ma preuve irréfutable. Si elle est du groupe O, ça signifiera qu'elle et Jen on été échangées. Comment et pourquoi? Resterons alors les deux seules questions qu'il me faudra encore élucider.
J'ai sûrement trop de choses en tête pour me laisser aller comme ça et plus j'avance et moins j'ai envie de faire de mal à Taylor. Elle n'a déjà pas une grande confiance en la gente masculine et ça ne risque pas de s'arranger avec moi, pourtant, elle sera inévitablement un dommage collatéral. Et puis, je crois qu'elle mérite de connaître la vérité... je ferais en sorte qu'elle souffre le moins que possible, je m'en fais la promesse.
Je sors de la salle de bain et mon frère sort de sa chambre au même moment. Il porte encore son pyjama alors que je suis presque prêt à partir.
— Tu veux que je te dépose? Il me demande en bâillant.
— Je veux bien merci.
— Au fait! Tu sais que les Warriors viennent jouer contre les Kings ce soir? Brandy a réussi à dégoter trois tickets d'entrée.
— Comment ça se fait? J'ouvre les yeux.
— Son père travaille à la mairie. Il lève les yeux au ciel. C'est l'adjoint au maire.
— Tu chasses dans la cours des grands! Je me moque.
— Je l'ai su après trois mois de relation, il hausse les épaules. Il y a trois tickets, un pour Brandy, un pour moi et un pour toi.
— Je verrai, mais je crois que ça dépend aussi de Taylor.
— Mmh Taylor, il fait la danse des sourcils.
Je rigole en secouant la tête et il part s'enfermer dans la salle de bains.
En attendant qu'Austin finisse de se doucher, je m'installe sur mon lit, avec le journal de Jen sur les jambes. J'ai bien avancé sur ma lecture et ai déjà fini avec la période collège, d'une part parce que selon ses dires elle avait égaré son journal pendant près d'un an et demi et d'autre part parce qu'elle n'y a pas écrit grand chose.
Je vois la date et je sais que ça ne présage rien de bon.
"27 Novembre 2015,
JE DÉTESTE MILES, DU PLUS PROFOND DE MON CŒUR JE VEUX QU'IL CRÈVE CE VIEUX CON!
Pardon cher journal, j'en oublie mes bonnes manières. Mais je ne regrette aucun de mes mots parce que c'est juste la putain de vérité. Je regrette de l'avoir appelé mon meilleur ami, je regrette de lui avoir dit qu'il est la personne que j'aime le plus sur Terre, parce qu'il ne le mérite pas merde. MILES BELL N'EST QU'UN VIEUX CON DE PREMIÈRE CATÉGORIE.
Hier tout allait bien, enfin ça c'est juste parce qu'il me mentait. Notre prof principal l'a retenu après le cours parce que Miles est délégué de classe, alors je l'attendais calmement dans le couloir. C'est là que Meredith, une fille d'un an de plus que nous, m'a vu et m'a prise dans ses bras. Je lui ai souhaité un joyeux anniversaire et elle m'a dit que c'était dommage que je ne puisse pas venir à la soirée qu'elle organisait en son honneur. Je lui ai répondu que je ne savais pas qu'elle le fêtait et elle m'a dit que si, qu'elle avait dit à Miles de me faire passer le message et qu'il lui avait répondu quelques jours plus tard que j'avais une visite de contrôle à l'hôpital au même moment. Et puis elle est partie vers son cours suivant. Quand Miles est sorti de la salle, je lui ai demandé s'il avait des plans pour le soir, il m'a certifié qu'il devait se rendre au café de son père, pour l'aider à faire les comptes blablabla...
Le soir, j'ai pris un bus et je me suis rendue chez Meredith. La musique était forte et puis une odeur d'alcool additionnée à une odeur de cannabis me piquaient les narines. Il y avait beaucoup de monde, mais c'était des dernières années en majorité. J'ai cherché Miles un peu partout, cuisine, jardin, salon, mais rien. Alors je me suis rendue vers les chambres, me disant qu'il était impossible que j'y trouve mon (ex) meilleur ami. Parce que malgré ses blagues salaces de bas goût, il a encore sa pureté.
Mais j'ai été conne de penser ça, parce que je l'ai bien retrouvé dans la chambre de Meredith. Il était torse nu, son jean était un peu descendu, je voyais très clairement la moitié de son boxer et Meredith était en sous-vêtements. J'ai crié sans le vouloir et jamais je n'oublierai le regard de Miles quand il m'a vu.
Il était dégoutté, il m'en voulait, mais par hypocrisie il est venu me voir, m'a demandé ce que je fichais là. J'étais vraiment en colère mais il prenait la situation à la légère. Il dédramatisait tout, putain. Il puait l'alcool mais il n'était pas bourré. Je l'ai insulté, lui ai demandé si j'étais comme un boulet pour lui, si c'était pour ça qu'il ne m'a pas informé de cette fête, si m'a présence l'aurait empêcher de s'envoyer en l'air. Il a gardé un silence qui en disait long.
Et puis comme s'il n'était pas descendu assez bas dans mon estime, il a remonté son jean, refait sa ceinture et m'a traînée au rez-de-chaussée. Il me tirait fort par le bras et marchait vite, c'était comme s'il s'en foutait que mon cœur soit fragile. Il cherchait Derek partout et quand il l'a trouvé il lui a exigé de me ramener chez moi. Derek n'était même pas dans son état normal, il avait bu et ça se voyait. Miles a tellement insisté que Derek a cédé et m'a fait sortir de cette fête, permettant à l'autre vieux con de baiser.
En voiture j'avais peur, Derek n'était pas lucide, j'avais peur de faire un accident. Il faut aussi ajouter que j'étais en rognes et que le tout faisait un cocktail explosif pour mon cœur. Je le sentais battre super vite et je le sentais aussi s'essouffler. J'ai tenté de me calmer mais... sans Miles c'était compliqué...
Alors j'ai demandé à Derek de me ramener chez lui. J'ai toujours dit que je ne voulais pas mourir chez moi, je ne voudrais juste pas que mes parents ressentent partout mon absence, je ne veux pas que mes frères se disent que leur grande-sœur est morte à moins de cinq mètres d'où ils dorment tous les soirs.
Il a accepté, précisant que son père était de garde cette nuit... et ce n'est que plus tard que j'ai compris la légitimité de cette phrase.
En entrant dans la chambre de Derek, j'ai sus ce que je souhaitais faire. Je n'ai jamais voulu faire ma première fois sur un coup de tête, mais ce soir là je le voulais vraiment. Miles devrait être content puisqu'il me répétait souvent que je devrais sortir avec Derek, que nous irions bien ensemble, que si je faisais un effort vestimentaire, Derek voudrait bien de moi.
Va te faire foutre Miles, puisque je portais un jean baggy, un sweat et pourtant Derek a tout de même voulu de moi.
C'était plutôt bizarre comme sensation, j'avais des frissons qui parcourraient tout mon corps. Je me sentais protégée dans les bras de Derek, il sait très bien que je suis fragile alors il a pris son temps, vérifiait constamment si j'allais bien.
Alors hier soir cher journal, j'ai perdu mon meilleur ami mais j'ai aussi perdu ma virginité et je ne regrette aucun des deux."
Je ferme brutalement le journal et mes yeux qui se sont embrumés de larmes me picotent. Je n'avais jamais su ce qu'elle avait ressenti ce jour-là... je savais qu'elle avait couché avec Derek, elle ne me l'a pas dit clairement, mais j'avais fini par le deviner. Je ne savais pas que je lui avais fait un jour autant de mal. Je ne voulais pas la blesser... je ne voulais pas qu'elle vienne mais le pire dans tout ça, c'est qu'elle a raison.
Je ne voulais pas qu'elle soit à cette fête parce que je savais qu'il se passerait quelque chose avec Meredith, ça faisaient déjà quelques temps qu'on se chauffait par messages et il fallait bien que les gestes suivent les mots si je ne voulais pas passer pour un loser. Mais je savais très bien que si Jen était là, je n'aurais pas pu me concentrer sur Meredith, parce que dès que Jen est présente je veux passer du temps avec elle, m'occuper d'elle et que je me fous un peu du reste. Déjà à l'époque elle me rendait faible. Nous avions une si forte connexion et j'essayais de la défaire.
Mais la vérité c'est que Jen me détestait... elle est morte en me détestant? Je n'ai pas envie de savoir qu'elle me détestait quand elle est partie. Elle m'avait pourtant prévenu, interdiction formelle de lire son journal. Je ne veux plus jamais lire son journal. J'ai tout gâché... absolument tout.
La salle de bains s'ouvre de nouveau et dans un sursaut, je cache le journal et sèche mes larmes. Austin arrive quelques instants me prévenant de notre départ imminent et le cœur en vrac, je le suis jusqu'à sa voiture.
Je reste silencieux pendant le trajet et c'est la même chose quand mes collègues me saluent. Je m'assois dans les vestiaires du café, soupirant longuement. J'arrive tant bien que mal à vêtir mon uniforme et me rends derrière le comptoir. Je demande exceptionnellement à m'occuper des tâches qui n'incluent pas un contact avec la clientèle, justifiant ma requête par un mal de tête.
Ludovic ne tarde pas à rejoindre la troupe derrière le comptoir alors que je suis occupé à ranger la vaisselle.
— Salut mon pote! Il entame de bonne humeur.
— Salut. Je dis dans ma barbe.
— Alors comment c'était hier avec Taylor?
— Tranquille...
— Pourquoi tu ne l'as pas embrassé?
Je me retourne avec surprise vers lui et fronce les yeux.
— Elles ont fait un débriefe du rendez-vous devant moi. Il hoche la tête. Votre rendez-vous avait l'air sympa, il manquait juste le baiser Miles! T'étais à ça, il montre un écart minuscule avec son pouce et son index.
— Je préfère prendre mon temps.
— Je ne pensais pas que je serais celui à te donner des conseils sur les relations avec les filles, mais il ne faut jamais trop les faire poiroter, elles ont l'impression d'être prises pour des poires sinon! Il pouffe de rire. T'as vu le jeu de mot?
— Très drôle. Je n'esquisse même pas un sourire.
— Quelle bonne humeur... il expire. Il faut que tu trempes ta nouille Miles, je te le dis!
Je ne l'écoute plus, je m'occupe des machines, des pacs de lait, des grains de café, de la vaisselle et ainsi de suite.
Je passe un chiffon sur le comptoir et je la vois. Ses cheveux blonds volent quand elle tire la porte, elle porte une combi-short rouge, sous une veste en jean et avec des converses montantes blanches. Elle a un sourire resplendissant et quand elle me voit, elle me fait un léger signe de main sans perdre son sourire. Comme je ne la lâche pas du regard, elle met ses mains devant son visage, faisant mine de se cacher. Je souris. Je sais ce que je veux.
Elle. Je la veux elle. Je veux qu'elle me fasse totalement oublier les sentiments que j'ai eu pour Jen. Je veux qu'elle trouve la recette, connue juste par Jen et qu'elle me fasse tomber éperdument amoureux d'elle. Je veux ressentir des papillons dans le ventre quand je suis avec elle. Je ne veux plus aimer Jen. Je veux aimer Taylor, Taylor, Taylor. C'est elle qui aurait dû se trouver sur mon chemin, c'est elle que j'aurais dû aimer.
Je dis à mon collègue que je me sens mieux et que je peux le remplacer. Il me remercie et je sers tous les clients jusqu'à ce que ce soit son tour.
— Un latté avec... elle pose son index sur son menton.
— Un latté avec un coocake. Je lui fais un sourire radieux. C'est une part de gâteau aux cookies.
— On part sur ça, elle hoche la tête ravie.
— A emporter. J'ajoute.
— Non sur place, je suis avec Claude et Lou.
— Je prends ma pause dans trois minutes, alors à emporter.
Elle ne rétorque pas et je lui prépare sa commande ainsi que celle de ses deux meilleurs amis. Quand j'ai fini, je lui demande de m'attendre près du portillon, le temps pour moi d'avertir mes collègues et d'enlever mon tablier et ma casquette.
Quand je suis prêt, je me glisse par le portillon, passe discrètement ma main derrière son dos. Nous marchons durant une minute histoire de nous éloigner du café. Taylor buvait son café tout en me jetant des coups d'œil.
— Qu'est-ce que tu voulais Miles? Elle me demande.
— Faire quelque chose, que j'aurais certainement dû faire plus tôt.
Elle incline légèrement sa tête, ne voyant certainement pas où je veux en venir et baisse son gobelet de café. Je la guide doucement pour que nous nous écartions du milieu du trottoir et nous nous appuyons contre un mur en briques derrière lequel se trouve un cabinet dentaire.
— Tu es magnifique.
— Merci, elle rougit instantanément.
Je passe mes deux mains dans son dos et rapproche ainsi nos deux bassins. Je la regarde attentivement, sa peau pure, son nez fin, sa bouche pulpeuse, ses yeux verts. Elle m'observe silencieusement et réduit sans s'en rendre compte l'espace entre nos bouches. Elle fait un hochement de tête à peine perceptible et je finis le travail.
Nos lèvres viennent se rencontrer, d'abord timidement et puis gagnent de l'expérience au fil du temps, mais perdent de leur sagesse quand nos langues rentrent en contact. Je colle d'avantage son bassin au mien et je la sens frissonner contre moi. Dans le feu de l'action, Taylor lâche son gobelet et ça nous force à nous séparer quelques instants.
Nous baissons le regard, une flaque marron claire s'étale au sol, ses converses blanches son tâchées et le liquide glisse sur mes bottes. Je lui demande si c'est grave et elle s'empresse de secouer la tête. Je lui souris avant de sceller à nouveau nos corps entre eux, ainsi que nos lèvres. Elle place ses mains derrière ma nuque et joue avec mes cheveux. Je la retourne contre le mur, caressant ses hanches.
Je suis coupé dans ma lancée quand un klaxon résonne dans la rue, je me retourne et vois un inconnu au volant d'une belle voiture nous faire des signes obscènes.
Je pouffe de rire, Taylor sourit gênée et se recoiffe légèrement. Je pose plusieurs baisers sur sa joue.
— Je dois retourner travailler. J'expire.
— Je dois retourner étudier avec mes amis.
— Tu aimes regarder des matchs de basket? Je lui demande sur le chemin.
— J'adore! Elle s'exclame.
— Tu supportes qui?
— Les Kings, comme tout le monde de cette ville. Elle hoche la tête. Et toi ?
— Les Warriors bien-sûr!
— Dire que je croyais que ça marcherait entre nous... elle expire longuement avant d'accélérer le pas.
— Attends! Je la rattrape. T'es pas sérieuse?
— Non! Elle sourit en levant les yeux au ciel.
Elle dépose un baiser chaste sur mes lèvres avant de pousser la porte du café. Je la suis mais nos chemins se séparent quand je dois me glisser derrière le comptoir.
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Hey!
J'espère que vous allez bien,
Et que ce chapitre vous a plu !
Bonne vacances à vous et puisqu'on ne se reverra pas avant le réveillon je vous souhaite déjà un Joyeux Noël! Profitez bien, n'exploser pas votre ventre de chocolat ou de foie gras!
Je voulais vous écrire une histoire courte pour Noël mais je suis désolée je n'ai pas eu le temps d'écrire assez à cause des cours de la fatigue etc... jsuis désolée ❤️❤️❤️
Cœur cœur ❣️
Noémie =)
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