Chapitre 19
"Que tous les hommes soient frères, c'est le rêve des gens qui n'ont pas de frères." - Charles Chincholle
J'appuie ma main sur la poignée de ma valise et Austin porte son attention dessus. Il cligne des yeux plusieurs fois, me détaille de nouveau en croisant les bras.
— Qu'est-ce que tu fais ici? Il me demande encore perdu.
— Il y a longtemps, tu m'as dit que tu aurais toujours une chambre pour moi si je voulais fuir Corvallis. C'est toujours le cas?
— Ouais... mais c'est pas le bon moment, tu devrais être avec les parents à Corvallis... pas ici. Ils savent où tu es au moins?
— Non, je secoue la tête, pourquoi tu veux que je leur dise où tu te caches?
— Non. Il dit sèchement. Tu peux rentrer, il passe sa main dans ses cheveux, mais avant il faut que je te dise quelque chose...
Il se tait et me fait signe d'en faire de même quand la porte s'ouvre de nouveau. Une jeune femme en ressort, vêtue d'un cycliste de sport et d'une brassière Nike. Elle m'arrive juste à l'épaule. Elle a la peau noire, des cheveux marrons et dorés bouclés rattachés dans une couette haute et des tâches de rousseur sur son nez et ses joues. Elle se sert contre le torse d'Austin et m'observant l'air interrogateur.
— Brandy, je te présente Miles mon petit-frère. Miles, je te présente Brandy ma fiancée.
— Fiancée? Je répète on ne peut plus surpris.
— Salut Miles! Elle a une voix plutôt grave et cassée. Je suis vraiment contente de te rencontrer, Austin m'a tellement parlé de toi, j'ai déjà l'impression de te connaître.
— Pareil pour moi, je mens en scrutant mon frère du regard.
— Austin tu pourrais me raconter encore une fois le jour où vous vous êtes enfuis de l'orphelinat pour assister à la fête foraine? Elle tire sur son t-shirt. C'est mon histoire préférée.
J'écarquille les yeux et m'apprête à la contredire mais Austin m'en empêche d'un regard fermé.
— Pas maintenant Brandy, il l'embrasse sur le front, Miles a fait une longue route et je suppose qu'il est fatigué.
Austin attrape ma valise et la rentre à l'intérieur. J'observe la décoration qui est vraiment simple, les murs sont blancs, la cuisine américaine est design et donne immédiatement sur le salon, composé d'un sofa, d'une télé et d'une table basse sur laquelle sont posés des restes de boîtes de sushis. Nous montons à l'étage, il y a trois pièces, deux chambres et une salle de bains.
Nous entrons dans une chambre, il y a un lit qui est entouré de cartons non-déballés. Austin trouve une petite place pour ma valise et observe la pièce gêné.
— Désolé, c'est le bazar, j'ai pas encore eu le temps de tout déballer et je ne savais pas que tu arrivais...
— T'inquiète, ça me va. C'est toujours mieux que ma chambre à l'orphelinat. J'essaie.
Il hoche la tête, comprenant certainement qu'il me doit quelques explications. Il tourne la tête vers Brandy qui nous observe attendrie.
— Bébé, tu veux bien me ramener de quoi faire le lit s'il-te-plaît, je vais mettre un peu d'ordre pendant ce temps. Il lui demande gentiment.
Brandy hoche la tête en souriant et se retourne jusqu'à la porte. Je la détaille de haut en bas et stoppe mon regard sur ses fessiers musclés et imposants. Elle ferme la porte derrière elle et coupe court à mon spectacle. J'entends un raclement de gorge et je porte mon attention sur Austin.
— Tu ne l'as regardes plus jamais comme ça. C'est ma fiancée, pigé? Il s'agace.
— Comme ça nous avons été dans un orphelinat? Je dis légèrement amusé en m'asseyant sur le matelas nu.
— Officiellement les parents sont morts dans un accident de voiture quand tu avais cinq ans et moi onze.
— Ok et il y a quelque chose d'autre que je dois savoir? Je m'assois en tailleurs.
— Vire tes chaussures de mon matelas, merde Miles! Il me reprend.
— Pardon monsieur j'ai une maison et une femme. Je lève les yeux au ciel.
— C'est ma fiancée, il me corrige. J'y tiens vraiment beaucoup alors ne fais pas tout foirer s'il-te-plaît. Et puis arrête avec cet accent anglais, on vit dans ce pays depuis plus de douze ans c'est ridicule.
— Aussi ridicule que de cacher la vérité à ta fiancée? Je le nargue.
Il lâche un long soupire et me toise du regard. Il ouvre certains cartons et les empile, créant un peu plus d'espace dans la chambre. Il ne m'adresse plus un mot et plus un regard. Les choses n'ont jamais été au beau-fixes entre nous et je crois que c'est principalement parce que nous avons six ans d'écart. Ça et le fait qu'Austin soit la personne la plus défaitiste que je connaisse. Il n'a jamais été heureux de quitter l'Angleterre quand il avait onze ans alors il ne cessait de se plaindre. Puis à 15 ans, il s'est mis à broyer du noir nuit et jour. Il détestait encore plus mes parents.
Brandy revient en souriant quelques instants plus tard et je l'aide à faire mon lit tandis que je me sens surveillé par mon grand-frère. Je secoue la tête en souriant.
— Bon je vous laisse entre frères, je suppose que vous avez plein de temps à rattraper, je rentre chez moi. Déclare Brandy. A la prochaine Miles! Bisous Austin.
— Je te raccompagne, il dit à voix basse en glissant sa main dans le bas de son dos.
Je suis seul dans la chambre et récupère mon portable. J'ai vu que Derek ne m'a envoyé aucun message aujourd'hui et moi de même. Je n'ai pas envie de lui dire pour Sacramento et pour Taylor. De son côté il ne veut certainement pas me dire qu'il replonge. J'aurais aimé l'aider cette fois encore, mais il capterait facilement que je lui mens. Je sais très bien qu'il verrait ma rencontre avec Taylor d'un très mauvais œil, qu'il tenterait de me dissuader de le faire, mais c'est ok si on se perd tous les deux.
Quelques coups se font entendre contre la porte et bientôt la silhouette svelte de mon frère apparaît. Il vient s'asseoir dans le lit et je me redresse alors. Il m'observe tranquillement, tandis que je sers mes jambes contre mon torse. Face à l'air sérieux et protecteur qu'il vient d'adopter, je choisis de prendre les devants.
— Comme ça tu es fiancé et tu vas bientôt te marier! Pourquoi tu ne me l'as pas dit plus tôt?
— Je crois juste que ce n'était pas le bon moment... il expire longuement. Quand tu m'as appelé pour me dire... tu sais... je voulais te l'annoncer, mais ça aurait été égoïste. Elle te manque, Jen?
— Je me suis fait à son absence, je mens. Mais au final, c'est toi qui avait raison, je n'aurais pas dû m'attacher à elle, cette fin était inévitable.
— Tu ne m'entendras pas le dire souvent mais j'avais tord. T'attacher à elle c'était juste super courageux...
Je souris dans le vide, je ne savais pas que c'était courageux, je savais juste que je ne pouvais et voulais pas faire autrement. C'était juste Jen...
— Depuis quand t'es devenu adepte de la positive attitude?
— Je vis à moins de cinquante mètres d'un cimetière, je ne sais pas si on peut dire que j'ai la positive attitude. Il pouffe. Mais c'est juste parce que c'est moins cher et puis les voisins sont silencieux alors c'est cool.
— Tu l'aimes Brandy? Je veux dire tu es amoureux d'elle?
— Tu crois que je lui aurais passé la bague au doigt si ce n'était pas le cas? Il plisse les yeux.
— Comment t'as su que tu étais amoureux?
— Je ne sais pas... au départ je ne la supportais pas, elle accompagnait une amie durant son premier tatouage, elle me lançait incessamment des piques par rapport à mon travail et puis elle a oublié son portable dans mon salon et on a été contrains de se revoir. Elle continuait de me dire que mon travail est bien trop simple alors je lui ai dit de me tatouer, elle a accepté.
Il me tend son bras et me laisse observer ses tatouages. Je ne saurais les compter. Il pointe son doigt près d'un, le plus approximatif d'entre eux. J'incline ma tête, plisse mes yeux et essaye de comprendre le sens de ce dessin, mais c'est presque mission impossible.
— C'est certainement le tatouage qui m'a valut le plus de souffrance. Il représente un chien, parce qu'elle est en étude de vétérinaire. Elle a réalisé à quel point le métier de tatoueur peut être dur et si tu avais pu voir la tête qu'elle a fait, mimant son désespoir mélangé à un four rire, tu comprendrais ce que je ressens.
— Des papillons dans le ventre? Je dis à voix basse.
— Si on veux oui. Dès qu'elle est là... dès que je pense à elle. Il hausse les épaules et remonte son regard sur moi. Pourquoi Miles? Il y a une fille derrière ça?
— Non. Je m'empresse de répondre. Et puis même si c'était le cas... c'est trop tard maintenant.
— L'amour ne meurt jamais Miles.
Oh que non... mais les gens si.
— Pourquoi elle ne vit pas ici Brandy? Je relance la conversation.
— Elle doit se concentrer sur ses études, ce qu'elle a du mal à faire avec moi dans les parages.
— Tu lui as déjà fait un tatouage?
— Non, il soupire tristement. C'est pas son truc.
— Et tu pourras me tatouer? Je lui demande sérieusement.
— Ouais carrément, mais pas maintenant.
— Pourquoi? Je me froisse.
—Tu n'as pas 18 ans et je suppose que tu n'as pas d'autorisation parentale! Il baille en se levant. Je vais me coucher, demain je bosse, je te laisserai le double de la clé sur la table de la salle à ma manger, si tu sors tu feras gaffe à bien fermer après toi.
J'ai profité du fait d'avoir du temps pour moi afin de peaufiner mon plan pour rencontrer Taylor. Je sais que je veux la connaître, elle me permettra de connaître toute la vérité et c'est tout ce que je souhaite, la vérité.
Il me faudra d'abord l'espionner sur les réseaux sociaux, j'ai constaté qu'elle est très active sur Instagram et qu'elle est publique. Je n'aurais alors aucun mal à en savoir plus sur sa vie, ses habitudes, ses fréquentations. Non je ne suis pas un pervers obsessionnel, je mets juste à profit les nouvelles technologies et aussi le côté visiblement non pudique de Taylor. Je la prendrai alors en filature et un jour, je provoquerais notre rencontre.
Je descends les marches de l'escalier, j'ai mon ordinateur dans une main et mon portable de l'autre. Autant dire que ce n'est pas le moment de me rater.
Et pourtant...
J'aperçois une petite boule de poiles grimper dans l'escalier. Un pas de plus et je lui briserais le dos de mon pied. Je m'arrête rapidement et manque de tomber en avant à cause de mon élan. Je m'appuie à la rampe et louche sur le petit animal me léchant les pieds. Je me baisse, pose mon ordinateur et mon portable sur la marche et passe ma main sur le pelage doux de la petite bête.
Austin et moi avons toujours beaucoup aimé les animaux, surtout lui. Il n'avait pas vraiment d'amis à Corvallis et passait la plupart de son temps dans le ranch de la famille de Rima, s'occupant de quelques chevaux sur son temps libre. Mais de là à aller adopter un Jack Russel Terrier... Je crois que mon frère a vraiment changé, il est moins pessimiste, sourit à la vie, s'engage et tout semble bien aller pour lui. En revanche il n'a toujours pas pardonné à mes parents.
Le petit chien blanc et marron me suit tandis que je m'installe sur la table en verre de la salle à manger. J'ouvre mon ordinateur et choisis de me créer un tout nouveau profil. Je fais craquer mes doigts, me concentre sur mon écran et c'est parti.
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Hey!
J'espère que vous allez bien,
Et que ce chapitre vous a plu !
Je sais qu'il est assez court donc désolée :(
Bref demain c'est la... rentrée, je ne sais pas comment je vais faire pour tenir jusqu'aux vacances de Noël, et surtout résister à la tentation de regarder un film de Noël alors que je dois travailler :s
Cœur cœur ❣
Noémie =)
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