Chapitre 52

Hey tout le monde ! Chapitre très long pour vous aujourd'hui. En espérant qu'il vous plaira, n'hésitez pas à commenter ça fait toujours plaisir~

S'écartant brusquement, les larges portes heurtèrent le mur sous la violence acculée contre elles. S'introduisant dans le laboratoire, les trois Fears semblaient d'humeur massacrante, enveloppés d'un voile de froideur sinistre. D'un signe, deux d'entre eux se dispersèrent, analysant le laboratoire de leur vision thermique, traquant scrupuleusement la présence des deux fugitifs jusque dans les moindres recoins. Surprise, la scientifique demeura aussi immobile que calme, tandis que le troisième lui fit face.

— Que se passe-t-il ? l'interrogea-t-elle.
— Avez-vous ouvert l'I54 récemment ?
— Non. Pas avant hier du moins.
— Deux criminels se sont échappés. Ils sont passés par la trappe des macchabées menant droit à elle.

Fronçant les sourcils, elle se tourna vers la grande porte menant aux cadavres avant de secouer la tête.

— Dans ce cas ils y sont encore. Il n'y a aucune issue autre que celle-ci, et je ne m'y suis pas rendue.

Revenant vers eux, les Fears adressèrent un signe de tête, confirmant l'absence des deux parasites. Signifiant ainsi qu'ils étaient toujours piégés à l'intérieur. Et qu'ils le seraient à jamais. Un sourire mauvais allongea légèrement le coin de ses lèvres masquées avant qu'il n'ordonne :

— Brûlez tout.
— Si je fais ça mes recherches seront retardées.
— Faites-le.

Pinçant ses lèvres afin de contenir sa colère, elle se détourna, s'approchant vers la grande porte métallique. Glissant ses doigts fins sur l'écran immatériel, elle y inscrivit un code puis scanna son tatouage d'identification.

— Processus enclenché. 3676.11.02.06.45.

La voix robotique résonna dans toute la pièce tandis que les flammes se déployèrent, tourbillonnant dans l'immense salle tout en se délectant de leur proie. Incinérant ainsi toute chair humaine de l'I54.

— Poursuivez vos recherches avec ce qu'il vous reste. D'autres rejoindront rapidement l'I54. dit-il en faisant un signe de tête vers les six larges cylindres d'eau transparent, ou flottaient pour chacun d'eux, un cadavre.

Sans plus de cérémonie, il quitta la pièce, suivi des deux autres, la laissant de nouveau seule dans son laboratoire. Un long soupire las s'échappa d'entre ses lèvres, son regard dirigé vers leur sortie. Comment voulaient-ils qu'elle avance s'ils réduisaient tout en cendre si tôt ? Se retournant vers la porte métallique, elle s'approcha lentement, attendant quelques minutes en silence avant de l'ouvrir.

Assis dans le petit couloir de décontamination, les deux jeunes étaient collés l'un à l'autre, en une position recroquevillée qui accentuait leur jeunesse. Adossés au mur, des tremblements incessants les parcouraient, renforçant la fragilité qu'elle décelait en eux. Du moins qu'elle pensait apercevoir à travers leur posture alors que leurs yeux emplis de méfiance et de défis la transperçaient.

L'atrocité ignoble dont ils avaient été témoin derrière la seconde porte – celle-là même où les flammes se rassasiaient de chair humaine – les avait réellement secoués. Et elle pouvait le comprendre. Elle-même ne s'y était toujours pas conformée. Peu importe combien elle s'y était rendue afin d'y poursuivre ses recherches. Personne ne pouvait s'accoutumer à la mort. À l'odeur pestilentielle irrespirable de la putréfaction des corps. À la vue tout simplement, de ces dépouilles décomposées et éviscérées.

Se tenant devant eux, elle ne pouvait s'empêcher de compatir face à l'horreur qu'ils venaient de vivre. Piégés dans cet salle abjecte et asphyxiante de puanteur fétide. Elle savait qu'ils devaient se sentir souiller après cette expérience déplaisante.

Autant physiquement que psychologiquement, une fois à l'intérieur, l'odeur de la mort s'accrochait à chaque parcelle du corps et de l'âme, refusant de s'en détacher avant plusieurs jours. Un frisson lui parcourut l'échine alors qu'elle croisa à nouveau leur regard. D'une telle profondeur et intensité qu'elle manqua de reculer d'un pas en se perdant dans celui brûlant de menaces de Jungkook.

— Je ne vous ferai aucun mal.

Et cela sonnait plus comme un supplice inversé. Car la dangerosité du noiraud était palpable et alourdissait l'atmosphère. Même aussi ébranlé, son allure d'enfant n'était qu'une feinte pour tromper sa proie. Parfaitement conscient de la situation, il se tenait sur ses gardes, octroyant une image frêle de lui afin qu'elle le sous-estime et baisse la sienne.

Taehyung était dans un état d'épuisement intense, une main posée sur son flanc atrocement douloureux. Il se devait de le protéger et le sortir d'ici, peu importe le moyen employé. La chute avait ravivé sa douleur, si acérée qu'il avait l'impression qu'elle s'était réouverte. Son expression demeurait néanmoins le plus neutre possible, souffrant en silence afin de ne pas alerter la scientifique, ne sachant si elle était dangereuse ou non. Sortant lentement une seringue de sa poche, elle vit Jungkook se tendre de tout son être, le regard rivé sur sa main. Tel un félin prêt à bondir contre son chasseur, à le réduire en charpie.

— Il faut que je vous injecte un antidote. Vous venez de toucher des centaines de cadavres valétudinaires et respirer l'air impur et empli de leurs bactéries. Si je ne le fais pas, vous mourrez d'ici quelques heures.
— Pourquoi nous ferions-vous confiance ? cracha-t-il toujours tremblant.

Et peut-être n'était-ce pas seulement à cause de ce qu'ils avaient vu.

— Je ne suis pas comme eux. répondit-elle calmement en baissant son regard vers ses pieds.

Faisant de même, les deux jeunes discernèrent alors les chaînes reliées aux les menottes technologiques enserrant fermement ses chevilles. L'analysant finalement, ils la détaillèrent de haut en bas. Entièrement vêtue de blanc, sa blouse de scientifique descendait presque jusqu'à ses genoux, tandis que ses longs cheveux noirs contrastaient avec ses vêtements, encadrant un visage marqué par la fatigue et l'âge. Des cernes éternelles semblaient s'être installées sous ses yeux alors qu'ils lui donnaient une quarantaine d'année.

— Venez, sortons d'ici.

Quittant le petit couloir de décontamination, elle attrapa une petite fiole puis y enfonça la seringue, dosant minutieusement le liquide à l'intérieur. Se relevant doucement, Jungkook aida Taehyung à en faire de même avant d'entourer sa taille en le sentant peiner à tenir debout.

— Ça va aller, murmura-t-il, inquiet par sa pâleur. Tiens le coup.

Le faible sourire douloureux qu'il lui adressa étreignit son cœur d'anxiété. Le guidant dans le laboratoire, il ignora la porte qui se referma automatiquement, concentré à tenir sur ses propres jambes flageolantes.

Traîtresses...pensa-t-il.

Ils ne firent que quelques pas avant de se laisser glisser contre un mur, éreinté par les faibles efforts qu'ils avaient fournis.

— Se rendre dans l'I54 sans protection est très dangereux. C'est pourquoi vous devez déjà vous sentir affaibli. Si je ne vous injecte pas ça, dans moins d'une heure vous régurgiterez votre propre sang.
— Pourquoi nous aider ? demanda Jungkook, incapable de réprimer sa méfiance.
— Pourquoi pas ? Vous ne trouvez pas qu'il y assez de morts ici ? Vous préférez peut-être rejoindre ceux qui brûlent actuellement ? Ou ceux-là ? le défia-t-elle en glissant son regard vers les cadavres baignant dans les cylindres d'eau.

S'ils en furent horrifiés, ils n'en montrèrent rien, détournant simplement le regard vers elle. Remarquant que Taehyung peinait déjà à respirer, elle s'approcha, s'accroupissant devant lui. Mobilisant toutes ses forces Jungkook agrippa son poignet, l'interdisant d'avancer davantage.

— Quels sont ses composants exacts ?
— Tu n'en connaîtrais pas la moitié. Je l'ai inventé il y a plusieurs années pour pouvoir entrer là-dedans, il n'existe nulle part ailleurs.

Il refusa de la lâcher, trop angoissé à l'idée qu'elle lui fasse du mal.

— Vous pouvez me faire confiance. Au cas où vous ne l'auriez pas remarqué, je suis aussi une prisonnière. Nous devrions nous entraider tu ne crois pas ?
Ça va aller Ny'lan. murmura Taehyung dans leur langue en glissant sa main le long de son bras, jusqu'à ce qu'il cède.
— D'accord. marmonna-t-il à contre-cœur.

Lui souriant afin de le rassurer, elle s'empara du bras de Taehyung et plaça un garrot au-dessus de son coude. Désinfectant la zone, elle attendit quelques secondes avant d'injecter le produit dans ses veines. Prenant ensuite une seconde seringue déjà préparée du même produit, elle en fit de même avec Jungkook avant de tout relâcher.

— Voila, ça devrait aller maintenant. L'effet est plutôt rapide en général.
— Merci. murmura Taehyung.

Plissant les yeux, elle le détailla, remarquant sa main fermement accrochée à son flanc.

— Tu as mal quelque part ?
— Ça va passer.
— Est-ce que je peux regarder ?

Il acquiesça d'un mouvement de tête sous le regard soucieux de Jungkook. Des bandages légèrement ensanglantés entouraient sa blessure par balle. Les retirant, elle examina la plaie cousue puis la nettoya avant de refaire ses pansements.

— Ça devrait aller. sourit-elle en se relevant.

Jungkook récupérait déjà ses forces, alors que ses tremblements cessaient et que les couleurs revenaient sur son visage.

— Je ne savais pas que les scientifiques étaient des prisonniers. reprit-il.
— Ils ne le sont pas. dit-elle de dos, rangeant son matériel. Ou alors c'est assez rare je suppose ? Je dois être la seule dans cette prison.
— Pourquoi ?
— Ils ne voulaient pas me tuer. Parce que j'étais trop importante pour la recherche.
— Vous travaillez pour eux ?
— On peut dire ça oui.

Elle se retourna, plongeant dans son regard océanique si particulier.

— Tous ces cadavres...est-ce que vous vous en servez ? demanda-t-il incapable de refréner sa curiosité.
— Oui. Ils sont nécessaires aux recherches auxquelles ils veulent que j'aboutisse. Je ne le ferais pas si j'avais le choix, mais ce n'est pas le cas.

Une expression de dégoût imprégna ses traits, avant qu'elle ne se reprenne.

— Pourquoi êtes-vous ici ? questionna-t-elle.
— Nous essayons de nous évader.
— Vous évader ?

Un léger rire s'échappa d'entre ses lèvres.

— Personne ne peut sortir d'ici une fois entré. Seuls deux personnes y sont parvenues dans l'histoire de cette prison mais une fois dehors, l'un est mort empoisonné par l'environnement néfaste, l'autre n'a jamais réussi à franchir le grand mur et s'est fait abattre par les Fears. Kuluzar est un District invivable, vous ne survivrez jamais sans protection, encore faut-il les trouver.
— Je sais. Mais nous y parviendrons et sortirons d'ici. répliqua Jungkook avec détermination.

Et aucune de ses paroles ne lui ferait changer d'avis, la lueur flamboyant à travers ses pupilles le lui hurlait, la laissant mue par le silence.

— Vous êtes complètement fous.

Son sourire confiant la fit douter. Elle détourna le regard alors que son cœur se contractait. Jungkook se leva, se sentant en bien meilleure forme qu'il y a quelques instants, rapidement suivi par Taehyung qui s'accrocha discrètement à sa tenue dans son dos, accablé par un léger vertige qui l'étreignit. Le noiraud se recula légèrement en le sentant, sans détourner son regard d'elle.

— Vous n'avez qu'à venir avec nous ?
— Et me faire tuer ?
— Parce que vous préférez rester enfermer ici à jamais ?

Elle resta silencieuse.

— Même si nous réussissons par je ne sais quel miracle, nous ne pourrons vivre à cause de ça. dit-elle en tendant son bras où se trouvait son tatouage invisible.
— Les choses vont bientôt changer. Beaucoup d'événements ont eu lieu ces dernières années. Les gens se révoltent contre la Loi, celle qui nous interdit de vivre.

Un léger espoir gonfla dans sa poitrine malgré la douleur intense qui la tiraillait. Depuis combien de temps l'avait-on privé des nouvelles de l'extérieur ? Probablement trop d'années.

— Si ce que vous dites est vrai...Alors peut-être qu'il existe une véritable justice dans ce monde.
— Vous n'êtes pas lesbienne n'est-ce pas ?
— Non. murmura-t-elle tristement. J'ai été mère pendant neuf uniques mois.
— Ça n'arrivera plus. Parce que nous nous battrons tous pour ça.

Ses yeux...

— Je n'ai plus rien à perdre de toute façon.

Elle leur sourit, prête à prendre le risque.

— Je m'appelle Jeon Laya.

La violence d'un uppercut n'aurait pas été suffisant pour décrire leur choc alors qu'ils écarquillèrent les yeux, le souffle coupé par sa révélation. Pétrifié par ce nom qu'il crut avoir mal entendu, Jungkook sentit son cœur pulser à un rythme effarant contre sa poitrine. Le monde semblait presque s'écrouler sous ses pieds, tout autant que le temps qui s'était figé.

— Jeon...? murmura-t-il à peine audiblement.

C'était impossible. Comment pouvait-elle l'être ? Même dans ses rêves les plus fous, jamais il n'aurait pu ne serait-ce qu'imaginer voir sa mère. Elle n'était que des paroles contées par Namjoon, des histoires qu'il avait visualisé à travers son esprit. Ça ne pouvait être réel...

Et pourtant elle était là. Sous ses yeux. Ne réalisant pas la cause du choc incommensurable qu'elle venait de lui procurer. Combien de fois en avait-il rêvé ? Combien alors qu'il désirait tant l'avoir à ses côtés, ne comprenant pas pourquoi tous les enfants avaient leurs parents, sauf eux. Cette période douloureuse marquée par le manque maternel les avait fait souffrir. À tel point qu'il rêvassait constamment d'elle, dessinant sa silhouette dans son esprit alors qu'il n'avait aucune idée de son apparence.

Jusqu'à ce que Namjoon lui dévoile une photo d'elle à ses dix neuf ans, l'unique qu'il avait réussi à sauver avant qu'elle ne se fasse détruire par les Fears. Elle était si méconnaissable désormais, alors que l'âge et la fatigue tirait ses traits.

— Je...

Sa voix lui manquait, brisée par l'émotion alors qu'il la dévisageait.

— Ma mère...s'appelait Jeon Laya.

À son tour, le choc lui fit écarquiller les yeux, aussi intense que ce qu'il avait ressenti.

— Namjoon...m'a dit que vous m'aviez donné mon nom. Jeon Jungkook.

Ses yeux s'embrumèrent de larmes alors qu'elle plaça sa main tremblante contre sa bouche. Faisant un pas en arrière, elle s'accrocha de sa main libre contre la paillasse, tentant de rester ancrée à la réalité alors qu'elle la serrait de toutes ses forces. Quelques objets chutèrent à ses pieds alors qu'elle le fixait, bouleversée. Ce sentiment étrange qui l'avait étreint lorsqu'elle l'avait aperçu se confirmait désormais. Ses yeux étaient aussi profonds que l'océan, exactement comme ceux de son père. Dès qu'elle l'avait vu, elle n'avait pu s'empêcher de le dévisager, sentant les souvenirs de son mari resurgir avec violence, tant il lui ressemblait. Son regard, sa détermination, la lueur qui y brillait, tout comme lui...

— Jungkook...

Son enfant. Celui dont ils avaient tous deux rêvé jusqu'à ce que tout ne se transforme en cauchemar. Elle qui avait tant haï Namjoon pour l'avoir trahi, toutes ces années emprisonnées ici. Il l'avait sauvé. Tout ce temps où elle le pensait mort...

— Enoha aussi ? s'enquit-elle avec espoir.

La tristesse envahit son regard alors qu'il secouait la tête.

— Je ne l'ai jamais connu. Namjoon m'a dit qu'il avait tenté de le retrouver mais il...n'a pas été assez rapide.

Elle s'approcha de lui, réduisant la distance entre eux avant de caresser sa joue avec amour, laissant les larmes dévaler ses joues.

— Tu es si grand...et si beau. Mon fils.

L'émotion lui comprima la gorge alors qu'il plongeait dans son regard.

— Tu as les yeux de ton père.
— Est-ce qu'il...?
— Non. murmura-t-elle chagrinée. Il n'est plus de ce monde. Je n'aurais pas dû l'être non plus.
— Pourquoi ?

Ses yeux brillaient de larmes contenues tant il était ému.

— Parce qu'ils ne pouvaient pas se résoudre à le faire. J'ai découvert le traitement contre les cancers quand j'avais dix-neuf ans.

Son regard s'illumina au souvenir de son nom glorifié dans les revues scientifiques. Jeon Laya était connue et infiniment respectée de tous pour les grandes avancées auxquelles elle avait participé, éradiquant à jamais le cancer. Le SIDA, les tumeurs, la tuberculose, l'Alzheimer ainsi que tant d'autres avaient été décimés par l'avancée de la médecine. Cependant la complexité du cancer en avait fait un fléau intraitable malgré les multiples recherches de scientifiques renommés. Personne n'était parvenu à le déchiffrer, personne, sauf cette jeune surdouée d'à peine dix-neuf ans, devenue mondialement connue pour l'élaboration de l'antidote qui sauva des millions de vies.

— Kuluzar est devenu trop dangereux. Aucun scientifique n'arrivait à trouver de solution contre ce qui vit hors de ces prisons. À part le contenir, nous n'arrivons pas à rendre l'air de nouveau pur. Que se passerait-il alors, lorsque les barrières céderont ?

L'angoisse lui enserra l'estomac, alors que cette pensée lui avait traversé l'esprit dès son arrivée.

— "Cherche un moyen de la purifier, ou bien sers toi de tous ces cadavres et prisonniers pour trouver le secret de l'immortalité." Que je le fasse ou non, la prison ne possède que de petits laboratoires, les autres sont détachés dans des bâtiments spécifiques où sont sans cesse transférés les condamnés.
— C'est dégueulasse. s'énerva-t-il. Il y a forcément un moyen autre que l'immortalité.
— C'est ce pour quoi je suis ici.

Il hocha la tête, ne pouvant détacher son regard d'elle. Effaçant ses larmes, elle lui sourit avec bienveillance, heureuse de l'avoir retrouvé.

— Je n'arrive toujours pas à y croire.

Ses lèvres s'étirèrent également tandis qu'il prit la main du brun.

— Je te présente Taehyung, l'homme que j'aime.

À son tour, elle lui caressa la joue, d'une telle tendresse similaire à celle que Jungkook avait reçu, qu'il se figea de surprise alors qu'un sentiment étrange s'emparait de lui.

— Namjoon l'a sauvé en même temps que moi. Nous avons vécu ensemble toute notre vie.
— Merci d'avoir pris soin de lui. murmura-t-elle avec sincérité.

Aussi stupéfié, qu'émerveillé par cette affection maternelle qu'il ne connaissait pas, il demeura muet alors que sa gorge se serrait. Était-ce ça, l'amour d'une mère ?

— Sortons d'ici. se reprit Jungkook en détachant son regard empli de fierté envers le brun.

Son inquiétude reprit le dessus alors qu'elle se tournait vers la porte.

— Comment comptez-vous faire ça ? Sortir d'ici est inconcevable.
— Les Hinvys sont avec nous. sourit-il en cherchant une arme du regard.
— Pardon !? s'exclama-t-elle sous le choc.
— C'est une longue histoire, fais-nous confiance, nous pouvons sortir d'ici.

Hochant finalement la tête, elle prit une fiole qu'elle lui tendit.

— C'est de l'acide chlorhydrique. Deux Fears sont postés devant la porte.

Lançant un regard complice à Taehyung, il n'eut besoin d'aucune parole pour qu'il comprenne le fil de ses pensées.

— Je m'en occupe. (Il s'approcha de l'oreille de Taehyung.) Reste ici El'hya.

Il l'embrassa avant de se diriger vers la porte.

— Toque deux fois, ils ouvriront.

Se préparant à l'attaque, il fit ce qu'elle lui dit, les poings déjà serrés.

À peine la porte fut-elle ouverte, que Jungkook jeta le fond de la fiole dans les yeux du Fear, le faisant hurler de douleur. Laissant à peine l'autre réagir, il le frappa, attrapant sa tête qu'il cogna violemment contre le mur trois fois. Se retournant vers le blessé qui se tenait le visage, il l'assomma à son tour avant de les tirer à l'intérieur. Taehyung s'approcha tandis qu'ils commencèrent à les déshabiller, échangeant leurs vêtements pour se faire passer pour eux.

— Nous nous déplacerons mieux en nous fondant dans la masse. Ils nous croient morts, nous avons l'avantage pour le moment. expliqua Jungkook.

Attrapant le flingue du Fear, il le déchargea, prenant en compte le nombre de balles avant de les réintégrer. Du coin de l'œil, il vit Taehyung enfoncer la sienne dans son holster sans plus d'attention. L'équipement de protection était assez lourd, fournissant non seulement l'arme à feu, mais également deux couteaux et une matraque. Jungkook s'accroupit à côté du Fear, levant son bras tatoué puis dirigeant son regard vers les chevilles de sa mère. D'un soupir, il le lâcha avant de se redresser. S'il la libérait non seulement le signal serait instantanément envoyé au serveur, les informant de sa libération, mais cela les trahirait dès leurs premiers pas hors de ce laboratoire. De toute façon ils n'en avaient pas l'autorisation, car seul un tatouage d'identification pouvait l'ouvrir.

— Il faut trouver un moyen qui nous rendrait indétectable au regard des Fears. Je ne veux pas parier sur le fait qu'ils utilisent ou non leurs lentilles bioniques et prendre le risque de se faire tuer sur le coup.

Baissant son regard vers les bracelets technologiques des Fears, un léger sourire trôna sur ses lèvres.

— Est-ce qu'il y a un ordinateur ici ?
— Là-bas.

Se dirigeant vers lui, il hacka le système, les trafiquant pendant une quinzaine de minutes.

— Ça devrait aller. J'ai réussi à brouiller le système pour que lorsqu'ils nous voient, l'identité de ces deux-là apparaisse au lieu de la nôtre. Mets-le sur ton tatouage pour qu'ils ne le détectent pas. dit-il en lui rendant le sien. Ça ne marchera pas très longtemps mais ça devrait suffire tant qu'on attire pas l'attention et qu'ils décident de nous analyser.

Une fois mis en place, il releva sa manche et tourna son avant-bras, laissant apparaître la projection d'un écran immatériel grâce à sa puce. Un plan complet de l'immense prison s'y trouvait, déterminant leur position ainsi que celles des Hinvys.

"— Yoongi vous m'entendez ? pensa-t-il.
Oui.
Nous sommes dans le laboratoire à côté de l'I54. Où doit-on aller ?
— Je te montre le chemin."

Celui-ci se dessina par une ligne bleutée, indiquant les passages à prendre ainsi que leurs obstacles. Soit la position des Fears.

"— Nous avons une troisième personne avec nous. Elle s'évadera également.
— Comment ça une troisième personne ?
— Je vous expliquerai plus tard.
— Très bien. Le temps presse dépêchez-vous avant que le Leader n'arrive."

— Allons-y. Comment agissent les Fears lorsque tu sors d'ici ?
— Ils se tiennent seulement à mes côtés.

Hochant la tête, ils sortirent du laboratoire, empruntant le chemin qu'ils avaient rapidement mémorisé. Leur cœur s'accélérant à chaque passage devant d'autres Fears, ils furent satisfaits de leur supercherie qui n'en fit broncher aucun. La moitié de leur visage étant dissimulée sous un masque squelettique, seule la couleur azurée de leurs pupilles était perceptible. Favorisant les escaliers aux ascenseurs nécessitant une identification, ils montèrent quelques étages, quittant le sous-sol jusqu'à rejoindre la cour extérieure.

Alors leur souffle se coupa, tandis qu'ils posaient le pied dehors, observant sidérés, les milliers de cages qui les entouraient. Toutes disposées les unes sur les autres sur une dizaine d'étages, les prisonniers étaient contraints de se tenir debout dans cet espace étroit, à peine suffisant pour leur taille. D'une largeur d'un petit mètre et d'une hauteur de deux, la place ne permettait en rien de s'y déplacer, ni même de s'y asseoir.

Outrés par les conditions de vie ignobles et l'odeur désagréable de la puanteur marquant des jours sans hygiène, ils étaient comme pétrifiés face à ce spectacle abject. Le soleil brûlant était une torture pour leur peau ainsi exposée tout au long de la journée. Attendant indéfiniment qu'on leur trouve une utilité. Car ils n'étaient que des futurs sujets d'expériences. De simples numéros.

Comment pouvaient-ils rester de marbre face à cela ? C'en était horrifiant. Jamais ils n'auraient pu imaginer que ce genre de traitement existait réellement. Ils semblaient tous à bout, affamés et assoiffés, les jambes ankylosées et douloureuses alors qu'ils pouvaient à peine s'adosser aux barrières brûlantes sous les rayons du soleil.

Tout ça leur donnait envie de vomir. Tant d'inhumanité les révoltait. Et s'ils ne l'avaient pas été, alors peut-être que les Fears ne les auraient pas suspectés. Découvrant ainsi leur identité après une analyse plus poussée.

***

— Ils se sont fait repérer. s'exprima Yoongi, le regard rivé sur les écrans immatériels.

Ignorant le regard noir des Fears menottés et baillonnés, Hoseok s'approcha calmement de lui, observant les jeunes courir à travers les grandes cages extérieures.

— Qui est cette femme ?

Yoongi afficha ses caractéristiques sur un autre écran. S'ils furent surpris aucun d'eux ne le montra, gardant une expression neutre.

— Jeon Laya ? Intéressant. murmura le Hinvys de Tirga.

Il étudia ses données, comprenant la raison pour laquelle ils la menaient avec eux.

— Ils finiront par tomber dans une impasse à se diriger au hasard dans les allées. songea Hoseok.
— Le signal a été envoyé.

D'un geste, il exposa plusieurs écrans où les Fears les pourchassaient, alertés par ceux sur place. Divergeant vers un autre écran, il sourit en remarquant la cellule déserte de Kéïna.

— Notre colombe s'est envolée.

Le sourire en coin d'Hoseok s'étira alors qu'il procédait aux derniers réglages.

— C'est le moment. Ouvre toutes les cages.

***

S'arrêtant brutalement, Jungkook jura alors qu'ils étaient complètement cernés par les Fears, une vingtaine d'armes à feu braquées droit sur eux. Le cœur pulsant contre sa poitrine, il se plaça devant Taehyung, le protégeant de son corps bien que leur dos à découvert était une cible pour ceux se tenant à leurs arrières.

Quand bien même leur poursuite s'était achevée rapidement, la course avait complètement essoufflé le brun. Sa blessure l'affaiblissait tant que son endurance en pâtissait, sans compter la douleur sourde qui l'irradiait. Les vertiges l'assaillaient alors qu'il peinait à rester stable. S'accrochant à l'uniforme de Jungkook, il se reposa à nouveau sur lui, tentant de dissiper les nausées qu'il ressentait. Une Fear se détacha du groupe, s'avançant de quelques pas.

— Vous avez causé assez de problèmes comme ça. La peine encourut sera décidée dès l'arrivée du Leader. Arrêtez-les ! ordonna-t-elle de sa voix puissante.

Arrêtez-les ? pensa Jungkook. Alors ils doivent nous maintenir en vie...

Contenant son sourire, il s'apprêta à se défendre lorsque soudain un bruit sourd éclata tandis que les centaines de cages au sol s'ouvrirent d'un coup, libérant les prisonniers. Une confusion générale s'appropria d'eux, avant de réaliser qu'aucun lien ni aucun Fear ne les retenaient. Profitant alors de l'occasion, ils se jetèrent contre eux, hurlant à la vengeance. Résonnant à leurs cris, les coups de feu s'élevèrent tandis que Jungkook attrapa Taehyung et sa mère, profitant de l'anarchie pour fuir dans la foule.

S'enfonçant sous terre, les premières rangées désormais vides disparurent, laissant celles d'au-dessus s'ouvrir. Encore et encore, ainsi de suite, jusqu'à ce que tous les étages y passent, ne laissant plus qu'une immense cour empli de milliers de personnes. Des renforts armés se mélèrent au chaos, tentant d'y remettre l'ordre par la force.

Gardant la main de Taehyung dans la sienne et le bras de sa mère dans l'autre afin de ne pas les perdre, ils continuèrent de s'éloigner avec difficulté, sans cesse bousculés de tous les côtés. Le désordre était total alors que Jungkook tentait de les mener au point de rendez-vous.

— Ce message s'adresse à tous les Fears. Cessez immédiatement le combat et rendez-vous ou mourrez. Nous prenons le contrôle de cette prison.

Transmise par tous les hauts parleurs, la voix de Kéïna se répercutait dans chaque partie de la prison. À l'intérieur, les combats avaient également pris place, sans pitié tandis que plus personne n'était emprisonné. Yoongi les retrouva dans un couloir après quelques minutes, les incitant à le suivre. Se dépêchant du mieux qu'ils purent, Jungkook maintenait une marche rapide pour soulager Taehyung qui parvenait à peine à masquer l'intense douleur qui le foudroyait.

— Tiens bon El'hya, on y est presque.

Alors qu'il l'aidait à avancer, il remarqua dans leur dos un Fear les viser. Manquant un battement, Jungkook eut le réflexe de pousser Taehyung contre le mur tout en s'écartant alors que la balle siffla entre eux. Sortant son arme à une vitesse insoupçonnée, il abaissa le chien et tira dans sa poitrine.

Ses équipements le protégèrent, le faisant seulement reculer sous l'impact de la balle. Déjà prêt à se défendre, le Fear rehaussa son flingue, le canon pointé sur lui. Cependant il n'eut pas le temps d'appuyer sur la détente que Yoongi l'abattit d'une balle dans le crâne, au centre du front malgré la grande distance qui les séparait. Reprenant leur souffle, ils se dépêchèrent de poursuivre leur chemin jusqu'au parking où ils retrouvèrent Hoseok.

— Montez vite !

Yoongi prit le volant tandis qu'il se plaça à sa droite. Les trois autres prirent place sur les sièges arrières avant que le Hinvys de Reshea ne leur donne des tenues.

— Changez-vous.

Yoongi démarra le véhicule et roula vers la porte qui s'ouvrit. Il fit un signe à la caméra, sachant Kéïna dans la salle de contrôle. Le véhicule passa les trois stades d'assainissement avant que la seconde porte ne s'ouvre, les laissant enfin quitter cette maudite prison.

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