Chapitre 13 : Hanté


Wow, ça fait pratiquement un an que je n'ai pas publié sur cette histoire, il ne faut jamais désespérer ! Merci à leur patience pour ceux qui sont encore là. Je ne suis pas morte, j'écris toujours, et je reprend peu à peu confiance en moi et en mon avenir. Je reviendrais bientôt, c'est promis, alors en attendant voilà un petit avant goût de mon retour, car la reine du sadisme œuvre toujours dans l'ombre ^^

Warning, cependant : présence de relation non consentie, âmes sensibles s'abstenir. Pour ceux qui s'accrochent, bonne lecture !

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- Alec ? Alec, est-ce que tu m'écoutes ? S'enquit Jem d'une voix douce et posée, patiente.

Vautré dans le sofa molletonné en daim bleu roi, positionné face à la chaise qu'occupait l'ancien Frère Silencieux aux yeux couleur d'argent, le noiraud releva la tête avec lenteur, comme s'il ne le voyait même pas. Le Nephilim faisait peine à voir, et Jem avait l'impression d'avoir fait un bon de dix ans en arrière. Devant lui, Alec semblait dans un autre monde, plongé dans l'un des recoins brumeux de son esprit tourmenté. Avec son sweat trois fois trop grand dont la capuche était rabattue sur son visage, le dissimulant aux trois quart, et son jogging noir qui dissimulait ses hanches, on aurait dit un enfant dans des vêtements d'adultes. Mais le noiraud s'en fichait. Il se fichait de bien présenter ou non, il se fichait d'être beau ou non, tout ce qu'il voulait c'était rentrer chez lui ou, mieux encore, s'enterrer dans un trou et y rester définitivement jusqu'à ce que l'univers ait oublié jusqu'à son existence. Pourtant, il se trouvait là, dans le bureau de Jem pour sa séance de suivi hebdomadaire. Depuis la naissance de Max, qui était arrivé dans leur vie trois mois plus tôt, le Nephilim se faisait suivre une à deux fois par semaine par son ami qui servait aussi de conseiller et de confident. Alec n'avait toujours pas pu reprendre son traitement à cause de son taux de HCG qui était encore trop élevé dans son cas pour faire quoi que ce soit. Il avait refait des prises de sang, le matin même, dans l'espoir que les prochains résultats lui donneraient l'accord de reprendre une vie normale. Malheureusement, il y avait aussi, comme bien des femmes, la dépression post-partum qui sévissait et ne le ménageait pas. Le noiraud ne comptait plus le nombre de fois où il pouvait pleurer dans une seule et même journée, parfois même sans raison apparente. Les premiers temps, il avait sû gérer la situation aux côtés de Magnus qui était toujours prévenant et aux petits soins pour lui, mais ensuite les crises de colère s'étaient installées, suivies par les pleurs. Aujourd'hui, malgré ses larmes, le Chasseur d'Ombre se retrouvait principalement dans un état avancé de léthargie, le laissant complètement apathique les trois-quart du temps. Le tout combiné donnait un cocktail explosif qui mettait ses nerfs à rude épreuve. Relevant donc la tête vers son ami, il soupira en secouant la tête.

- Pardon...Tu disais ? Demanda-t-il d'une voix atone et monocorde.

- Je te demandais comment se passait ton sommeil en ce moment ? Tu récupère assez pendant tes nuits ?

- Je...Pas vraiment, admit le plus jeune en secouant tristement la tête. Magnus se lève bien plus que moi pour s'occuper de Max mais...je n'y arrive pas...

- Est-ce que ce sont des cauchemars qui te tiennent éveillé ? Ou des angoisses ?

- Je rêve d'Annabelle...., souffla-t-il les yeux dans le vague. Elle me hante...Elle est partout comme un fantôme...Elle veut revenir..., avoua-t-il dans un sanglot.

Jem soupira et le regarda tristement avec toute la compassion du monde. Les crises dysphoriques s'étaient vu accrues depuis l'accouchement du Chasseur d'Ombre, et elles étaient plus violentes aussi, notamment lorsque ses règles survenaient. Dans ces périodes, le britannique avait remarqué que son patient était toujours plus prompt à avoir des idées sombres, presque dangereuses. Heureusement pour lui, le noiraud était bien entouré, par sa jumelle, son parabatai, même ses parents, et surtout son époux. Comme au tout début de leur relation, Magnus se donnait à deux cent pour cent pour aider son mari à traverser les épreuves. Le sorcier travaillait moins longtemps, s'occupait de leur appartement, de la cuisine, du ménage (merci la magie) et de leur fils, ainsi que du bien être d'Alec, sans jamais se plaindre ou demander à faire de pause. Jem ne l'avait jamais formulé à voix haute, car bien que ce ne soit pas un reproche il ne voulait pas qu'Alec le prenne mal, mais il voyait l'asiatique comme une véritable force de la nature capable de continuer à avancer malgré les problèmes, quitte à ramper à terre tant qu'il pouvait faire un pas de plus. Malheureusement, le Grand Sorcier de Brooklyn n'en restait pas moins un être humain qui ne pouvait pas, même s'il l'avait voulu, changer l'état d'esprit de son homme en un claquement de doigts. Mais pour en revenir au sujet qui les concernait, il s'inquiétait de voir Alec parler de plus en plus souvent d'Annabelle et de son retour hypothétique.

- Tu veux m'expliquer ce que tu veux dire sur le fait qu'Annabelle veuille revenir ? Demanda-t-il en douceur.

- Je le sens, elle est toute proche..., déclara le noiraud alors qu'un frisson remontait le long de son échine. Elle va me tuer, et elle va reprendre le contrôle...Et je sais que ça fera plaisir à tout le monde...

- Non, Alec, ça ne fera plaisir à personne que tu disparaisses, tu comprends ? Tu es notre ami, notre frère, tu es le parabatai de Jace, tu es le mari de Magnus...La dernière fois on avait parlé de ton prénom : Alexander Gideon Lightwood-Bane, ça te fait toujours plaisir de l'entendre en entier ?

- ...Oui..., confia le plus jeune après un moment de silence. J'aime ce nom.

- Et si je dis Annabelle Grace Lightwood ? Tenta Jem pour montrer à son ami qu'il n'était plus cette fille-là.

A l'entente de son dead name, Alec fondit brusquement en larmes en se recroquevillant dans le canapé. Jem prit quelques notes dans son carnet et vint prendre son cadet dans ses bras pour le consoler. Il était son psy, oui, mais son ami avant tout. Le noiraud pleura longtemps sur son épaule alors que de tristes souvenirs remontaient à la surface et le britannique le berça contre lui. L'ancien Frère Silencieux ne put s'empêcher de penser à son propre parabatai, William, décédé voilà une bonne centaine d'années. Will et Alec étaient des copies conformes sur le plan physique, bien que sa personnalité soit plus proche de celle de Jace, puisque le blond n'était autre que son descendant. Quoi qu'il en soit, Jem se souvenait de longues nuits où son frère de cœur faisait des cauchemars à cause de ses démons intérieurs, qu'il ne tuait pas aussi facilement que ceux d'Edom. Il se voyait le prendre dans ses bras pour le bercer, le consoler, l'apaiser jusqu'à ce qu'il se rendorme. Will aimait tout particulièrement quand Jem jouait du violon ou fredonnait pour lui, aussi le mortel aux yeux gris entonna une berceuse en mandarin que lui avait appris sa mère. Contre lui, Alec finit par se détendre peu à peu, transporté par la musique, ayant lui-même en tête chaque moment où Magnus lui avait chanté, à lui et à leur fils, des berceuses dans diverses langues qu'il connaissait pour les aider à s'endormir le soir après une longue journée d'épuisement. Une fois qu'il se sentit mieux, le noiraud se redressa en remerciant son ami d'une voix tremblante et s'excusa en disant qu'il devait retourner chez lui. Jem, compréhensif, le racompagna jusqu'à ce qu'il soit arrivé à bon port et repartit de son côté. Alec inspira brusquement. Il était à la maison. Le noiraud sentit distinctement une bouffée de soulagement l'envahir et envelopper son cœur en sentant les effluves familières du parfum de son époux flotter dans l'air. Malgré tout, ce soulagement était accompagné d'une vague d'angoisse qu'il eut peur de devoir affronter. L'angoisse de cette vie, de ce quotidien qui n'était pas le sien et qui lui rappelait, jour après jour, qu'il appartenait à Annabelle, et non à lui. Ses larmes remontèrent brusquement, à peine taries, et il se mordit la lèvre à sang pour ne pas laisser éclater ses sanglots. Il inspira et souffla plusieurs fois, calmant ses respirations comme il le pouvait, et décida finalement de se laisser tomber dans le canapé.

Fermant les yeux pour garder son calme, le noiraud tenta, bien que vainement, de faire taire les pensées qui lui embrumaient l'esprit. Des souvenirs d'autrefois, lorsqu'Annabelle était encore là, hantaient sa mémoire sans relâche et la petite voix de sa dépression, insidieuse et menaçante, lui martelait inlassablement qu'il n'était qu'une erreur, que c'était mal d'avoir privé Magnus d'une épouse et leur fils de sa mère, qu'il aurait dû être moins égoïste, moins faible, moins lâche. La gorge du Chasseur d'Ombre se noua et ses larmes menacèrent de déborder de sous ses paupières closes. La voix de Magnus, appelant son nom en constatant certainement son retour d'après séance, lui parvint aux oreilles comme de très loins et c'en fut assez pour faire céder ses maigres résistances. Le flot de larmes qu'il avait réussi à contenir jusqu'ici déborda et ses sanglots déchirèrent sa poitrine alors qu'il se recroquevillait dans le canapé, les yeux désespérément clos, tâchant de disparaître sous son amas de vêtements de grossesses trop grands et informes. Deux bras l'enveloppèrent alors et un corps chaud, celui de son mari, se lova contre le sien. Alec pleura plus fort, de soulagement comme de chagrin, et il s'accrocha à son époux de toutes ses forces avec la dernière lueur d'espoir d'un noyé accroché à sa bouée. L'Indonésien fredonna pour lui, comme Jem l'avais fait un peu plus tôt et il prit le temps de le calmer, sans le brusquer. Depuis qu'il le connaissait, et après tout ce qu'ils avaient traversé, le descendant d'Asmodée avait finit par comprendre que la patience était le maître mot des crises d'angoisses et de dysphorie d'Alec et qu'il fallait être prêt à consacrer tout le temps nécessaire au noiraud pour qu'il puisse se sentir en sécurité. Il leur fallut un bon trois quart d'heure pour que le plus jeune ne cesse enfin d'inonder le col de chemise de son compagnon, Magnus continuant à fredonner et à passer sa main baguée dans les cheveux courts du Nephilim qui s'écarta finalement de lui pour plonger ses orbes cobalts dans les siennes. Le Grand Sorcier de Brooklyn sentit son coeur se fendre en voyant la détresse dans le regard de son amant et garda ses mains dans les siennes pour l'aider à s'ancrer dans la réalité et à ne pas complètement perdre pied. Alec déglutit difficilement, essayant de ravaler la boule d'angoisse qui lui bloquait la gorge et essaya de sourire mais ne parvint qu'à une grimace désespérée qui lui donna une nouvelle fois envie de pleurer.

- Tout va bien, Sayang, tu es à la maison, chuchota Magnus en caressant ses mains de ses pouces en de lents cercles apaisants. Comment ça s'est passé avec Jem ?

- J'ai pas envie d'en parler..., souffla Alec en se redressant, retirant ses mains de celles de son mari pour se rendre à la cuisine, bien qu'il n'ait pas faim, piochant une carafe de jus d'orange dans le frigo.

- Alexander, s'il te plait..., soupira le plus vieux en le suivant à la cuisine. Je ne peux pas t'aider si tu ne me laisses pas t'aider...

- Je t'ai dis que je n'avais pas envie d'en parler, c'est clair ? S'agaça le Nephilim en reposant violemment la carafe sur le plan de travail. Si j'ai voulu être seul pour parler avec Jem ce n'est pas pour tout te déballer après ! Alors laisse tomber, d'accord ?

- Arrête, je sais ce que tu essaies de faire, ça ne marchera pas...

- Ah oui ? Et j'essaie de faire quoi selon toi, madame Irma ? Grommela Alec en s'adossant au frigo.

- Tu es énervé et tu veux me pousser à bout pour provoquer une dispute. Tu espères m'entendre dire toutes les choses que tu as en tête pour te convaincre qu'elles sont vraies mais c'est faux. Je ne penserais jamais ça de toi et tu le sais très bien, Alexander. Je sais combien c'est dur, mais je ne te laisserais pas tomber comme tu penses que je vais le faire. Je t'aime trop pour ça.

Magnus secoua la tête face à l'absence de réaction de son cadet et il se détourna pour mettre un peu d'ordre dans le salon. S'il était honnête avec lui-même, le Grand Sorcier de Brooklyn devait bien avouer qu'il était lui aussi épuisé par toute cette situation. Il donnait tout ce qu'il pouvait pour faire en sorte de prendre soin de leur chez eux, de leur fils, de leur quotidien, et que la vie de son époux soit la moins pénible possible. Il avait eu envie de céder à la tentation de s'engueuler avec lui, poussé par la fatigue, mais l'asiatique savait que le jumeau d'Isabelle cherchait la dispute avant tout pour avoir une preuve matérielle de sa haine envers lui-même. Ce n'était pas la première fois que ça leur arrivait, et ça ne serait sans doute pas la dernière, mais il espérait sincérement que le Chasseur d'Ombre finisse par comprendre qu'il n'avait aucune honte à être un homme, qu'il n'avait jamais été une femme et que son cher et tendre ne le détesterait jamais pour ça. Malgré tout, il savait également d'expérience que garder son calme face à une personne en colère était le mieux pour lui faire perdre ses moyens et reprendre le contrôle de la situation, aussi ne fut-il pas surpris lorsqu'Alec lui lança la carafe de jus d'orange dans un vain espoir de le contraindre à une engueulade. Magnus s'écarta à temps pour éviter le projectile qui alla se fracasser sur le mur et, face à son air stoïque, Alec perdit définitivement le contrôle et fondit en larmes en hurlant de douleur, plaquant ses mains sur ses oreilles. Il n'en pouvait plus t'entendre ses pensées lui répéter les mêmes horreurs en boucle et il se laissa glisser le long du frigo en sanglotant comme un enfant. L'immortel aux yeux de chat, lui, soupira de fatigue et de peine à la vue brisée de son amant et il s'approcha de lui une nouvelle fois pour le prendre dans ses bras et tâcher de le rassurer en espérant que la crise serait vite passée.

- Elle va revenir..., sanglota le plus jeune en suffoquant d'angoisse. Elle sera bientôt là, Magnus...Moi je vais partir...Elle va me tuer et tout le monde sera heureux....

- Non, Sayang, elle ne reviendra pas, chuchota avec patience le plus vieux. Tu ne vas pas mourir, Alexander. Personne ne sera heureux de te voir partir, tu vas rester, je te le promet.

- Si...Elle est partout, Magnus...J'en peux plus...J'arrête...J'arrête de me battre contre elle...Max a besoin de sa mère, toi de la femme dont tu es amoureux...C'est pas grave, renifla-t-il avec défaitisme en haussant les épaules et son regard se perdant dans le vide, j'aurai eu un peu de bonheur avec toi...C'est son tour, maintenant...

- Et tu penses sincèrement qu'après ce qu'elle a vécu Annabelle a envie de revenir ? Le provoqua Magnus douloureusement, sachant que lui rappeler son traumatisme était, pour l'heure, le seul moyen de le dissuader de lâcher prise. Tu te souviens ce qu'il s'est passé la dernière fois ? Tu te souviens de ce qu'ils lui ont fait subir ?

- Arrête...Pas ça...Pleura le noiraud en secouant la tête. S'il te plait...

- Pas tant que tu ne m'auras pas répondu, Alexander, insista Magnus. Tu as vraiment envie de redevenir cette jeune fille qu'ils ont agressée ? Tu veux vraiment revivre ce qu'il s'est passé ? Demanda-t-il tandis qu'Alec, vaincu, pleurait plus fort en se remémorant les événements survenus sept ans plus tôt.

Dans la glace de la salle de bain, Alec observait son reflet avec un soupir contrarié. Sa peau était toujours pâle et délicate et les traits de son visage fin, malgré leur androgynéité. Heureusement, ses longues boucles noires avaient laissé place, depuis quelques semaines, à une coupe courte qui lui allait bien mieux, de son goût personnel. Il avait également troqué ses anciens vêtements contre des tenues plus adaptées à son nouveau style. Magnus l'avait emmené, deux jours plus tôt, faire toutes les boutiques de la ville pour se fournir en nouveaux jeans, t-shirts, pulls, chemises et blousons, ainsi qu'en chaussures et accessoires sans regarder à la dépense. Ils étaient même passés chez le tailleur préféré de l'Indonésien pour confectionner au noiraud deux nouveaux costumes, dont un pour sa cérémonie de majorité où il recevrait sa dernière rune permanente : une rune de blocage dans le cou. Peu à peu, le Chasseur d'Ombre avait l'impression que le bonheur n'était plus une notion complètement hors de sa portée et qu'il pourrait peut-être, un jour qui sait, être enfin celui qu'il avait toujours voulu être. Et cela commençait, comme l'avait indiqué Magnus, par une nouvelle garde robe. Le plus jeune soupçonnait son petit ami d'avoir eu envie de se faire plaisir en se prenant quelques chemises et vestons supplémentaires mais où était le mal ? L'immortel, par ailleurs, était parti de bonne heure le matin même et l'avait prévenu qu'il devait passer la journée au Labyrinthe en Spiral en compagne de Ragnor et qu'il ne rentrerait que tard le soir. Cela aurait pu déranger Alec mais, au contraire, il avait décidé de retourner à l'Institut, après trois semaines d'absence. Il craignait la réaction des autres Chasseurs d'Ombres, évidemment, mais il n'en restait pas moins un Nephilim lui-même qui avait des devoirs envers l'Enclave et il ne pouvait continuer à faire l'autruche plus longtemps sans s'attirer d'ennuis. Et puis, Isabelle, Jace, Clary et Simon seraient là également. Il n'était pas seul, il avait sa famille avec lui. Avisant donc une dernière fois son reflet, ajustant sa chemise bleue nuit, son jean noir et son blouson de cuir, noir également, le noiraud opina du chef, relativement satisfait du résultat, et prit son arc et ses clefs avant de quitter l'appartement en refermant derrière lui. Le vent froid du dehors l'accueillis et il frissonna, se mettant en route jusqu'à l'Institut qui n'était, heureusement, qu'à une dizaine de minutes à pied.

Arrivé devant les portes de l'immense édifice, le Chasseur d'Ombre aux yeux cobalts s'arrêta un instant, juste le temps d'inspirer profondément et de se donner le courage d'entrer. Il était terrifié, tétanisé par l'angoisse de comment pourrait se dérouler la journée, mais il se força malgré tout à se rappeler qu'il n'était pas seul, que sa famille était là pour le soutenir, qu'il était Alexander Gideon Lightwood et que, connaissant son petit ami, Magnus aurait l'idée de préparer une surprise pour le féliciter d'avoir été assez courageux pour retourner à l'Institut. Inspirant et soufflant profondément, Alec passa la porte et se dirigea vers la salle d'entraînement où il devait retrouver ses amis. Sur le chemin, il croisa d'autres Chasseurs d'Ombres qui se contentèrent de lui adresser un simple signe de tête et il se demanda un instant s'il passait réellement inaperçue, si personne n'était plus capable de le reconnaître. Le noiraud aurait pu se sentir gêné, comme s'il était là incognito sous le couvert d'un costume mais, en réalité, il en était diablement excité. Il pouvait enfin être lui-même, un jeune homme comme les autres, libre et heureux. Un sourire plus franc commença à étirer les lèvres du Nephilim qui se retrouva presque à trottiner de bonheur jusqu'à la salle d'entraînement qu'il atteignit en quelques secondes à peine. A l'intérieur, il y trouva Jace s'entrainant au sac de frappe, Isabelle aiguisant ses poignards et Clary et Simon s'affrontant en duel. Le jeune homme observa sa jumelle, son parabatai et ses amis et toussota pour se faire remarquer. Clary plaqua Simon au tapis de combat et releva la tête pour le dévisager curieusement, sans trace d'animosité cependant.

- Désolée, la salle est prise mais il y en a une de libre à côté, expliqua-t-elle gentiment en maintenant son meilleur ami immobile.

- Mais...je...

- Je sais, il reste de l'équipement pour une personne mais on attend quelqu'un.

- Alec ? Finit par s'étonner Jace en quittant son sac de frappe pour s'approcher.

Le noiraud hocha la tête avec émotion, heureux d'avoir réussi à passer pour un garçon, un vrai, même aux yeux de ses amis les plus proches et il sourit de toutes ses dents lorsque le blond vint le serrer dans ses bras, lui aussi ému. Jace l'avait senti dans leur lien, il savait que c'était son parabatai, et il ressentait tout son bonheur de pouvoir enfin exprimer sa vraie personne au grand jour, aux yeux de tous. Isabelle, ayant elle aussi rapidement reconnu son jumeau, se joignit au câlin, suivit par Simon et Clary qui s'excusa de ne pas l'avoir accueillie immédiatement. Le Chasseur d'Ombre aux yeux cobalts, qui n'était pas pour lui en tenir rigueur, lui ébouriffa les cheveux et ils passèrent un long moment à débriefer des changement qu'il avait opéré, de son traitement hormonal qu'il avait commencé et la manière dont il se sentait maintenant qu'il n'avait plus besoin de prétendre être quelqu'un d'autre. Une fois que les quatre amis eurent constaté qu'Alec se portait mieux que la dernière fois qu'ils l'avaient vu la dernière fois chez Magnus, ils se mirent en place pour l'entraînement. Jace et Simon lui apprirent certains de leurs enchaînements et d'autres de leurs techniques pour l'aider à se muscler un peu plus et à affirmer sa carrure, sans négliger pour autant sa souplesse qu'il devait conserver pour continuer à utiliser son arc comme il se devait. Ils passèrent l'heure suivante à s'entraîner, donc, sans relâche, toujours dans la bienveillance et assurant la sécurité des uns et des autres. A la fin d'un énième enchaînement, Simon et Isabelle reclamèrent une pause que les trois autres leurs accordèrent de bonne grâce. Les deux plus jeunes s'écroulèrent sur l'un des tapis et Isabelle annonça qu'elle allait leur préparer un goûter et Jace proposa de l'aider. Voyant son parabatai et sa jumelle quitter la salle, Alec s'empressa de faire un détour aux toilettes avant qu'ils ne reviennent pour ne pas manquer le goûter avec lequel ils reviendraient. Le noiraud remonta donc à l'étage supérieur et fila du côté des hommes, maintenant qu'il pouvait s'y rendre sans soucis. Enfin, ça, c'était la théorie. En pratique, le jeune homme de presque dix-sept ans vit deux Nephilim lui tomber dessus à peine eut-il passé la porte. Il n'eut qu'à peine le temps de voir leur ombre que le premier des deux le poussa contre le mur sans ménagement, faisant s'affoler son cœur dans la panique.

- Regardez moi ça..., siffla l'un d'eux. Alors, Lightwood, tu pensais vraiment qu'on ne t'aurait pas reconnue ?

- Qu'est-ce que vous me voulez ? Paniqua Alec en se relevant péniblement pour finalement se faire mettre au sol une fois de plus.

- Toi, qu'est-ce que tu veux, plutôt ? S'amusa l'autre. Qu'est-ce que tu es venu foutre ici ? Tu avais envie de te rincer l'œil et de mater ? C'est pour ça que tu t'es sapé comme un mec ?

- Annabelle Lightwood, quelle coquine, rit méchamment le premier. Hein, pas vrai que tu es une petite salope Annabelle ?

- S'il vous plaît, laissez-moi partir, souffla le noiraud d'une voix étranglée. Je ne dirais rien à personne, laissez moi partir et on oublie ça...

- Oh que non tu ne diras rien, tu n'as pas intérêt. Regarde toi, te prendre pour un mec. Tu n'es qu'une merde, tu le sais ça ? Tu n'es même pas une Chasseuse d'Ombre, même le sorcier qui te baise nous ferait moins honte que toi. Mais c'est pas grave, on s'en fout nous que tu sois défaillantes, ça ne va pas nous empêcher de nous amuser un peu. Alors soit une bonne fille et écarte les jambes, tu veux ? Tu vas voir, avec moi tu vas adorer être une femme.

Alec sentit son cœur manquer un battement et il se releva aussi vite que possible pour atteindre la porte d'entrée avant ces deux fous furieux qui s'étaient mis en tête d'abuser de lui. Pourtant, sa carrure était encore frêle et ils étaient à deux contre un. Le combat était perdu d'avance. La terreur brillait dans ses yeux cobalts lorsque les yeux hommes le saisirent pour le plaquer au sol une nouvelle fois, l'un maintenant ses bras écartés et l'autre s'installant sur son bassin. Le Chasseur d'Ombre sentait son coeur battre à tout rompre et il se débattit de toutes ses forces avant de se prendre un coup de poing dans la joue qui lui fit lâcher un gémissement douloureux qui le sonna quelques instants. Profitant de cette diversion, le Nephilim assis sur lui se saisit des pans de sa chemise pour les écarter, arrachant les boutons qui s'éparpillèrent sur le sol des toilettes. De sous sa chemise, ils virent le binder couleur de peau que portait le noiraud pour dissimuler sa poitrine et, avec un sourire sadique, ils le brûlèrent de leur stèle, le tissu ne supportant pas la puissance de la rune. Alec gémit piteusement en tremblant de tous ses membres et un sanglot déchira sa gorge lorsque sa poitrine leur fut exposée. Les deux hommes, visiblement satisfaits de la situation, commencèrent à le caresser, d'abord sur les seins et le ventre, puis celui installé sur lui se décala pour lui retirer son jean d'un mouvement brusque, le mettant à nu. Le noiraud, au supplice, fondit en larmes et supplia encore et encore d'être libéré. Il hurla même, appelant à l'aide, mais se figea en apercevant la rune de silence tracée sur la porte des toilettes. Personne ne l'entendrait, personne ne viendrait le chercher. Fermant les yeux pour canaliser la douleur, le jeune homme se mordit la lèvre à sang lorsque l'homme qui le dominait entra brutalement en lui sans la moindre douceur. Sanglotant de terreur et de douleur, étendu à même le sol, le Chasseur d'Ombre supplia silencieusement Raziel, Lilith, n'importe qui de lui venir en aide. Il pensa à Magnus, Magnus si loin et dont il avait tant besoin en cet instant. Alec hurla de désespoir et se prit coups sur coups, son premier agresseur caressant ses seins jusqu'à lui en faire mal, l'autre le martelant de coups de rein brutaux et bestiaux. Il n'y avait aucun plaisir, même pour ces deux monstres, si ce n'est celui de le voir souffrir. Alors, après plusieurs minutes à n'être que leur marionnette, Alec sentit l'homme s'écrouler sur lui dans un râle, le souillant de sa semence et le jeune homme se pinça les lèvres pour ne pas vomir de dégoût.

- Pas mal, Lightwood, rirent-ils comme deux animaux. A bientôt, poupée : on est très loin d'en avoir fini avec toi...

Après son agression, le noiraud était resté étendu au sol un long moment avant de se rhabiller et de filer sans donner d'explication à sa famille, ne leur envoyant qu'un simple message comme quoi il ne se sentait pas bien. La suite, Magnus et lui la connaissaient tous deux. Pourtant, le noiraud n'y avait pas repensé depuis des années et que son sorcier lui rappelle à ses traumatismes le blessa profondément. Pourtant, il comprenait peu à peu le point de vue de l'immortel et son intention derrière ses paroles. Relevant la tête, il constata avec un certain soulagement que son époux pleurait lui aussi, sans honte aucune. L'Indonésien prit son visage en coupe et embrassa ses lèvres chastement en posant son front contre le sien pour chuchoter ce qui n'appartenait qu'à eux.

- Je m'en voudrais éternellement de ne pas avoir été présent pour les empêcher de te faire du mal ce jour-là...Et je m'en veux tout autant de te rappeler combien tout ça a été horrible pour toi, Sayang. Mais je veux que tu comprennes que tu n'es plus cette personne. Tu n'es plus cette jeune fille effrayée, perdue, que la vie à rouée de coups. Tu ne l'es plus, Sayang. Tu es Alexander Gideon Lightwood-Bane, mon mari, le père de Max...S'il te plait, je t'aime tant mon ange, ne m'enlève pas ça, ne disparait pas. C'est toi que je veux près de moi, pas Annabelle, pas une copie de toi, pas le voisin d'en face : je veux toi et uniquement toi. Je veux Alexander Gideon Lightwood-Bane, tu comprends ?

- Je comprends..., murmura Alec d'une voix étouffée. Je veux être Alexander Lightwood-Bane...Je suis...Alexander Lightwood-Bane.

- Oui, tu l'es, depuis toujours Sayang, et pour l'éternité, souffla Magnus en pleurant de soulagement.

Les deux époux, instinctivement, soudèrent leurs lèvres et restèrent blotti dans les bras l'un de l'autre. Tendrement. Simplement. Sans rien ni personne pour les déranger. La route serait longue, et le Grand Sorcier de Brooklyn ne doutait pas que d'avoir rappeler de tels souvenirs à son mari ne resterait pas sans conséquences, mais pour l'heure ils n'avaient besoin que de l'autre pour s'apaiser et se gorger d'amour. Tout irait bien, tant qu'ils seraient ensemble : Magnus et Alexander Lightwood-Bane, tout du moins l'espèraient-ils...

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