Chapitre 24 : Bon Baisers d'Amérique


Depuis deux semaines l'ambiance était au beau fixe. Les professeurs commençaient à remarquer une certaine cohésion au sein de la maison Dumbledore, et l'humeur des 8es années en était la preuve. Ils étaient tous assez concentrés en cours et assidus dans leur travail, il n'y avait pas eu une seule dispute depuis la dernière disparition d'Ernie et tout le monde se parlait, même Drago était inclus dans les conversations. Harry était très fier des remarques que Stebbins et Hermione lui avaient faites sur le fait qu'il contribuait à cette cohésion, et il était plutôt soulagé que ses amis aient arrêté de l'accuser de semer la discorde comme après sa rupture avec Ginny. La rousse était finalement un peu sortie de l'esprit de l'élu, qui était tant concentré sur ses cours la plupart du temps qu'il avait fini par passer au dessus de ses sentiments presque involontairement, même s'il ne pouvait pas s'empêcher de la chercher du regard à la table des Gryffondors à chaque fois qu'il entrait dans la grande salle aux heures des repas. Il ne pensait plus trop à elle avant de dormir, puisque tous ces derniers soirs il s'était plongé dans l'album photo que son professeur de potions lui avait donné, ne pouvant plus s'en détacher. Il allait systématiquement aux mêmes pages, où sa mère et son groupe d'amies était en train de rire ici, où son père fêtait avec l'équipe de Quidditch de Gryffondor une victoire là, où toute la promo souriait à la caméra encore ici ... A force de feuilleter le même livre tous les soirs, il en connaissait toutes les photos, cette petite trace sur la photo des professeurs, cette petite tache qui recouvrait les cheveux d'une jeune fille de serpentard, cette légère déchirure entre deux photos du parc ... Le contact de la couverture en cuir vieilli sous ses doigts était devenu si familier qu'il pouvait se le représenter dans ses moindres détails uniquement de tête. Il ne s'en lassait simplement pas, et ne l'avait surtout dit à personne d'autre. Il avait l'impression d'avoir retrouvé sa famille comme ça, et au fond de lui il savait que ses amis détruiraient ce sentiment aussitôt qu'ils apprendraient l'existence de ce livre.

Harry s'arracha à ses pensées et concentra son esprit sur le cours de botanique. Neville venait de passer à une autre plante d'étude et sortit d'un bocal une espèce de masse visqueuse qu'Harry reconnut aussitôt. Sans attendre une unique question de Neville, il leva la main, prêt à parler de ce végétal. Son ami au visage rond lui sourit gentiment et le laissa expliquer aux autres ce qu'il faisait passer dans les mains des 8es années.

- C'est de la branchiflore, une plante méditerranéenne qui permet d'obtenir momentanément les caractéristique d'un animal marin. Il suffit d'en manger une bouchée pour avoir des branchies et les doigts et orteils palmés pour une durée d'environ une heure.

- C'est exact Harry, mais il ne faut pas oublier que c'est une plante très difficile à obtenir. On ne peut en cultiver que dans de l'eau de mer avec l'aide de strangulots, qui ne sont maîtrisés que par les êtres de l'eau. Les relations entre les sorciers et les êtres de l'eau sont parfois difficiles, c'est pour ça que la branchiflore est si rare.

À cet instant Neville s'interrompit, les yeux tournés vers la porte de la serre. Tous les 8es années se tournèrent pour voir la cause de son silence et Harry fut très surpris de voir le professeur Chourave qui se tenait là à les regarder avec un sourire bienveillant. Elle les félicita pour leur attention en cours et repartit peu de temps après, ayant elle-même les 3es années en cours dans la serre numéro 1. Le cours se finit rapidement et ils traversèrent le parc sous la pluie pour aller vers leur prochain cours, qui était une heure de métamorphose avec le professeur Mac Gonagall, leur dernière heure de cours avant le repas.

Harry se couvrait tant bien que mal des trombes d'eau lui tombant sur la tête, et il n'était pas le seul à utiliser sa cape pour se protéger. Hermione avait sorti sa baguette et formait un parapluie translucide par un sort qu'Harry ne connaissait pas, et il se promit mentalement de l'apprendre rapidement, regrettant uniquement de ne l'avoir pas fait plus tôt. Il se faufila à l'abri de ce parapluie magique et arriva au château presque sec, ce qui ne dura pas longtemps puisque Peeves avait trouvé un moyen de récupérer des bassines énormes qui avaient dû autrefois servir pour faire prendre des bains, et il les remplissait dehors avec la pluie et les vidait sur les élèves qu'il jugeait trop secs dans le hall. Il venait justement d'en remplir une et se dirigeait vers le groupe des 8es années quand une voix puissante retentit.

- Peeves ! Laisse ces élèves tranquilles, ils ne t'ont rien fait !

C'était le baron sanglant qui venait d'arriver, et il chassa l'esprit frappeur d'un claquement de ses chaînes. Il n'eut aucune réaction lorsque Suzanne et Hannah le remercièrent et continua son errance, le regard sinistre. À cause de cet incident ils durent courir pour ne pas arriver en retard en cours de métamorphose mais trouvèrent la salle vide en arrivant. Pourtant tout le monde s'assit sagement et sortit ses affaires, s'attendant à voir apparaître un chat derrière un bureau. Il fallut cependant attendre une bonne dizaine de minutes avant que ne retentissent dans le couloir les pas de la directrice, qui arrivait en courant à moitié. Elle avait les joues rouges d'avoir fait un tel effort pour son âge, mais faisait tout pour ne rien laisser paraître de sa fatigue. Harry put remarquer malgré ses efforts ses mains tremblantes et son souffle court, et cette faiblesse, ce qu'elle voulait cacher au maximum, faisait beaucoup de peine. Tous savaient qu'elle avait utilisé une grande puissance magique lors de l'attaque de Poudlard, et que cet effort immense qu'elle avait dû produire l'avait considérablement vieillie. Même si elle était une sorcière incroyablement puissante, elle ne l'était pas autant que Dumbledore, et elle en payait cher les conséquences. C'est donc avec une pointe d'inquiétude pour Mac Gonagall qu'Harry suivit son cours, remarquant avec soulagement qu'elle semblait se remettre quand même assez rapidement. Ils étaient en train de ranger leurs affaires à la fin du cours quand elle les interrompit, coupant Dean et Seamus dans leur élan pour aller manger.

- J'ai oublié de vous dire que dans une semaine nous allons recevoir les correspondants des 4es années de l'école américaine d'Ilvermorny, alors d'ici-là apprenez à vous tenir.

La déclaration de Mac Gonagall suscita de nombreuses réactions de la part des 8es années, qui en parlaient toujours en descendant manger, et en passant devant d'autres élèves Harry se rendit compte qu'ils n'étaient pas les seuls à avoir eu cette nouvelle. Outre les 4es années qui avaient dû être prévenus plus tôt, tous les élèves semblaient n'avoir qu'un seul mot à la bouche : Ilvermorny. En passant devant un groupe de filles de Serdaigle de 6es années il les entendait glousser et se demander si les garçons d'Ilvermorny étaient aussi beaux et aussi séduisants que ce que l'on disait, et Harry ne put s'empêcher de penser que les garçons de Poudlard étaient tout à fait corrects voire même très beaux, alors pourquoi chercher ailleurs ... Il ne s'était jamais posé la question si les américaines étaient vraiment différentes, mais dans tous les cas il n'allait pas le voir avec les correspondants, elles étaient quand même bien plus jeunes que lui.

- Quel dommage que nous n'ayons pas eu de correspondants en 4e année, cela aurait été vraiment très enrichissant comme expérience.

Personne ne répondit à Ernie mais beaucoup hochaient la tête à ce qu'il disait, la bouche pleine de poulet. Harry était profondément déçu de n'avoir jamais eu de correspondant, mais en même temps avec le tournoi des trois sorciers qu'il avait vécu en 4e année il avait pu rencontrer Viktor Krum et Fleur Delacour, et il savait que le sorcier et Hermione avaient correspondu encore longtemps après par lettres, mais il était presque certain qu'ils avaient dû arrêter avec la guerre, Hermione ayant bien d'autres choses à faire. Il voyait souvent des nouvelles de l'attrapeur dans le journal, étant mondialement connu, et il avait l'occasion de voir Fleur facilement en lui rendant visite avec Bill dans la chaumière aux coquillages, même s'il n'y était pas retourné depuis la fin de la guerre. Trop de souvenirs, trop de signes de cette guerre y étaient, et même s'il refusait de se le dire, il avait surtout peur de voir la tombe de Dobby qui faisait face à la mer. Ce petit elfe de maison lui avait cruellement manqué ces derniers mois, il aurait aimé descendre aux cuisines de Poudlard et de voir ses grandes oreilles bouger en même temps qu'un sourire se fendrait sur son visage, et parler avec lui de chaussettes et de chapeaux. Il avait toujours dans sa valise la paire de chaussettes que Dobby lui avait offerte en 5e année, et même s'il ne l'avait jamais mise elle était le seul souvenir de son ami, la seule possession qu'il avait laissé avant de quitter ce monde. Une larme solitaire s'écrasa sur la table en bois sans qu'aucun des 8es années ne s'en aperçoive, et Harry essuya ses yeux du revers de la manche. Il détestait se perdre dans ses pensées où il ne retrouvait que le bruit des sanglots et les cris de douleur. Il devait rester dans le présent pour avancer, et ses pensées, maudites soient-elles, étaient son plus grand obstacle. Il dût faire un énorme effort pour revenir dans la conversation pour écouter Hermione parler des coutumes américaines et des rapports entre moldus et sorciers de l'autre côté de l'océan. Quand les plats disparurent pour laisser la place au dessert, Suzanne prit la parole, à la fois gênée de parler presque officiellement devant les autres 8es années et à la fois apparemment très enthousiaste avec ce qu'elle s'apprêtait à dire.

- Comme vous le savez on a tous un projet à faire et moi j'ai décidé d'organiser un père noël secret. Vous allez tirer un nom d'un autre de la maison de Dumbledore et il faudra que vous lui trouviez un cadeau, et après le but c'est que ça reste secret de qui offre à qui donc dites vraiment à personne la personne que vous avez piochée !

Elle fit passer son chapeau dans lequel elle avait plié des petits bouts de parchemin, et Harry reçut son propre bout de parchemin, écrit à la plume rapidement et plié en quatre. Il ne put réprimer la pointe de déception qu'il ressentit en lisant « Ernie », car il avait toujours apprécié le sorcier de Pouffsoufle mais il ne le connaissait pas au point de savoir quoi lui offrir, et il aurait voulu pouvoir demander à Hermione un conseil mais elle comprendrait trop vite, et c'était contre les règles du jeu. Harry observa pendant tout le reste du repas Ernie à la dérobée, cherchant dans ses traits un indice sur le cadeau qu'il aimerait. Il ne trouva pourtant absolument rien avant que les 8es années ne repartent en cours et se promit de suivre ses moindres faits et gestes les prochains jours pour trouver le cadeau parfait. Ron arriva à ses côtés alors qu'ils montaient les grands escaliers vers la tour d'astronomie et dût s'y reprendre à deux fois pour attirer l'attention de l'élu, qui était perdu dans sa contemplation du couple marchant devant eux.

- Harry ! Eh ! Harry ! Tu m'écoutes ?

- Oui oui ...

Il n'avait pourtant pas détaché les yeux des mains d'Hermione et d'Ernie entrelacées, son cerveau fonctionnant à mille à l'heure pour interpréter tout ce qui pouvait l'être. Ce père noël secret n'allait pas être une partie de rigolade.

- Je disais que je n'avais pas encore commencé les devoirs de transfigurations pour mardi prochain, ils sont vraiment long ?

- Oui oui ...

Ron remarqua que son meilleur ami ne l'écoutait pas et quand Harry tourna enfin le regard vers lui il regardait les cheveux d'Hermione se balancer dans son dos au rythme de ses pas avec le visage fermé.

- Je n'aurais pas dû revenir ici, pas pour vivre ça en tous cas.

Et il laissa Harry sur ces mots, grimpant l'échelle menant à la tour d'astronomie si vite que le brun n'eut pas le temps de faire le moindre geste pour tenter de le rattraper. Dans la salle sombre au parfum entêtant Harry n'arrivait pas à se concentrer sur quoi que ce soit, ni sur le cours, ni sur Ernie, et très souvent il se reprenait à observer Ron qui était parti s'asseoir au fond de la salle avec Dean et Seamus. Lui-même s'était retrouvé avec Suzanne et Hannah, qui étaient toujours aussi admiratives de Trelawney, même si cette dernière continuait les présages de malheur sur ses élèves. Harry ne comprenait pas pourquoi on les avait forcé à reprendre l'astrologie, qui ne leur serait en aucun cas utile pour leurs ASPICs. Il regardait une mouche foncer à plusieurs reprises dans la fenêtre quand la sorcière passa devant sa table et le frôla avec le bout de son long châle le faisant sursauter. Elle s'arrêta devant Drago, Neville et Pansy et regarda le serpentard avec ses yeux grand ouverts, mystifiés par ses énormes lunettes. Elle leva les mains au ciel d'une façon plus que tragique et se mit à presque crier le malheur que Drago allait connaître, la voix tremblante.

- Je vois ... Un coeur troublé entre le bonheur et le mal ... ! Je vois ... Un chemin double, une fin tragique ! Attention aux choix que tu vas faire, mon cher ! Ton destin sera scellé par ce choix !

Elle resta quelques instants silencieuse, comme pour faire durer son effet, mais il y avait bien longtemps que la classe avait arrêté de croire à ses prédictions faites en cours, même si Harry savait qu'elle avait déjà fait deux véritables prophéties, dont une qui avait marqué sa vie à jamais. Aucun ne peut vivre tant que l'autre survit, mais maintenant que Voldemort était mort, vivait-il vraiment ? Il n'avait pas l'impression, c'était comme s'il était mort avec ce sort dans la forêt, quelques mois plus tôt, qu'il n'était jamais revenu entièrement de son entrevue avec Dumbledore dans ce qu'il avait fini par désigner comme l'au-delà. Il avait toujours eu une raison de vivre, une cause pour laquelle se battre, mais maintenant que le mage noir avait été vaincu, il n'avait plus aucune réelle utilité dans le monde, il se contentait se suivre sa vie sans savoir où ses pas le mèneraient, et il n'appelait pas ça vivre. Quand il posa son regard sur chacun de ses camarades de classe, néanmoins, il crut voir en chacun d'eux une raison de vivre, une volonté de sourire avec eux, et de continuer à avancer avec eux. Il devait voir en chacun une raison de vivre, il en avait besoin. Que ce soit à cet instant ou plus tard, il avait l'impression qu'il ne les quitterait jamais vraiment. Ils s'étaient relevés ensemble, et maintenant il fallait qu'ils réapprennent à marcher, et Harry n'avait qu'un seul espoir : qu'ils le fassent ensemble.






<°>°<°>°<°>°<°>°<°>°<°>°<°>°<°>°<°>°<°>

Bonjour bonjour tout le monde ! Avec le Coronavirus, je n'ai plus cours, donc il y aura finalement un chapitre par jour (ou un tous les deux jours si je n'ai pas le temps de poster) ! On arrive bientôt à la moitié de notre aventure, et le Drarry arrive très bientôt (je sais que certains s'impatientent) ! Bonne lecture, restez en forme et en bonne santé pendant cette période un peu plus stressante pour certains :)

<°>°<°>°<°>°<°>°<°>°<°>°<°>°<°>°<°>°<°>

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top