Bonus 2
Un crac sonore retentit dans la cuisine de la grande maison. Derrière un nuage de poussière, un elfe de maison fit son apparition sur le carrelage froid. Harry l'attendait en croisant les bras, un léger sourire flottant sur ses lèvres.
- Kreatur ?
- C'est un honneur pour Kreatur de revenir vous servir, maître.
Le nez disproportionné de la créature toucha le sol alors qu'il se pliait en deux face au sorcier. Drago fit irruption dans la pièce, une brosse dans la main.
- Harry ? Mais que ... que fait-il ici ?
- Le neveu de maîtresse Bellatrix est un ami de maître ? demanda l'elfe de sa voix criarde.
Le blond lança un regard plein de questions à son petit-ami, avant de lui demander silencieusement :
- Que fait-il ici ?
Ils n'étaient revenus que la veille de chez les Dursleys, et Harry avait passé la nuit à réfléchir. Et il en avait conclu que tout ce dont il avait besoin était d'une vraie maison, un foyer, un endroit où il se sentirait chez lui. Et il était convaincu que l'elfe de maison pourrait les aider, du moins au début. Il n'était plus si jeune après tout, et le brun ne voulait pas en mettre trop sur ses frêles épaules. Il les avait déjà suffisamment aidés alors qu'ils se réfugiaient dans la vieille demeure pendant leur recherche des horcruxes.
- Kreatur, j'ai besoin de toi pour rénover la maison.
- Quoi ? s'écria le Serpentard, manquant de perdre l'équilibre sous le coup de l'étonnement.
Harry leva ses yeux émeraudes vers lui, ses lèvres fines dessinant un sourire auquel le sorcier blond ne pouvait rester sans réaction.
- Tu as bien compris, je veux rénover cette maison.
- Mais, je croyais que c'était provisoire et ...
- Tu n'aimes pas ici ?
La température de la pièce semblait avoir chuté de plusieurs degrés, à l'image du cœur du Gryffondor dans son buste. Il était pourtant sûr de lui faire plaisir, que ça lui plairait ... Mais l'étonnement et la surprise qui faisaient briller les pupilles acier n'étaient accompagnés d'aucune joie, et cela finit d'achever le sorcier à lunettes. Il se redressa et partit la mort dans l'âme à l'étage le plus haut, cherchant désespérément du réconfort, et surtout des réponses. Il remarqua que Drago voulut essayer de l'intercepter, mais il l'ignora du mieux qu'il put et ouvrit sans réfléchir la porte de la chambre de Sirius.
Au milieu de toutes images et décorations aux couleurs de Gryffondor, le brun s'y sentait plus chez lui qu'il ne l'avait jamais été, accueilli comme il aurait pu l'être chez sa famille. Ils avaient déjà pu voir pas plus tard que la veille que la seule famille d'Harry avait définitivement tiré un trait sur lui, alors il avait pris la décision de tout recommencer à zéro. Avec Drago. Qu'ils aient leur propre famille, leur propre foyer, sans devoir dépendre de leurs familles respectives qui ne les acceptaient pas pour ce qu'ils étaient. Ils n'avaient pas encore rencontré ensemble les Malefoys, mais Harry n'était pas impatient de se retrouver à nouveau face à l'ancien Mangemort, dans le manoir où tant de malheurs étaient arrivés. Il savait bien au fond de lui qu'il devrait le confronter tôt ou tard, puisque cette situation ne pouvait pas durer indéfiniment. A la rentrée, Harry partirait commencer ses entraînements en tant qu'Auror, Drago hésitait encore entre essayer de devenir un guérisseur ou professeur de potions. Mais pour commencer leur nouvelle vie, il fallait bien une maison, un endroit où rentrer le soir, non ? Un endroit où il se saurait accueilli, attendu. Une place où il pourrait s'endormir sur ses deux oreilles dans l'impatience d'un lendemain chaque fois plus éclatant.
S'il se sentait à l'aise dans cette grande demeure, ce n'était que grâce à la présence constante de Drago à ses côtés. Ils avaient décidé de rester dans une chambre au premier étage pour minimiser la partie de la maison à nettoyer pour la rendre vivable, mais le feu chaleureux qui brûlait chaque soir dans la cuisine n'enlevait rien au caractère glacial de cette maison. Sombre, poussiéreuse, et emplie de magie noire, c'était tout l'inverse de ce que le sorcier était. Il aimait cette maison, son héritage de son parrain, et aussi la place qu'elle occupait au centre de Londres, alors il voulait lui communiquer sa couleur. La transformer de l'intérieur, pour qu'enfin, il se sente chez lui.
Mais jamais, jamais il n'avait pensé que Drago puisse être déçu de son initiative. Pourtant, c'est bien ce qu'il avait pu voir dans les yeux du blond, et maintenant il remettait tout en question. Se laissant lourdement tomber sur le lit de son parrain, soulevant un nuage de poussière au passage, il enfonça sa tête dans ses bras. Drago ne voulait-il pas rester avec lui ? Considérait-il cette situation comme temporaire ? N'avait-il jamais réfléchi à un après ? Prévoyait-il déjà de refaire sa vie loin du sorcier qui ne retenait désormais plus ses larmes ? Le sorcier se laissa tomber sur le dos, soudainement écrasé par le poids de son impuissance. Il s'était sûrement cru dans ces stupides comédies romantiques moldues qu'il avait regardées par-dessus l'épaule de Pétunia, tel le héros incompris qui se faisait sauver par son âme sœur et avec qui il passait le restant de ses jours. Non, ce n'était pas ça. Il s'était sûrement emballé bien trop vite, et son cœur se serrait douloureusement à cette pensée.
Le bruit des pas lourds de Drago dans l'escalier lui fit l'effet d'un électrochoc, il se leva vivement du lit et essuya ses larmes du revers de la main, concentrant tous ses efforts pour retrouver une tête à peu près normale. Il espérait que la faible luminosité qui passait à travers la fenêtre sale ne permettrait pas au blond de deviner qu'il avait pleuré, mais c'était peine perdue.
- Harry ? demanda-t-il d'une voix douloureusement douce et chaleureuse. Qu'est-ce que tu ...
Il s'interrompit en pénétrant dans la pièce poussiéreuse et se dirigea à grandes enjambées vers son petit-ami, et le prit dans ses bras quelques instants. Il s'écarta, retira ses lunettes embuées et passa son pouce fin sur les pommettes du brun, un sourire rassurant illuminant son beau visage.
- Harry, qu'est-ce qu'il s'est passé pour que tu sois comme ça ?
Comme le brun restait silencieux, Drago ne se démonta pas et ne montra aucun signe d'impatience. Seulement une infinie douceur qui ne faisait qu'empirer la situation sans qu'il ne puisse s'en rendre compte.
- Quoi que j'ai pu dire ou faire, je m'en excuse. Je ne voulais pas te mettre dans cet état, je m'en veux ...
- Tu n'as pas à t'en vouloir ! répondit un peu trop vite le Gryffondor, désormais écarlate. C'est juste que ...
- Explique-toi, bébé. J'ai besoin de te comprendre, sinon ça ne marchera pas.
« Sinon ça ne marchera pas ». Le cœur d'Harry se serra un peu plus, et il s'assit sur le rebord du lit en soupirant doucement.
- Tu ne veux pas rester ici, hein ?
Les yeux gris du Serpentard s'arrondirent de stupeur, mais son compagnon interpréta son silence comme de la culpabilité, et il baissa la tête, en proie à des pensées plus sombres les unes que les autres.
- Je le savais, je n'aurais pas dû y croire autant, m'attacher autant, tout est ma faute ...
- Mais Potter qu'est-ce que tu racontes ?
- Je le voix bien à ta façon de te comporter ! Tu évites soigneusement de dire quoi que ce soit par rapport à un quelconque futur, et là pour rendre la maison vivable tu as l'air plus que sceptique ! Je ne me ferais pas avoir Malefoy !
La tension était montée d'un cran entre les deux garçons, et Harry s'était levé sans s'en rendre compte. Il avait bien évidemment noté que Drago l'avait appelé « Potter », instaurant immédiatement une distance, un mur qui lui paraissait presque infranchissable entre eux. Et la douleur en était insupportable.
- Tu te rassois et tu m'écoute. Gronda le Serpentard. Si je ne parle pas d'avenir avec toi, c'est parce que, je te cite, « aimer c'est prendre le temps de vivre au jour le jour ». Alors c'est ce que je fais. Parce que mon avenir n'est nulle part sans toi. Tu ne te débarrasseras pas de moi facilement. Et si je suis sceptique quant à changer cette maison, c'est juste que ça me paraît être insurmontable. Tu as vu la taille de la maison ! Il nous faudrait des années, avec une armée d'elfes de maison, pour tout rénover ! Mais maintenant tu enlèves toutes tes idées de ta petite tête de bébé et tu descends avec moi, si tu veux qu'on rénove quelque chose autant commencer par la cuisine c'est là où on est le plus.
Le brun resta complètement abasourdi à ce qu'il venait d'entendre. L'étau qui martyrisait son cœur semblait être libéré d'un poids, et il avait l'impression de respirer à nouveau. Ses lèvres se fendirent inconsciemment en un grand sourire à l'intention de Drago qui lui déposa un doux baiser sur le front pour toute réponse. Alors que le Serpentard s'apprêtait à ressortir de la chambre, Harry l'attrapa par le bras et déclara timidement :
- Est-ce qu'on ne pourrait pas ... Dormir dans cette chambre plutôt que celle du premier étage ?
- Ah non ! s'exclama le concerné avec une grimace de dégoût. C'est bien trop rouge pour moi, je vais en faire des cauchemars !
Il finit pourtant par céder au regard suppliant de son petit-ami et accepta de bon cœur de s'installer dans la chambre de son parrain.
- Kreatur ! appela-t-il d'une voix puissante.
Un crac sonore retentit immédiatement dans la pièce et l'elfe de maison apparut immédiatement dans la chambre, vêtu de son tablier immaculé. Il s'inclina à nouveau à en toucher le sol du bout de son nez et demanda de sa voix aiguë :
- Y-a-t-il une chose que Kreatur peut faire pour aider l'ami de Maître Harry ?
- Oui, nous aimerions nous installer dans cette chambre, mais il faut d'abord la nettoyer. Est-ce que tu pourrais nous aider, s'il te plaît ?
L'elfe de maison ne semblait attendre que ça et ses yeux gros comme des balles de tennis s'illuminèrent alors qu'il s'inclinait à nouveau devant les deux sorciers. Harry était reconnaissant de voir que le Serpentard essayait d'être agréable avec Kreatur même si cela allait à l'encontre de son éducation, et il était bien conscient de l'effort que cette attitude lui demandait. On ne changeait pas le monde en un jour, mais on pouvait le changer, Drago en était la preuve vivante. Il mettait tout ce qu'il avait appris, tout ce qu'il avait pu vivre et expérimenter pour le Gryffondor, et c'était sûrement la plus grande preuve de son amour. Harry s'approcha de lui et l'embrassa rapidement sur la joue avant de venir en aide à l'elfe qui s'affairait déjà dans toute la chambre.
A la fin de la soirée, le nuage de poussière était enfin sorti par la fenêtre et la pièce sentait le propre comme la cuisine de Pétunia. Les carreaux avaient retrouvé leur transparence initiale, laissant passer les rayons d'un soleil couchant sur le lit. Les meubles étaient enfin libéré de leur charge de poussière. Les photos et affiches avaient retrouvé leur éclat grâce à des techniques que Drago avait appris avec sa mère. De nouveaux draps aux couleurs de Gryffondor apportaient la touche finale au nettoyage, et Harry était heureux de voir qu'ils ne changeaient en rien l'ambiance de la pièce. C'était comme Sirius l'aurait voulu, et c'était comme ça qu'il souhaitait le conserver. La chambre de son parrain resterait comme ça, ornée de rouge et or jusque dans ses moindres recoins, et agrémentée de posters moldus de tous genres. Kreatur alluma un bon feu dans la cheminée, et les flammes emplirent instantanément la pièce de leur lumière dansante. Le brun souriait sans pouvoir s'en empêcher. Il avait l'impression d'être de retour à Poudlard, dans la salle commune de Gryffondor. Il se sentait chez lui, et les bras de Drago qui vinrent s'enrouler autour de sa taille ne firent qu'augmenter son bonheur. Il soupira de bien-être en calant sa tête contre les doux cheveux platine et se laissa envoûter par le mouvement hypnotisant du brasier.
Ils s'occupèrent avec Kreatur de nettoyer sa propre « chambre », qu'il refusait de quitter pour une pièce plus grande, et le cœur du Gryffondor se gonfla de nostalgie en voyant les argenteries et cadres photos soigneusement entreposés derrière les tissus sales. Il se souvenait parfaitement de cet été, ce dernier été passé avec Sirius ici au 12 square Grimmaud. De tout le nettoyage, de l'angoisse avant de comparaître devant le Magenmagot pour avoir conjuré un patronus, de l'excitation des enfants pendant les réunions de l'Ordre du Phénix ... A ce moment-là, il aurait tout donné pour se retrouver en première ligne, se battre avec les autres, tout simplement agir. Mais là, devant le feu, dans les bras du sorcier qui faisait battre son cœur, il réalisait à quel point il avait pris de risques, combien il avait vécu dangereusement et surtout la chance qui lui permettait d'être en vie, avec celui qu'il aimait. Et il n'espérait qu'une chose : que leur bonheur dure encore longtemps.
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