Chapitre 1 : Braquage
Une nouvelle découverte. Celle de son existence...
~*~
Marinette
Du plus loin que je me souvenais mon amour pour la mode avait toujours existé et il avait été si présent et envahissant qu'il m'avait poussé à me battre pour devenir celle que je voulais et non celle qu'on voulait que je sois.
A la place de satisfaire des personnes que je considérais comme sans foi ni loi j'avais préféré trouver refuge dans les tissus, travaillant durant des heures seule et d'arrache pieds sur mes leçons. Puis avec du temps, j'avais remplacé la solitude écrasante et étouffante par un silence fidèle et réparateur.
Cependant aujourd'hui le plus important était : ma famille et mes amis. J'étais satisfaite du présent et de mes acquis, enfin j'essayais.
En effet j'étais incapable d'oublier le passé et donc Adrien... Sauf qu'il fallait quand même avancer. Je savais que de son côté il avait depuis longtemps tourner la page, je n'existais plus à ses yeux, j'avais disparu de sa vie comme j'aurais aimé qu'il le fasse pour la mienne mais ce que j'avais ressentis pour lui faisait partie d'un bout de ma vie d'avant désormais. Déjà parce que je savais le passé encore bien trop cramponné à nos souvenirs mais aussi car sinon jamais la plaie béante dans ma poitrine ne réussirait à se refermer.
Parfois, la nostalgie pouvait rendre bien triste. Pour autant je n'acceptait de laisser à Adrien que cette victoire éternelle, rien d'autre, rien de plus, jamais plus...
Épuisée, j'avais arrêté de lutter contre mes pertes et m'étais résignée à vivre dans les regrets. Au fond de moi, je ne cesserais jamais de revivre ce qui s'était passé entre lui et moi. Nous avions partagé trop de choses pour que cela soit autrement. Cette relation était à la fois l'opium de mon sang, le poison, le venin, mais aussi ma principale source d'énergie pour vivre. Son départ avait arraché un morceau de ma raison, mais les lambeaux de mon amour persistaient, motivant mon âme à continuer.
Plus résistant. Plus persistant. Plus éternel. Je luttai avec détermination contre mon intense attraction pour lui. J'avais tout essayé pour l'oublier, tout tenté, sans succès. Le destin rendait cette tâche insurmontable. Sous le ciel le plus magnifique, je continuais, encore et encore, à penser à lui.
Si seulement Nathaniel n'était pas mort... Il aurait su quoi me dire. Ses conseils me manquaient terriblement aujourd'hui. Sa mort tragique liée à la drogue l'avait rattrapé plus tôt que prévu. Et pourtant, ce n'était pas de sa faute. Le plus triste était que non, il n'était pas mort d'une overdose, mais d'un coup de feu.
En voulant me protéger, il s'était laissé mourir. Lui, mon meilleur ami. Il avait sacrifié sa vie pour moi... Rien que pour moi.
Si seulement je pouvais remonter le temps. Empêcher ce drame, prendre la balle à sa place. Le tir avait été soudain, je n'avais rien vu venir. Mais Nath, lui, oui. Toujours vigilant, il avait repéré la personne casquée, arme à la main, me visant de loin.
Oh Seigneur, oui.
Lui l'avait vue.
Mais pas moi.
Son décès n'avait pas seulement mis fin à notre amitié. Il avait aussi scellé la fin de ma relation avec Adrien.
Ce blond séduisant cachait un secret trop lourd à porter seul, et il avait choisi de me le révéler aussi. Pensait-il vraiment que je resterais avec lui ? Non. Jamais. Je ne pouvais simplement pas le supporter, c'était plus fort que moi. Et il le savait. Son geste était donc prémédité. Il voulait que nous nous séparions.
Parce qu'il ne me voulait plus.
Malgré tout, je lui en voulais toujours, seule dans mon coin. J'étais simplement ridicule. Comme on le disait, le ridicule ne tuait pas, n'est-ce pas ?
À force de repenser aux circonstances de la mort de Nathaniel, je commençais à détester Adrien. La haine s'était déjà installée, mais elle grandissait. Et c'était plutôt une bonne nouvelle.
En plus de m'obliger à le haïr, je mettais fin à mes sentiments. J'étouffais mon cœur sous une épaisse couche de nuages qui, au moindre souffle de vent, pourraient s'envoler... Peut-être. Mais au moins, j'essayais d'avancer sans lui. Il me manquait un pilier, et récupérer était déjà assez difficile. Je ne devais pas ajouter une nouvelle couche en m'attachant à quelqu'un d'aussi fort que pour Adrien.
Désolée Luka, mais tu resteras toujours un très bon ami.
Je sortais avec lui. Depuis... Quelques moins, il me semblait. C'était un garçon vraiment adorable et je l'aimais beaucoup. Mais pas autant que j'avais aimé Adrien... Il me comprenait bien. Mais aussi bien que Adrien... Et nous rigolions beaucoup tous les deux. Mais autant qu'avec Adrien...
Argh, Adrien sort de ma tête !
D'ailleurs, en parlant de petit ami, il n'en avait plus jamais eu une... de petite amie. M'aimait-il toujours ? J'ignorais la réponse. Toutefois, je n'oubliais guère que Adrien n'avait jamais été le genre de garçon à aimer les couples. Il avait toujours été le style de garçon à vouloir s'amuser et profiter des plaisirs de la vie. Un grand volatile !
À l'opposé de moi qui recherchais la stabilité passionnée et romantique des amours de jeunesse, je rêvais de découvrir le véritable amour. Pas de simples sentiments superficiels qui nous font rester quelques mois avec quelqu'un avant de le quitter sous prétexte que l'amour a disparu.
Il était évident que lui et moi étions des opposés complets. D'un côté comme de l'autre, rien ne pouvait nous faire tomber amoureux si ce n'est cette soirée où, en sortant de la bibliothèque, il m'avait arrêtée pour me demander une cigarette.
À cette époque, je ne fumais pas. Pourtant, cela n'avait pas empêché une conversation de naître entre nous. Nous nous entendions étonnamment bien.
Pendant deux ou trois heures, il m'avait parlé du lycée et de ses impressions. De mon côté, je lui avais un peu parlé de ma vie, et il m'avait écouté attentivement, souriant parfois. Il était très populaire, et l'était encore aujourd'hui. Mais sa réputation le précédait beaucoup, alors j'avais été un peu méfiante au début.
Cependant, j'avais compris qu'il cherchait simplement à vivre. Il n'était pas si complexe. Notre relation avait évolué. Le premier soir, en me raccompagnant chez moi, nous avions échangé un baiser timide, fougueux et doux sur la joue. Sa tendresse m'avait profondément touchée.
En me remémorant la chaleur de son corps contre le mien, je souriais comme une idiote. C'était si doux... si réconfortant.
À cette époque, rien d'autre dans le monde n'avait la même valeur pour moi qu'Adrien. Rien ne pouvait égaler l'éclat de son sourire. Personne ne pouvait le remplacer. J'étais alors plus naïve qu'aujourd'hui. Surtout, j'étais amoureuse.
Malheureusement, notre histoire d'amour, la plus belle de ma vie, prit fin. Elle s'éteignit comme la vie de Nathaniel, dans les ténèbres, noyée dans les larmes... et se perdit à jamais.
Pourtant, je m'efforçais d'avancer, de résister à l'envie de me jeter dans ses bras, risquant de compromettre le peu de liberté que j'avais réussi à retrouver en m'éloignant de lui. Céder à cette tentation aurait signifié sacrifier ma liberté, ce qui était inenvisageable. Sans elle, je savais que je sombrerais. Confier ma vie à l'homme qui avait montré sa capacité à me détruire était hors de question.
Notre rupture m'avait fait souffrir. Je ne referais pas la même erreur. Plutôt mourir.
— C'était une journée assez calme aujourd'hui. Et toi, ma chérie ? Me demanda mon père en s'accoudant au comptoir alors que je revenais à moi, dans un élan rempli de confusion, je me penchais et lui faisais la bise.
— Euh oui, les cours tu sais. Comme d'habitude, haha ! Ris-je en me redressant, le regardant dans les yeux.
Il fallait que je me concentre sur ce que me disait mon père. Repenser au passé ne m'apporterait que des ennuis. Et dans ma tête, c'était déjà assez le bordel comme ça. Quelques réflexions de plus, et je signais mon arrêt de mort.
— Mme. Bustier vous a rendu vos dissertations ? M'interrogea-t-il posément.
— Non pas encore, la semaine prochaine. Elle avait beaucoup de travail à cause des examens de fin d'année qui arrivent dans un mois. Lui expliquai-je en souriant un peu, pour faire passer plus facilement la bile qui m'était montée.
Ce que je cachais à mon père -et qui me révoltait au plus profond de moi- c'était le spectacle que Adrien avait fait en apprenant qu'il ne recevrait pas son travail à temps. Une fois de plus, tel un imbécile charismatique que seul notre village pouvait produire, il s'était permis de critiquer Mme Bustier sur son travail. La pauvre femme avait été profondément bouleversée.
Sachant que le père d'Adrien avait une grande influence, particulièrement à Hollywood, il aurait pu la faire renvoyer. Elle ne pouvait pas se permettre de perdre son emploi, surtout là-bas où les opportunités étaient rares.
Ce qu'Adrien avait fait était impardonnable. C'était tout simplement horrible. Mon père l'aurait encore plus détesté s'il l'avait su. C'est pourquoi j'avais préféré garder cet incident pour moi. Cela ne faisait que raviver des émotions de frustration et d'ironie.
Mon père avait une antipathie assez irrationnelle envers Adrien. Tout avait commencé lorsqu'il était venu me chercher en voiture, une rareté en soi puisque mon père, grand écologiste, préférait éviter d'utiliser la voiture pour de courtes distances. Nous vivions à seulement quinze minutes à pied du lycée, après tout. Je pouvais comprendre son point de vue, mais je m'éloigne du sujet.
Ce jour-là, il avait repéré une place, mais il était passé trop vite devant. Quand il était revenu en arrière, la place avait été prise par une grande limousine. Celle d'Adrien. Cet incident avait exacerbé la rancœur tenace que mon père nourrissait à l'égard des limousines en général, et surtout de celle d'Adrien.
Cet épisode était loin... et y penser me brisait le cœur. À l'époque, Adrien et moi étions au début de notre relation. Se remémorer cela me poignardait au ventre à chaque fois.
Nous étions si heureux...
Nous avions tout pour nous.
Notre relation était celle que j'avais toujours rêvée, et il semblait aussi épanoui que moi.
Mais ce conte de fées n'avait jamais autant compté pour lui que pour moi. Profondément blessée, j'essayais d'effacer les images qui tournaient en boucle dans ma tête.
Je faisais de mon mieux pour l'ignorer. Pour le haïr autant qu'il semblait me haïr. Mais honnêtement, détester une personne que j'avais tant aimée était incroyablement difficile.
Un an plus tard, un immense fossé nous séparait. Nous avions tous les deux changé. Évolué. J'espérais encore qu'il ressentait quelque chose pour moi. Mais c'était une illusion. Notre belle histoire n'existait plus. Peut-être n'avait-elle jamais existé. Peut-être que nos baisers n'avaient été que des illusions que je m'étais créées toute seule !
Après tout ce qu'il m'avait lancé au visage lors de notre rupture, je doutais de tout. Même de ce que nous avions été. Amants ? Pour lui, je n'avais été qu'une aventure. Un passe-temps. Une activité.
L'amour faisait mal. Il détruisait plus qu'il ne construisait. Je n'aurais jamais pensé que rencontrer le regard d'Adrien me ferait ressentir tout cela. Je voulais juste être avec lui. Mais visiblement, cela lui demandait trop d'efforts. Ou peut-être pas assez...
Je le voulais, lui. Mais il semblait impossible pour lui de s'engager avec moi. Maintenant que cette histoire n'était plus qu'un lointain souvenir, je pouvais en parler sans craindre le retournement de situation.
En fait, non. Parce que cette histoire triste recelait une bombe à retardement, prête à exploser et à faire plus qu'une victime sur son passage...
Une fois de plus, pour la dernière fois, je serrais le dernier lien qui me rattachait encore à Adrien. Honteusement, je gardais le secret de mes sentiments, enfouis au plus profond de moi. Je savais que je ne pourrais jamais l'oublier. Mais aujourd'hui comme toujours, je gardais le silence. Car Adrien ne faisait plus partie de mon avenir.
Il restait une cicatrice sur ma peau. Un souvenir enraciné dans mon cœur. Attaché à mes souvenirs. Mais c'était tout ce qu'il pouvait me faire à présent.
— Ne t'inquiète pas, ma chérie. Je suis sûr que tu as été excellente, me rassura mon père en posant sa main sur la mienne, posée sur le comptoir de marbre.
— Merci, papa, lui répondis-je avec un sourire sincèrement reconnaissant.
Au fond de moi, des questions tournoyaient, mais je me forçai à écouter la suite de ses paroles. Mon père était une présence rassurante, mais mes pensées se perdaient souvent dans d'autres directions. Je brûlais de lui confier pourquoi j'avais tant changé depuis le bal de l'année dernière. Mais l'amour que je lui portais m'en empêchait.
Révéler la véritable raison de la mort de Nathaniel équivalait à allumer la mèche d'une bombe, amorçant le compte à rebours avant l'explosion.
Pour les personnes chères à nos cœurs, nous étions prêts à tout. Pour elles, je vendrais mon âme et je porterais le fardeau du mystère entourant la mort de mon meilleur ami... N'était-ce pas suffisant ?
Je l'ignorais sincèrement.
— Essaye de... Commença mon père avant que plusieurs personnes ne rentrent, faisant retendre la clochette dans l'entrée.
Je me retournais aussitôt.
— Bonjour... Reprit mon père en levant les yeux vers eux. Mais tout comme moi, il se tut de suite en découvrant les trois individus devant nous.
— Le fric de la caisse, tout de suite. Ou, je la bute. Ordonna le garçon du milieu, d'une voix grave, en visant son gun sur moi.
Pendant l'espace d'un instant, ses yeux verts retenus mon attention. Et il sembla que lui aussi, n'était pas si insensible à mon regard. Mais cette confusion ne traversa ses prunelles émeraudes que quelques secondes ; avant qu'il ne pointe son arme sur moi.
— Tout de suite, c'est comme si c'était fait ! S'exécuta mon père d'une voix jovial pour faire comme si de rien n'était.
J'ignorais ce qu'il lui prenait. Mais peut-être faisait-il cela pour détendre un peu l'atmosphère qui était devenue tendue à leur arrivées ?
Bon sang, mais papa ?!
— Il se fou de notre gueule le vieux, ou quoi ?! S'agaça le garçon à la gauche du garçon aux yeux verts.
— Calme-toi... Lui fit-il, à voix basse, gardant toujours son arme sur moi.
Mon cœur battait à toute vitesse. Il n'allait quand même pas s'énerver en ayant son arme visée sur moi ? Et mon père qui était en train de vider ses caisses pour ne pas que je meurs. Argh, ça me mettait dans une colère folle. Je me sentait une fois de plus utilisée, et qu'est-ce que cela pouvait m'irriter. Pour qui se prenaient-ils ?!
Furieuse conte la situation, je serrais la mâchoire en serrant très fort mes poings. Mes ongles s'enfoncèrent dans la chaire de ma main, tandis que je fixais à tour de rôle les deux hommes qui discutaient devant moi.
— Je ne vous dérange pas j'espère ! Me surpris-je à leur lancé, froidement.
Celui de gauche leva sa tête cagoulée vers moi. Bien trop prise par les évènements, j'avais oublié de les regarder. Mais comme trois braqueurs, ils étaient tous entièrement habillés de noir. Même leurs baskets étaient noires. Des cagoules noires trouées au niveau de la bouche et des yeux, me permettant de voir leur bouche et la couleur de leurs yeux.
Le garçon face à moi, avait les yeux verts. A gauche il les avait caramel et le dernier à droite, qui surveillait mon père, les avaient chocolats. Bizarrement, ce trio me dit immédiatement quelques choses. En les analysant, je plissai les yeux et me mis à cogiter pour savoir d'où venait la ressemblance familière qui m'intriguait.
— Qu'est-ce qu'elle dit, celle-là ? Demanda le garçon aux yeux caramel en s'approchant dangereusement de moi.
Violemment, sans m'attendre au coup, il me poussa brusquement en arrière. Proche du comptoir, mon dos cogna. Et sous la douleur, je ne pus retenir un léger cri. Une vive douleur se mit à apparaitre dans le bas de ma colonne vertébrale alors que je m'écroulais sur le sol. J'avais tellement mal, c'était si douloureux, que je grimaçais en posant aussitôt ma main sur le bas de mon dos.
Retiens tes larmes. Ravale ta douleur.
Mon mal allait passer. Il n'était que de passage... N'est-ce pas ?
— Alors, petite connasse, c'est qui le chef ici ? cracha-t-il en s'accroupissant devant moi, agrippant brutalement mon visage entre ses doigts. Il me força à relever la tête, ses doigts serrés sur ma mâchoire.
La douleur me traversait, mais je m'efforçai de paraître impassible. Je n'étais pas certaine encore, mais demain, peut-être aurais-je un bleu, et pas seulement dans le bas du dos...
— Connard, soufflai-je d'une voix venimeuse.
— Moi, connard ?!! Moi, connard ?! répéta-t-il en se redressant, presque choqué.
Un sourire narquois étira mes lèvres en le voyant réagir ainsi. Mais avant que je puisse savourer ma petite victoire, il sortit presque instantanément un flingue de son dos. Il me visa droit dessus.
— Qui c'est le chef ici, hein ? cracha-t-il avec une fureur hystérique, ses yeux brillant de malice alors qu'il s'accroupissait devant moi, agrippant mon visage avec une brutalité glaciale.
Ses doigts serrèrent ma mâchoire, me faisant mal, mais je m'efforçai de ne rien laisser paraître. Je pressentais déjà les marques que cette rencontre laisserait sur ma peau, peut-être même plus profondément, là où les yeux ne pouvaient voir...
— Connard, murmurai-je d'une voix chargée de venin.
Il se redressa brusquement, répétant mes mots comme s'il était blessé dans son orgueil démesuré.
Un sourire mince se dessina sur mes lèvres, presque ironique. Mais avant même que je puisse savourer cette mince victoire, il tira un revolver dissimulé dans son dos, l'arme pointée droit sur moi.
— Alors, c'est moi le connard, c'est ça ?! hurla-t-il, la rage emplissant ses yeux d'une lueur démente.
Mon père, paniqué, tenta de négocier en vain, sa voix empreinte de terreur. Mais je savais que ses paroles ne changeraient rien à la volonté implacable de l'homme devant moi. J'avais touché un nerf sensible, et maintenant, sa vengeance prenait forme sous mes yeux.
Pourquoi est-ce que ça finissait toujours ainsi, dans ces affrontements qui menaçaient de voler ma vie ?
Ma propre colère ne fit qu'exacerber la situation. J'aurais mieux fait de me taire, de ne pas provoquer le destin de cette manière. Maintenant, j'étais face à ma fin imminente, une mort stupide pour des mots échangés. Alors que je voyais ma propre existence défiler devant mes yeux, il étira un sourire vicieux, un prédateur savourant sa prise.
— Dis adieu à la vie, ma belle. Ce sera ta dernière chance. Sa voix, pleine de menace et de cruauté, résonna alors qu'il ajustait son arme avec précision.
Je déglutis, sentant mon cœur battre dans ma poitrine avec une violence presque douloureuse. L'estomac serré, une boule de terreur me nouait les entrailles. Non, je ne voulais pas mourir. Pas ici. Pas maintenant. Je n'étais pas prête à céder, à abandonner si facilement.
Mais alors que je me préparais à me battre, prête à faire face à l'inévitable, il tira.
Je déglutis péniblement. Allais-je vraiment mourir ? Au fond de moi, je refusais d'y croire, de vraiment m'en rendre compte. Mon cœur battait si fort dans ma poitrine qu'il en devenait douloureux. Mon estomac se tordait, une boule de plomb pesait en son centre.
Non, je ne voulais pas mourir, surtout pas ici et maintenant. J'étais trop jeune, la vie me tendait encore ses bras accueillants. Mais comme une lâche, je m'en allais. Je mourrais. Bien sûr, ce n'était pas entièrement de ma faute, mais je ne pouvais nier avoir provoqué le destin, m'être jouée du diable.
Maintenant, les enfers me réclamaient.
J'avais joué.
J'avais perdu.
Oui, j'avais tellement perdu que maintenant, il ne me restait plus qu'à verser mes dernières larmes et m'envoler vers le ciel, retrouver Nathaniel. Peut-être le paradis m'accueillerait-il, à moins que les enfers ne m'aient déjà dévorée.
Puis, comme un éclair de lucidité, je réalisai que je ne me battais pas assez.
Non, je ne pouvais pas m'éteindre maintenant. Nathaniel était parti à cause de bêtises et d'erreurs involontaires. Il n'avait jamais connu la véritable vérité sur sa propre mort. J'avais dû le voir s'éteindre lentement dans mes bras, et après toute la douleur que cela m'avait infligée, je ne pouvais pas infliger la même chose à mon père.
C'était trop traumatisant, personne ne méritait ça. Je ne pouvais plus me permettre de me laisser abandonner si vite. Plus jamais. C'était une promesse que je m'étais faite.
Pourtant...
Au moment où je me relevais en étouffant la douleur dans le bas de mon dos, il tira. Tout se passa si vite... Je n'eus même pas le temps de comprendre ce qui se passait.
— NAAANNN !!!! S'écria mon père, d'une voix remplie de détresse.
Mon corps fut violemment projeté à l'autre extrémité de la pièce, collé contre un autre corps. Les yeux fermés, je fus envahi par la chaleur de cet inconnu, instinctivement enfouissant ma tête dans son cou, le serrant malgré moi.
Nous roulions, notre élan s'arrêtant juste avant d'atteindre le mur. Dans ce bref instant, le parfum boisé du garçon contre moi évoquait étrangement Adrien...
— Putain, mais pourquoi t'as fait ça ?! s'énerva le garçon qui, peu de temps auparavant, avait tenté de me tuer.
J'ouvris les yeux, relâchant lentement l'emprise sur celui qui venait de me sauver la vie. La terreur mêlée à ma détermination ravageait mon cœur. Le sien aussi, battait précipitamment, comme au bord de l'infarctus, me faisant craindre de perdre connaissance à tout instant.
Le souffle court, je sentis son haleine contre ma peau tandis qu'il humait mon parfum imprégné dans mes cheveux, reprenant lentement sa respiration. Ses soupirs chauds dans mon cou déclenchèrent des frissons le long de ma colonne vertébrale.
Je me posais mille questions. Pourquoi avait-il agi ainsi ? Dans quel but ? Ne souhaitait-il pas que son complice me tue ? Qu'est-ce que cela signifiait pour lui, que je vive ou que je meure ?
Espérant obtenir au moins une réponse, j'agrippai les pans de sa veste noire et approchai mon visage près de son oreille. Peut-être que je risquais à nouveau ma vie... ? Je n'en savais rien. Tout ce que je voulais, c'était la vérité. Rien que la vérité.
— Merci... Mais pourquoi ? Lui soufflai-je à l'oreille en tentant de calmer mon cœur.
Je tentais désespérément de calmer les battements frénétiques de mon cœur. Mais mes efforts étaient vains, comme si chaque pulsation amplifiait mon angoisse. Il posa ses mains de chaque côté de ma tête, me forçant à le regarder droit dans les yeux. Nos regards se croisèrent, et tout mon être fut submergé par une décharge émotionnelle. C'était comme un feu d'artifice dans mon estomac, des frissons parcourant chaque parcelle de ma peau. Je restai là, pétrifiée par ce contact intense.
— Tu aurais préféré mourir ? Non. Alors tu as ta réponse, murmura-t-il d'une voix rauque, comme s'il parlait pour moi seule.
Avant que je puisse répondre ou même comprendre, il se redressa brusquement. La chaleur de sa présence s'évapora instantanément, laissant un vide palpable. Désemparée, je me secouai pour reprendre mes esprits. En relevant les yeux, je le vis déjà s'éloigner avec ses complices, emportant le sac d'argent que mon père avait rempli.
C'était comme si une tempête avait balayé ma vie paisible en un instant, me laissant là, encore tremblante et incertaine de ce qui venait de se passer.
Alors que mon père se précipitait vers moi et me serrait dans ses bras pour vérifier que j'étais intacte, je le tenais faiblement en retour. Mes pensées tourbillonnaient, complètement obsédées par le garçon aux yeux verts qui, contre toute attente, avait sauvé ma vie.
Mon esprit était en déroute. Des larmes menaçaient de déborder de mes yeux, car malgré tout, la peur de ne jamais revoir la lumière du jour m'avait saisie. Cette brève rencontre avec la mort m'avait rappelé la fugacité de la vie, sa dangerosité lorsqu'elle est seulement effleurée.
Cela m'avait fait réaliser combien il était absurde de ne pas avoir dit à Adrien ce que je ressentais pour lui. Mais le pire, c'était ce parfum de cet inconnu, étrangement familier, semblable à celui d'Adrien. Peut-être que c'était ma paranoïa qui parlait, mais j'aurais juré sur ma vie que c'était lui.
Qu'il était revenu vers moi, que nos chemins s'étaient croisés à nouveau. Comme la première fois où nos corps s'étaient rencontrés, où nous avions partagé cette intimité...
Bon sang, qu'est-ce qui m'arrivait ?
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