Chapitre 2
Cinq bonnes minutes durent s'écouler tandis avant qu'Harry ne réussisse à enregistrer les informations que son cerveau lui envoyait. Agrippé au lavabo avec tellement de force que les jointures de ses mains en avaient blanchi, bouche ouverte dans illustration parfaite de l'incrédulité horrifiée, il fixait son reflet avec la sensation d'avoir été précipité en plein cauchemar.
Ces cheveux qui tombaient sur ses reins en de lourdes boucles noires... Ces épaules moins larges qu'elles n'auraient dû l'être, cette taille plus étroite...
Harry secoua vivement la tête, tentant désespérément de chasser cette vision de son esprit, d'émerger de ce qu'il espérait ardemment n'être qu'un mauvais rêve. Mais en vain. A son grand désespoir, ses yeux ne le trahissaient pas. Les traits de son visage étaient indéniablement plus fins, ses cils plus longs, sa bouche plus pulpeuse.
La personne que Harry apercevait dans le miroir était incontestablement une fille.
Une ravissante jeune fille, même. Mais la question n'était pas là. La potion de Neville l'avait transformé en fille !
Pris d'un soudain doute, Harry porta sa main à sa poitrine avant de la retirer brusquement, le visage brûlant de honte. La transformation avait l'air totale... Harry se prit la tête à deux mains en poussant un gémissement de détresse. Que faire ? Il ne pouvait pas rester indéfiniment comme ça.
Il existait certainement une solution.
Il devait exister une solution.
Soudain, Harry redressa la tête.
- Mme Pomfresh, murmura-t-il sous le coup d'une inspiration subite.
Sans perdre une seconde, il se rua hors des toilettes et s'élança dans les couloirs. Il se mit à courir comme un fou en direction de l'infirmerie, ignorant la douleur lancinante qui gagnait ses poumons alors qu'il prenait à peine le temps de respirer dans sa folle course.
- Mme Pomfresh !, hurla-t-il en arrivant à destination.
- J'arrive, j'arrive, répondit cette dernière avec une expression réprobatrice sur le visage. Ce n'est pas la peine de crier comme ça. Encore heureux qu'il n'y ait personne !
Arrivant devant Harry, elle posa ses poings sur les hanche et le dévisagea en affichant une moue circonspecte.
- Bon, quel est le problème ?, reprit-elle enfin. Vous avez l'air en pleine forme.
- Je suis une fille ! lui cria Harry, incapable de se calmer.
- Oui, oui, je le vois bien, répliqua l'infirmière en haussant un sourcil intrigué. Et alors ? Je ne vois pas où est le problème.
- C'est que, normalement, je suis un garçon, répondit Harry en essayant de reprendre le contrôle de lui-même. Je suis Harry Potter. Mais aujourd'hui, on a eu cours de potion, et Rogue m'a fait boire une potion ratée...
Fronçant les sourcils, Mme Pomfresh souleva quelques mèches des cheveux de Harry pour dégager son front. Ses pupilles se dilatèrent légèrement de surprise quand ses yeux tombèrent sur la cicatrice en forme d'éclair qui ornait le front du jeune Gryffondor.
- Oui, effectivement, murmura-t-elle en reculant d'un pas.
Elle sortit sa baguette et articula plusieurs sortilèges, mais en vain. Au bout du septième essai infructueux, elle renonça à s'acharner et s'approcha de nouveau de Harry.
- Vous connaissez la composition exacte de la potion qui vous a transformé ? reprit-elle d'une voix contrariée. Ou à défaut de mieux, est-ce qu'il en reste pour que je puisse l'analyser ?
Harry sentit son ventre se tordre d'horreur, le laissant secoué une soudaine vague de nausée.
Il revoyait Rogue, furieux, faire disparaître le contenu du chaudron de Neville d'un coup de baguette.
- Non, articula-t-il dans un murmure à peine audible.
- Mmmm, c'est embêtant, ça..., soupira Mme Pomfresh. Je ne peux rien faire pour vous pour l'instant, je vais voir le professeur Rogue. Revenez en fin d'après-midi.
Surprenant l'expression désespérée qui avait prit place sur le visage de Harry, elle lui adressa un chaleureux sourire d'encouragement.
- Allons, poursuivit-elle lui en tapotant l'épaule d'un geste amical, courage. Ne vous inquiétez pas, on trouvera bien une solution. En attendant, restez donc un peu ici en attendant l'heure du repas, je vous excuserais auprès de votre professeur.
Harry se dirigea vers l'un des lits de l'infirmerie à pas lents, encore sonné par la nouvelle.
Il s'était transformé en fille.
En fille !
Et pire encore, sa guérison semblait dépendre désormais uniquement du bon plaisir de Rogue.
Harry poussa un gémissement de détresse en se laissant tomber lourdement sur le matelas. Les choses ne pouvaient pas être pires. Non, se reprit immédiatement le jeune Gryffondor en secouant vivement la tête. Il faisait erreur.
Les choses pouvaient aisément être bien, bien pires.
Comme dans une heure par exemple, quand il rentrerait dans la Grande Salle et devrait faire face à tous les élèves de Poudlard réunis. Harry Potter, transformé en fille ! Malfoy se ferait un plaisir de lui rendre la vie infernale, comme si la situation n'était déjà pas suffisamment pénible. Ron en perdrait son latin et Hermione s'empresserait de débiter toute la liste des remèdes possibles et imaginables auxquels elle penserait, avant de conclure par un « je file à la bibliothèque ! », songea Harry en souriant faiblement. Et Cho...
Harry se redressa brusquement.
Cho !
Comment pourrait-il espérer sortir un jour avec elle, à présent qu'il s'était métamorphosé en fille ? Déjà qu'en tant que garçon il n'arrivait à rien, alors en fille... Quoique, le problème était peut-être là, songea Harry depuis le fin fond de son désespoir. Il était tout à fait possible que Cho n'ait pas la moindre inclinaison pour la gent masculine et que cette malencontreuse aventure lui offre enfin une chance de la séduire...
Poussant un soupir désabusé, Harry secoua la tête pour chasser cette hypothèse de son esprit, puis se laissa retomber lourdement sur son matelas.
Qui espérait-il tromper ? Il n'y avait qu'à voir la façon dont Cho dévorait Cédric Diggory des yeux pour deviner que ses préférences de sa camarade étaient loin d'être le cœur du problème.
Non.
Il ne pouvait décidément pas permettre que cette histoire ne s'éternise.
Il lui fallait absolument trouver une solution, et vite ! Peut-être pouvait-il prétendre être l'une de ses propres cousines. Dire que « Harry Potter » avait dû s'absenter pour raisons familiales, et qu'elle venait d'être transférée à Poudlard... Qu'elle s'appelait Harriet Potter, par exemple, ou quelque chose comme ça...
Harry laissa échapper un nouveau soupir.
Pour aussi tentante que soit l'idée de s'inventer une cousine factice, cela ne marcherait jamais. Tout le monde comprendrait certainement du premier coup qu'il ne s'agissait là que d'un mensonge et cette mascarade ne servirait qu'à le rendre encore plus ridicule. Peut-être devrait-il essayer de négocier avec Dumbledore pour quitter Poudlard quelques jours, le temps que la situation redevienne normale...
Les minutes filèrent à toute vitesse pendant qu'Harry ruminait ses sombres pensées, et l'heure du repas arriva sans même qu'il s'en rende compte.
Ignorant royalement les protestations de son patient, Madame Pomfresh l'encouragea à aller dans la Grande Salle.
- Allez-y, vous avez besoin de vous remplir un peu l'estomac après toutes ces émotions, le pressa-t-elle en lui donnant une tape encourageante sur l'épaule. Il n'arrivera rien de bon si vous restez ici toute la journée.
Après avoir tenté en vain de plaider sa cause, Harry finit par sortir de l'infirmerie de mauvaise grâce.
- Évidemment, maugréa-t-il à voix basse, c'est facile à dire. On voit bien que ce n'est pas elle qui est transformée.
Pestant une fois de plus contre ce terrible coup du sort qui allait certainement faire de sa vie un enfer, Harry se dirigea à pas lourds vers la Grande Salle. La sensation de nausée qui l'avait saisi un peu plus tôt dans la matinée le reprenait de plus belle, accentuant le déconfort évident qui était le sien. Harry avait désormais l'horrible impression qu'une boule de plomb s'était logée au fond de son estomac et que sa gorge avait été passée au papier de verre.
Il progressait dans les dédales de couloirs avec autant d'entrain qu'un condamné se rendant à l'échafaud, tremblant tellement que ses jambes le portaient à peine.
Plus d'une fois, il ne résista que de peu à l'impulsion de repartir directement à l'infirmerie ou d'aller se réfugier dans sa chambre. Mais il ne pourrait hélas pas se cacher indéfiniment. Si par malheur un remède n'était pas trouvé rapidement, il serait certainement condamné à garder cette apparence encore plusieurs heures, voire plusieurs jours.
Réprimant un frisson d'horreur à cette idée, Harry poursuivit sa route.
Il arriva à l'entrée de la Grande Salle bien trop tôt à son goût et s'arrêta un instant auprès de la porte pour tenter de reprendre contenance. Des vagues d'angoisse et de panique s'abattaient sur lui de plus en plus violement, cherchant à saper ses dernières réserves de courage.
Mâchoires serrées, Harry serra rageusement les poings.
Il était un Gryffondor, se répétait-il désespérément, essayant d'ignorer les battements affolés de son cœur. Un Gryffondor ET la seule et unique personne connue pour avoir survécu à Voldemort.
Il avait déjà affronté des trolls, des chiens géants, des sorciers maléfiques, et il s'en était toujours sorti avec brio.
Il pourrait tout à fait faire face à ses camarades et à sa féminisation provisoire – très, très provisoire, souhaitait-il ardemment.
Main crispée autour du chambranle de la porte, Harry balaya la pièce du regard à la recherche de Ron et d'Hermione. Puis, après avoir repérés ses amis, il releva vaillamment le menton et se dirigea vers eux.
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