Chapitre 5




Surprise par une migraine tenace, Louane referma le dossier et se massa les tempes. À vrai dire, elle ne savait pas si cette migraine était provoquée par le rapport qu'elle devait taper ou la présence de Zakhar Slovovitsh juste derrière elle. Elle résistait depuis deux jours à cette dangereuse attirance qu'elle avait pour lui. Pour s'en défaire, elle n'arrêtait pas de se répéter jour et nuit qu'elle était trop jeune pour lui.

- Je dois vous abandonner, annonça l'homme en attrapant sa veste.

Elle sortit in extremis de sa torpeur et se redressa pour le dévisager. Il portait une chemise immaculée de blanc avec des bretelles noirs. Sa carrure impressionnante lui donnait des bouffées de chaleur. Et lorsqu'il se passa dans la nuque une cravate noire aussi sombre que son pantalon, Louane détourna le regard.

- Où allez-vous ?

- Au tribunal.

Malgré le trouble que lui causait cet homme Louane bondit de sa chaise.

- Est-ce que je peux venir ?

- Hors de question, répondit-il avec une telle simplicité qu'elle cilla.

- Mais pourquoi ? Demanda-t-elle d'une voix agacée.

Il noua sa cravate sans la lâcher du regard.

- Vous devez terminer votre rapport et moi je dois régler une affaire.

- J'aimerais vous voir sur le terrain, protesta Louane en croisant les bras.

- Vous m'avez déjà vu sur le terrain miss, vous vous rappelez ? Rétorqua-t-il sur le ton de l'ironie.

Miss ? S'indigna Louane intérieurement.

- Je veux vous accompagner !

- Non.

Elle combla l'espace qui les séparait et l'affronta du regard.

- Comment voulez-vous que j'apprenne si vous ne me montrez pas enfin !

Zakhar sentit ses sens s'irradier lorsque cette déesse venant des Antilles s'avança vers lui, les yeux étincelants de fureur. Un pas de plus et il la renverserait sur son bureau, songea-t-il avant de regretter ces songes dictés par sa libido.

- Vous apprendrez avec ce dossier.

- Je veux vraiment vous accompagner, insista-t-elle fermement. J'ai toujours rêvé de voir l'un des meilleurs sur le terrain.

Il n'était pas contre qu'elle vienne. Le seul soucis, c'est qu'il était quasiment persuadé qu'elle le perturberait sans vouloir dans la salle d'audience. Or, il ne pouvait pas se permettre de perdre le contrôle. Non. Certainement pas à cause d'une femme.

- Allons ! Laissez-moi faire !

La jeune femme pressa ses doigts sur les siens pour faire le nœud de sa cravate. Si elle espérait l'attendrir avec ce coup de main, Zakhar restait campé sur sa décision.

- Merci, dit-il brièvement.

- Mais...

- J'ai dit non, maintenant vous allez poser vos fesses sur cette chaise et continuer votre rapport.

Louane resta bouche bée sous cet ordre indiscutable. Zakhar descendit les étages à toute vitesse et rejoignit son garage pour se mettre au volant de sa Lexus et se passa une main dans les cheveux avant d'appuyer sur le bouton pour ouvrir la porte du garage. Il posa son téléphone sur le socle. Constater que la jeune femme n'était guère impressionné par sa façon de la séduire le rendait fou de rage. Zakhar se retrouvait dans une situation toute nouvelle. Le piège qu'il avait échafaudé depuis qu'il l'avait vu dans cette robe du soir était incontestablement en train de se refermer sur lui. Il avait voulu déceler en elle une femme nullement intéresser par son travail mais plutôt assoiffée à l'idée de terminer dans son lit pour s'en vanter le lendemain dans les journaux. Or cette belle antillaise aux yeux verts faisait tout pour parfaire son travail, pour le rendre d'une qualité irréprochable. Elle était douée. Forcé de se l'avouer, Zakhar s'était complètement planté sur elle. Il avait beau essayer de renverser la situation rien n'y faisait.

Zakhar tourna la tête vers le siège passager. Une silhouette frêle s'installa à coté de lui.

- Vous avez oublié votre sacoche ! S'exclama-t-elle avec un large sourire.

- Merci, grogna-t-il doucement en lui arrachant des mains.

Dans l'habitacle un parfum dont l'odeur ressemblait fortement à celle d'une cerise fraîchement cueilli irradia ses sens. Mais ce n'était pas le pire constata Zakhar en la regardant refermer la portière.

- Je peux savoir ce que vous faites ?

Elle tira sur la ceinture et suspendit son geste pour plonger ses yeux verts dans les siens en faisant mine de ne rien comprendre.

- Je m'attache ! La sécurité avant tout monsieur Slovovitsh ! Surtout avec un tel bolide.

Sidéré, il se pinça les lèvres en la regardant impuissant boucler la ceinture et se remettre droite sur le siège.

- Cela vous arrive d'obéir ! Gronda-t-il en tapant ses doigts nerveusement sur le volant.

- Parfois oui ! Affirma la jeune femme en regardant du coin de l'œil, mais seulement avec les personnes que j'apprécie.

Piqué au vif, Zakhar s'avoua vaincu et démarra en trombe. La vitesse allait peut-être lui permettre de remplacer ce désir violent par une bonne dose d'adrénaline et donner par la même occasion une bonne leçon à cette jeune intrépide !

Sur le chemin sinueux, Zakhar accéléra en passant la seconde les yeux rivés sur la route.

- Je vous prie de ralentir s'il vous plaît, demanda-t-elle fermement.

Il tourna furtivement la tête vers elle. Celle-ci avait les deux mains agrippées à l'accoudoir, le visage blême.

- Personne ne vous a obligé à monter dans cette voiture.

- Je...sais mais ralentissez vous allez nous tuer !

- Aucun risque, je sais conduire mademoiselle Jemena, pas de ça avec moi, je pensais que les femmes adoraient la vitesse.

- Pas moi, dit-elle en grimaçant.

Zakhar amortit le virage en rétrogradant puis accéléra de nouveau.

- N'ayez pas peur, la vitesse, il suffit juste de la dominer savoir où sont les limites.

- Allez donc dire ça au chauffeur qui a fauché mon père, je suis sûr que...vous lui serez de très bon conseils.

Zakhar se figea et ralentit aussitôt en réalisant bien trop tard l'erreur qu'il venait commettre. La frayeur se lisait sur son visage. Il se gara sur le bas-côté et coupa le moteur.

- Les circonstances de sa mort n'étaient pas mentionné dans votre dossier, je suis désolé si j'avais su...

- Vous auriez ralenti ? Déduit-elle en passant une main tremblante sur ses lèvres.

Zakhar ferma les yeux. Que pouvait-il répondre à cela. Incontestablement coupable il ouvrit la boite à gant en effleurant son genou et lui tendit une petite bouteille d'eau.

- Buvez, ordonna-t-il dont la voix ne souffrait d'aucune protestation.

Elle accepta volontiers la bouteille et but quelques gorgées.

- Il était ivre, il est parti et l'a laissé sur le bord de la route, murmura-t-elle d'une voix qui lui serra le cœur.

- Je suis vraiment navré, articula-t-il sincèrement bouleversé par cette confidence.

- On l'a retrouvé que sept jours après comment est-ce possible ça ? Vous le savez ? Demanda-t-elle en s'emparant du mouchoir qu'il lui tendait.

- Non, avoua-t-il en plissant son front.

- S'il s'était arrêté, s'il avait choisi de lui porter secours peut-être que mon père aurait eu une chance de vivre.

La détresse de la jeune femme lui fit oublier pendant un instant qu'il était son professeur. Alors il lui prit le menton pour qu'elle tourne la tête vers lui.

- Voilà pourquoi vous voulez devenir avocate n'est-ce pas ? Vous voulez réparer les injustices ?

- C'est débile n'est-ce pas ? Murmure-t-elle en reniflant.

- Pas du tout au contraire.

Zakhar retira ses doigts et s'écarta.

- Je suis navré, je regrette mon attitude.

- Excuse acceptée, dit-elle en se mouchant.

Elle contempla le tissu la bouche entrouverte.

- Mon dieu votre mouchoir est d'une beauté, je vais devoir le nettoyer.

Il rit doucement en remettant le contact.

- Gardez-le, il vous sera plus utile qu'à moi.

Zakhar marqua une pause avant de reprendre.

- Vous êtes prête ?

- Absolument, allons-y j'ai hâte...

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