Chapitre 5


Hey ! 

Un très long chapitre que j'ai bien aimé écrire ! Un peu d'action !  

C'est écrit sur When the rain begins to fall de Jermaine Jackson

Bonne lecture !


Chapitre 5


France-Suède. Si les deux équipes cherchaient un match à pression, elles allaient être servies. Deux nations du handball dont l'affrontement était toujours élevé au rang de classico international.

Dans les vestiaires français, l'effervescence et la concentration battait son plein. Luka Karabatic motivait ses troupes avec un discours plutôt habituel de sa part : fermer les intervalles en défense, prendre ses responsabilités aux tirs et ne pas parler aux arbitres. C'était souvent le même, mais ses coéquipiers l'appréciaient, il avait montré son efficacité jusque là. 

Lorsque le temps arriva de la présentation des joueurs, chacun se prit dans les bras pour une ultime motivation. Ludovic fit en sorte de se retrouver devant Nedim en dernier. Il remarqua que le demi-centre hésita une seconde mais finit par lui faire une accolade. Ils s'étaient encore disputés il y avait deux jours. Ludovic avait un peu élevé la voix. Il avait pensé qu'il pourrait maintenir cette relation amicale, mais il en était incapable. Il tombait petit à petit irrémédiablement amoureux de Nedim. Il n'avait pas réussi à effacer leur baiser de son esprit et imaginer que lui y était visiblement parvenu plutôt facilement le blessait. Quand il avait essayé d'évoquer le sujet, il s'y était mal pris et Nedim s'était renfermé. Parfois, il se demandait si le problème n'était pas ailleurs.

- Je suis désolé pour l'autre fois, murmura Nedim dans son oreille.

- Ce n'est rien. Si tu joues bien ce soir, tout est pardonné.

Ludovic se rappela que leur conversation avait été interrompue.

- Et Elohim ? Il n'avait pas l'air bien, rien de grave ?

Il le vit soudain préoccupé, comme s'il venait de repenser à quelque chose d'important. Nedim chercha du regard Elohim. Ce-dernier discutait à voix basse avec le docteur Jae Ulam. Il avait sa main sur son épaule et ils semblaient proches. C'était un bon signe, ça signifiait sans doute que le médecin était au courant pour ses crises de panique. Il reporta son attention sur Ludovic.

- Non, tout va bien. Il est juste... pas toujours sûr de ses capacités et ça l'angoisse.

- Ah je vois, rien de nouveau sous le soleil alors, rigola la pivot.

Il eut le droit à un lumineux sourire du demi-centre et cela lui rappela qu'il allait devoir se contenter de ce genre de moments à présent, et probablement à jamais.

- Allez on a un match à gagner ! s'écria Nedim en enlaçant encore une fois Ludovic.

Le ton était donné. L'équipe abordait ces trente premières minutes comme un véritable combat, dont ils seraient les vainqueurs incontestables.

Le match commença dans une forte intensité, avec des joueurs aux coudes à coudes, ne voulant rien lâcher et un Andreas Palicka monstrueux dans le but suédois. Les Français n'étaient pas en reste et entre les buts de Nikola Karabatic, de Kentin Mahé ou de Hugo Descat, le score demeura serré. 

Elohim restait sur le banc, les poings serrés, frustré à l'idée de ne pouvoir participer au jeu. Il assistait impuissant à ce destin se déroulant devant ses yeux. Il applaudissait et encourageait à chaque occasion, mais une certaine frustration naissait en lui. Finalement, la première mi-temps s'acheva sans qu'il n'ait décollé du banc. Une égalité pour les retours aux vestiaires.

- C'est bien les gars ! On arrive à les contenir et on n'a pas trop de difficultés à trouver des solutions en attaque. Par contre Palicka gagne beaucoup trop de duels, arrêtez de chercher des impacts compliqués et tirez sur la jambe d'appuie ! insista Guillaume Gilles

Il se retourna vers le tableau blanc et explicita quelques tactiques d'attaques pour détruire la défense suédoise.

- On va entamer avec une base arrière Dika, Nedim, Elo. Pour faire respirer Niko et Kentin. Ludo, tu tiens le coup ?

Le pivot dégagea la tête de sa serviette pour hocher la tête.

- Je préfère te laisser quand Nedim est sur le terrain et surtout pour avoir un changement défensif en moins. Vous ne me montrez pas assez de jeu tous les deux, je veux voir des passes, des fixations.

Nedim qui était assis à ses côtés, lui tendit une bouteille d'eau. Le Barcelonais jouerait sans doute les soixante minutes, le combat ne faisait que commencer.

- Valentin et Mika vous entamez aux ailes. Et on reste sur Luka en changement défensif.

Guillaume se tourna vers Elohim.

- Je te fais rentrer pour avoir un jeu plus offensif. On a encore une mi-temps pour creuser l'écart, donc tu ne te précipites pas et tu fais comme à l'entraînement.

Une boule d'angoisse se déployait doucement dans son estomac et Elohim se redressa pour masquer son malaise. Il sentit le regard perçant de Jae, appuyé sur un mur dans son coin, qui le balayait. Il repensa à ce qu'il lui avait dit et se visualisa sur le terrain, ses passes au pivot, ses tirs à neuf mètres. Une main se posa sur son épaule.

- Tu vas tout défoncer, murmura Nedim. Et puis on sait tous les deux que Palicka est à chier sur les tirs de loin, tout ce que tu as à faire c'est sauter plus haut que le contre et le bombarder.

Elohim éclata de rire et cela le surprit de lui-même. Peut-être avait-il finalement besoin d'être un peu détendu ?

- Allez les gars ! s'écria Luka. On gagne ce match !

Jae arrêta un instant Elohim avant qu'il ne sorte des vestiaires.

- Comment tu te sens ? chuchota-t-il

- Pas trop mal. Je ne tremble pas et mon cœur n'est pas sur le point d'exploser. J'ai les mains un peu moites mais la colle devrait régler ça.

Jae lui sourit et l'encouragea par une accolade.

- Merci pour les exercices, j'ai l'impression que ça m'aide beaucoup.

- C'est normal. Fais de ton mieux.

Elohim rejoignit les autres et rentra sur le terrain. Il toucha machinalement son poignet toujours strappé, comme une mauvaise habitude. Aujourd'hui devait être le jour où il n'y toucherait pas.

Et, comme il avait travaillé pour le réaliser, Elohim permit en effet à l'équipe de France d'améliorer son jeu offensif, que ce soit sur des passes aveugles pour le pivot, libérations d'intervalles pour son ailier. Il était en phase avec ses coéquipiers et il ne manqua pas de le montrer lorsqu'après avoir effectué un croisé avec Nedim il déclencha une mine pleine lucarne en extension. En repliant, le poing levé, il échangea un clin d'œil avec lui. En effet, Palicka et les tirs de loin, c'était compliqué.

Sur les actions suivantes, il se sentit plus libéré et tenta des mouvements qu'ils s'étaient plutôt interdits jusque-là, comme un demi-tour contact ou un tir désaxé à dix mètres. Peut-être la chance insolente du débutant, mais au bout de quinze minutes de jeu, il était à 4 sur 4 et la France s'envolait, d'autant plus que Dika, lui aussi, semblait inatteignable pour les Suédois. Malgré sa réussite, Guillaume le fit sortir et renvoya Nikola.

- Tu es en feu, mais on est pas assez solide en défense, il faut Niko. Je te garde pour le money-time à la fin au cas où. Tu as été parfait Elo.

Il aurait préféré rester mais se persuada que c'était une bonne tactique. Il regarda son équipe continuer de dominer tandis que leurs adversaires s'agaçaient de plus en plus, multipliant les fautes offensives comme défensives. Les deux minutes pleuvaient dans leur camp et ils défendirent même une fois à quatre.

Dans les trois dernières minutes, Elohim rentra à nouveau sur le terrain. La France avait un confortable écart de quatre points et défendait alors que la balle était au demi-centre Jim Gottfridsson. Il enclencha une combinaison et Elohim qui avait encore du jus dans les jambes intercepta une passe compliquée qui sautait un poste. Le champ étant libre devant lui, et aucun coéquipier ne lui proposant de solutions plus adéquates, il partit en dribble à toute allure. Un arrière qui avait eu le temps de se replier jusqu'au milieu du terrain, essaya de le bloquer mais Elohim le prit de vitesse. Le défenseur laissa traîner son bras entre son cou et son nez et Elohim partit violemment en arrière. Son corps tomba lourdement et il sentit sa tête frapper le sol, tandis que les sons se mélangeaient entre les coups de sifflets secs des arbitres, la foule qui huait et les pas des joueurs se réunissant autour de lui. Il crut entendre Ludovic lui parler mais il était complètement sonné et lorsqu'il porta sa main à son nez, comme un réflexe, le liquide rouge dégoulinant de ses doigts le surprit.

- I'm really sorry. I was in the heat of the moment. I didn't want to hurt you, s'excusa Eric Johansson.

Elohim voulut lui répondre mais Nedim, qui n'avait pas du tout apprécié le geste du Suédois, se chargea d'une réplique plutôt musclée.

- Here, we're playing Handball, not Rugby. You freaked out, man, s'exclama-t-il en fonçant vers Johansson.

Ils se branchèrent, presque front contre front, quelques secondes avant que les autres joueurs ne les séparent. Elohim fut accaparé par Jae qui regardait son nez et essayait d'arrêter le saignement alors que le flot avait atteint sa bouche et qu'il était obligé de cracher. Mais le nez ne semblait pas cassé. Il inspecta un instant son cou qui gardait une marque rougeâtre puis s'attelait au plus inquiétant. Il était tombé sur la tête, un protocole commotion s'imposait.

- Tu m'entends Elohim ?

- Oui.

- Is he all right ? demanda un des deux arbitres qui revenaient du visionnage de la vidéo.

- Headshok, no broken nose and a bit groggy. I take him out immediately.

L'arbitre acquiesça et rejoignit sa paire pour décider de la couleur du carton.

- Il va falloir que tu te relèves et on va regarder tout ça, d'accord ?

Le médecin appela Nedim et tous les deux l'aidèrent à se mettre sur ses pieds. Dire qu'il avait le tournis était un euphémisme, il ressentit une puissante envie de vomir et le bruit autour de lui n'arrangeait pas son mal de crâne. En passant devant le banc de son équipe, ils le félicitèrent en posant leurs mains sur sa tête ou son torse.

- On va aller directement dans les vestiaires, dit Jae à l'intention de Nedim, tandis que le Suédois s'était finalement pris un carton rouge.

Une fois installé sur un banc, Nedim repartit pour la fin du match et le médecin observa la réaction des yeux d'Elohim à une petite lumière, tout semblait normal.

- Tu as mal ?

Il hocha la tête.

- Est-ce que tu sens que tu vas t'évanouir ou pas ?

- Non, mais je crois que je vais vomir.

Cela ne sentait pas bon. Il attrapa un bac dans un coin et lui posa à sa gauche.

- N'hésite pas si jamais. Je vais toucher ton crâne pour voir s'il y a une bosse.

Jae passa ses doigts dans les cheveux bouclés et palpa son crâne, il ne trouva pas d'aspérité.

- Je ne pense pas que tu as une commotion, mais il faudra vérifier dans une heure. Maintenant, je vais cautériser ton nez.

Jae releva son menton avec sa main. Elohim se rendit alors compte qu'ils étaient très proches et sentit son cœur s'emballer. Jae ne semblait intéresser que par ses cotons et sa blessure.

- Il ne t'a pas raté...

Lorsqu'il eut terminé de soigner son nez, il essuya avec une lingette le sang séché et enfin il croisa son regard. Jae se perdit dans ses yeux. Personne ne l'avait jamais regardé de cette façon, avec un désir innocent. Il déglutit, sa main toujours sur son visage, et poussé par une force invisible, il rapprocha dangereusement son visage de celui d'Elohim. Leurs lèvres n'étaient plus qu'à quelques centimètres, son rythme cardiaque s'envolait et son esprit ne pouvait penser à une autre donnée qu'à l'irrésistible envie d'embrasser Elohim Prandi.

- Alors ? Tout va...

La voix de Nedim fit sursauter les deux hommes qui se reculèrent instantanément. Le demi-centre, à qui rien n'avait échappé, resta un moment choqué par le spectacle. Cependant, il se reprit vite.

- Pardon, je ne pensais pas que...enfin... Je reviens quand tout le monde arrive.

Jae reporta son attention sur Elohim qui avait la tête baissée, ses cheveux cachaient ses yeux. Il arracha des mains du médecin la lingette et finit seul d'effacer les traces de sang séché.

- Tu te sens bien ?

- Oui, répondit sèchement l'arrière.

Jae ne s'attendait pas à un tel revirement mais ça ne l'étonnait pas vraiment. Tout le monde n'était pas encore sorti du placard.



Merci pour la lecture ! Bonne nuit ! 

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