🎃 10.(4) La nuit est noire, mes sœurs, le duel des magiciens commence
J'ouvre brusquement les yeux, l'air s'engouffre dans mes poumons si bien que je manque de m'étouffer. La nuit m'assaille et je me roule sur le ventre par terre, suffocant tandis que je recouvre mes sensations en serrant fort le talisman de Draghan contre moi.
- Candice ! crie Abigail.
La sorcière se précipite vers moi pour m'aider à me remettre sur mes jambes, son regard fait un rapide examen de mon visage, sans qu'elle ne parvienne à comprendre le fait que je sois encore en vie.
Je la repousse gentiment et redresse les épaules, prenant l'expression la plus sévère et abominable que je possède.
- Laisse-moi sorcière ! Ne me touche pas ! je m'écrie sous les visages abasourdis.
Le dégoût peut se lire sur mon visage quand je jauge du regard Abigail qui ne comprend pas le tournant qu'est en train de prendre la situation.
- Candice... bredouille-t-elle.
- Vous n'êtes pas digne de vos pouvoirs ! je l'accuse. Vous n'êtes que des moins que rien, une honte pour le monde de la magie ! Vous me répugnez, je crache avec mépris.
Quelque chose se brise en elle, comme en chacune des femmes qui me toisent avec ahurissement. Je reporte mon regard sur Salomon qui visiblement ne s'est pas encore remis de ma résurrection.
- J'accepte votre offre.
Les prunelles cramoisies du sorcier s'illuminent et il sombre dans un rire sinistre mais victorieux. Je délaisse Abigail qui n'a plus la force de me retenir et vais rejoindre Salomon qui me tend la main. Je glisse mes doigts dans sa paume chaude, un sourire diabolique sur les lèvres, le sorcier me contemple avec ravissement et adoration, ses lèvres s'étirent sur ses dents pointues.
- Je me suis trompé, tu es bien plus maligne et forte que Bathsheba en fin de compte.
Je lui répondis par ma plus belle figure de peste.
- Allons fermer le cercle, proposé-je.
Sans attendre, Salomon me conduit au cercle des sorcières qui ne peut se fermer depuis que je l'ai rompu. Le puissant sorcier s'avance au cœur du cercle des sorcières qui le dévisagent avec haine et colère, à peine son pied franchit la barrière que la lumière blanche se nimbe d'une lueur rouge et un faisceau lumineux s'ouvre au cœur du Grand Chêne sous mes yeux ébahis.
- La porte... murmuré-je.
Je contemple le spectacle surnaturel qui se peint devant moi, un souffle chaud comme un brasier s'échappe de la lumière vermeille, les portes de l'enfer s'ouvrent. Une bourrasque s'échappe de la porte, balaie nos cheveux et nos capes, la terre tremble sous nos pieds, Salomon écarte les bras, comme un dieu victorieux et part dans un rire diabolique, lorsqu'il se tourne face à moi ses prunelles d'un rouge incandescent brillent sur le noir qui a recouvert ses yeux.
- Mes bien chères sœurs ! Le temps est enfin venu pour nous de nous libérer ! scande-t-il dans la nuit d'une voix à glacer le sang. Nous allons enfin nous débarrasser de cette vermine humaine qui nous pourrit la vie, qui nous chasse, qui nous traque, qui tue nos enfants !
Des flammes apparaissent à l'intérieur de la porte et en lèchent les bords, comme si elles s'apprêtaient à sortir pour tout ravager sur leur passage.
- Démons ! Pères de la nuit ! Azazel, gardien des légions infernales, je t'offre la liberté ! Viens à moi !
Le sorcier pose un genou à terre en signe d'allégeance. Dans la lumière brûlante de la porte une ombre sinistre se dessine, une immense silhouette trapue à cornes de bouc, dans son dos des hurlements résonnent, des rires odieux s'élèvent jusqu'à nos oreilles.
Je jette un œil dans mon dos, les sorcières contemplent le spectacle, impuissantes, Abigail à genoux dans la terre, Draghan sur ses coudes observe, bouche grande ouverte, ce qu'il craignait voir arriver se produire. Tout est en place, c'est le moment où jamais.
En fermant les yeux, je cherche en mon for intérieur l'âme de Bathsheba. Dans les ténèbres de mon âme je trouve une étincelle pourpre qui brûle, irradie, du bout des doigts je l'effleure, je la touche, m'enveloppe dans son énergie. Aussitôt une puissance jusqu'alors inconnue afflue dans mes veines, elle parcourt tout mon corps comme une décharge revigorante. Je me sens vivante.
- Salomon ! je crie par-dessus le vacarme.
Interpellé par ma voix, le sorcier se relève et fait volte-face.
- Bathsheba... bredouille-t-il.
- Tu n'aurais jamais dû provoquer les sorcières du clan Campbell, Salomon. Maintenant tu vas payer pour tout le mal que tu as fait.
Campée solidement sur mes pieds, Bathsheba place toute son énergie dans mes paumes de mains, mon corps se meut de lui-même, et de toutes mes forces je propulse Salomon vers la porte grande ouverte sur l'enfer.
Emporté par la puissance de la magie, ce dernier recule, ses pieds s'enfoncent dans la terre meuble et il parvient malgré tout à s'arrêter à quelques pas de la porte infernale. Une aura de poussière et d'ombres terribles se forment autour de lui, l'enroulent, l'enveloppent, le protègent, jusqu'à former un bouclier devant lui pour empêcher mon pouvoir de l'expédier directement en enfer.
J'essaie néanmoins de ne pas broncher, toute ma force se concentre dans mes mains afin de pousser le sorcier, je souffre, mes bras et mes jambes se mettent à trembler. Je ne vais pas tenir très longtemps, je n'y arriverai jamais toute seule !
- Fermez le cercle ! je hurle.
Brynn semble comprendre où je souhaite en venir.
- Grand-mère ! appelle la jeune fille. Il faut fermer le cercle ! Vite ! Il faut l'empêcher de sortir !
Ni une ni deux, les sorcières se regroupent et ferment le cercle. Un rire sinistre s'échappe des lèvres de Salomon qui vient sans doute de deviner la suite de mes plans.
- Misérable petite sorcière ! Si tu crois que tu vas te débarrasser de moi comme ça ! Espèce de petite idiote ! Tu vas mourir toi aussi !
- N'en sois pas si sûr ! se manifeste une voix à mes côtés.
J'écarquille les yeux en constatant que Draghan se trouve à mes côtés. Il me lance un coup d'œil entendu et imite ma position, paumes de mains brandies vers le sorcier maudit, et déchaîne son pouvoir contre lui. Salomon recule davantage... mais pas assez pour se faire aspirer par l'énergie de la porte.
Les tremblements s'accentuent, mon corps m'élance et je sens un liquide chaud à l'odeur de ferraille perler de mon nez. Je jette un rapide coup d'œil à Draghan, il a l'air de souffrir autant que moi et lutte pour ne pas flancher. Je décide d'attraper sa main, nos regards se croisent et un regain d'espoir et d'énergie s'insurgent dans mes veines.
Salomon se bat, comme un lion féroce, pas une seconde il ne flanche et ma colère redouble, pas seulement la mienne, celle de Batsheba qui vient se joindre à ma rage, celle de Draghan et de toutes les femmes ici présentes. C'est notre colère.
- Rappelle-toi Candice, c'est ton pouvoir maintenant.
Je ne saurais dire si cette voix était la mienne ou celle de la sorcière. Dans un dernier effort surhumain, en combinant nos forces, Salomon faiblit, son pied glisse et son bouclier de ténèbres se fissure. Dans un cri d'horreur, le sorcier se fait engloutir par la porte des enfers.
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