Chapitre 20

—     Il n’y a rien à signaler. Vous n’avez pas de problèmes de santé depuis votre dernier examen d’il y a deux semaines, déclara le docteur, en souriant.

Il donna mes analyses à Kahron, qui prenait le soin de lire ce qui était marqué sur les documents. Il fronça des sourcils, se concentrant dessus. La conclusion du docteur m’allait très bien. Je n’avais rien, mon corps était en très grande forme, et cela ne cachait pas une maladie ou un cancer. Il n’y avait donc pas à réfléchir plus sur le sujet. J’étais en parfaite santé.

—     Merci docteur.

Karhon rendit les analyses au docteur, et nous quittions l’hôpital pour rentrer. Mon loup semblait un peu soucieux de ce qui se passait. Je n’avais pas dit grand-chose face au docteur. Cela ne m’avait pas semblait approprié sur le moment. Je pris la main de Karhon pour qu’il porte son attention vers moi. Ses deux lagons de glace plongèrent dans mes yeux, et je le voyais s’inquiéter.

—     Il y a un problème avec mes analyses ? Le docteur a dit qu’il n’y avait rien à signaler.
—     Je m’inquiète certainement de trop, soupira-t-il, en portant ma main à ses lèvres.

Je lui offris un doux sourire, avant de me venir me caler dans ses bras. Je déposais un baiser sur son menton, essayant de le rassurer. Je plaçais mes mains froides sous son t-shirt, et je sentis son corps se tendre à ce contact, non pas à cause de la différence de température, mais parce que je prenais l’initiative de le toucher un peu plus intimement. Son regard s’assombrit un instant et cette lueur de désirs vint s’allumer dans ses prunelles.

—     Tu joues de plus en plus avec le feu, susurra-t-il, légèrement grondant.
—     Moi ? Pas encore…, lui répondis-je taquine.

Je lui offris un petit sourire provocateur, et il déposa ses lèvres sur les miennes, comme pour se contenir de ne pas me soulever du sol pour m’emmener dans un lieu loin des regards pour faire des folies. Un petit rire étouffé s’échappa de mes lèvres occupées par les siennes. Il lâcha un autre petit grognement, venant prendre mon visage en coupe. Son souffle balayait mon visage, alors que ses yeux étaient fermés. Il devait certainement puiser au fond de lui pour ne pas sauter sur moi comme une bête affamée. Je devrais certainement ne pas le titiller davantage. Cependant mon objectif était accompli, l’inquiétude avait quitté ses yeux. Je récupérais ses mains dans les miennes, les serrant doucement. Il rouvrit les yeux, et je pus voir l’amour qu’il me portait dans ses deux orbes de glace. Je déposais un bref baiser sur ses lèvres, avant de me reculer, ses mains toujours dans les miennes.

—     On rentre ? Je risque d’arriver en retard à mon rendez-vous avec ta mère et les filles.
—     Je vais me sentir jaloux, se moqua doucement mon loup.
—     Jaloux de ta mère ? ris-je, en venant me mettre à côté de lui.
—     Pas seulement de ma mère. De tous les autres. J’ai l’impression que tu passes plus de temps avec eux, qu’avec moi.
—     Tu ne dramatises pas un tout petit peu ? pouffai-je, en le bousculant un peu.
—     Pas du tout.

Il passa un bras autour de moi, m’empêchant de m’éloigner et je dus m’agripper à lui pour pouvoir marcher correctement. Nous riions plusieurs minutes, tout en nous dirigeant vers la voiture. Je me sentais heureuse dans ses bras. C’était simple, sans prise de tête. Il n’y avait pas de problème. Mon amour pour Karhon allait en grandissant, même si je ne me sentais pas vraiment encore à ma place dans la meute, je m’habituais petit à petit d’être considérée comme sa compagne. Le seul petit souci était le changement dans mon corps. Karhon s’en inquiétait beaucoup trop, et je pouvais le comprendre. Il m’avait vu souffrir pendant trois jours, moi aussi, je me serais inquiétée pour lui. Cependant, même les médecins disaient que je n’avais rien, les examens affirmaient les dires, et je pétais littéralement la forme. C’était comme si j’avais fait peau neuve. C’était génial, parce que je pouvais donc supporter un peu plus de chose qu’avant.

Plongée dans mes pensées, je n’avais pas remarqué que nous étions déjà à la tanière. Lucile nous attendait sur le pas de la porte. Je descendis de la porte toute guillerette, en allant directement la rejoindre. Je lui fis un câlin, ce qui pouvait certainement la surprendre, mais dernièrement j’étais assez tactile avec elle et les filles. Sûrement parce que de cette façon, je n’avais pas à ressentir l’absence d’Altie. Elle me manquait énormément dernièrement. Elle nous avait contactés la semaine dernière. Elle ne devrait pas tarder à rentrer, seulement, j’avais l’impression que quelque chose n’allait pas. Althea était distante, même si je savais qu’elle l’était souvent quand elle partait en déplacement. Comme Adam le disait, si elle avait vraiment un problème, elle nous contacterait. Malheureusement, je n’arrivais pas à me débarrasser de cette sensation gênante.

—     Qu’ont donné les examens ? s’enquit Lucile.
—     Tout va bien. Je n’ai rien. Je suis en parfaite santé, souris-je, en réponse, en émergeant de mes pensées.
—     Alors pourquoi mon fils fait-il cette tête ? déclara-t-elle, en désignant Karhon.
—     Oh… c’est apparemment sa tête de jaloux, parce que je passe plus de temps avec vous autres, qu’avec lui, chuchotai-je légèrement moqueuse.
—     Je t’entends, tu sais, soupira mon alpha, en nous rejoignant.

Il m’attrapa par les hanches pour venir me coller à lui, sous le rire de Lucile. Je lui fis une petite moue innocente, et il déposa un baiser sur mes lèvres. Il enfouit ensuite son nez dans mon cou, et je lâchai un petit rire sous le coup chatouilleux de son nez. Je m’enfonçais un peu plus dans son étreinte, et il resserra son emprise sur moi. Il ne voulait pas me lâcher.

—     Mon dieu ! Relâche donc ma petite Elerys ! Tu n’es pas le seul à vouloir passer du temps avec elle, le gronda-t-elle, tout en étant moqueuse.
—     Justement. Je devrais être le seul à accaparer son temps, marmonna-t-il, légèrement grognon.
—     Tu as du travail, répliquai-je, amusée.

Il lâcha un grommellement, montrant qu’il n’avait vraiment pas envie de me laisser. Il finit tout de même par me lâcher, après m’avoir embrassé le cou. Il me déposa un dernier baiser, avant d’entrer et de se diriger vers son bureau. Je partageais un regard avec Lucile et nous éclations de rire, face à son comportement enfantin. La mère de mon loup m’amena jusqu’à la terrasse où les autres louves nous attendaient déjà. Leona et Ruby vinrent à ma rencontre pour me saluer. Leona me prit dans ses bras, tandis que Ruby, la sœur d’Esmeralda m’accueillait chaleureusement avec une assiette de crêpes.

—     Notre invitée d’honneur, enfin ! Je commençais à croire que Karhon n’allait pas te laisser venir, gloussa-t-elle.
—     C’est pour ça que Lucile est partie les accueillir, rit Leona, en me relâchant.
—     Evidemment. Je n’allais pas mon fils s’accaparer ma belle-fille, comme ça ! s’exclama-t-elle, en me prenant par les épaules.
—     Ce n’est pas non plus une perte si elle n’avait pas pu venir, répliqua Esmeralda, en nous rejoignant avec d’autres louves.

Mon corps s’était légèrement tendu à l’arrivée de cette dernière. Je continuais tout de même mon geste pour récupérer une crêpe de l’assiette de Ruby, pour la manger. Elle l’avait tartiné de chocolat, remplie de fraises et de crème pâtissière pour ensuite mettre de la chantilly. Mon regard se posa ensuite sur elle, et je pouvais déjà ressentir toute sa haine à mon encontre, qu’elle cachait derrière ce sourire prétentieux.

—     Esmeralda ! la rouspéta sa sœur.
—     Quoi ? Je ne fais que dire la vérité. Cela n’aurait rien changé à notre réunion. Ce n’était pas comme si elle apportait vraiment quelque chose, en dehors de manger et rester silencieuse dans son coin.
—     Tu vas trop loin, Esmeralda, prévint Leona. Elerys a tous les droits d’être présente. Elle est une louve de notre meute.
—     Peut-on vraiment l’appeler comme ça ? répliqua-t-elle, en croisant les bras.

Je sentis mon cœur se serrer. Je ne pouvais pas vraiment nier ce qu’elle sous-entendait. Je n’avais pas de loup, pas de part animal. Être une sineulla avait ce sacré désavantage. L’incapacité de se changer en loup, de ne pas avoir de forme lupine. Je ne pouvais pas vraiment être appelé « loup-garou » si je n’avais pas la partie « loup ». Je serrais la crêpe entre mes doigts, faisant quand même attention à ne pas la serrer trop fort pour que la crème ne se répande pas partout. Je sentis la prise de Lucile se raffermir sur mes épaules. La mère de Karhon était une louve au grand cœur, et même si nous n’avions jamais vraiment abordé ce sujet, je savais qu’elle n’y prêtait pas attention. Elle voulait seulement le bonheur de son fils. Elle m’avait dit une fois, qu’elle était avant tout une mère, avant d’être la Vetusna. Je n’étais pas vraiment sûre de vraiment faire le bonheur de Karhon, mais on était heureux ensemble. On s’était trouvé et on cherchait notre chemin ensemble vers ce bonheur.

—     Qu’est-ce que tu cherches à dire exactement, Esmeralda ? souffla Lucile.
—     Je ne cherche rien. Je ne fais qu’un constat, déclara-t-elle, en réponse.

Son regard de jade se posa sur moi, brûlant de cette haine froide. Elle renifla de dédain à mon encontre, avant de reposer son regard sur Leona, Ruby puis enfin Lucile. Elle haussa des épaules, avant de se tourner vers les louves qui l’avaient suivie. Elle ouvrit ses bras, comme pour les englober afin d’avoir leur pleine attention, comme si elle les prenait sous son aile.

—     On nous enseigne depuis la nuit des temps qu’une meute est dirigée par un Alpha et une Luna. Un couple de loups destiné à protéger chaque membre de la meute, que si un seul d’entre eux était un maillon défaillant, c’était la perdition de la meute, commença-t-elle et elle se tourna vers moi. Un couple de loups.

Elle insista bien sur ce dernier mot, montrant son importance auprès des autres louves. Esmeralda n’attendit pas de réponse, et tourna des talons pour quitter la réunion des louves. Quelques-unes des louves présentes la suivirent, alors que la rencontre n’était pas encore terminée, démontrant leur soutien à Esmeralda dans ses propos. Je pouvais voir les autres hésiter. J’avais l’impression de diviser les louves.

—     Je suis désolée pour son comportement, Elerys. Esmeralda est tellement…
—     Tout va bien. Je devrais manger la crêpe avant d’en faire de la bouillie, tentai-je de blaguer.

Je voulais alléger l’atmosphère, mais la petite voix que j’avais utilisée, ne semblait convaincre personne. Je reposais la crêpe dans l’assiette finalement, sans en prendre une bouchée. J’étais restée silencieuse face à l’attaque verbale de cette peste. Je n’avais même pas réagi, parce que je savais que c’était la vérité. Je n’avais pas de louve, et cela pouvait porter préjudice à la meute, si je devenais la Luna. Je m’excusais auprès de Lucile, et des filles, et je fis demi-tour. Je n’arrivais pas à faire face aux regards des autres louves. Althea me manquait dans ce genre de situation. Elle aurait certainement répliqué, voir agi contre elle. Je sentais mes yeux s’embuer de larmes. Je me sentais fragile, comme si on avait rouvert une plaie et qu’on y avait jeté du sel dessus, la rendant encore plus vive. Plus lancinante. Me rappelant que je n’étais rien. Rien du tout…

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