Chapitre 19
J’avais l’impression d’être légère, comme si on m’avait retiré des poids. Je me sentais aussi plus vive, plus rapide. Ce qui me paraissait à la fois étrange et naturel. C’était comme si j’avais reçu un power up. Cela faisait une semaine, depuis que j’avais perdu connaissance lors de la chasse. Je pétais la forme, et pour ainsi dire, je contrôlais assez mal ma force. J’avais cassé plusieurs tasses, des portes et sous l’effet de l’agacement, j’avais perdu ma table basse, ainsi que mon portable, sans parler de mon lit.
— Comment te sens-tu ? s’enquit Adam, en me rejoignant.
— Bien. Je peux encore courir.
— Tu viens de courir un marathon, et tu ne te sens pas essoufflée, constata-t-il.
— Oui. J’ai même envie de courir encore un peu. Je me sens… hyper active alors que je ne l’ai jamais été.
— Oui. Tu aurais recraché tes poumons aux deux premiers kilomètres, se moqua-t-il, gentiment.
— Merci de dire que j’avais une mauvaise endurance, répliquai-je, en riant.
Adam ne répondit rien, réfléchissant sûrement à ce qu’il m’arrivait. J’avais cassé ma porte, il y avait deux jours sous un accès de colère. Je n’avais pourtant pas à l’être, mais juste l’idée de savoir qu’Esmeralda était autour de Karhon, avait fait naître cette possessivité, en moi. Ou bien était-elle déjà là ? Difficile à dire. Cependant, il était évident que quelque chose avait changé avec mon corps. J’étais plus forte, plus rapide et plus endurante. J’avais donc demandé à Adam de m’aider avec ça. Karhon était déjà bien occupé avec ses devoirs d’Alpha. Mattie devait encore aller à l’école, quant à Altie, elle avait eu des affaires extérieures de la meute. On s’était envoyé quelques messages, mais depuis deux ou trois jours, je n’avais plus vraiment de nouvelles.
— Tu as eu des nouvelles d’Altie ?
— Non, mais ne t’en fais pas. C’est une chose habituelle, quand elle sort du territoire.
— Je sais… mais je m’inquiète quand même pour elle.
— Tu n’as pas à t’en faire, s’il y avait vraiment un problème, elle nous l’aurait fait savoir d’une façon ou d’une autre.
Je hochais de la tête, en remettant une mèche derrière mon oreille. Adam m’observa pendant plusieurs secondes, avant de lâcher un soupir. Il devait aussi s’inquiéter pour sa sœur. Je pouvais comprendre, même si Althea était débrouillarde, elle pouvait aussi attirer la poisse et se retrouver dans une mauvaise situation. C’était d’ailleurs, l’une des raisons pour lesquelles, ma meilleure amie n’aimait pas sortir du territoire. Au moins ici, les situations même mauvaises pouvaient se régler par la parole et la négociation. Dehors, cela pouvait être plus compliqué sur un territoire étranger.
— Tu devrais plutôt te concentrer sur toi. Tu devrais peut-être aller faire un check-up à l’hôpital ?
Je n’avais même pas pu ouvrir la bouche que deux bras m’entourèrent pour me caler contre un torse large et chaud. Je n’avais pas vraiment besoin de me retourner pour savoir que c’était Karhon qui venait de nous rejoindre. Je me laissais donc aller contre lui, me tournant à moitié pour pouvoir passer un bras autour de sa taille, ma joue venant se poser contre son pectoral. Mon regard se releva dans le sien, et je pus voir une pointe d’inquiétude. Sûrement à cause de ce qu’il venait d’entendre.
— L’hôpital ? Tu ne te sens pas bien, Floslunae ?
— Tout va bien. Trop bien même. Je viens de parcourir un quart de la forêt en courant, sans m’essouffler, souris-je, fière de moi.
— Et ce n’est pas normal, poursuivit Adam, en fronçant doucement des sourcils.
— Tu penses que ça a un rapport avec ce qu’il s’est passé pendant la super lune bleue ? Que ça a affecté ton corps ?
— Ce n’est qu’une supposition, mais on n’est jamais trop prudent. Je ne suis pas malade ou quoi. Je me sens même en super forme.
Je sentis le regard insistant d’Adam à l’arrière de mon crâne. Sincèrement, je ne voyais pas l’intérêt d’aller à l’hôpital, mais il était vrai que le phénomène était des plus étranges. Je devais me montrer prudente. Ce regain d’énergie ne pouvait pas être seulement bénéfique.
— Je vais prendre rendez-vous avec le médecin de notre famille pour toi, déclara Karhon.
— Merci.
Je déposai un baiser sur l’arête de sa mâchoire, et il me répondit en embrassant ma tempe. Il vint frôler mes lèvres, des siennes. Il me serra un peu plus contre lui, et je lui rendis son étreinte pour le rassurer. Je le savais inquiet pour moi. Dès que cela me touchait, il s’en inquiétait. Il frottait son nez contre ma joue.
— Je n’ai rien contre tant d’amour, mais on peut reprendre les tests ? souffla Adam, devant notre élan d’affection.
— Vous n’avez pas terminé ? s’enquit l’Alpha.
— Non, on comptait rentrer pour tester sa force dans la salle d’entraînement.
Karhon hocha la tête. Je leur offris un sourire, avant de me séparer de mon loup. Ce dernier fronça doucement des sourcils, en me voyant s’éloigner de lui, alors qu’on pouvait rentrer bras dessus, bras dessous. Seulement, j’étais d’humeur joueuse. Ce n’était peut-être pas une bonne idée ce que j’allais faire, mais je savais que les conséquences seraient nulles avec ces deux-là. Je pouvais donc me permettre de faire ce que je ne ferai certainement jamais, en tant normal.
— Une petite course, ça vous dit ? m’enquis-je, en sautillant presque tout en prenant doucement le chemin de la tanière.
— El’, prévint Adam, alors qu’un rictus amusé s’étirait sur ses lèvres.
— Floslunae, tu…
— Je vais considérer ça, comme un handicap pour vous !
J’avais à peine terminé ma phrase, que je m’étais élancée pour rejoindre la tanière, le plus vite possible. Je savais que cela titillerait leurs instincts de chasse. Je faisais plutôt une belle proie, surtout pour l’un d’entre eux. Adam avait juste la compétition dans le sang. Même si ce qu’il renvoyait ne le montrait pas du tout. Je savais que le grand frère qu’il était, n’appréciait pas de perdre dans un domaine qu’il maîtrisait à la perfection. Surtout quand cela concernait une activité physique. Il restait bon joueur quand même.
En revanche, Karhon, j’ignorais qu’elle serait sa réaction. Bien que nous soyons un couple, il avait toujours fait en sorte de me montrer le meilleur de lui-même. Même lors de ces moments où il n’arrivait plus à se restreindre sur certaines choses, il restait correct. Cependant, je ne l’avais jamais provoqué aussi ouvertement que maintenant. Sa partie animale devait avoir envie de me poursuivre, après tout, j’avais quitté ses bras et je m’étais éloignée en courant par la suite. Ce qui ne devait pas énormément plaire à mon Alpha.
Je commençais à voir la sortie du sous-bois à côté de la tanière. Adam avait considéré qu’il n’avait pas été nécessaire d’aller si loin pour faire quelques tests physiques. Enfin, cela faisait quand même une sacrée trotte, si je n’avais pas eu cette nouvelle énergie qui me parcourait. J’avais presque atteint l’entrée de la tanière, quand je sentis deux bras m’entourer et nous faire tomber sur l’herbe tendre. Je lâchais un petit cri, suivi d’un petit rire.
— La prochaine fois, je demanderai un handicap d’au moins 500m, pouffai-je, en relevant mon regard sur Karhon.
— Bon sang, grogna-t-il, bassement. Tu es décidément…
Sa voix légèrement grondante me fit dresser doucement les poils, alors que des papillons chaleureux prenaient vie dans mon ventre. Cette vibration dans sa voix, elle était si sexy. Je glissais mes mains dans son cou, attirant davantage son attention sur moi, alors qu’il essayait certainement de trouver le meilleur moyen de me sermonner sur ce que je venais de faire.
— Lunae…
— Tu n’aimes pas ? soufflai-je, enjôleuse.
— Ce n’est pas la question ! Mais je me rappelle que tu voulais y aller doucement.
— Je ne me rappelle pas d’avoir utilisé ce terme, répliquai-je, en haussant un sourcil.
— Elerys, souffla-t-il, légèrement grondant.
Je sortis le bout de ma langue pour humidifier mes lèvres, et je vis son regard s’assombrir à ce simple geste. Seigneur… je l’avais peut-être poussé à bout. S’il venait à m’emmener avec lui, pour assouvir le désir brûlant que je voyais dans ses prunelles glaciers, je ne pourrais jamais lui dire d’arrêter alors que j’avais provoqué ça. Je commençais à me tortiller inconsciemment sous lui, alors que ses prunelles s’embrasèrent de ce désir si fort qu’il avait pour moi.
— Karhon…
Avant que je ne puisse dire autre chose, il s’était relevé d’un bond. Il me releva brusquement, mais toujours avec tendresse. Il marmonna quelque chose d’indéchiffrable dans sa barbe, avant de me prendre la main, et de rejoindre la maison. Je clignais des yeux, devant son comportement. Est-ce qu’il m’emmenait dans un endroit plus intime pour me dévorer ?
— Karhon… où est-ce..
Il nous avait conduit à l’intérieur du manoir, mais au lieu de prendre l’escalier qui menait dans sa chambre, il avait pris la direction du sous-sol. Il s’arrêta devant une double porte, avant de se tourner vers moi. Il me prit dans ses bras, ses lèvres caressant la peau de mon cou, m’offrant un frisson de la tête aux pieds. Je voulus m’accrocher à lui, mais il m’éloigna de lui abruptement. Je me sentais confuse sur le coup.
— La prochaine fois. Je ne me retiendrais pas. Tu es prévenue.
Sans un mot grogné de plus, il s’en alla et je sentis mes joues devenir brûlantes. Je posais mes mains contre mes joues, afin de les rafraîchir et de réfléchir à ce qu’il venait de se passer. Karhon avait clairement du désir pour moi, mais il s’était fait violence pour ne pas me brusquer. Je me sentais un peu honteuse de l’avoir provoqué de la sorte. Dire que j’ignorais ce qui m’avait pris, n’aurait été qu’une excuse bancale, un déni profond du désir qui vivait en moi. Je voulais Karhon, je voulais qu’on franchisse une autre étape. Cependant, je me sentais effrayée par cette impulsion soudaine… c’était incontrôlable.
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