III-Noir ébène
Je suis au café. Celui dans lequel on s'est rencontré, Au rendez vous des artistes.
J'y suis retourné comme tous les jours après t'avoir rencontré.
Je suis présentement en train d'attendre ma commande. Je t'ecris en attendant, c'est devenu comme une habitude. Je ne sais pas si j'aurai un jour le courage de te donner les pages de ce cahier que j'ai noirci avec mes mots et toutes mes pensées foireuses à ton propos.
J'espère que je pourrais.
J'ai l'impression de t'avoir perdu à jamais, pourquoi tu m'as dit de partir ? Pourquoi tu m'as dis que tu m'aimais ? Hein ? Tu crois que c'est facile pour moi maintenant ? Tu crois que parce que tu m'as demandé de t'oublier tout est plus simple pour moi. ?
Ben non.
Putain.
Je ne sais même pas si j'écris pour toi ou juste pour moi, pour pas que je devienne fou à ressasser toutes ses pensées. On m'a dit en cours que j'étais "une chose pensante" mais c'est fatiguant de penser surtout de se souvenir. Les moments passés ensemble n'arrête pas de me revenir à l'esprit comme un si mon cerveau n'était qu'un vieux CD rouillé.
Honnêtement, j'sais pas pourquoi j'écris. Je me sens comme un con. Je voudrais te rechercher, te retrouver mais tu ne veux pas, je ne peux pas. Alors j'suis assis là à la terrasse de ce café parisien comme un pauvre idiot.
J'voulais pas d'une fin de conte de fée. J'voulais juste être heureux avec toi, mais bon peut être que j'étais pas assez bien pour toi. À vrai dire, j'étais juste moi. Etait- ce suffisant ?
J'viens de recevoir ma commande.
Ma vie est d'une banalité déconcertante depuis que tu l'as quitté.
Lever, doucher, étudier, manger... Le temps continue inlassablement que j'aille bien ou non.
Tiens je viens de remarquer aussi, mon café il est noir. Aussi noir que tes cheveux ce jour là.
Tu te souviens ?
On était à une sortie organisée par la fac. On allait assister à une représentation théâtrale. Tout le monde s'était paré de ses plus beaux vêtements. Pour ma part, une chemise blanche et un slim noir avec une paire de mocassin. J'avais laissé mes cheveux trop longs détachés car tu m'avais dis une fois en cours, que tu les aimais bien comme ça, ça me donnait un air poète tu disais. J'avais mes bagues aux doigts et un sourire ne quittait pas mon visage.
Mais toi, tu étais la plus unique.
Tu portais une longue robe noire simple qui descendait jusqu'à tes pieds. Ton éternel perfecto en cuir noir sur tes épaules. Tu avais changé de couleurs de cheveux. Tu étais passée du bleu pastel au noir corbeau. Ils t'arrivaient en dessous de la poitrine et tu t'étais fait une frange. D'une telle manière que tes yeux vairons ressortaient encore plus. Ta paire de lunettes était toujours sur le bout de ton nez.
Tu avais décidé de peindre tes lèvres en noir. Ta peau hâlée ressortait encore plus de cette manière. Une multitude de colliers autour du cou, tu ressemblais à une sorcière, putain de magnifique mais diablement dangereuse.
Tu m'avais rejoins le sourire aux lèvres. À ce moment là, j'commençais à bien t'aimer. On avait une relation bizarre, unique, que je n'aurais échangé pour rien au monde. Je ne savais rien sur toi, on parlait seulement de livres, de cinéma, de musique, du temps aussi parfois. De la société, de nos rêves, de nos peurs et de nos envies. Mais en même temps, il y avait comme une sorte de barrière invisible qui nous séparait. On était des étrangers mais aussi bien plus que des amis. On était maladroits, un peu bizarres. On avait passé trop de temps entourés de personnage de papier.
J'pense qu'on s'aimait déjà, avec les regards qu'on se lançaient, les fous rire qu'on échangeait et nos discussions passionnées mais, on était trop idiots pour s'en rendre compte.
Sinon, on allait voir Antigone de Anouilh. Ma pièce préférée, je connais chaque tirade et je rêvais depuis que je l'avais lu quand j'étais encore un gamin de la voir jouer, pour de vrai.
On prit place côte à cote, les rideaux se ferment, la pièce commence.
Puis je t'ai regardé et j'ai pensé que tu ressemblais à Antigone, l'orgueil d'Oedipe.
Avec ton regard volontaire et tes convictions tu me faisais penser à l'héroïne de tragédie. Condamnée par les Dieux, son destin est immuable.
Tu étais absorbée par la pièce, complétement emportée par le jeu des acteurs. Et j'adorais te voir ainsi.
C'est pour ça que l'on est si souvent retournés au théâtre.
J'me souviens aussi que pendant le trajet du retour en taxi, ta tête était doucement tombée sur mon épaule.
Tu étais endormie, tes cheveux d'ébène tombant sur ton visage, semblaient te protéger du monde extérieure. Tu avais une expression candide. Je me rappelle que c'est la première fois que j'ai dis Je t'aime à une fille.
Des mots innocents murmurés à l'oreille d'une jeune fille endormie qui ignorait à quelle point elle avait bousculé ma vie. Tu ne les avais sûrement pas entendu mais mon coeur battait la chamade, j'me sentais con de ne pas avoir eu le courage de te le dire en face.
Mais je te l'écris, même encore maintenant.
Je t'aime Aerin. J'taime comme un taré et mon coeur semble encore faire une course folle tandis que j'écris ces mots.
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