Chapitre I

- Enfin !

Je viens de ranger le dernier carton dans mon appartement. C'est officiel : je viens d'emménager à New-York. Je suis tellement excitée à l'idée de pouvoir vivre cette nouvelle vie dont je rêvais, même si cela me terrifie aussi en un sens.

Je me dirige vers la cuisine afin de me préparer un café, il est déjà dix-sept heures et cette journée m'a éreinté ! En allumant la machine à expresso, j'entends gémir dans mon dos.

- Bien sûr mon chien, je vais te donner un biscuit à toi aussi ! M'exclamais-je.

C'est mon animal de compagnie, un chien Border Collie noir prénommé Chaussette qui est également mon plus fidèle ami. Il m'a suivi dans chacun de mes voyages et je lui ai toujours confié mes pensées les plus intimes. Son nom fait souvent rire la plupart des personnes qui ne comprennent pas pourquoi j'ai donné un prénom féminin à un mâle. Mais pour moi, cela avait un sens : la première fois que je l'ai vu, ce n'était qu'un bébé, et presque toute sa patte avant droite était blanche ; c'était un contraste saisissant avec le reste de son pelage noir. Naturellement, la première chose qui m'a traversé l'esprit sur le moment était « mais tu as une chaussette ! ». Son prénom demeure un clin d'oeil à notre première rencontre. Et je pense aussi que le monde manque cruellement d'imagination, et même de logique pour ne pas forcément le comprendre en le voyant, ou au moins tenter de le deviner.

Après avoir récompensé mon chien pour son calme olympien durant notre déménagement et déposé ma tasse sur la table basse, je m'étale de tout mon long sur le canapé.

Je dois commencer à me pencher sur mon entretien d'embauche de demain. Je suis une personne très méthodique et je n'ai pas envisagé une seule seconde que je viendrai m'installer dans une si grande ville, loin de ma famille, sans aucune garantie financière ; même si j'ai économisé avant le départ, je ne pourrai pas tenir plus de quelques mois sans un emploi et je m'interdis strictement de demander de l'aide à mes parents, je dois bâtir ma vie moi même, seule.

Ces dernières années, j'ai effectué plusieurs stages juridiques, et j'ai candidaté au Cabinet Crayton -constitué des plus grands noms du droit, des requins tout de même !-, je n'avais que peu d'espoir. Je ne pensais pas qu'un matin, la secrétaire du cabinet aller me demander de sa douce voix quelles étaient mes disponibilités pour un entretien.

Assise devant la tasse désormais vide, je passe en revue les divers éléments importants pour le rendez-vous, vérifiant que ma "règle des trois A" ne comporte aucune faille : attitude, assurance, affirmation. Je mise toujours beaucoup sur la présentation, je sais que même une personne avec un curriculum vitae intéressant peut passer à côté d'un poste si elle manque à l'un de ces trois points cruciaux, et une tenue imparfaite ou inappropriée peut y contribuer. Je me dirige donc vers mon dressing à la recherche de LA tenue qui me permettra demain de convaincre mon recruteur, Monsieur Crayton, que je suis la personne qui lui faut indéniablement.

Après près de dix minutes de recherche, je décide d'opter pour un pantalon slim noir, avec un débardeur à col bénitier bordeaux surmonté d'une veste de tailleur moderne, crème et des escarpins Gucci noirs vernis. J'ai délicatement posé l'ensemble de la tenue sur le fauteuil en cuir marron dans le dressing avant d'enfiler des baskets et une veste pour aller promener Chaussette.

L'air de la fin d'après-midi est agréable en ce mois de mai, surtout à Central Park : un havre de paix et de nature dans ce monde de brutes industrialisé. J'observe Chaussette se défouler depuis le banc sur lequel je suis assise. De temps en temps, il me ramène son bâton pour que je le lui renvoi, mais il l'attrape toujours avant qu'il ne touche le sol. Je manque cruellement de force mais le spectacle que m'offre mon chien me fait toujours autant rire.

Soudainement, un frisson me parcours l'échine. Le soleil a prit congé et l'air s'est considérablement rafraichit. Je me mets en marche tout en rappelant mon chien, signe que nous sommes sur notre départ, avant de prendre la direction du restaurant vietnamien au coin de la rue.

Une fois dans notre nouvelle demeure, je fonds sur le sofa, emmitouflée dans une couverture, mon plat à emporter à la main avant de mettre le film « Coup de Foudre à Notting Hill » sur l'écran de télévision. J'adore vraiment les histoires d'amour, l'ambiance romantique des romans à l'eau de rose m'a toujours séduite. Petite, je me disais qu'un jour je vivrai une histoire d'amour comme dans les films ; hélas, mes espoirs ont tous été anéantis aux moments des premiers amours. J'ai parfois honte de l'admettre, mais malgré ces déceptions, je demeure fleur bleue.

Lorsque le générique de fin s'est affiché à l'écran, Chaussette dormait déjà, visiblement épuisé par notre balade ; c'est le signal m'annonçant que je dois à mon tour me plonger sous les draps frais et embrasser le pays des songes.

À sept heures et demies, le réveil me tire du sommeil. J'ai très peu dormi à la perspective de mon entretien. Je sors mollement des couvertures, j'ai toujours froid à ce moment là. J'ai mal partout, le déménagement a provoqué l'arrivée de charmantes petites courbatures parfaitement désagréables.

En passant devant le miroir j'ai même pu voir les magnifiques valises noires sous mes yeux. « Aie ... Je vais avoir du travail ! » Me dis-je intérieurement. Chaussette se lève à l'instant même où je franchis le seuil de la porte pour venir me faire sa fête quotidienne. J'ai besoin, avant toute chose, d'un bon café dans mon mug rose à l'effigie de Marie des Aristochats que Mayson m'avait ramené de l'un de ses séjours à Disney World. Rien que l'odeur de cet or noir a pour effet de tirer instantanément de mon sommeil. J'enfile rapidement un jogging et une paire de baskets pour aller courir. Je ne fais pas souvent de sport, mais particulièrement avant des évènements importants, je dois me défouler pour diminuer le stress qui me ronge.

J'enchaine les foulées, je sens mes palpitations cardiaques s'accélérer et ma respiration se faire plus saccadée ; plus je me défoule, plus je me sens sereine et libre. Peu m'importe le monde autour dans ces moments là. Chaussette n'est jamais bien loin, tantôt il prend du retard pour sentir une feuille morte, tantôt il me devance de plusieurs mètres. Mon plaisir personnel est d'essayer de le dépasser à chaque fois, en vain. Il peut être tête en l'air par moment et maladroit, mais il est vif comme l'éclair.

En rentrant, je me précipite sous la douche. Les jets d'eau chaude m'apaisent, et après avoir été courir, j'ai toujours la sensation que je me lave de mes angoisses, mes peines et que j'évacue les particules fines présentes dans mes organes.
Après m'être entièrement apprêtée, je me place devant le miroir en pied du dressing, me répétant inlassablement que je ne dois pas oublier la règle des trois A et à chaque encouragement, je me sens gagner en confiance. La tenue que j'ai sélectionné la veille me va à ravir, soulignant mes courbes plutôt généreuses sans pour autant que cela ne vienne éveiller d'autres intérêts pour mon interlocuteur. Cela s'accorde parfaitement avec mon teint légèrement halé typique de la Californie. J'ai choisi de boucler négligemment les longueurs de mes cheveux blonds méchés miel, et également, d'accentuer mon regard vert en le soulignant avec un maquillage brun chaud.

J'attrape mon petit sac à main rigide Prada noir, avant de fermer la porte d'entrée en déposant un baiser sur le front de Chaussette. Le cabinet n'est qu'à un quart d'heure de marche de mon nouveau logement, et je dispose d'une heure pour m'y rendre. Je suis tellement en avance que je vais pouvoir flâner librement dans les rues.

En avançant, je note intérieurement de faire du shopping dans quelques magasins devant lesquels je passe, les vitrines sont très attirantes, et je n'ai pas réellement envie de me contenter de faire du lèche-vitrine. La ville est exactement comme je l'ai toujours imaginé : immense. Tout semble être dans la démesure, la hauteur des buildings, la précipitation des habitants, même la couleur des taxis me semble trop jaune pour être vraie. Mais cela me plait. « Vive l'Amérique, vive New-York ! » suis-je entrain de penser, heureuse.

Dans leurs empressements, de nombreux new-yorkais en retard pour le travail me percutent, tandis que je découvre le quartier de la ville dans lequel je vais vivre désormais. Le ciel nuageux menaçant me rend nostalgique du soleil californien, je ferme les yeux un instant pour me souvenir de l'agréable sensation de ses rayons sur ma peau. En rouvrant les yeux, je ne cesse de me dire que cette ville m'ouvre grand les bras.

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