chapitre 9
Dans les espaces publics, ce que Madi préfère, c'est se fondre dans la masse. Ne surtout pas se faire remarquer. N'avoir aucun regard sur elle.
C'est pourquoi, en se regardant dans le miroir, elle se demande pourquoi aujourd'hui, elle a décidé de porter une robe jaune.
C'est un joli jaune ; un jaune poussin. Mais c'est jaune. C'est loin d'être discret. Les gens vont sûrement la regarder dans la rue, ou du moins, la voir.
Pourtant, elle décide de la garder. Elle attrape son sac qui contient ses affaires indispensables et sans plus de cérémonie, elle sort de chez elle, direction chez Ibtissem.
Quand elle arrive devant la maison, elle prend quelques instants pour savourer ce moment. Elle attend de revoir Ibtissem depuis que celle-ci est partie, la veille. Et même si cela semble court, Madi a vécu ça comme quelque chose de beaucoup trop long à son goût.
-Bonjour, fais comme chez toi ! lui lance Ibtissem en ouvrant la porte, et contrairement à la première visite de Madi chez elle, elle la fait entrer avant de fermer la porte. J'adore ta robe ! J'ai abandonné les vêtements jaunes en faisant ma couleur, déclare-t-elle en montrant ses pointes bleues et rose. J'hésite encore pour la prochaine couleur.
-Quelles idées tu as ? demande Madi en suivant Ibtissem dans la cuisine, et celle-ci hausse les épaules.
-J'avais pensé à vert. Et ensuite je me suis dit que rouge et rose, ça pouvait être joli. Demain, je vais peut-être me réveiller avec une envie de faire du orange, qui sait.
Madi sourit.
-Mais assez parlé de mes cheveux. J'ai tout préparé ! s'exclame Ibtissem en montrant la table de la cuisine, sur laquelle les ingrédients--que Madi suppose, sont ceux dont elles ont besoin--sont posés. Le premier ingrédient qui attire les yeux de Madi est un petit flacon rempli aux trois-quarts.
-Qu'est-ce que c'est ? demande-t-elle en s'approchant pour le voir de plus près.
-De l'extrait de rose. Je me suis dit qu'on pouvait en mettre un peu, car ça va très bien avec les fraises. Enfin, je trouve. Mais si tu n'aimes pas ou que tu n'as simplement pas envie, aucun souci.
-Non, non, ça me dit bien d'en mettre. Ça a l'air bon.
L'idée de l'ouvrir et de sentir l'odeur de la rose traverse la tête de Madi, qui se penche pour attraper le flacon en même temps que son hôtesse. Madi essaie de le lâcher avant de réaliser que sa main est prise au piège en dessous de celle d'Ibtissem.
Elle relève la tête pour regarder celle-ci, et leurs yeux se rencontrent plusieurs secondes avant que Madi ne dise :
-Ibtissem.
-Oui ? répond celle-ci, sur un ton indiquant qu'elle n'avait aucune idée de ce qu'elle allait bien pouvoir ajouter après.
-Ma main. Tu écrases ma main.
Madi se fait la remarque, une fois la phrase dite, qu'elle a un peu exagéré. La main d'Ibtissem n'écrase pas la sienne, elle l'enveloppe simplement. Mais c'est déjà trop pour elle.
-Oh, dit simplement Ibtissem, et il lui faut quelques secondes de plus pour l'enlever, comme si elle n'en avait pas envie. On commence ?
Madi acquiesce et pose le flacon sans avoir senti l'odeur ; elle ne veut plus l'avoir dans les mains.
-J'ai la recette dans mon classeur, je vais le chercher dans ma chambre, annonce Ibtissem, et elle n'attend pas de réponse avant de disparaître, laissant Madi et ses émotions seules dans la cuisine.
Elle se passe les deux mains sur le visage, comme pour reprendre ses esprits. Mais où sont passés ses esprits, justement, et pourquoi les a-t-elle perdus juste à cause d'une main sur la sienne ?
Elle s'ordonne mentalement de redevenir normale juste avant le retour d'Ibtissem, qui revient dans la cuisine avec un grand sourire aux lèvres et un classeur rouge dans les mains.
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