Madi et Ibtissem échangent plusieurs fois durant la semaine, et finalement, c'est le samedi qu'elles ont décidé de se voir pour leur première activité : la fabrication de la guirlande.

Ce jour-là, Madi se lève aux aurores. Elle range et nettoie son studio du sol au plafond, sort tout le matériel nécessaire et se prépare. Elle est prête deux heures avant l'arrivée prévue d'Ibtissem, et elle n'a aucune idée de ce qu'elle pourrait bien faire en attendant.

Ce n'est pas de voir Ibtissem qui la rend anxieuse ; c'est plutôt le fait qu'elle vienne chez elle. Personne ne vient jamais dans son studio, et elle réalise soudainement à quel point cet endroit la reflète. À quel point c'est un espace personnel. Et ça lui fait bizarre de se dire que quelqu'un comme Ibtissem, c'est-à-dire, quelqu'un de très ordonné et minimaliste va venir ici.

Quand Ibtissem lui envoie un message pour lui annoncer qu'elle est en bas, Madi ne réfléchit plus et descend immédiatement la chercher. Elle trouve Ibtissem en train de regarder les fleurs, ce qui la fait sourire.

-Hey.

-Salut ! s'exclame Ibtissem en la voyant. C'est super sympa, par ici ! C'est pas une résidence étudiante ?

Madi secoue la tête.

-Non. J'ai trouvé ça toute seule.

-Ça a l'air vraiment cool. C'est accueillant, en tout cas.

Ibtissem suit Madi à l'intérieur, et aucun mot n'est échangé jusqu'à ce que les deux jeunes femmes sortent de l'ascenseur.

-Je te préviens, c'est moins rangé que ta chambre, se sent obligée de préciser Madi, et Ibtissem rit.

-Ça me dérange pas.

Madi ouvre enfin la porte, et elle invite Ibtissem à entrer avant de la suivre.

-Mais c'est trop beau ! s'exclame immédiatement Ibtissem, tournant sur elle-même pour regarder tous les dessins accrochés aux murs du studio. Ça fait combien de temps que tu as commencé ?

-Quand je suis arrivée ici, en septembre, répond Madi en haussant les épaules. C'était pas prévu que ça finisse comme ça.

Ibtissem sourit.

-Ça fait une ambiance géniale, en plus. C'est vraiment beau.

-Merci. Est-ce que tu veux boire quelque chose ? Manger quelque chose ?

-Non, merci. Je suis super contente d'enfin apprendre à faire une guirlande de coeurs, j'en ai même rêvé cette nuit.

-En fait... commence Madi. J'ai eu une autre idée.

Ibtissem fronce les sourcils, perdue.

-Comment ça ?

Madi l'invite à s'asseoir par terre--où elle a disposé deux coussins--, et ouvre la boîte où elle a interposé le matériel.

-En plus du papier rouge, j'ai aussi pris du papier vert. Pour faire des fraises.

Ibtissem se met immédiatement à sourire.

-Une guirlande de fraises, alors ?

-Une guirlande de fraises, acquiesce Madi en hochant la tête.

Elle attrape le matériel nécessaire et explique à Ibtissem qu'il va falloir couper les feuilles afin de "monter" les fraises avant de pouvoir les disposer sur la guirlande.

-J'en ai acheté une qui n'est pas très grande, explique Ibtissem en fouillant dans son sac. Je sais exactement où je vais la poser, c'est pour ça. Il faut qu'on compte le nombre d'ampoules, non ?

Madi acquiesce, et c'est comme ça qu'elles commencent à travailler. Madi s'occupe de couper les feuilles rouges, Ibtissem s'occupe de couper les feuilles vertes. La concentration gagne le pas sur la conversation, c'est donc en silence que les deux jeunes femmes découpent leurs bouts de papier. Mais ce n'est pas un silence gênant, c'est presque un silence relaxant.

Madi termine la première, et en attendant qu'Ibtissem la rattrape, elle sort la colle qu'elles vont utiliser pour l'assemblage. Elle réalise que finalement, la guirlande est presque finie, ce qui lui fait un petit pincement au cœur.

-C'est bon ! s'exclame Ibtissem, toute contente, en déposant les ciseaux par terre. Et maintenant ?

Madi sourit avant de lui tendre le petit tube de colle.

-Tu mets la colle, et je colle ? propose-t-elle, et Ibtissem acquiesce.

Madi décide de chasser ses pensées pour profiter du moment pendant qu'elle le vit.