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Severus resta impuissant face à la scène qui se joua devant lui, incapable de faire le moindre geste pour venir en aide à la vieille femme. Il ne put que regarder le directeur rattraper Minerva avant qu'elle ne s'effondre au sol, ayant perdu connaissance, pour venir la déposer sur un lit voisin du sien, prenant garde de la déposer avec délicatesse. Comme ci il se souciait d'elle. Pas après ce qu'il venait de lui faire...
-Qu'avez-vous... Fait...? La douleur ravivée dans sa poitrine ne lui permit pas de parler sans que sa voix ne tremble, la rendant bien trop faible et vulnérable à son goût.
Le directeur ne se retourna pas directement, prenant le temps d'observer la directrice adjointe comme ci ce qu'il venait de se passer l'avait impacté lui aussi. La peur envahit l'esprit du maître des potions. Une peur qu'il n'avait jamais ressenti auparavant, pas même concernant l'enfant. Une peur instinctive, glacée, qui vous saisit de ses doigts crochus pour ne plus vous lâcher. À ce moment précis, il le savait, rien n'allait se passer comme cela devrait...
Sensation déjà forte qui s'accentua davantage quand les yeux glacés du directeur se posèrent sur lui, dénué de toute trace de compassion ou même d'intérêt. Ses yeux-là étaient froids, morts, ne faisant que sonder son âme pour le mettre à nue, le dépouiller de toutes ses pensées et se les approprier contre sa volonté. Lentement, avec des gestes délibérément calculé et menaçant, Albus se redressa pour se rapprocher de lui, ne le quittant pas une seule seconde du regard. Toujours sans un mot, il saisit la chaise à côté du lit et s'installa calmement. Le silence s'étendit davantage entre eux.
Le mal-être s'empara un peu plus de Severus à chaque seconde. Que se passait-il ? À quoi jouait le directeur ? Ne voyait-il pas qu'il était déjà à bout, prêt à craquer à tout moment. Craqué de peur, d'angoisse et de douleur.
-Qu'avez-vous fait ? Demanda-t-il une seconde fois en jetant un bref regard à sa collègue endormie.
-Rien de plus qu'un simple oubliette.
Severus n'aurait jamais cru cela possible. Et pourtant la peur déjà irradiante de son être s'intensifia davantage. Cet homme face à lui était un prédateur. Il l'avait toujours su. Mais le voir ainsi, en pleine possession de tout contrôle, était la chose la plus terrifiante que Severus ait jamais vu... Et le fait que tout cela était dirigé contre lui spécialement ne l'aidait pas à retrouver le calme et le contrôle de son esprit.
-Pourquoi ?
Sa voix n'avait été qu'un murmure mais elle avait semblé résonner dans toute la pièce, foudroyant ses tympans.
Le moment de pause s'éternisa un peu plus, s'étirant jusqu'à devenir de longues minutes. Seule la respiration difficile de Severus venait entrecouper le long moment de blanc qui s'étira entre les deux hommes. Un regard. Le malaise augmentait à une allure impressionnante, presque aussi vite que les battements de cœur de Severus que le panique faisait accélérer de façon erratique. Il remua légèrement, provoquant une explosion de douleur dans tout son corps. Et alors que Severus allait reprendre la parole pour sommer une fois de plus le directeur à répondre à sa question, la porte de l'infirmerie s'ouvrit de nouveau. Laissant apparaître une personne que le maître des potions n'aurait jamais cru revoir de sa vie...
-Tout s'est déroulé comme prévu. Les autres ont déjà subi le sortilège oubliette comme vous nous l'aviez spécifié avant d'entreprendre la mission. Il ne reste que moi, et lui... Déclara l'homme en fixant Severus avec un profond dédain, le jaugeant de toute sa hauteur.
Ce regard...
Le cœur de Severus rata un battement.
Ce regard qui avait, à un moment, été rempli de temps de compassion et de regret. Ce regard qui lui avait apporté réconfort et soutien. Il n'existait plus. Laissant la place à un regard ferme, froid et surtout rempli de reproche et de haine. S'il avait été en pleine possession de ses moyens, il était presque certain que Severus se serait levé pour écraser son poing dans le visage de cet homme pour ce qu'il avait osé faire à Harry. Mais il n'en avait pas la force. Et la puissance de ce regard le clouait sur place dans un étau glacé où se confondait haine, ressentiment et désespoir.
Il était tombé si bas en si peu de temps et sans qu'il ne sache pourquoi que cela en était devenu risible. Et tout le monde pouvait en profiter désormais... Comme il détestait ce sentiment de faiblesse qui semblait ne plus jamais vouloir le quitter... Et de toute évidence, Charles Evans avait dû le lire dans ses yeux, car un sourire étirait ses fines lèvres. Un sourire carnassier digne du seigneur des ténèbres lui-même...
Et ce qu'il y avait d'effrayant avec cela était que cet homme était du côté du directeur. Celui qui devait lutter contre le seigneur des ténèbres. C'était une chose de savoir que les deux grands sorciers étaient aussi féroces l'un que l'autre dans la bataille qui les opposaient, prêt à tout pour triompher. Mais s'en était une autre de le voir... Et Severus ne put s'empêcher de penser à Harry qui serait bien trop tôt entre les griffes de la lumière pour qui la fin justifiait les moyens.
-Bien merci, répondit Dumbledore en faisant comme ci il n'avait pas vu l'échange mortel entre les deux hommes et en ramenant Severus à la réalité. Je m'occuperai de cela plus tard.
-Dans ce cas je vais attendre dehors que vous ayez fini ici.
Et l'homme était parti comme il était venu, en grandes enjambées sûres, la tête haute et fière, laissant derrière lui Severus qui fulminait de rage mais qui n'osait pourtant pas bouger face aux regards durs de Dumbledore qui, lui, semblait bien trop fière de lui. Il ne fallut pas longtemps après que la porte se soit refermée pour que Severus finisse par perdre patience, retournant toute son attention vers le directeur. Et bien que Charles Evans, ou quel que soit son véritable nom, était enfin parti, emportant avec lui une partie de la tension qui avait serait le cœur de Severus, Il était encore beaucoup trop tendu pour que cela soit bon dans l'état ou il se trouvait.
-Qu'est-ce que tout cela ? Que fait-il ici ? Où est Harry ?
Il toussa sec, dur, se déchirant la gorge, ayant du mal à respirer. Le pire étant probablement que le directeur se contentait de le regarder sans rien faire, son expression ne changeant jamais et ne laissant rien transparaître de ses pensées. Finalement, le souffle revint enfin dans les poumons endommagés de Severus, libérateur et l'apaisant un peu, bien que son cœur soit toujours prisonnier d'un étau glacé qui refusait de le laisser en paix.
-Chaque chose en son temps, mon ami.
Severus tiqua.
Depuis quand le vieil homme le considérait-il ainsi ? Comme un ami ? Et surtout, depuis quand se souciait-il suffisamment de lui pour venir le voir à l'infirmerie quand il y était ? Était-il si fatigué et engourdi que son esprit se mettait à inventer des choses de toute pièce ? Il devait bien s'avouer que cela ne serait pas la première fois que cela lui arriverait...
Mais cela n'avait pas de sens. Le directeur avait un comportement si froid envers lui à peine quelques minutes avant... Il se perdit dans ses pensées pendant un long moment, incapable de rester concentrer sur une seule chose, sa colère fulgurante après avoir vu Charles totalement envolé et oublié, remplacé par un désarroi comme il n'en avait jamais connu
Dumbledore resta silencieux un moment, jaugeant l'homme en face de lui, le détaillant comme jamais auparavant. Il était si vulnérable, si brisé que cela en était risible. Finalement, il n'avait eu aucune raison de s'inquiéter. Le grand Severus Snape, sous sa carapace dure d'homme sans cœur et sans émotions, n'était en fait qu'un enfant effrayé, en quête d'attention et de reconnaissance. Il n'avait pas fallu grand-chose pour en arriver là...
Ce qui l'arrangeait et le travaillait en même temps...
-Vous avez rempli votre mission avec brio Severus...
-L'enfant... Harry...
-Chaque chose en son temps, voulez-vous. Vous aurez la réponse à vos questions, mais avant tout...
Sous le regard rempli de question de Severus, le directeur sortit une petite fiole contenant un liquide argenté de sa manche, la déposant sur la table de chevet juste en face de lui. Le maître des potions regarda le contenant d'un œil méfiant, ne prononçant pas le moindre mot, attendant que le directeur fasse le premier pas.
-Le plus important pour vous, à l'instant précis, est que vous allez être récompensé. Vous avez gagné ma pleine confiance après ce que vous avez fait pour le jeune Potter. Vous avez fait ce que je vous demandais sans jamais remettre en question la tâche qui vous a été assignée.
Même si les propos du directeur auraient dû le ravir, lui qui attendait son approbation depuis si longtemps, Severus ne ressentait que rejet, incompréhension. Mais surtout, la mention de l'enfant avait ravivé son inquiétude le concernant. Où était-il ? Pourquoi le directeur refusait obstinément de répondre à ses questions ? Et pourquoi ne comprenait-il pas pourquoi l'homme le fixait avec tant de rejet ?
-Je dois vous avouer que j'avais des doutes concernant vos capacités à accomplir cette mission. Mais j'ai décidé de vous faire confiance. Et il faut croire que j'ai bien fait. Comme je vous l'ai dit, je vais vous récompenser pour vos actions. Et il me semble que ce qu'il vous ferait le plus de bien à ce moment précis, serait que je vous donne le remède à votre maladie...
Tout en parlant, Albus avait fait un vague geste de la main vers la fiole, incitant l'homme à suivre son geste du regard. Ses yeux s'écarquillèrent en se posant sur le liquide qui, étrangement lui procura un réconfort. S'inquiétait-il vraiment pour lui après tout ? Était-il possible que le directeur ai finalement la lumière en lui ? Ai finalement décidé de lui attribuer sa pleine confiance ? Une ombre vint soudainement s'ajouter au tableau...
-Vous ne pouvez pas me soigner...
Stebbins le lui avait bien dit. Personne ne pouvait le soigner. La maladie qui le rongeait était les conséquences d'un sort très puissant que seul le lanceur pouvait rompre. Car il y avait une signature dans la formule qui était propre à chaque sorcier. Une signature que personne ne pouvait reproduire.
Une idée se fraya dans l'esprit de Severus. Une idée terrible. Une idée qui le brisa comme jamais auparavant.
Non...
Ça ne pouvait pas être vrai ?
Il ne pouvait pas lui avoir fait ça ?
Et pourtant, au fond de lui Severus savait la réalité en refusant de la voir.
Il n'y avait qu'une seule raison pour que le directeur lui tende ce flacon avec autant d'espoir concernant sa guérison. Une seule raison pour laquelle se sourire hypocrite n'avait pas quitté ses lèvres depuis qu'il l'avait sorti de sa manche...
Dans sa poitrine, son cœur se serra si douloureusement sous le coup qu'il venait de recevoir qu'il se sentit obligé de mettre sa main sur sa poitrine, comme pour apaiser sa souffrance dans une veine tentative.
Sa vision se troubla de larmes qu'il refusait de laisser couler devant cet homme qui se disait partisan du bien commun...
Un gouffre sans fond venait de s'ouvrir sous lui. Un gouffre qui l'avalerait petit à petit jusqu'à ses dernières forces. Jusqu'à ce qu'il soit à jamais brisé.
-Pourquoi ? Demanda encore Severus d'une voix qu'il n'aurait jamais cru pouvoir remplir d'autant de mépris.
-Tu sais pourquoi, répondit calmement le directeur en le regardant toujours de ses yeux fermes et sans compassion.
-J'ai besoin de l'entendre de votre bouche. J'ai besoin de vous entendre le dire. J'ai... J'ai besoin... Vous m'avez manipulé. Vous avez tout mis en place. Pour me piéger... Alors je veux savoir pourquoi. Et Harry ? Et ce vous qui... ?
-En effet Severus. Je suis celui qui à « enlever » Harry Potter...
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