35
Quand Harry fut de nouveau tiré du sommeil, une journée entière venait de s'écouler, laissant la nuit reprendre place. L'enfant crispa ses paupières, n'osant pas ouvrir les yeux et découvrir que tout ce qu'il s'était passé la veille n'avait été qu'un rêve. Que Severus était encore profondément endormi, et que jamais il ne se réveillerait.
-Harry ?
La surface sous laquelle reposait la tête d'Harry vibra à l'énonciation de son nom. Mais il ne voulait pas ouvrir les yeux, pas encore. Et si tout n'était qu'un rêve ? Son imagination qui lui jouait des tours ? Il ne voulait pas que tout ça soit faux...
-Harry, je sais que tu es réveillé...
La voix, calme et apaisante était la même que celle de ses souvenirs. Plus forte, plus vivante mais encore légèrement étouffé. Pas comme celle qu'il avait entendu un peu plus tôt juste avant de dormir. Severus allait-il mieux ? Était-il enfin guéri ? Il voulait le savoir, le voir, mais il avait tellement peur que tout cela ne soit que factice.
-Tu peux ouvrir les yeux Harry...
Il obéit, ses paupières papillonnant quelques instants pour s'habituer à la légère clarté de la pièce. Puis, Harry releva la tête vers l'homme en noir, fixant ses yeux dans ceux qui lui faisait face, plus brillant, plus vivant. Harry se redressa légèrement, de l'espoir commençant à envahir son cœur.
-Monsieur ?...
-Oui petit gars. Je suis là.
Avec une certaine vivacité, mais toujours en prenant soin de ne pas agripper un des trop nombreux fils reliés à Severus, Harry glissa ses bras autour du cou de l'homme, plongeant son visage tout contre son épaule, cherchant une étreinte rassurante. Que Severus lui rendit aussitôt. Ils restèrent ainsi, quelques instants, profitant de la présence rassurante de l'autre, cherchant le confort qui leur avait tant fait défaut dans leur vie respective.
Lentement, Severus repoussa Harry, sans le quitter du regard. Ils se fixèrent un court instant.
-On quitte cet endroit Harry. Maintenant.
-Quoi ? Mais... Tu es malade monsieur !
-Ne t'inquiète pas. Je vais beaucoup mieux. Et... Je t'ai fait une promesse tu te souviens ? Je dois t'emmener dans un bel endroit.
-Oui !
Si Severus avait su que c'était aussi simple de faire apparaître un si grand sourire sur le visage d'Harry, il aurait répété ces quelques mots bien plus souvent. Sans attendre plus longtemps, Severus repoussa gentiment l'enfant hors du lit, lui permettant de se redresser à son tour, et commença à enlever les perfusions sur son bras gauche, puis retira le masque respiratoire avant de se redresser sans parvenir à empêcher un petit râle de douleur de traverser ses lèvres.
-Monsieur... Severus ! Tu ne peux pas encore te lever ! Tenta de le raisonner Harry que l'inquiétude avait recommencé à gagner.
-Je vais bien Harry, je te le promets...
Si seulement cela avait été vrai... Severus se savait condamné. Il sentait le peu de vie qui l'habitait encore être drainé hors de lui de plus en plus vite. Chaque geste lui demandait un effort considérable. Chaque respiration était un obstacle qu'il devait franchir. Mais il le faisait, refusant de s'arrêter en si bon chemin, pour Harry. Il devait le faire, pour Harry. Il le lui avait promis, et il allait tenir cette promesse coute que coute.
Severus finit de se dégager de tout ce qui le relié aux différentes machines de soins, faisant le plus possible abstraction du regard d'effroi que lui lançait Harry, puis se releva, tanguant dangereusement pendant quelques instants sur ses jambes encore faibles. Mais la force de sa volonté parvint à le faire tenir debout. Très rapidement, plus qu'il ne s'en serait cru capable, Severus se rhabilla, troquant sa chemise d'hôpital contre ses vieux vêtements moldus qui étaient restés dans un coin de la chambre, étendu sur une chaise en bois. Sa fièvre de plusieurs jours était enfin tombée pour le moment, lui permettant enfin de tenir dans ses vêtements chauds sans étouffer, appréciant la douceur de la laine du col roulé et la douce chaleur qu'il maintenait contre son corps meurtri.
Une chose cependant manquait, et Severus put sentir une pointe de douleur saisir son cœur quand il s'en rendit compte. Sa baguette ne se trouvait nulle part. La seule chose à laquelle il avait toujours accordé de l'importance lui avait été enlevé.
-Monsieur Severus ?
Cherchant à cacher sa peine, Severus se retourna vers l'enfant sans aucune expression sur le visage, et fut surpris de constater que Harry lui tendait quelque chose.
-Je voulais pas que les gens la trouvent, ou la jettent. Alors je l'ai gardé avec moi, expliqua l'enfant. Elle était cachée sous mon pull.
Ni croyant qu'à peine, Severus se rapprocha de l'enfant, agrippant avec douceur sa propre baguette qui se trouvait dans les petites mains en face de lui. Pendant un instant, il regarda ce morceau de bois qui signifiait tant pour lui, la tournant entre ses doigts fins et agiles.
-Merci Harry. Tu ne peux pas savoir comme je suis heureux que tu aies pris le temps de la garder.
-J'ai vu que c'était important pour toi. Alors je ne voulais pas que tu la perdes.
Les mots manquèrent à Severus pour exprimer sa gratitude. Et le temps lui manquait pour quitter cet endroit maudit.
-Harry écoute moi, je vais jeter un sort sur toi, d'accord. Rien de méchant. C'est juste pour te rendre invisible. Pour qu'on puisse sortir d'ici tu comprends ?
Les yeux d'Harry s'étaient ouverts en grand à l'entente du mot «invisible». C'était un rêve qui devenait réalité, lui qui avait toujours espéré disparaître à la vue de son oncle et sa tante pour ne pas avoir à faire ses bien trop nombreuses corvées. Et maintenant, il pourrait vraiment ne plus être vu ! Mais alors, Severus non plus ne le verrait plus... D'un coup son enthousiasme se fana quelque peu.
-Ce n'est pas pour très longtemps, reprit Severus qui perçu très bien le trouble de l'enfant en face de lui. Juste le temps de sortir de l'hôpital, et après je l'enlève.
-Mais tu ne me verras plus...
-Non. Juste pour quelques minutes, pas plus...
Severus hésita, mais il devait le dire, le préparer à ce qui allait se passer.
-Tu ne me verras pas non plus.
La panique prit entièrement possession de Harry. Il allait l'abandonner encore ! Il allait le laisser ! Il n'allait plus le voir ! Mais il avait promis ! Severus avait promis de ne plus le laisser seul ! Alors pourquoi ? Des larmes, dont il n'avait pas conscience, montèrent à ses yeux, se préparant à couler à n'importe quel instant. Severus s'agenouilla face à l'enfant, posant sa main sur son épaule avec hésitation, effrayé par la réaction que pourrait avoir l'enfant à son contact.
-Je serais là Harry. Je ne te quitterais pas...
-Mais tu ne me verras pas. Et moi non plus...
-Mais je ne te lâcherais pas. Je te tiendrais la main jusqu'au bout, c'est promis Harry.
La peur ne quitta pas les iris vertes face à lui. Mais Severus put percevoir un petit éclat de confiance s'allumer dans le fond de ses yeux qu'il connaissait et aimait tant.
-Tu es courageux petit gars. Tu peux le faire, je le sais.
Harry se contenta de hocher la tête, incapable de prononcer le moindre mot.
-On y va ?
Un autre hochement de la tête de l'enfant, et Severus se releva, pointant sa baguette sur Harry, agrippant sa main avant de lancer le sort de désillusion sur l'enfant, le voyant disparaître petit à petit mais sentant toujours son contact au travers de sa main. Severus effectua la même action sur lui-même et, une fois qu'il fut sûr d'être totalement invisible, quitta la pièce, traînant derrière lui Harry qui se laissait guider de manière très docile.
Dans les couloirs déserts de l'hôpital, le silence était presque pesant, rendant l'endroit presque irréel, plongé dans un univers parallèle où rien ne semblait jamais être dérangé. Toutes les portes des chambres étaient fermées, ne laissant la possibilité que d'aller de l'avant, toujours tout droit, sans aucune possibilité de se dissimuler dans une pièce attenante. Tirant Harry derrière lui, Severus se sentait oppressé par cette ambiance, cette situation qui le forçait à aller toujours tout droit, comme ci tout était décidé pour qu'il tombe de nouveau dans un piège.
Bientôt, le couloir prit un tournant, et Severus s'engagea sur la droite, longeant le mur afin de laisser le couloir libre au cas où ils croiseraient quelqu'un. Derrière lui, Harry paniquait intérieurement. Ne pouvant voir l'homme, il se contentait de se laisser diriger par cette traction qu'il sentait dans son bras sans en voir la provenance. Se sentant terriblement seul et abandonné dans ce couloir où il ne pouvait voir personne. Harry ne cessait de se répéter intérieurement qu'il n'était pas seul, que Severus était toujours là, devant lui, et qu'il n'allait pas l'abandonner. C'était si dur...
Le temps semblait s'être arrêté, les couloirs s'allonger de manière interminable, les enfermant dans une boucle aussi bien physique que temporelle, qui ne les laisserait plus jamais quitter ce maudit hôpital.
Une porte attira l'attention de Severus, et il s'arrêta devant, étudiant la liste des différents services qui se trouvaient à chaque étage.
-Harry. On va prendre les escaliers, murmura-t-il pour que l'enfant l'entende.
Harry releva instinctivement la tête vers le haut, prêt à rencontrer le visage familier de Severus, mais il ne rencontra que le vide. Cela le frustra davantage. Mais il suivit le mouvement qui le tira vers l'avant, en direction des escaliers. Encore une fois, cette épreuve parut durer une éternité pour Harry, le silence le faisant frémir, les escaliers qui semblaient interminable, et surtout le fait de devoir descendre une à une la centaine de marches sans voir où il posait ses pieds.
Finalement, ce fut avec soulagement, qu'ils sortirent tous deux la cage d'escalier, faisant face à un nouveau couloir sans fin. Et, au bout de ce couloir qui semblait être là pour les décourager à jamais de vouloir sortir, la porte de sortie. La porte qui leur permettrait de quitter cet endroit qui avait tant effrayé Harry. Leurs pas s'accélérèrent à mesure qu'ils progressaient, se rapprochant à chaque fois un peu plus de leur but sans jamais l'atteindre, la sortie semblant s'éloigner un peu plus à chaque nouvelle enjambée.
La porte de sortie fut poussée sans un seul bruit, et l'air frais les fouetta de plein fouet, les faisant frissonner, mais leur permettant enfin de reprendre leur souffle qu'il n'avait pas conscience d'avoir retenu aussi longtemps. Ils étaient enfin dehors, laissant l'hôpital derrière eux. Severus ne ralentit pas le pas pour autant, guidant Harry à travers plusieurs rues, mettant le plus de distance possible entre l'hôpital et eux. Harry le suivait sans difficulté, se sentant de nouveau en sécurité, rien que lui et Severus, personne d'autre autour pour lui faire du mal, lui faire peur, ou pire, faire du mal à Severus.
Bientôt, l'homme, se sentant de nouveau faible, l'adrénaline retombant peu à peu, finit par se stopper en plein milieu d'une rue encore éclairée. Se sentant faible, Severus fit la première chose qui lui semblait être la meilleure à faire.
Il brisa le sort de dissimulation qu'il s'était lancé, se tourna ensuite vers là où, il supposait se trouvait Harry, sa main toujours fermement tenue par l'enfant. Puis il leva le sort qui dissimulait Harry, révélant face à lui un petit visage qui, de toute évidence avait été effrayé par une telle épreuve. Severus rangea sa baguette puis s'accroupit face à l'enfant, l'attirant à lui dans une forte étreinte. Harry cacha son visage contre son torse, refusant de laisser ses larmes couler.
-Je suis fier de toi Harry, tu as été très courageux. Tu es un petit gars très fort.
Ils restèrent un court instant ainsi avant de rompre le contact, reprenant leur route main dans la main, pressant le pas pour atteindre leur but.
Severus le savait, il n'avait plus beaucoup de temps...
Ils devaient se dépêcher...
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