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Le patronus argenté en forme de chat passa au travers de la haute fenêtre comme si elle n'avait pas été là, prenant place sur un large bureau en bois d'acajou brun sur lequel reposaient de nombreux parchemins barbouillés d'une écriture fine et distinguée. Le chat s'assit avec une certaine prestance, faisant face à la femme en plongeant ses yeux d'argent dans ceux sombre du professeur de métamorphose de Poudlard. Minerva McGonagall avait cessé toute activité dès que son patronus était apparu dans la pièce, repoussant au plus profond de son esprit la correction des devoirs de ses quatrièmes année. La présence de son patronus face à elle ne laissait supposer qu'une seule chose, et cela était bien plus important que tout le reste.

L'animal argenté finit par s'évaporer lentement, sans bouger, tandis que Minerva se précipitait hors de son bureau, traversant les longs couloirs avec hâte, faisant reculer les élèves sur son passage qui la regardèrent avec crainte et questionnement. Ce n'était pas rare de voir la directrice de Gryffondor se précipiter ainsi dans les couloirs, mais en règle générale, cela n'augurait rien de bon pour les élèves ou le directeur... Le trajet lui semblait interminable malgré ses longues enjambées fluide et souple, mais certes pas aussi impressionnante que celle de Severus.

-Professeur McGonagall ? S'il vous plaît ?

-Plus tard monsieur Cooper, coupa Minerve sans même se retourner vers son élève de Gryffondor.

-Mais... C'est important... Insista le jeune homme sans se laisser démonter par le ton autoritaire de sa directrice de maison. Ça concerne mes notes qui sont en chute libre en potions. Depuis que le professeur Snape n'est plus là, j'ai le sentiment de ne plus progresser. Voir même de régresser, et cela m'inquiète un peu...

Minerva poussa un soupir. Ce n'était pas la première fois que Ben Cooper venait la voir pour ce genre de sujet depuis que l'école avait repris. Soit cinq jours, et cela commençait à l'exaspérer quelques peux même si elle était plus que fière de voir un de ses petits lions s'inquiéter autant pour ses études.

-Ce n'est que le début de l'année monsieur Cooper, vous aurez le temps de remonter vos notes lors des prochains cours, je ne me fais aucun souci à ce sujet. Et, en plus de cela, je ne suis pas professeur de potion. C'est avec le professeur Slughorn que vous devez en parler, pas avec moi.

-J'ai essayé madame. Mais il ne m'écoute pas...

Le professeur s'arrêta sans crier gare faisant manquer de peu à l'élève de Gryffondor de se cogner contre elle, la regardant avec le plus grand intérêt dont il était capable envers l'un de ses professeurs.

-Monsieur Cooper, bien que je sois tout à fait heureuse de voir que vous vous inquiétez pour votre réussite scolaire, je suis dans l'incapacité de vous accorder un peu de mon temps à l'instant présent. Aussi, je vous demanderais de bien vouloir patienter quelques heures, le temps que je puisse régler mon affaire. Je ne vous oublie pas mais pour l'instant, j'ai une chose bien urgente à faire.

-Oui professeur. Je comprends...

-Disons que nous nous retrouvons ce soit après le repas dans la grande salle, ajouta Minerva en voyant la mine dépitée de son élève. Cela vous convient-il ?

-Oui madame ! Merci pour tout !

Et sans attendre plus longtemps, la femme reprit sa course en direction du bureau du directeur, prononçant le mot de passe à la gargouille avant même de l'avoir atteint et s'engouffrent dans le petit passage sans attendre que les escaliers soient totalement apparus. Comme la veille, Minerva entra dans le bureau de Dumbledore sans s'annoncer, sans frapper à la porte, et en entamant directement dans le vif du sujet.

-Il est arrivé quelque chose Albus.

Le directeur, plongé dans sa lecture quotidienne du journal, redressa la tête, délaissant son article sur les dernières réformes du ministère concernant le droit de posséder un grille-pain moldu, pour fixer son regard d'acier sur sa directrice adjointe. La femme vint se placer juste devant lui, fixant fermement ses mains sur le bureau en bois pour se pencher vers le directeur, le surplombant de sa hauteur dans un air menaçant et plus que sévère. Dumbledore n'eut pas besoin de demander pour savoir de quoi parlait la femme.

-Severus... Murmura l'homme.

Albus rejeta son journal sur le bureau, s'enfonça dans son fauteuil, croisant ses mains sur sa poitrine dans un geste se voulant apaisant. Il fixa pendant un long moment la femme en face de lui, cherchant probablement un moyen de s'extraire de cette conversation qui, il le savait, allait être tendu et désagréable. Ou au moins un moyen de la faire basculer en sa faveur. Face à lui, McGonagall ne faisait aucun geste, le fixait avec colère et crainte mêlée. Albus ne se souvenait pas de l'avoir déjà vu aussi inquiète, et encore moins pour Severus, surtout que, à peine deux jours plus tôt, elle se fichait pas mal de ce qui pouvait lui arriver. Il ne savait comment, mais Albus était certains que la femme n'éprouvait plus autant de haine envers son jeune collègue que ce qu'elle prétendait.

-Qu'avez-vous fait Minerva ? Demanda Dumbledore après quelques longs instants de silence.

-Un patronus. J'ai envoyé un patronus à Severus. Pour lui demander où il était, pour que j'aille l'aider. Non ! Je sais que vous désapprouvez, mais je ne peux pas le laisser seul alors que, de toute évidence quelque chose ne va pas. Cinq jours qu'il a disparu Albus, et il n'est toujours pas revenu, ce n'est pas normal. J'ai donc envoyé un patronus, et il est revenu, sans aucun message, sans rien. Mon patronus ne l'a pas trouvé malgré le fait que je connaisse très bien la signature magique de Severus. Et c'est une chose impossible, vous le savez. Un patronus trouve toujours le destinataire du message. Mais cette fois, mon patronus ne l'a pas trouvé, montrant qu'il y a définitivement quelque chose qui ne va pas Albus. La seule explication serait...

-Que sa force magique ai été réduite à néant. Fini le directeur avec une expression pensive sur le visage.

-Ou qu'il est mort...

-Il n'est pas mort Minerva.

-Comment en être si sûr ? Nous ne savons pas où il est, ni dans quel état, ni quand il compte revenir, s'il revient un jour. Albus, si vous ne le faites pas pour lui, faites le pour Harry. L'enfant est sûrement en danger et...

-Vous vous inquiétez pour Severus ?

-Évidement.

-Et pourtant, il y a deux jours, vous le vouliez nulle part ailleurs qu'à Azkaban, rappelant Dumbledore avec une pointe de malice dans la voix et une lueur de victoire dans le regard.

Pendant un instant, Minerva ne su pas ce qu'elle devait répondre à cela. Oui, elle voulait Severus à Azkaban pour avoir été responsable de la mort de Lily et James, et pour avoir décidé de se tourner vers les arts sombres et avoir pris la marque des ténèbres. Mais depuis peu... Elle ne savait plus quoi penser de cet homme sombre qui n'attirait aucune sympathie de la part de personne. La directrice adjointe prit place dans le fauteuil rembourré, face au large bureau de Dumbledore, l'esprit perdu et le regard dans le vague. Devait-elle expliquer à Albus qu'elle avait déjà pardonné en partie à Severus depuis plus de six mois ? Quand elle l'avait vu en pleine dépression ? Quand elle l'avait vu vouloir mourir ? Minerva n'en avait jamais parlé à personne, laissant sa rancœur l'aveugler, sa douleur la guider, et désormais, elle le regrettait plus que tout. Elle n'avait pas pu sauver Lily et James, et désormais, elle commettait la même erreur en refusant de voir la vérité concernant Severus.

-Je lui ai pardonné Albus...

L'homme la regarda fixement, attendant la suite avec grand intérêt.

-Depuis six mois, je lui ai pardonné. Je ne le savais pas encore, je me voilais la face, mais je l'ai pardonné pour tous. Parce que je l'ai vu. Je veux dire, je l'ai vraiment vu lui, pas le masque qu'il prend devant tout le monde. Je venais le voir pour parler de la réunion entre les directeurs de maison qui devait avoir lieu. La porte de son bureau était entrouverte, et il ne savait pas que j'étais là. Je l'ai vu se fustigiez Albus, comme jamais je n'avais vu quelqu'un le faire auparavant. À ce moment-là, j'ai vu qui il était vraiment et à quel point il se sentait mal. Ça ne pardonne pas ce qu'il a fait, mais je pense que nous l'avons tout de même mal jugé. Severus est bien plus brisé que ce que vous pensez, il... Il s'en veut plus que tout, et il a besoin d'aide. Albus, je crains que, un jour ou l'autre, il finisse par faire une bêtise...

L'homme écarquilla les yeux sous le coup de la surprise. Severus souffrait donc à ce point ? Il ne l'aurait jamais soupçonné, lui qui n'était rien d'autre qu'un assassin ne devrait pourtant pas ressentir plus de remords que cela. Dans tous les cas, ce n'était pas bon du tout... Il était hors de question qu'il perde son espion. Il devrait donc tout faire pour empêcher le jeune homme de faire la moindre bêtise. Après tout, Albus n'avait pas fait tout cela, le sauvant d'Azkaban, le forçant à devenir professeur de potion, à lui prêter allégeance, pour le retrouver un jour mort, baignant dans son sang...

-Je ne pense pas que Severus compte survivre à la mission que vous lui avez confiée.

-Allons Minnie, ce n'est rien de plus que l'angoisse qui vous fait dire cela, coupa Dumbledore en bondissant presque sur ses jambes. Faites-moi confiance et tout se passera bien. Je ne m'inquiète pas pour Harry. Il est auprès de Severus et il va nous le ramener. Et en ce qui concerne notre maître des potions, s'il lui est arrivé quelque chose, ce dont je doute, il sera pris aussitôt en charge par Poppy. Il n'y a donc rien à craindre de ce côté comme de l'autre.

-Et pourtant, vous n'avez aucune confiance envers Severus. C'est là un étrange paradoxe Albus.

-Je ne lui fais pas confiance, mais comme je vous l'ai dit, Severus est lié à moi par un serment qu'il ne peut pas rompre. Il ne fera pas de mal à Harry, et il va le ramener, quoi qu'il arrive.

Minerva fixa un moment le directeur sans rien dire, toujours pas si sûr que le directeur soir cohérent dans ses propos. Il y avait bien trop de choses qu'elle ne comprenait pas, bien trop de choses qui n'étaient pas dites. Mais elle n'avait pas son mot à dire concernant l'enfant. Et encore moins concernant Severus. Tous deux étaient sous la responsabilité de Dumbledore, et personne d'autre que lui.

-Je ne comprends toujours pas l'ensemble de votre plan Albus, mais vous avez raison. Je dois vous faire confiance. Concernant ce que je vous ai dit sur le mal être de Severus...

-Là aussi, laissez-moi m'en occuper Minerva. Vous m'avez rapporté vos inquiétudes, je vais donc me charger de la suite.

-Très bien. Dans ce cas, j'en déduis que notre conversation est close.

Albus eut un sourire satisfait. La conversation s'était déroulée comme il l'avait souhaité et, une fois de plus, il avait réussi à maintenir Minerva loin de ses affaires. Inutile de tout raconter à sa directrice adjointe, mais il devait rester prudent. Elle finirait par trouver par elle-même s'il ne faisait pas attention à la maintenir là où il voulait qu'elle soit. Elle n'avait pas à s'inquiéter plus que de raison. Severus lui mangeait littéralement dans la main, aucun souci à se faire pour cela.

Du coin de l'œil, il vit Minerva tendre la main pour prendre un bonbon au citron.

-Je ne saurais trop vous conseiller de ne pas toucher à ces friandises Minnie. Je crains que, depuis le temps, elles ne soient plus bonnes à manger, et puissent vous rendre malade. Si vous le permettez, je vais les changer de ce pas...

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