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Mais cela ne servit à rien. Comme il s'en était douté, les antibiotiques qu'il avait achetés, aussi nombreux qu'ils furent, n'avaient aucun effet. Allongé dans la chambre d'hôtel, Severus respirait avec difficulté, se débattant entre les râles et les quintes de toux de plus en plus nombreuses. Plongé dans un état d'inconscience profonde, l'homme n'avait aucune idée qu'Harry se tenait contre lui, le serrant dans ses bras et retenant ses larmes, lui murmurant des mots qui ne pouvaient pas l'atteindre. Severus ne ressentait rien d'autre que la douleur dans ses poumons qui s'intensifiait à chaque nouvelle inspiration, la chaleur qui l'agressait de l'intérieur et semblait le brûler, le froid qui le glaçait sur sa peau parcourue de frisson. Les yeux fermés et agités sous les paupières closes, il était sujet à des hallucinations que lui envoyait la maladie. Des sons, des images, des flashs, tous détachés les uns des autres, sans liens, sans consistance réelle.

Severus poussa un nouveau gémissement, son corps se crispa sous la douleur, et Harry resserra un peu son étreinte. Il savait très bien que si le monsieur se réveillait maintenant, il serait en colère contre lui pour avoir pris l'initiative de le prendre dans ses bras sans son autorisation. Mais, au plus profond de lui-même, Harry s'en fichait totalement. La seule chose qui comptait réellement à ce moment précis était que l'homme avait mal, qu'il allait mourir et que lui ne pouvait rien faire. Cela le terrifiait tellement.

Une toux plus dure que les précédentes le fit relever la tête pour regarder le visage de Severus, crispé par la douleur, qui avait du mal à reprendre son souffle. Harry se redressa et, comme il l'avait déjà vu faire par tante Pétunia quand Dudley était malade, il posa sa main sur le front de Severus, ne sachant pas trop ce qu'il devait découvrir en faisant cela. Il n'eut pas à attendre longtemps avant de comprendre. Harry ne savait pas vraiment ce qu'était une fièvre, ni que c'était dangereux, mais dans tous les cas, le front de l'homme était beaucoup trop chaud pour que cela soit normal, et cela le terrifia encore plus.

Faiblement, Severus porta sa main droite à sa poitrine, agrippant son pull dans un geste désespéré en poussant un râle d'agonie.

Ce fut le râle de trop.

Et Harry sut instantanément ce qu'il devait faire, comme si un petit être invisible perché sur son épaule le lui avait soufflé dans l'oreille. Toujours en ayant vu tante Pétunia le faire, l'enfant déposa rapidement ses lèvres sur le front de Severus pour lui faire un rapide bisou avant de se reculer et de descendre du lit. Harry regarda sa couverture transformée en écharpe par Severus qui reposait au sol, Harry l'ayant jeté là négligemment, bien trop préoccupé par l'état de l'homme. L'enfant la saisit, et vint la poser sur la poitrine de l'homme, là où il semblait avoir mal, espérant que cela le protégerait un peu plus, puis il se rapprocha de la porte de la chambre.

Bien qu'il soit encore petit, Harry parvint assez facilement à atteindre la serrure, la déverrouiller grâce au petit loquet et à abaisser la poignée pour enfin ouvrir la porte. Il se retourna une dernière fois vers Severus, comme attendant son approbation, plus si certains que ce soit une bonne chose à faire. Et s'il se réveillait alors qu'il n'était plus là ? Il serait inquiet pour lui. Ou peut-être furieux. Une nouvelle toux se fit entendre, et Harry dû résister à l'envie de retourner auprès de l'homme alors qu'il semblait ne pas parvenir à retrouver sa respiration, mais ce fut cela qui finit de décider le petit. Plus déterminé que jamais, il commença à courir dans le couloir en direction de l'entrée. Il allait enfin pouvoir aider Severus à aller mieux. Et pour cela, il devait retrouver la femme de tout à l'heure.

Heureusement pour lui, le couloir n'était pas très long, en comme ci le destin avait, pour une fois dans sa vie, décidé d'être clément envers lui, la femme de l'accueil était là, derrière son bureau à trier quelques papiers, une petite plaque avec son nom «Norah» épinglé sur sa chemise blanche. Elle releva la tête au son des pas de Harry, regardant à droite puis à gauche pour accueillir les nouveaux clients, mais son regard se fixa sur le petit garçon qui courait vers elle avec, dans le regard, une lueur de désespoir. Délaissant ses papiers, la jeune femme sortie de derrière son bureau et s'accroupi face à Harry quand celui-ci parvint enfin à la rejoindre, se mettant à sa hauteur pour le regarder droit dans les yeux.

-Et bien mon grand, que t'arrive-t-il ? Tu t'es fâché avec ton papa ?

Et alors qu'il ouvrit la bouche pour tenter de parler, d'expliquer ce qu'il se passait vraiment Harry finit enfin par fondre en larme. Des larmes de peur, d'impuissance, mais aussi de frustration et de colère. Pourquoi fallait-il qu'il pleure maintenant ? Cela l'empêchait de parler convenablement et d'expliquer à la dame que Severus était en train de mourir.

-Allons mon grand, ce n'est pas si grave que ça. Je suis sûr que ton papa va te pardonner.

Harry fit non de la tête, et au lieu de tenter de dire quoi que ce soit, se sachant incapable de prononcer le moindre mot, il attrapa la main de Norah et fit des petits gestes pour l'inciter à le suivre. Il n'en fallut pas plus à la jeune femme que quelque chose n'allait pas. Le visage marqué de l'homme lui revint en mémoire, et elle sut définitivement que non, quelque chose n'allait pas du tout.

Norah suivit Harry jusqu'à la porte de sa chambre qui s'était refermée derrière l'enfant. Elle ne prit même pas la peine de toquer et entra dans un seul élan. Harry courut de nouveau auprès de Severus, inquiet que l'homme ne soit mort pendant qu'il était parti chercher de l'aide, mais non il respirait toujours. Norah le suivit rapidement sans rien dire, et ne put que constater l'état déplorable de l'homme. Sa respiration sifflante l'aidant à se décider sans trop se poser de question, la jeune femme attrapa le téléphone de l'hôtel juste à côté d'elle et appela le service des urgences. Il ne fallut pas longtemps avant que Norah ne puisse raccrocher, et sans attendre plus longtemps elle alla chercher un gant dans la salle de bain attenante à la chambre, le mouilla avec de l'eau fraîche et le posa délicatement sur le front de Severus qui ne réagit même pas.

À côté d'elle, Harry regardait avec impuissance l'homme se débattre de plus en plus pour respirer, ses pleurs ayant cessé sous l'urgence de la situation.

-Mon grand, tu vas rester ici avec ton papa, expliqua Norah en forçant Harry à la regarder.

-Non...

-Ecoute...

-Me laisse pas !

-Je ne t'abandonne pas, je vais juste chercher de l'aide. D'accord ? Ton papa va aller bien...

-Il va mourir !

-Non mon grand.

Norah attrapa Harry et le força dans une étreinte se voulant rassurante. L'enfant se laissa faire.

-Il va aller mieux, je te le promets. Les secours sont bientôt là et ils vont l'emmener à l'hôpital.

-Je pourrais venir ?

-Bien sûr... Maintenant tu restes avec lui pour le surveiller. Il a besoin de sentir que tu es là aussi. Je reviens très vite. D'accord ?

Harry se contenta de hocher la tête.

-C'est bien. Tu es très courageux, ton papa peut être fier de toi. J'y vais maintenant d'accord ? Je reviens très vite.

Harry hocha la tête une seconde fois, son attention de nouveau focalisée sur Severus, ne faisant déjà plus attention à la jeune femme, bien trop occupé à parler à l'homme pour lui montrer sa présence. Harry ne savait pas vraiment si le monsieur pouvait l'entendre mais il avait déjà vu, ou plutôt entendu, tante Pétunia parler à Dudley quand il faisait des cauchemars, alors Harry supposait que c'était possible qu'il soit entendu. L'enfant fit totalement abstraction de ce qui l'entourait, totalement concentré sur la seule chose qui avait de l'importance à cet instant précis : le bien-être de Severus. Bien trop absorbé par ce qu'il faisait, il ne remarqua pas même le rapide retour de Norah, accompagné par deux urgentistes qui n'attendirent pas plus longtemps pour commencer à s'occuper de Severus.

Toujours plongé dans ce qu'il faisait, Harry ne remarqua même pas qu'il avait été gentiment repoussé dans les bras de Norah, regardant de loin les urgentistes prendre les constantes vitales de Severus.

-41 de fièvre, on l'embarque.

Et sur ses mots, tout fut mis en place pour transporter Severus. Harry, qui ne se rendait toujours compte de rien, fut pris en charge par un des urgentistes, pris place à côté de Severus dans l'ambulance, n'entendit pas même les mots rassurant que lui disait l'homme, son esprit bien trop focalisé sur le monsieur en noir. Le trajet fut rapide, l'hôpital étant très proche de l'hôtel dans lequel ils s'étaient rendus. Severus fut pris en charge très rapidement, si bien que Harry le perdit de vue pendant un moment et commença à paniquer. Heureusement pour lui, l'urgentiste était resté avec lui, et ne comptait pas le quitter tant que Severus ne serait pas placé dans une chambre et hors de danger. Se croyant de nouveau abandonné, son esprit ne parvenant pas à comprendre tout ce qui était réellement en train de se passer, Harry recommença à pleurer, paniqué.

-Ne t'inquiète pas mon grand. Je reste avec toi. Comment tu t'appels ? Demanda l'urgentiste pour tenter de lui changer les idées.

-Harry, répondit l'enfant entre deux sanglots.

-Moi je m'appelle Aïdan. Tu as une jolie couverture dit moi.

Harry, perplexe, baissa les yeux sur son écharpe et put constater que oui, c'était redevenu sa vieille couverture qui sentait papa et maman, et aussi cette drôle d'odeur de forêt qu'il ne connaissait pas. Et il pleura de nouveau. Parce que cette odeur, il l'avait déjà senti une deuxième fois, lorsqu'il avait dormi à côté de Severus dans la forêt. Cette odeur était celle de Severus, il en était sûr, mais il ne savait pas comment elle avait pu être sur sa couverture vu qu'il ne connaissait pas l'homme avant il y a trois jours. Ses pleurs s'intensifièrent quand il se rendit compte d'autre chose. Inconsciemment il savait, que si sa couverture était revenue à l'état normal, c'était que Severus n'exerçait plus sa magie sur l'objet.

Severus était mort !

Harry commença à paniquer. Voyant cela, Aïdan le prit dans ses bras, le berçant calmement pour le rassurer, le temps semblant de nouveau interminable pour l'enfant qui ne parvenait pas à se calmer. Severus était mort, il l'avait encore abandonné. Il avait promis, mais il était parti, et pourtant Harry ne parvenait pas à lui en vouloir. Il était bien trop triste pour ça.

Il se sentit soulevé, conduit dans une chambre, déposé sur un lit et recouvert par une couverture bien chaude. Il eut vaguement conscience de voix autour de lui, mais il était bien trop fatigué et triste pour les comprendre. Harry vit vaguement des ombres danser devant ses yeux, mais ils étaient bien trop embués de larmes pour qu'il ne voit quoi que ce soit. Ses mains fermement agrippées à sa petite couverture, Harry enfouit son visage dans la seule chose qui ne lui ait jamais appartenu, cherchant un peu de réconfort dans son odeur qu'il aimait tant, cherchant désespérément celle de Severus pour espérer y trouver du réconfort.

Severus était mort.

Et son odeur sur cette couverture était tout ce qui lui restait de lui.

Harry ferma les yeux, ses pleurs se tarissant quelque peu alors que la fatigue prenait le relai et qu'il commençait à partir contre sa volonté. Il lutta quelques instants, ne voulant pas prendre le risque de faire face à des cauchemars qui, il le savait, seraient inévitables après une telle journée, mais il ne put résister longtemps.

C'est ainsi blotti dans sa petite couverture, que Harry finit par s'endormir.

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