08
Sursautant face à l'écroulement inattendu et soudain de Severus, Harry poussa un petit cri de surprise, les yeux écarquillés dans la stupeur et la frayeur que la scène venait de provoquer en lui. Il ne s'était absolument pas attendu à voir l'homme en noir, qui semblait être quelqu'un d'assez fort et tenace, s'écrouler ainsi sur le lit, ne pensant même pas à enlever ses chaussures avant. Tante pétunia l'aurait très probablement fâché, rouge de colère, si elle avait vu ça.
Harry ne parvint pas à trouver sa pensée drôle tant cela l'avait effrayé. Il ne s'était pas attendu à ça. Mais ce qui inquiétait vraiment Harry était de voir le visage crispé de l'homme alors qu'il était plongé dans l'inconscience. Il devait vraiment avoir mal même s'il ne le montrait pas. Après tout, avec tout ce sang qu'il avait deviné sur le sol tout à l'heure, il se demandait même comment l'homme avait pu marcher aussi longtemps.
Effrayé par ce qu'il venait de se produire juste sous son nez, Harry, descendit aussitôt de son lit et effectua un pas en avant pour se rapprocher de lui et le secouer. Ou lui venir en aide si jamais il pouvait faire quoi que ce soit pour lui. Au dernier moment, alors que sa main n'était plus qu'à quelques centimètres de l'homme en noir, il retint son geste, se rappelant de ce qu'il s'était produit à peine quelques heures plus tôt. Bien qu'il avait été terriblement effrayé par le sursaut du monsieur, il n'avait absolument pas manqué la panique dans les yeux de l'homme en noir, comme ci il craignait quelque chose de sa part. Comme s'il le fuyait...
C'était donc ça...
Après tout, il était un anormal. Pas étonnant que l'homme n'ait pas voulu qu'il le touche. Il ne voulait pas que lui, Harry Potter, l'enfant bizarre, le monstre ne risque de lui faire du mal à son simple contact. Et cela, l'enfant le comprenait très bien. Il avait déjà fait du mal à des gens juste en les regardant alors il n'osait pas imaginer ce qu'il pouvait faire par un simple contact. Harry Potter l'anormal.
Il ne comprenait pas ce mot mais il savait que ce n'était pas quelque chose de gentil, ni d'agréable, surtout vu comment son oncle et sa tante le regardaient en l'appelant ainsi, du dégout marqué sur leur visage haineux. C'était certain que tout le monde était plus heureux loin de lui, sans aucun contact physique.
Après tout, il devait bien y avoir une raison pour qu'il n'ait jamais reçu de câlin de qui que ce soit. Pas même un bisou sur la joue pour lui dire bonne nuit. Mais pourtant, c'était le monsieur qui l'avait attrapé le premier, juste avant qu'il y ait cette drôle de sensation au niveau de son nombril. Juste avant que sa tête ne tourne. Et juste avant qu'il n'ait envie de vomir. Harry en était sûr, c'était bien le monsieur qui l'avait attrapé et qui avait causé ce mal être. Peut-être que c'était pour ça qu'il ne voulait pas qu'il le touche ? Peut-être qu'à chaque fois qu'il y avait un contact entre eux, il serait de nouveau malade ?
Peut-être qu'il n'était pas réellement responsable alors ? Que ça ne venait pas de lui mais de l'homme ? Bien qu'il se sente mal à cette pensée qui n'était pas très gentille, Harry ne pouvait s'empêcher de ressentir un peu d'espoir. Il espérait que cela ne provenait pas de lui, mais de l'homme. Car alors, peut-être qu'il serait un peu moins un anormal...
Frustré de ne pas comprendre ce que tout cela voulait dire, Harry ravala le sanglot qui commençait à remonter dans sa gorge. Il avait suffisamment pleuré pour aujourd'hui et il ne tenait pas à passer pour quelqu'un d'encore plus faible qu'il ne l'était déjà. Et surtout pas devant le monsieur en noir qui l'avait aidé, sauvé et protégé alors qu'ils ne se connaissaient même pas. Le monsieur en noir que, il ne savait pas réellement pourquoi, il voulait garder auprès de lui pour toujours.
L'homme n'avait pas fait grand-chose pour attirer sa sympathie, il n'avait pas même été gentil, juste rassurant et compréhensif, ne cherchant pas à le rabaisser alors que jusqu'à maintenant tout le monde l'avait fait. Il lui avait même dit que lui aussi était un anormal. Et qu'il l'emmènerait voir des gens gentils dans un endroit qu'il allait aimer. Rien de plus que cette petite attention avait permis à l'enfant de l'apprécier, de lui faire confiance, même s'il était encore effrayé lorsqu'il lui avait crié dessus.
Effrayé... Oui, il l'avait été. Surtout avec tout ce sang sur le sol dont il ne savait pas comment il avait pu se retrouver là. Effrayé comme il ne l'avait jamais été auparavant même face à sa tante et son oncle alors qu'ils étaient enragés contre lui. Mais pas autant que maintenant, debout entre les deux lits de ce motel de bord de route complètement paumé, figé avec sa petite main tremblante tendue vers le monsieur qui venait de le sauver allongé de tout son long, la respiration faible et difficile, le visage bien trop pâle crispé dans la douleur. Harry était même pétrifié face à cette vision, ne sachant pas ce qu'il devait faire, ou ce qu'il pouvait faire pour aider l'homme qui semblait avoir très mal.
Pourquoi pas tenter de nettoyer sa blessure avec de l'eau. Mais là encore, il ne pouvait pas agir, car il n'avait pas le droit de le toucher, et ça il l'avait bien compris. Mais il voulait savoir si l'homme en noir allait bien, ou du moins pas trop mal étant donné qu'il était évident même pour le petit garçon qu'il n'allait pas bien. Il voulait tenter de le rassurer comme le monsieur l'avait fait avec lui un peu plus tôt dans la journée.
Surtout qu'il n'allait pas bien du tout. Sa respiration était sifflante et laborieuse, son visage bien plus pâle qu'à l'ordinaire, voir livide, et de la sueur coulait sur son froid lui collant ses cheveux longs et noir sur le front. Et c'était sans parler des frissons incontrôlables qui parcouraient tout son corps. Il ne faisait pas très chaud dans la petite chambre, mais suffisamment pour ne pas avoir froid. Mais là, Severus était plus que frigorifié, comme pouvait le témoigner ses frissons mais également ses lèvres et le bout de ses doigts légèrement bleu.
Il a dû tomber malade dehors, se dit Harry en repensant à la fraîcheur de la nuit.
Lui-même, bien que protégé par sa couverture, qui était très chaude et douillette malgré qu'elle soit vieille et légèrement usé, avait ressenti le froid mordant de la nuit l'entourer et le refroidir petit à petit malgré la marche forcée qui aurait dû le tenir parfaitement réchauffé. Et l'homme était moins chaudement habillé que lui à ce moment-là, vêtu seulement d'un manteau un peu long ouvert et d'un pantalon qui semblait bien trop léger pour un temps pareil. Sans parler de l'immense trou dans le dos où il avait été blessé, sa blessure encore suintante. Et déjà bien avant cet épisode de la marche dans la nuit, le monsieur en noir avait semblé être malade lorsqu'il était venu le chercher dans la grande maison. Harry l'avait vu mais n'avait fait aucun commentaire étant donné qu'il ne le connaissait pas, mais aussi que ce n'était pas vraiment le bon moment pour parler de ça.
Résolu, Harry rabaissa sa main qui était restée figée en l'air tout le long de sa contemplation. Rapidement, tournant la tête dans tous les sens, les yeux grands ouverts comme ci cela lui permettrait de mieux voir, il chercha quelque chose pour recouvrir le monsieur et lui tenir chaud. C'était la seule chose qu'il pouvait faire pour l'aider à aller un peu mieux. Mais il n'y avait rien dans cette petite chambre, hormis sa propre petite couverture qui ne serait pas assez grande du tout pour recouvrir complétement l'homme en noir. La seule chose qui aurait pu suffire, c'était la couverture sur laquelle il reposait déjà.
Mais Harry ne tenta même pas de le bouger, tout d'abord parce qu'il s'était résolu à l'idée qu'il n'avait pas le droit de le toucher. Et ensuite parce qu'il savait très bien qu'il lui serait totalement impossible de le bouger pour le glisser dans la couette.
Il réfléchit un instant à ce qu'il pourrait faire. Peut-être retourner à l'accueil pour demander de l'aide au monsieur de l'entrée ? Pourquoi pas mais Harry n'avait aucun moyen de savoir s'il pouvait lui faire confiance. Et de toute façon, il était trop petit pour atteindre la poignée de la porte de la chambre, et même s'il le pouvait, il était certain qu'il se serait perdu dans les couloirs du bâtiment. Alors autant ne pas tenter de rendre la situation encore plus effrayante pour lui.
Quelques minutes s'écoulèrent, silencieuses, entrecoupées uniquement par la respiration laborieuse de Severus. Et, soudainement, un éclair de génie passa dans son esprit d'enfant qui fut soudainement très heureux de sa découverte.
Lui aussi avait une couverture sur son lit après tout ! Il pourrait très bien la donner au monsieur pour le protéger du froid. Lui, il avait la sienne qui était suffisamment grande pour le recouvrir entièrement et chaude pour le protéger de la fraîcheur de la chambre. Et ce n'était pas comme ci il était frigorifié. Harry avait eu le temps de se réchauffer dans la petite chambre, contrairement à l'homme qui continuait de grelotter dans son inconscience.
Lâchant sa précieuse couverture pour la première fois depuis qu'il l'avait récupéré, il s'affaira de toutes ses forces de petit garçon de quatre ans, à défaire la couette de son propre lit, restant le plus silencieux possible pour ne pas réveiller l'homme en noir qui avait besoin de se reposer. Puis, il se rapprocha du lit de l'homme en noir en trottinant, dérapant légèrement sur les pans qui trainaient au sol mais sans jamais perdre l'équilibre. Il avait déjà eu l'occasion d'être grondé par sa tante, inutile de chercher à revivre la même chose...
Harry fixa pendant quelques secondes le monsieur avec intérêt, restant immobile. Heureusement pour lui, le lit était bas, il n'aurait donc pas besoin de monter dessus pour recouvrir l'homme. Prenant particulièrement bien soin de ne pas toucher le monsieur, ne désirant absolument pas retrouver la drôle de sensation qui l'avait rendu malade un peu plus tôt, il parvint à recouvrir entièrement Severus de la couette, la remontant même jusqu'à son menton pour être sûr qu'il soit bien au chaud.
Harry regarda un instant son œuvre, fier de sa réussite.
Grâce à lui, le monsieur irait bien mieux demain matin.
Tout content de lui, Harry remonta sur son propre lit, s'enroula dans sa couverture, recroquevillé sur lui-même, tourné vers l'homme en noir pour l'observer, de peur que, s'il détournait le regard, il ne disparaisse définitivement. Il le regarda, le détailla, s'arrêtant sur les moindres détails de son visage. Un visage dur et ferme, comme taillé dans la pierre à grand coup de pioche. Un visage pas très rassurant et surtout pas très gracieux à regarder. Pourtant, Harry se sentait étrangement apaisé en regardant ce visage si froid, si marqué, et surtout terriblement épuisé.
Ne sachant trop pourquoi, une sensation de déjà vu ne cessait de tenailler l'enfant à chaque fois qu'il regardait l'homme ainsi. Comme un ancien rêve qui cherchait désespérément à refaire surface dans sa mémoire. Un rêve effacé mais dont il est possible de se souvenir de certaines images, de certaines sensations. Harry avait déjà vu un visage comme celui-ci.
Mais était-ce celui-ci en particulier ?
Ou quelqu'un d'autre qu'il avait vu il y a très longtemps ?
Il n'aurait su le dire. Tout ce qu'il savait était qu'il l'avait déjà vu, et cela suffit pour le détendre davantage.
Luttant contre ses paupières qui commençaient à se fermer, Harry tentait de garder son esprit focalisé sur le monsieur, ne voulant pas rompre le contact visuel avec lui.
Finalement, le sommeil finit par l'emporter.
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