66 | « À la recherche du slip de Tarzan ! »
N O L A
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— TU POURRAIS AU MOINS ME RACONTER, râla Hortense pour la centième fois depuis qu'on avait quitté le camping Les Trois Dauphins.
Je levai les yeux, lâchant par la même occasion un nouveau soupir d'exaspération. Et, dire que nous n'étions qu'à mi-chemin du lac de Montdesbois.
— Tu n'avais qu'à pas boire autant, rétorquai-je finalement en me tournant vers ma meilleure amie.
— Eh, mais c'est ma réplique habituelle ça ! protesta-t-elle.
Sans lui laisser le temps d'en rajouter une couche, en mentionnant toutes les fois où elle m'avait gentiment fait un résumé des soirées fortement alcoolisées dont je ne gardais aucun souvenirs, j'accélèrai le pas pour rattraper Dorian.
Le métisse marchait seul devant, ses mains enfoncées dans les poches de son short de bain. Il avait pris une longueur d'avance dès notre départ du camping, laissant Maël et Jules en dernière ligne, alors qu'ils débattaient à propos d'un jeu vidéo qui venait — apparement — de sortir.
Après l'avoir rejoint, je remarquai que Dorian avait les yeux fixés sur le sol, sortant son portable toutes les cinq secondes pour allumer l'écran, avant de le remettre dans sa poche en voyant qu'il n'avait aucune nouvelle notification.
— Qu'est-ce que tu fous ?
Il sursauta et manqua de faire tomber son téléphone : il ne m'avait visiblement pas entendue arriver.
— Rien, répondit-il, un peu trop rapidement à mon goût pour que ce soit crédible. J'attends un message de ma mère.
— Et dis-moi, par le plus grand des hasards, ta mère elle serait pas brune avec un bandana autour de la tête les trois quarts du temps ? ironisai-je en esquissant un sourire en coin.
Aussitôt, les joues de Dorian prirent une jolie teinte coquelicot, s'accordant parfaitement avec le tee-shirt qu'il portait aujourd'hui. Il enfonça alors davantage sa casquettte fluorescente sur son crâne, comme si elle possédait des pouvoirs d'invisibilité — sauf que non, il ne s'agissait pas de la casquette d'Annabeth Chase.
Il essaya encore cinq bonnes minutes de me convaincre qu'il attendait vraiment un message de sa mère, avant d'abdiquer.
— Ok, ça va, capitula-t--il dans un souffle. J'attends un message d'Ulysse. Sauf que ça fait plusieurs heures et il n'a toujours pas répondu à celui que je lui ai envoyé. À ton avis, Nola, qu'est-ce que je dois faire ?
Dorian paraissait réellement paniqué, et moi je commençais doucement à me sentir mal à l'aise. La vérité, c'était qu'Ulysse n'avait jamais fait quoi que ce soit pouvant laisser penser qu'il était attiré par les hommes. Sachant qu'il était sorti avec la cousine de Jules — Darla, si je ne trompe pas — la probabilité était mince. Pas inexistante, mais mince quand même.
— Je ne sais pas, finis-je par lâcher avec hésitation. Patiente, et ne le harcèle surtout pas ou il va te bloquer.
— Je savais que j'aurais jamais dû tenter cette approche, gémit Dorian en se prenant la tête à deux mains.
Je roulai des yeux, excédée. Dorian pouvait réellement se révéler pire qu'Hortense à certains moments.
— Mais qu'est-ce que tu racontes ? Ulysse te plaisait, t'as flirté avec lui et t'as réussi à l'embrasser. Qu'est-ce que tu juges de plus important ? Que votre relation dure une heure ou dix ans, ça ne change rien et ça ne veut surtout pas dire qu'elle n'était pas importante. On n'est pas tous faits pour avoir des relations amoureuses dignes d'un couple de quatre-vingt-dix ans alors qu'on est que des adolescents !
Dorian me regarda avec des yeux ronds.
— Tant que t'as pas de regrets, c'est le principal, conclus-je en donnant une petite tape sur l'épaule du métisse.
Ce dernier hésita quelque peu, puis décreta finalement :
— J'ai pas de regrets.
— Alors, allons imiter Tarzan !
Nous arrivâmes bientôt à l'endroit du lac de Montdesbois où Dorian avait aperçu la corde. Par chance, aucun enfant ne s'amusait avec actuellement. Le temps que Jules, Maël et Hortense nous rejoignent, nous étions déjà en maillot de bain et prêts à plonger.
— Nola.. commença Maël en haussant un sourcil à la vue de mon maillot de bain une pièce rouge.
— Le premier qui m'appelle Pamela Anderson, je le noie et sa famille ne reverra jamais son corps.
Maël et Jules levèrent simultanément les mains en signe de paix, signalant qu'ils ne feraient aucune blague vaseuse sur mon maillot de bain. À côté, Dorian s'esclaffait et Hortense me regardait, un air triomphant sur le visage.
— Bon, s'exclama Dorian en tapant dans ses mains, une fois qu'il eut fini de rire. Qui se lance en premier ?
Personne ne lui répondit, mais tous les regards braqués sur le métisse, semblèrent lui faire comprendre l'idée générale qui traversait l'esprit de chacun de nous.
— Ok, j'ai compris. J'y vais en premier.
Dorian s'échauffa quelques minutes, humidifia sa nuque avec une bouteille que Maël avait amené — afin d'éviter un choc thermique nous précisa-t-il — et enfin, s'approcha du bord. Jules lui donna la corde particulièrement usée — je me demandais si elle allait vraiment pouvoir supporter le poids de notre ami.
Il prit quelques pas d'élan avant de se mettre à courir, en continuant à tenir la corde, jusqu'à ce que ses pieds quittent le sol et qu'il semble soudain n'être soumis à aucune loi de gravité.
— AAAAAH AAAH AAAAHH, hurla Dorian en parfaite imitation de son héros Disney préféré.
Il retomba dans l'eau du lac dans un plat du ventre quasiment parfait.
— Ouille, ça doit faire mal, commenta Jules avec une grimace.
Cela ne sembla nullement déranger Dorian qui, une fois remonté à la surface, nagea jusqu'à la rive pour nous rejoindre.
— Ça va ? s'enquit Hortense alors que Dorian venait de nous rejoindre.
— Ouais, répondit le métisse en adressant un énorme sourire à Hortense. T'inquiète pas, j'ai l'habitude des plats alors maintenant, ça ne me fait plus vraiment mal.
Ce n'était pas vraiment rassurant. Mais Dorian semblait aller bien alors nous ne cherchâmes pas davantage.
La suite de l'après-midi s'écoula rapidement. Nous avions tous essayé plusieurs fois la corde — avec plus ou moins de succès —, qui s'avéra d'ailleurs être très amusante, même Hortense qui pourtant, avait catégoriquement refusé au début, s'était prêtée au jeu et pataugeait désormais dans l'onde du lac.
— Tu vois, lançai-je alors que ma meilleure amie remontait à la surface pour remplir ses poumons d'air. C'est pas si terrible.
— Disons que c'est passable, approuva Hortense en dégageant les mèches de cheveux collées à son front.
— Tu pourrais essayer le plongeoir la prochaine fois, proposai-je innocemment.
— N'abuse pas, Nola, rétorqua ma meilleure amie en hochant négativement de la tête — moi qui croyait pouvoir l'avoir de la sorte, c'était plutôt raté.
Je n'eus pas le temps de répliquer, que Jules nous sommait de nous écarter pour que Dorian puisse sauter à son tour avec la corde. Nous nous exécutâmes rapidement, conscientes que notre ami n'hésiterait pas à nous tomber dessus si nous étions trop lentes.
Nous regagnâmes alors avec hâte la berge du lac, pendant que Dorian sautait dans l'eau verdoyante du lac de Montdesbois.
— Ça vous dit une petite glace au snack-bar ? proposa Maël en nous aidant à remonter sur la terre ferme. C'est moi qui paye.
— Oh ouais, s'exclama Hortense.
— Eh, Dorian, tu viens ?! appela Jules en se tournant vers notre ami métisse, au cas où il n'aurait pas entendu la proposition de Maël. On va manger une glace !
— Partez devant.. euh.. je vous rejoins plus tard.
Je fronçai les sourcils et me tournai vers le métisse. Ce dernier se trouvait toujours dans l'eau, et ne semblait pas décidé à bouger. Ce comportement n'était pas sans m'étonner : Dorian était un glouton et jamais, au grand jamais, il ne refuserait de manger, surtout gratuitement.
— Qu'est-ce que t'as ? demandai-je alors, emplie de curiosité. T'es malade ou bien ?
Visiblement, il hésitait à me répondre. Puis, il sembla se rendre compte qu'il n'avait pas d'autres choix et se décida à nous exposer son problème.
— Je.. Ej bien, quand j'ai sauté j'ai.. Comme qui dirait, perdu mon maillot de bain, avoua-t-il.
Nous éclatâmes littéralement de rire.
Peu nous importait que Dorian trouve cela vexant, la situation était bien trop risible pour demeurer sérieux. Jules et Maël se tenaient l'un l'autre pour ne pas s'écrouler au sol, des larmes de rire dégoulinaient sur les joues d'Hortense et l'hilarité générale gagna même le métisse. Avec un sourire, je pris conscience que ça faisait bien trop longtemps que notre petit groupe n'avait pas ri comme cela.
— Bon alors, vous venez m'aider ? s'écria Dorian, une fois redevenu à peu près sérieux.
— Allez, lançai-je avec un hoquet. À la recherche du slip de Tarzan !
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chapitre de :
chercheusedemots
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