61 | « Se retrouver en plein milieu d'un banc de requins, par tout hasard ?! »

H O R T E N S E
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          LE PRÉSIDENT, C'ÉTAIT BIEN LE SEUL JEU DE CARTES QUE J'APPRÉCIAIS, et ce, même s'il y avait de fortes chances pour que je termine trou du cul à chaque partie. Par chance, j'avais réussi à trouver plus mauvais que moi. Basile, l'un des garçons de la bande de Noé et d'Ulysse jouait tellement mal, que je le soupçonnais de le faire exprès pour finir par tous nous renverser quand on s'y attendrait le moins.

D'ailleurs, en parlant de Basile, ce dernier venait de nous laisser en plan et discutait désormais avec Jules et Nola. Je fronçais les sourcils tout en les regardant, sûre et certaine qu'ils préparaient un mauvais coup. Et alors que Julie venait de poser un deux sur notre pile de cartes, fermant la manche, je remarquai que les deux guignols lorgnaient Maël et le caniche du regard.

Ma main à couper qu'ils montaient un plan pour les séparer. Il ne restait plus qu'à espérer qu'ils ne m'incluaient point dans leur complot, parce que bon, après les événements de la veille, je n'avais vraiment plus envie d'avoir quelque chose à faire avec ce type. Pouah ! Dire que je l'avais embrassé alors qu'il me prenait pour Pauline : c'était tellement malsain, et même si par le passé j'avais effectué les mêmes actions, je me rendais compte que ce n'était vraiment pas la meilleure chose à faire.

— Hortense, c'est ton tour ! indiqua Noé en agitant une main devant mon visage.

Je me resaissis à cet instant et observai brièvement le jeu en cours : trois cartes étaient posées sur la table de pique-nique et par chance, il s'avérait que j'avais trois rois en réserve ! Je les posai donc, fermant la manche et m'attirai les foudres de Noé qui avait d'ors et déjà déposé le quatrième roi, l'empêchant de remporter la partie.

— Tu vas me le payer, siffla-t-il alors que le tour de Julie arrivait.

— Pff... Je veux bien voir ça ! pouffai-je en posant une dame de cœur sur le tas.

Au même moment, une pile électrique à la peau chocolatée surgit du sable sur laquelle elle était allongée. Dorian frappant du plat de la main sur la table de pique-nique, fit voltiger toutes les cartes par terre. Noé poussa un cri d'indignation, mais qui fut vite terré par ce que Dorian avait de si urgent à nous rapporter.

— Les gars. Je viens d'avoir la révélation de l'année : ça fait deux semaines qu'on est là et on n'a même pas essayé de faire du jet-ski, lâcha le métisse alors que Noé arquait un sourcil.

— Peut-être parce que y a pas de jet-ski dans ce trou paumé, supposai-je tout en partageant la confusion de Noé, mon soi-disant "copain".

Dorian ne prit guère la peine de me répondre et partit en direction de Nola, Jules et Basile. Pendant les explications de Dorian, j'échangeais un regard de loin avec ma meilleure amie et remarquai qu'une étincelle venait de s'allumer au sein de ses iris délavées. Franchement, si ça veut pas dire que je vais encore passer une mauvaise journée, je vois pas ce que ça peut être d'autre ?!

— Non mais stop quoi, déclarai-je en délaissant la table où nous jouions précédemment aux cartes. On peut pas faire un truc normal pour une fois ? Genre, quelque chose qui n'impliquerait pas de mettre ma santé physique et mentale en danger ? tentai-je une fois arrivée à la hauteur de Nola.

— Allez Hortense, arrête de faire la relou, me taquina Noé en passant un bras autour de mes épaules.

— Je fais pas la relou, protestai-je en retirant ce dernier. Et puis j'suis pas ta copine hein, t'es pas obligé de me toucher quand le caniche nous regarde pas.

Noé leva les mains en signe d'apaisement et je cessai de l'embêter. Certes, c'était mon idée de nous faire passer pour un couple devant le caniche Bordelais, mais lui il en rajoutait une couche à chaque fois et ça ne me rendait que plus mal à l'aise. Noé était beau garçon, cela on ne pouvait le nier, mais je n'avais pas le béguin pour lui et étais encore moins amoureuse de lui. C'était juste de la comédie, rien de bien sérieux, c'était juste pour que Pauline me foute la paix et ne se mette pas en tête de m'arranger un coup avec le premier venu.

— Bah moi j'suis pour le jet-ski, lâcha finalement Basile. Que ceux qui veulent m'accompagner lèvent la main.

Étrangement, je fus la seule à garder mon bras le long du corps.

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— Ah ! Pour une fois qu'on est un nombre pair ! Personne va se retrouver tout seul ! s'enthousiasma Dorian alors que nous venions de terminer de louer les jet-skis.

On avait pris une session de trente minutes et je pouvais vous assurer que ça nous avait coûté un bras — plus toutes les économies de la Grèce, parce qu'on aime être extra. Heureusement que c'était la fin des vacances et qu'on n'avait plus grand chose à acheter. En plus, on était allées retourner les vêtements — qu'on avait acheté il y a quelques jours avec Nola — juste avant de venir ici et on s'était faites rembourser : c'était d'ailleurs ça qui nous avait aidé à payer cette sortie que je n'avais vraiment pas envie de faire — pour changer tient.

Toujours est-il que nous barbotions tous les dix dans l'eau claire de la mer Méditerranée, à quelques mètres de nos jet-skis fraîchement loués. Nous avions décidé de former des équipes de deux. Nola et Jules s'étaient tout de suite mis tous les deux, ce qui avait confirmé mon hypothèse comme quoi ils préparaient quelque chose de louche. Noé m'avait proposée de me mettre avec lui, et alors que je m'attendais à ce que Julie et Basile montent sur le même jet-ski, Basile avait subtilisé Pauline à Maël — qui d'ailleurs le regardait d'un mauvais œil depuis. Résultat des courses, Julie était avec le blond alors que Dorian et Ulysse — oui, on l'avait fait rameuter — avaient décidé de faire équipe.

— Je pense toujours que c'est une mauvaise idée, persistai-je à déclarer alors que tous s'avançaient en direction de nos scooters des mers bleus.

— T'as dit exactement la même chose pour à peu près tout ce qu'on a fait jusqu'à présent, mais t'es toujours en vie Hortense ! rétorqua Nola en levant les yeux au ciel. La preuve que c'était pas si terrible que ça.

Je préférai ne guère relever ses propos et suivis silencieusement Noé jusqu'à notre jet-ski. Le franco-allemand ne prit même pas la peine de me proposer de conduire : sûrement avait-il d'ors et déjà deviné que je refuserais immédiatement de manier un tel engin ; et je grimpai derrière lui, toujours fort peu rassurée.

— Ça va bien se passer Hortense, tu vas voir ! En plus j'ai déjà fait du jet-ski donc j'vois pas ce qu'il pourrait nous arriver ? tenta Noé pour me rassurer.

— Se retrouver en plein milieu d'un banc de requins affamés, par tout hasard ?! hurlai-je alors que mon coéquipier attachait le leash du bracelet autour de son poignet.

Noé se retourna vers moi et se tapa le front du plat de la main : si cela ne voulait pas dire que je l'exaspérais, je ne voyais pas ce que cela pouvait signifier d'autre.

— Franchement, des fois je me demande vraiment où tu vas chercher tout ça, se lamenta-t-il en riant légèrement. Hortense, un banc de requins affamés en pleine mer Méditerranée ? Sérieusement ?

— Arrête de te foutre de ma gueule. Je sais très bien qu'il n'y en a pas, râlai-je tout en jetant un coup d'œil aux autres.

Jules et Nola semblaient se disputer pour savoir qui des deux conduirait le premier. De leur côté, Ulysse et Dorian fantasmaient déjà sur les vagues qu'ils allaient chevaucher, tandis que Basile expliquait avec beaucoup d'assurance le fonctionnement au caniche Bordelais. Seul Maël faisait la tête et jetait des regards dédaigneux en direction de Basile, Julie ne sachant plus trop où se mettre.

— T'as reparlé à Maël depuis la dernière fois ? murmura soudainement le franco-allemand.

— Non, et je compte pas le faire de si tôt, répliquai-je alors que Pauline tournait la tête dans notre direction.

Aussitôt, je me mis à rire — sans aucune raison bien entendu, enfin, j'avais juste à vanner dans ma tête sur Pauline et cela allait tout seul. Noé me suivit avant de m'embrasser prestement, comme si tout allait pour le meilleur du monde.

— Bon, vous êtes prêts les gars ?! s'enquit Dorian alors que notre accompagnateur venait d'arriver.

— Archi prêts ! renchérit Nola.

Et cinq minutes plus tard, je criais à en perdre la voix.

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chapitre de :
-missIndecise

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