58 | « Hakuna Matata »

N O L A

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          C'EST BIEN BEAU DE VOULOIR ALLER AU CINÉ, mais est-ce que vous savez au moins quel film ils passent ?

— Sûrement un truc pour enfant, répondit Jules en haussant les épaules.

Tout le monde me dévisageait, mais personnellement, ça ne me plaisait guère d'aller voir un film qui était peut-être tout sauf bien.

— Je crois que c'est Le Roi Lion, intervint Noé en se frottant le menton, faisant mine de réfléchir.

— Ok, on y va, rectifiai-je immédiatement, soudain beaucoup plus impatiente de voir ce film.

Les yeux d'Hortense s'illuminèrent a la mention du film Disney et nous échangeâmes un sourire complice. Qui avait dit que les Disney c'était pour les enfants ?

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— Dorian, accélère ! lançai-je alors que le métisse était à la traine et ralentissait par conséquent, tout le groupe.

— Ouais, ouais, répondit-il la bouche pleine du hot-dog qu'il tenait dans la mains.

Je m'abstiens de lui faire un commentaire, et de lui dire que ce n'était pas en se goinfrant de saucisse et de mayonnaise qu'il allait réussir à pécho Ulysse. À la place, je lui jetai un coup d'œil appuyé pour qu'il comprenne et rejoignis rapidement Hortense.

— Où est-ce qu'on s'assoit ? demanda Jules en se frottant l'arrière de la tête, ébouriffant ses cheveux bruns.

Un grand drap blanc avait été tendu entre deux piquets et des gens — sûrement des Montdesboisiens — étaient en train d'installer un gros projecteur de l'autre côté. Les gens s'étaient installés dans l'herbe, ou sur des couvertures pour les plus intelligents. Il y avait beaucoup d'enfants accompagnés de leurs parents, mais ce n'était pas ce qui allait m'empêcher de regarder l'un de mes Disney préférés.

— Là, lança Noé en désignant un endroit vide pas très loin du projecteur. Il y a de la place on dirait.

— C'est partit, lança Hortense d'une voix enjouée en suivant Noé jusqu'à la-dite place.

Nous nous laissâmes tomber sur le sol et je m'assis en tailleur face au drap, sur lequel allaient être projetées les aventures de Simba. L'un des hommes qui avait installé le projecteur réclama le silence, et annonça qu'il allait lancer le film.

— Nola, t'as des mouchoirs ? me demanda Hortense.

— Pourquoi tu veux des mouchoirs ? T'es pas enrhumée, intervint Dorian en fronçant les sourcils, son hot-dog toujours dans une main.

— C'est pour le passage de la mort de Mufasa, expliqua Hortense en mimant déjà une profonde tristesse, avant d'attraper le paquet de mouchoirs que je lui tendais.

Une vraie drama queen quand elle voulait, même s'il était vrai que la mort du père de Simba avait traumatisé tous ceux ayant vu ce film dans leur enfance.

— C'est qu'un dessin-animé, rétorqua Dorian.

Hakuna matata, chantonnai-je pour toute réponse.

Dorian sembla comprendre que ses critiques étaient vaines car il soupira et ne dit plus un mot. À la place, il se contenta de mâchouiller son hot-dog. Qu'il avait en main depuis que l'on était partis des tentes.

— T'as pas encore fini de le manger ? s'enquit Jules, qui était assis à la gauche du métisse.

Ce dernier prit un air innocent et se mit même à siffloter comme si de rien n'était.

— Laisse-moi deviner, ricanai-je en haussant un sourcil. T'en avais pris plusieurs dans tes poches ?

Dorian haussa les épaules mais la bosse que formait la poche ventrale de son sweat-shirt ne pouvait prêter à confusion. C'était un véritable ventre sur patte.

— On lance le film, annonça une dame assise derrière le projecteur, pour que les quelques enfants qui couraient partout retournent s'assoir à leurs places.

Quelques minutes plus tard, le silence était retombé sur le cinéma en plein air. On entendait plus que les mastications de Dorian quand le film commença à être projeté sur le drap.

Je lâchai un petit "oohh" devant la bouille de Simba, alors que le singe Rafiki lui mettait l'espèce de peinture sur le front. Dorian et Jules m'adressèrent un regard blasé.

Bande d'incultes.

— Oh putain, murmura Hortense. C'est bientôt, c'est bientôt.

Elle dégaina le paquet de mouchoirs que je lui avai prêtée juste avant, sous les regards d'incompréhension de nos deux compagnons. Quelques minutes plus tard, Mufasa était mort et nous arborions tout les trois — Hortense, Noé et moi — une tête de trois kilomètres de long.

— T'es fan du Roi Lion, Noé ? questionna Jules.

— Ouais, répondit le franco-allemand avec une moue toute triste. Et, je déteste ce passage sur la mort du père de Simba.

J'adressai un sourire narquois aux deux compère qui en restèrent patois. Et c'est en regardant Jules et Dorian pendant quelques instants, que je compris qu'il manquait quelqu'un à l'appel.

— Hey, chuchotai-je pour ne pas déranger les autres spectateurs. Où est Maël ?

— Tiens, remarqua à son tour Jules. Pauline n'ont plus n'est pas avec nous. Pourtant, j'aurais juré qu'ils nous suivaient.

— Ils ont dû s'éclipser discrètement, supposa Noé.

— On fait quoi dans ce cas ?

J'échangeai un regard avec Hortense, qui demeurait impassible, malgré une petite lueur de panique dans ses yeux. Forcément, savoir que Maël était tout seul avec cette sorcière, c'était pas joyeux joyeux.

— Je vais les chercher, annonçai-je aussitôt en me mettant debout. Vous, vous restez ici au cas où ils reviennent.

Avant que les trois garçons n'aient le temps de protester, j'avais déjà contourné la salle de cinéma en plein air et regagnais le chemin pour retourner au camping. En sortant mon portable pour utiliser ma lampe torche, j'entendis des pas derrière moi.

— Hortense ?

Ma meilleure amie semblait un peu gênée.

— Je peux t'accompagner ?

J'acquiesçai — j'allais tout de même pas aller l'envoyer bouler — et nous nous mîmes en route vers le camping, l'hypothèse la plus probable étant qu'ils étaient restés près des tentes au lieu de nous suivre.

Nous marchâmes en silence, seulement éclairées par la lueur de ma lampe torche — Hortense ayant oublié son téléphone portable dans la tente. Et, nous arrivâmes enfin près de notre campement.

— On dirait qu'ils sont pas là. Qu'est-ce qu'on..

Hortense me fit signe de me taire et désigna la tente des garçons du bout du doigt. Des voix étaient parfaitement audibles, même si je n'aurais su dire de quoi elles parlaient.

Nous nous approchâmes discrètement — j'aimais tellement jouer les espionnes quand j'étais petite — et nous nous cachâmes derrière une tente verte, qui avait été plantée juste à côté de celle des garçons.

— On fait quoi s'ils nous voient ?

— On dira qu'on est venues chercher nos duvets pour mieux s'installer au cinéma, répondis-je avec un haussement.

— Nola, c'est pas notre tente je te signale.

— On s'en fout, fais genre t'as oublié de mettre tes lentilles.

Hortense secoua la tête en marmonnant que mes excuses étaient stupides.

— Pourquoi on ne les entend plus parler ?

Nous échangeâmes un regard et nous nous redressâmes rapidement, pour observer une scène d'une telle horreur qu'un frisson me parcourut l'échine.

Maël et Pauline étaient en train de s'embrasser.

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chapitre de :
chercheusedemots

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