55 | « Pose pas de questions s'il te plaît »
H O R T E N S E
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L'ARRIVÉE DE PAULINE N'AVAIT GUÈRE CONTRIBUÉ À M'ENJOUER. Aussi avais-je préféré passer mon après-midi en compagnie de Noé et d'Ulysse, plutôt qu'avec mes "amis" et leur nouvelle distraction. Bon, je savais que ce n'était pas cool pour Nola, mais bon, elle avait toujours mieux su jouer les hypocrites que moi.
— Hortense ? Pourquoi t'es pas avec les autres au fait ? s'enquit Noé en descendant de sa planche de skateboard.
Assise au sommet de la rampe cuisante, les jambes se balançant dans le vide, je contemplais les alentours d'un air pensif. Noé et Ulysse m'avait amenée au skatepark situé derrière la place de Montdesbois. C'était un chouette endroit, plutôt désert vu la chaleur qui régnait ici, mais ça restait quand même sympathique, histoire de passer une après-midi loin de Maël — et de Pauline.
Ulysse avait fini par s'éclipser pour venir en aide à ses parents. Néanmoins, Noé demeurait en ma compagnie, m'ayant déjà proposée de me ramener au camping quand l'envie m'en plairait.
— Y a des têtes qui me reviennent pas, lâchai-je simplement alors que Boucle d'or grimpait à mes côtés, avant de s'asseoir.
— Hum... Laisse-moi deviner... Est-ce que le prénom de cette personne commence par un Ma et se finit par un Ël ? tenta le franco-allemand en esquissant un petit sourire narquois.
Je souris face à son expression mais fus contrainte de nier : après tout, je n'en avais pas vraiment après Maël, juste après ce qu'il s'était permis de faire, en ramenant son ancienne copine dans notre nouveau QG estival : Montdesbois.
— Non, tout est ok avec Maël, même si on ne se parle plus autant qu'avant et que... Et qu'on ne flirte plus, ajoutai-je douloureusement, en constatant que cette partie me manquait affreusement.
S'il fallait savoir quelque chose sur moi, c'était que je détestais lorsqu'une personne me draguait H24, pour finir par arrêter subitement, sans la moindre explication. Et si Maël avait pourtant été très clair sur le sujet, je constatais que je n'étais guère encore prête à oublier les événements des semaines passées. C'était comme si on m'avait offert un resplendissant cadeau d'anniversaire, pour ensuite me le reprendre de force et le redonner à une personne autre, Pauline en l'occurrence.
— Je comprends, je comprends, marmonna Noé en passant une main dans ses boucles blondes. Tu sais, les garçons font des choses stupides parfois, ils ne se rendent pas compte de leurs actes. Même moi, qui pourtant suis l'incarnation de la perfection, je fais des erreurs, ajouta-t-il alors que je lui donnais un coup de coude.
— Ça va tes chevilles là ? raillai-je en resserrant le nœud de mon chemisier.
— Parfaitement bien, rétorqua-t-il naturellement, avant de reprendre un air sérieux. Non mais ce que je voulais dire, c'est que si c'est un type bien, il se rendra vite compte de ses erreurs...
— J'espère bien, murmurai-je tout bas alors que Noé se relevait, m'entraînant par la main.
— Allez Hortense ! Cesse de te morfondre et viens plutôt essayer ma nouvelle planche !
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Assise sur l'une des chaises de camping, un peu à l'écart des autres invités, j'observais distraitement du coin de l'œil, Pauline parler avec ma meilleure amie. Bien que Maël a pu mentionner le fait que nous nous ressemblions, je ne voyais guère ce que Pauline et moi partagions. Hormis une chevelure brune, la différence s'arrêtait là : son visage était davantage anguleux, ses iris beaucoup plus claires et elle semblait culminer à presque un mètre soixante-cinq — contre mon mètre cinquante-sept et moi.
Soudain, alors que je sirotais paisiblement une gorgée de sangria achetée sur place, la créature qu'avait invité Maël à nous rejoindre, entreprit de s'approcher avec hâte de mon espace vital et de moi. Je fus tentée de fuir, cependant, j'avais peur de m'étaler sur le sol en trébuchant sur une pierre, ce qui m'aurait à nouveau value une honte intersidérale — qui n'aurait pas été sans réjouir Pauline le caniche.
Aussi, préférai-je jouer la carte de la fille qui ne parlait pas très bien français... De la fille allemande tiens !
— Tu t'appelles Hortense ? C'est ça ? demanda prudemment Pauline en s'asseyant délicatement — pff princesse — sur la chaise à côté de moi.
Je fis mine de ne saisir aucun mot de sa phrase et me contentai de pencher la tête sur le côté. Cherchant du regard le soutien de Nola, ou d'une tout autre personne, je remarquai que cette dernière retournait à la hâte des merguez complètement cramées. Je retins un sourire moqueur et reportai mon attention sur Pauline, qui semblait en pleine réflexion.
Elle semblait se sentir mal à l'aise, aussi, dans un élan de gentillesse, j'entrepris de lui répondre. En veillant cependant à bien changer de langue.
— Was ? lançai-je d'un air faussement désolé.
Alors que je me voyais déjà triomphante sur les forces du mal, que représentait l'ancienne ou peut-être nouvelle copine de Maël, cette dernière s'empressa de briser toutes mes illusions en répliquant, dans un allemand correct — quoiqu'un peu incertain.
— Bist du Hortense ?
Mais pourquoi ?! voulus-je m'écrier à pleins poumons en reprenant une de ces postures dramatiques, que l'on retrouvait dans tout bon film d'action ou de comédie romantique qui se respectait. Pourquoi étais-je tombée sur la seule personne — autre que Noé — qui parlait allemand aussi ? Pourquoi n'avais-je pas choisi l'espagnol en LV2 ? Ça aurait été beaucoup plus simple voyons !
À la place de cela, je me contentai d'exploser d'un rire forcé, admirant avec une certaine joie, l'incompréhension qui se lisait sur le faciès de Pauline. Maël passa à l'instant-même, apportant un verre à sa demoiselle en détresse, et me jeta un regard intrigué. Je me contentai de lui sourire, bien que j'eusse plutôt eu envie de l'étriper à cet instant précis.
Pauline, qui paraissait toujours désemparée, me détaillait de ses petits yeux pâles. Aussi, m'empressai-je de lui fournir des explications : je n'avais guère envie qu'elle me prenne pour une folle — même si c'était déjà probablement le cas.
— Désolé, c'était trop tentant, me justifiai-je en avalant une gorgée de ma sangria. Oui, je m'appelle bien Hortense, et tu dois être Pauline, n'est-ce pas ? Maël m'a beaucoup parlée de toi, ajoutai-je avec une hypocrisie totale, un large sourire scotché sur mon visage rond. Ah et si tu te demandes, je ne suis pas allemande, c'était juste pour te faire marcher.
Pauline parut se détendre quelque peu et laissa même s'échapper un petit rire d'entre ses lèvres. C'est là que je remarquai que ses incisives étaient légèrement écartées, formant un diastème peu marqué. La brune s'empressa de siroter avec lenteur sa boisson, avant de reposer le gobelet en plastique sur la table bancale qui nous servait de table à manger.
Rejetant ses longues tresses en arrière, elle se retourna promptement dans la direction de Maël. J'en profitai alors pour exprimer mon ressentiment auprès de Nola, en faisant semblant de vomir.
— Maël est vraiment un ange, soupira Pauline en revenant face à moi.
Je me contentai d'acquiescer poliment, bien qu'une envie de clamer ses quatre vérités à Pauline me tiraillait de plus en plus l'esprit. Elle avait beau me parler gentiment, je savais que son ressentiment n'était guère aussi aimable : je n'aurais guère été étonnée si elle venait à me sauter à la gorge en apprenant que Maël m'avait embrassé. Pauline me faisait l'effet de ces filles beaucoup trop gentilles pour être sincère. Elle semblait mielleuse à souhait, toujours à vouloir s'attirer les bonnes grâces des personnes l'entourant, leur assurant qu'elle ne voulait que leur bien.
Si tu voulais vraiment mon bien, le caniche, tu serais pas venue nous emmerder durant notre avant-dernière semaine de vacances !
— Et sinon... Dorian m'a dit qu'un certain blondinet t'avait tapé dans l'œil, gloussa tout à coup mon interlocutrice. Est-ce que ce ne serait pas ce beau gosse qui se trouve près de Jules ?
Je me retournai, intriguée par la question de Pauline, et surtout vexée que Dorian ait pu mentionner mon flirt avec Maël devant Pauline — bien qu'il avait tu son prénom volontairement. Mes iris azurées tombèrent alors sur Noé, qui se prélassait nonchalamment, une cigarette à moitié entamée coincée dans sa main droite. Une idée de génie se forma alors dans mon esprit : si je voulais faire payer à Maël ses actes indécents, peut-être fallait-il que moi aussi, je me trouve quelqu'un pour le remplacer.
C'était donc toute sourire, quoiqu'un peu gênée, que je me retournai en direction de Pauline.
— Noé ? Oui, c'est vrai qu'on a pas mal flirté, avouai-je même si c'était totalement faux.
— Vas-y, appelle-le ! m'encouragea sincèrement Pauline tandis que je hélais Boucle d'or.
Ce dernier parut surpris que je veuille lui parler, mais délaissa tout de même Jules pour nous rejoindre. Pauline, un grand sourire au bord des lèvres, nous observait tour à tour, telle une spectatrice face à un match de tennis. Je me levai alors, l'estomac noué par le tract, et m'approchai prestement de notre ami Montdesboisien.
— Pose pas de questions s'il te plaît, le suppliai-je dans un murmure.
Et l'instant d'après, j'écrasai avec une certaine réticence, mes lèvres sur celles du franco-allemand.
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OHLALA, dans quoi Hortense s'est-elle encore fourrée ?
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Hey !
Vous pouvez pas savoir comment ça nous fait plaisir de vous retrouver après ce mois de pause ! On espère que vous allez tous très bien et que l'arrivée des beaux jours vous remonte le moral !
On espère que ce chapitre vous aura plu ! N'hésitez pas à nous donner votre avis et à cliquer sur la petite étoile ! Ça nous ferait vraiment très plaisir ! On reprend le rythme de deux chapitres par semaine au fait !
Sinon, je tenais à vous dire que j'ai publié une nouvelle histoire, enfin, du moins j'ai mis en ligne le prologue et la partie de présentation. Cette histoire portera sur la jeunesse des parents de Noé et d'Ulysse et j'espère qu'elle vous plaira. L'action se déroule en août 1985 et suit les aventures d'une bande de jeunes, composée respectivement de la mère d'Ulysse, le père de Noé, les parents de Fanny, la mère de Darla et le père de Juliette (autrement dit le maire de Montdesbois).
J'espère vous avoir donné envie d'aller y jeter un œil !
Aussi, n'hésitez pas à vous rendre sur le profil de @chercheusedemots ! Elle a une histoire du nom de "Le vent se lève" qui est plutôt pas mal ! Alors si vous aimez le suspens, les soirées et les coups foireux entre ados d'un petit village côtier, vous n'allez pas être déçu(e)s ! Franchement, je me demande vraiment où est passée Maura !
Voilà, voilà, sur ce, on va vous laisser !
Bonne journée / soirée !
-missIndecise
& chercheusedemots
chapitre de :
-missIndecise
musique :
Egoist — Lina
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