44 | « Tu devrais te mettre au yoga »

N O L A
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          — ALLEZ JULES, on va se baigner, lâcha sèchement Maël en grinçant des dents.

Il jeta un dernier regard plein d'amertume à Hortense, avant de balancer son tee-shirt et ses chaussures pour rejoindre Dorian dans le lac, ce dernier se demandant toujours ce qui se passait sur la berge. Jules m'adressa un signe bizarre de la main avant de me regarder avec insistance, ce qui voulait sûrement dire : tu t'occupes d'Hortense, je gère Maël. Je lui répondis par un pouce levé.

Plus facile à dire qu'à faire.

— Hortense ? appelai-je en tournant sur moi-même sans voir ma meilleure amie dans les parages, alors qu'elle était juste à côté il y a deux minutes à peine.

Finalement, j'aperçus sa silhouette qui s'éloignait de la berge du lac d'un pas rapide.

— Hé, attends-moi ! protestai-je, inutilement, car elle ne pouvait sûrement pas m'entendre à une telle distance.

Après cinq minutes de course, je rattrapai Hortense juste avant qu'elle n'arrive au camping Les Trois Dauphins, mais elle n'eut pas le temps de dire quoi que ce soit ; elle trébucha contre un cailloux et s'étala de tout son long sur le chemin de terre qui marquait l'entrée du camping.

— Ça va ? demandai-je avec inquiétude en l'aidant à se relever.

— J'en ai MARRE ! hurla t-elle, une fois debout. Marre de ne pas savoir marcher correctement, marre de me casser la gueule et, surtout, j'en ai marre de Maël !

Mon regard se posa sur le sweatshirt qu'elle portait toujours et qui appartenait justement au blond. Hortense suivit mon regard et ses joues virèrent au rouge — colère ou gêne ? Aucune idée.

— Et, ce putain de pull me fait chier ! râla-t-elle en enlevant rapidement le-dit pull pour le balancer par terre, dans la poussière.

Je devinai rapidement que si je ne faisais rien elle était capable de le piétiner, ou de faire une danse vaudou dessus pour maudire Maël, j'attrapai alors rapidement Hortense par le bras et la tirai vers nos tentes.

— Allez, on va dormir, proposai-je.

Cela eut au moins le mérite de la calmer car elle s'engouffra en silence dans la tente et se coucha, toute habillée, dans son duvet. Je pris le temps de me mettre en pyjama avant d'éteindre ma lampe torche, et de m'allonger dans mon duvet à côté d'Hortense — qui me tournait toujours le dos.

— Hé, Hortense ?

Un grognement me répondit.

— Vos mots ont dépassé vos pensées, pas vrai ?

Nouveau grognement.

— Tu vas te réconcilier avec Maël demain, pas vrai ? tentai-je une dernière fois.

— Je ne veux plus rien avoir à faire avec ce crétin.

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J'étais assise en tailleur derrière la cabane du maître nageur, Dorian et Jules également assis devant moi. L'heure n'était pas la rigolade.

En fait, l'heure était plutôt grave.

— Bon, les gars, faut absolument qu'on trouve un moyen pour réconcilier Hortense et Maël.

Cela faisait maintenant deux jours que nous avions assisté au feu d'artifices, et la dispute au bord de lac planait toujours sur notre petit groupe. En vérité, j'avais passé les dernières 48h avec Hortense, à éviter soigneusement Maël — ce qui, il fallait l'avouer, était assez compliqué sachant que sa tente était plantée juste à côté de la nôtre. De leur côté, Dorian et Jules étaient restés avec le blond qui prenait soin de ne pas croiser Hortense non plus.

— Ça devient même carrément urgent, lâcha Jules. Maël est d'une humeur massacrante, je te promet, il est insupportable. Pire que Dorian !

— Hé, protesta l'intéressé.

— Sans blague, faut qu'on trouve un plan, approuvai-je.

Les deux garçons tournèrent la tête vers moi et le même air d'incompréhension se peignit sur leurs visages.

— Pour les réconcilier. Je sais pas moi, un piège, une fourberie, appelez ça comme vous voulez du moment qu'ils arrêtent de se faire la gueule.

— Et t'as une idée ?

— Peut-être, commençai-je en me raclant la gorge.

— Je te rappelle que la dernière fois qu'on a suivit l'un de tes plans, on s'est retrouvés à courir comme des tarés parce qu'on était poursuivis par un boucher enragé, ricana Jules.

Je levai les yeux au ciel ; mon plan pour voler le saucisson était parfait, c'était juste cet idiot de boucher qui n'avait pas correctement joué son rôle.

— Alors, débrouillez-vous pour en trouver un autre si vous êtes pas content, rétorquai-je.

— Je crois que j'ai une idée, s'exclama Dorian en claquant des doigts.

L'opération LRIDMEH du nom que lui avait donné Dorian — les initiales signifiant littéralement La Réconciliation Immédiate De Maël et Hortense, il n'avait apparement pas trouvé plus long — pouvait commencer.

Si vous voulez mon avis le plus franc, je pense que c'était une très mauvaise idée. Mais, comme je restais convaincue que quelque soient les idées qu'on puisse avoir, elles allaient foirer : j'ai adhéré au plan de Dorian.

— Ça m'énerve, lâcha une nouvelle fois Hortense alors que je la rejoignais devant notre tente.

Étonnement, beaucoup de choses l'énervaient depuis deux jours.

— Qu'est-ce qu'il y a encore ?

— Les pointes de mes cheveux rebiquent dans le mauvais sens, répondit-en passant rageusement sa brosse dans ses cheveux parfaitement normaux.

— Tu devrais te mettre au yoga, proposai-je. Ça te ferait le plus grand bien.

— Pas envie, grogna mon adorable meilleure amie.

Je lâchai un soupir mais ne dis rien et décidai de passer à la première phase du plan.

— Tous les campeurs doivent aller à la cabane du maître nageur au fait, signer une décharge comme quoi on accepte les règles du lac. Apparement, elles sont pas assez respectées. Et, ajoutai-je en voyant qu'elle s'apprêtait déjà à protester. De un, c'est obligatoire. Et, de deux, Jules m'a dit qu'ils y sont allés en début d'après-midi, donc on ne croisera pas Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom.

Voyant qu'elle hésitait toujours, j'ajoutai avec une pointe d'ironie dans la voix :

— Et, je ne parle pas de Tom Jedusor.

Après qu'Hortense eut capitulé — je ne lui laissais pas le choix de toute façon — nous nous dirigeâmes vers le lac, puis à le cabane du maître nageur. En chemin, j'aperçus Jules caché vers le snack-bar qui leva un pouce en l'air dans ma direction.

— C'est dedans je crois, oh merde ma tong s'est cassée !

J'enlevai la-dite tong et entrepris de la réparer — elle se cassait régulièrement, fallait dire que 2€ à Intermarché c'était pas de la super qualité — après avoir demandé à Hortense de commencer à y aller sans moi.

Au cas où vous ne l'auriez pas compris, j'avais fait exprès de casser ma tong en marchant dessus avec mon autre pied et rien n'attendait Hortense à l'intérieur de la cabane — ou presque rien.

Quel magnifique jeu d'actrice.

Au moment où ma meilleure amie pénétra dans le bâtiment, Dorian surgit de derrière un arbre et claqua la porte de la cabane. Deux tours de clefs — empruntées au maître nageur — plus tard, nos deux amis étaient tous les deux enfermés à l'intérieur.

Oui oui, Hortense et Maël s'offraient un tête à tête forcé.

— Yes, hurla Dorian alors que Jules nous rejoignait. Youpi, le plan a marché !

Trop heureux, Dorian en sauta de joie et les clefs lui échappèrent des mains.

Pour tomber dans le lac, juste à côté de la cabane.

— T'es un boulet, Dorian, sifflai-je en me dirigeant vers le lac pour les récupérer avant qu'elles ne s'enfoncent dans le sable.

Je n'eus même pas le temps d'atteindre le bord de l'eau, qu'une dizaine d'enfants couverts de crème solaire me devancèrent en courant pour se jeter dans le lac, le tout en hurlant des choses en allemand — comme les allemands savent si bien le faire.

— Oh putain, fut tout ce que Jules et Dorian trouvèrent à dire.

Les enfants ayant remué l'eau, soit les clefs avaient été enterrées soit balancées plus au large. Dans tous les cas, il allait nous falloir du temps pour les retrouver.

— Hé, laissez-nous sortir ! hurla Hortense.

On pouvait deviner au ton de sa voix qu'elle était furieuse et qu'elle étriperait le responsable — où plutôt les responsables dans notre cas — sitôt qu'elle serait sortie de la cabane.

— Euhh, tenta Dorian après un raclement de gorge, tandis qu'avec Jules on se précipitait vers l'eau à la recherche des clefs. On y travaille, t'inquiète.

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chapitre de :
chercheusedemots

musique :
More than you know — Axwell /\ Ingrosso

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