17 | « J'en ai maté des plus coriaces que toi »
H O R T E N S E
__________
CONNAISSEZ-VOUS L'EXPRESSION : "le calme après la tempête"? Certainement. Et bien sachez que c'était exactement ce que je ressentais, allongée sur mon transat bleuté.
Hier après-midi, après avoir bravé la mort avec bravoure — ou non — nous avions réussi à retrouver nos amis. Ces derniers arboraient des faciès inquiets, mélangés à de la peur et à un soupçon de joie. Néanmoins, lorsqu'ils avaient aperçu que Nola me soutenait avec difficulté, ils avaient tout de suite compris qu'il nous était arrivé quelque chose. Le guide avait alors accouru vers nous, nous demandant si tout allait bien et si on ne s'était pas faites mal. Je lui avais alors déclaré que je m'étais foulée la cheville, mais que ce n'était rien de grave : après tout, je m'étais tordue la cheville tellement de fois que je commençais à ne presque plus avoir mal. D'ailleurs, au moment où je vous parle, mon articulation va très bien, même si j'ai encore un peu mal quand je marche.
— Hortense ! Tu peux me passer la crème solaire ? demanda Nola, allongée un peu plus loin.
Je lui lançai ce qu'elle cherchait et retournai à ma séance de bronzage. Aujourd'hui, nous avions délibérément choisi de ne rien faire de violent, car après tout, les trois derniers jours avaient été riches en émotion. Ainsi, voilà que nous flanions tous les cinq à la piscine du camping Les Trois Dauphins. Les trois garçons étaient partis piquer une tête, et nous adressaient de temps à autre de grands signes. Nola se retenait d'aller dans l'eau : elle ne voulait pas me laisser toute seule, et ce, même si je lui avais explicitement indiquée d'aller rejoindre les autres. Mais que voulez-vous... Une vraie tête de mule celle-là !
— T'es sûre que tu veux pas aller te baigner ? déclarai-je en fermant les yeux.
— Non, c'est bon. On est bien là... Bronzer c'est cool tu sais.
— Et si je viens avec toi ? soufflai-je dans un murmure, un petit sourire en coin au bord des lèvres.
J'entendis un bruit de plastique à mes côtés et bientôt, mon champ de vision fut troublé par une silhouette longiligne. Je compris tout de suite que mon message n'avait pas atterri dans les oreilles d'une sourde. Lorsque je rouvris les yeux, je lâchai un petit rire en apercevant une Nola toute sourire. Je retirai alors mes lunettes de soleil, replaçai prestement ma lentille droite et me levai à mon tour, bien décidée à me rafraîchir.
— La dernière à l'eau est..., débuta ma meilleure amie avant de s'interrompre. Oublie ça.
En effet, si déjà je n'étais pas rapide avec mes deux chevilles valides, je n'osais imaginer ce qu'il se passerait si je courrais avec ma patte folle.
Ça finirait sûrement en gros plat dans le grand bain.
Après quelques secondes de marche légèrement pénible, nous atteignîmes le plus large des bassins — celui avec le toboggan en tourbillon. Là-bas, Dorian, Jules et Maël nous attendaient, enfin, du moins ils semblaient le faire : Dorian avait commencé à charrier le blond, ce dernier s'était donc ligué contre lui — avec la complicité de Jules — et tentait désormais de le faire couler. Nola se racla la gorge lorsque nous les rejoignîmes et je ne pus m'empêcher de rire en entendant les supplices de Dorian.
— Dorian, t'es vraiment une victime, lança Jules en rejetant ses cheveux en arrière, tout en adressant un petit regard à mon amie.
Ok. Elle aussi visiblement elle a des trucs à me dire.
— Mais laissez-moi tranquille ! s'exclama Dorian en essayant de se retourner contre Maël, qui était agrippé à son dos, tel une araignée.
Finalement, après encore quelques secondes passées à observer le métisse être immergé, Nola tourna la tête vers moi. Elle murmura quelque chose d'inaudible, mais après tout, nous n'avions pas besoin de grands discours pour comprendre ce que l'autre voulait dire. J'avais immédiatement saisi ce qu'avait l'intention de faire la brune et me contentai d'acquiescer, un petit sourire esquissé sur les lèvres. Et sans plus attendre, je m'écriai :
— À l'attaque !
Nola fut la première à se jeter sur la petite mêlée que formaient les deux garçons, enfin, les trois désormais : Jules venaient enfin de se réveiller suite aux paroles que je venais de prononcer. Il attrapa au vol une Nola sauvage et tenta de l'entraîner loin de ses amis, malgré ses rires et les jets d'eau qu'elle lui envoyait. De mon côté, je me précipitai sur Dorian, avec pour objectif de le délivrer de l'emprise de Maël.
Le métisse bougeait dans tous les sens, tant et si bien que je me demandai si j'allais un jour avoir la force pour le tirer loin du blond. Heureusement, au gré de nombreux efforts et après avoir manqué de peu de me prendre un coude dans le nez, Dorian fut délivré. Il me remercia prestement et courut porter secours à Nola, toujours en proie à l'étreinte de Jules.
Il ne restait donc plus que moi, moi et Maël. Maël qui me regardait avec un petit sourire mutin, comme s'il avait quelque chose derrière la tête. Je déglutis rapidement en riant nerveusement et me reculai légèrement. J'allais enfin atteindre le rebord du bassin, quand soudain, une main se referma sur ma cheville valide. J'essayai de me contorsionner pour voir de qui il s'agissait, et ne fus nullement surprise de constater que Maël était à ma suite.
— Où est-ce que tu vas comme ça toi ? questionna-t-il en me tirant vers lui, malgré le fait que je me débattais. T'as vraiment cru que t'allais pouvoir m'échapper ?
— Qui te dit que je ne vais pas le faire quand même ? rétorquai-je en haussant les sourcils en signe de défis. J'en ai maté des plus coriaces que toi, Maël le séducteur compulsif.
Mon dieu... Est-ce que ces mots viennent réellement de sortir de ma bouche ? Non mais, sérieusement, j'ai du prendre un sacré coup sur la tête en tombant !
Maël pouffa légèrement suite à ma réplique, mais je pus tout de même déceler un peu de gêne dans son attitude. Il continuait à m'entraîner vers lui, tandis que de mon côté, j'essayais de m'accrocher à tout ce qui me passait sous les doigts : un ballon de plage, une dame âgée, Nola... Néanmoins, tous mes efforts furent vains et quand je sentis qu'on cherchait à m'entraîner vers le fond, mon premier réflexe fut de bloquer ma respiration. Mon corps se retrouva entièrement immergé en moins de quelques secondes, et je sentais le poids de Maël m'entraîner vers le fond.
Je me débattis de plus bel, les yeux fermés, car après tout, je n'avais pas tellement envie de perdre mes lentilles. La main du blond avait quitté ma cheville et désormais, ses deux bras étaient enroulés autour de ma taille. Non mais ! C'est qu'il en profite en plus le petit cochon ! Je vous promets qu'il n'a pas intérêt à aller plus haut ou plus bas, car sinon, il pourra dire adieu à ses parties sensibles !
Voyant que je commençais à manquer d'air, je m'agitai plus brutalement, en proie à la panique. Je détestais ce genre de situation, le fait d'être coupé du monde extérieur, d'avoir l'impression d'étouffer. Pour une personne aussi stressée que moi, on ne pouvait imaginer pire comme situation. L'angoisse de mourir noyé prenait rapidement le contrôle de mon corps, tant et si bien que ce dernier commença à être parcouru de spasmes nerveux. Mes poumons me brûlaient, j'avais l'impression qu'ils allaient imploser sous la pression de l'eau. Alors prise d'un élan de bravoure, je décochai un énorme coup de coude à mon ravisseur.
L'emprise qu'il exerçait sur moi se défit immédiatement et je pus enfin remonter à la surface. Lorsque ma tête émergea de l'onde chlorée, la première chose que je fis, fut de prendre la plus longue inspiration possible. J'avais dû manquer d'air pendant... Trente secondes peut-être ? Néanmoins, j'avais l'impression que ce temps avait été décuplé par quatre. Soulagée d'être encore en vie, je rouvris les yeux et les frottai d'une main leste. Puis, je m'empressai de rejoindre le bord et m'appuyai contre ce dernier.
Mon regard décrivit un mouvement circulaire et je remarquai que Nola, aidée par Dorian, avait reprit le dessus sur Jules. Je ris en le voyant se débattre et crier comme une petite fille, et encourageai mes deux amis en sifflant de toutes mes forces. Nola se retourna vers moi et leva les deux pouces en l'air, ce qui signifiait dans notre langage codé : "je gère !". Je souris une ultime fois et mes pupilles continuèrent leur route, jusqu'à s'arrêter à l'endroit où Maël avait tenté de me couler.
Je fronçai les sourcils en remarquant que l'eau ne s'agitait plus à cet endroit. Je cherchai alors du regard Maël, tout en sentant une boule se former dans le creux de ma gorge. Il ne semblait nul part ailleurs... Pourvu qu'il ne lui soit rien arrivé ! pensai-je en me pinçant les lèvres.
— C'est moi que tu cherches, Miss Lagaffe ? tonna une voix au creux de mon oreille.
— Putain ! fus ma seule réponse lorsque je tournai la tête vers elle.
||°
chapitre de :
-missIndecise
musique :
This girl — Kungs vs Cookin' on 3 burners
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top