Epilogue
ÉPILOGUE
ROXANE
"Stop your crying Baby, it'll be alright
They told me that the end is near.
We gotta get away from here."
Sign of the Times - Harry Styles
*
Tout le monde doit mourir un jour. D'une manière où d'une autre, chaque être sur cette terre est condamné à voir son cœur s'arrêter, dès lors qu'a résonné son premier battement. C'est une loi immuable de l'univers, la seule devant laquelle tous les êtres vivants, qu'ils soient rois ou mendiants, sont réellement égaux.
Moi, je suis un mendiant à l'agonie dans le palais du roi.
Je vais mourir en repentir, à vingt-six ans.
Et c'est très bien comme ça.
J'ai mal, terriblement mal. La balle du fidèle Berretta de Robin a percé un trou rougeâtre dans ma poitrine et depuis, je n'arrive plus à respirer. Mes oreilles ne perçoivent plus que les battements affolés de mon cœur, qui résonnent dans tout mon être. Ma vision est trouble. Je ne vois plus que les reflets dorés de cette peinture, à côté de moi. Elle que j'ai si souvent vue dans mes livres étant enfant.
Je suffoque, chaque inspiration que je prends est un véritable supplice. Cette écœurante odeur de sang qui me retourne l'estomac, c'est celle de la mort.
Je cligne des yeux. Juste assez pour apercevoir les visages de maman, de Loïs, de Marguerite, de Zara... De toutes ces femmes qui ont tenté à leur manière et tant bien que mal de me guider sur le chemin du bonheur.
Je repense à elles, et je repense à toi.
J'aurais tellement de choses à te dire, Roxane.
Depuis le jour où tu m'as donné ton cœur, tu as fait chavirer ma vie. Je ne me pensais pas capable d'aimer quelqu'un de cette manière. Je ne pensais pas pouvoir être sensible au venin de l'amour au point d'en perdre la raison. Pourtant, aujourd'hui, ma vie n'a de sens que si j'ai des bras pour t'étreindre, des yeux pour te voir sourire et des oreilles pour t'entendre rire.
Mais cette course au bonheur avait un prix que je ne connaissais pas.
Oh, bien sûr, j'aurais dû m'en douter. J'aurais dû savoir qu'on ne touche pas le paradis sans conséquence. En particulier lorsque, comme moi, l'on vient de l'enfer.
Alors, maintenant, je suis là. Étendu sur une moquette hors de prix que je suis en train de souiller de mon propre sang. Je t'entends te débattre contre le diable en personne, armée d'une volonté sans faille. Je connais ton courage, je connais ta force. Mais j'ai si peur pour toi. Si peur que la haine te terrasse. Elle qui m'a déjà tant pris...
J'entends un corps s'affaisser, agoniser. J'ouvre grand les yeux, mais j'ai peur de ce que je peux voir. Si tu es blessée, ou pire encore... Tout cela n'aura servi à rien.
Enfin, tu apparais. Tu es là, tout près. Tes lèvres murmurent mon prénom et tu poses une main sur ma joue. Quelques battements de cils m'aideront à dissiper mes larmes de souffrance pour mieux percevoir tes traits.
Si tu savais comme j'ai peur, Roxane. Je suis terrorisé à l'idée d'oublier ton visage.
— Je suis là. Ça va aller. Je vais prendre soin de toi. Je vais appeler les secours, ne t'en fais pas, je...
Qu'est-ce que tu fais ? Non ! Ne pars pas ! Je ne veux pas que tu partes... Reste avec moi, reste près de moi. Ne me laisse pas partir tout seul, mon amour. Je ne veux plus être tout seul, j'en ai assez. Mes poumons sifflent, je n'arrive pas à parler. Tes doigts m'effleurent, mais la douleur est telle que je dois lutter pour garder les yeux ouverts.
Et je lutterai, jusqu'à mon dernier souffle. Je lutterai pour graver à jamais la forme de tes lèvres dans ma mémoire.
Je ne veux pas oublier, Roxane. Alors, je t'en prie, reste-là... J'ai besoin de toi.
— Qu'est-ce que je dois faire ? Dis-moi, ce qu'il faut faire... Je ne sais plus. Je t'en prie...
Si, tu sais ce qu'il faut faire. Tu le sais au fond de toi, mais tu refuses d'entrevoir cette vérité. Pourtant, si tu m'aimes comme moi je t'aime, tu le feras. Parce que je sais que ta douleur est l'écho de la mienne. Et je ne veux plus te voir souffrir. Je passe difficilement une main sous mon dos et ramène le revolver que je conservais précieusement. Ce même revolver qui n'a pas su défendre ton père...
Il est temps maintenant de lui donner sa chance de me libérer. De nous libérer.
Ton visage se décompose, tes larmes jaillissent de plus belle. Tu as compris.
— Non. Non, non, non... Tu n'as pas le droit de me demander ça ! Tout sauf ça, tu entends ? Tu vas t'en sortir, fais-moi confiance, tu vas... Tu vas vivre ! Je t'interdis de me demander ça !
Oh, Roxane...
Comme j'aimerais pouvoir te répondre que oui, tout ira bien, comme je te l'avais promis. Mais je ne peux pas. Je ne peux plus te mentir. Ma main s'affaisse lourdement et ma tête roule sur le côté. Je n'ai pas la force de faire face à cette réalité.
Je vais mourir ici, avec ou sans ton aide. Dans une souffrance des plus atroces ou en paix, grâce à toi. Le destin le savait depuis toujours. Cette nuit, il a abattu sa dernière carte. Je n'ai plus d'as à jouer. C'est à toi maintenant de terminer la partie.
— Non...
S'il te plaît, mon amour. Il n'y a plus que toi qui puisses me délivrer.
Un éclair de lucidité traverse ton regard. Ton visage se penche sur moi et tes lèvres embrassent les miennes. C'est un baiser d'adieu, je le sens et j'aimerais qu'il dure pour l'éternité. Oh, comme j'aimerais que tu saches à quel point je t'aime. À quel point j'admire ton courage et ta force... Pardonne-moi si je t'ai déçu. Pardonne-moi le mal que j'ai pu te faire. Pardonne-moi de ne pas avoir toujours été là pour toi. De mourir maintenant et de te laisser seule.
Lorsque ta joue effleure ensuite la mienne, tu me murmures, dans un souffle :
— Merci pour tout ce que tu m'as donné. Pour tout ce que tu m'as appris. Pars en paix, mon amour. Je te pardonne.
Ces trois derniers mots imprègnent ma conscience et font souffler un vent de paix dans mon esprit, me faisant presque oublier ma douleur fulgurante. Un profond sentiment de quiétude et de soulagement m'envahit. J'ouvre les paupières et plonge mon regard empli de reconnaissance dans le tien. Mon corps se relâche.
Je n'ai plus peur, maintenant. Je suis prêt.
Je ne peux plus détacher mes yeux de ton visage. Il sera le dernier souvenir que j'emporterai de cette vie.
Tu armes le revolver. Je souris.
Que tu es belle, Roxane. Belle et courageuse. Que je suis fier d'être aimé de toi. Le geste me coûte, mais je ne peux pas m'empêcher de caresser une dernière fois ta joue humide. Je veux garder ce contact imprégné dans ma chair, jusqu'à ce que mon corps redevienne poussière.
Tu poses le canon glacé contre ma tempe, tes larmes s'écoulent de plus belle.
— Je t'aime, de tout mon cœur. Depuis le premier jour et jusqu'à la fin de ma vie. Il faut que tu le saches, je n'ai jamais cessé de t'aimer.
Roxane.
Je ne peux pas te le dire, mais qu'importe. Aucun mot n'est assez fort pour décrire tout ce que tu représentes pour moi. Tu es mon univers dans toute sa complexité et toute sa simplicité. Mon cœur et mon âme. Mon infini et mon éternel. Tu es ce pour quoi j'ai survécu jusqu'à cette nuit. Ce pour quoi je me suis battu durant toute mon existence.
Depuis la nuit de ma naissance, les étoiles savaient que tu m'étais destinée. Elles savaient que ce chemin semé d'embûches qu'elles avaient tracé pour moi devait me mener jusqu'à toi. Et malgré toutes les souffrances que j'ai endurées, je suis heureux qu'elles l'aient fait.
Parce que sans elles, je n'aurai jamais connu le bonheur que je chérissais tant d'être dans tes bras.
Maintenant, il est l'heure pour moi de tirer ma révérence.
Alors je ferme les yeux.
Je pars avec un seul regret, celui de ne pas avoir pu passer plus de temps à tes côtés. De ne pas avoir pu t'offrir la vie dont tu rêvais. Mais ne pleure pas mon ange, je serai toujours près de toi. Je ne t'abandonnerai jamais.
L'éternité aime l'amour autant que je t'aime. Un jour, je le sais, nous serons réunis dans leur royaume étincelant. Toi et moi, pour toujours.
Et plus rien n'aura alors d'importance. Plus rien, à part nous.
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