Chapitre 27


Nous  traversons, main dans la main, une allée boisée d'immenses cèdres menant en ville. Les arbres forment deux murs qui semblent  vouloir nous emprisonner dans l'obscurité. Le temps est frais et quelques éclaircies passent à travers les arbres. Et puis, c'est calme. Comme la plupart des bois de Temporia puisqu'ils sont un hommage à la mort.
La Mort est elle-même si calme et silencieuse lorsqu'elle arrive...
Entre deux temps,  Néo fait semblant de me chuchoter un mot et de m'embrasser la joue.
C'est dégueulasse...

Mais il faut bien qu'on fasse semblant car c'est certain qu'on nous observe sans arrêt depuis la Tour de contrôle.
La police voit tout depuis la Tour.

Un Mouvement brusque, un geste déplacé ou même encore un regard défiant... Et notre sursis est écourtée. Heureusement que la Police n'est pas au point de surveiller les conversations mais même sans cela, nous ne sommes pas loin de l'être.
Les éclats de soleil brillent sur les cicatrices saignantes de Néo . Elles sont à fleur de peau , gonflés de sang et elles dégagent  une odeur épouvantable qui ressemble à de l'acier. Elle est pourtant si stoïque comme-ci elle n'avait rien subi.
C'est vraiment bizarre...
Je me demande d'où cette fille vient vraiment . Nous sommes élevés si strictement à respecter la mort depuis notre enfance. Comment peut-elle la détester autant que moi ?
Je me souviens encore du jour et du moment où j'ai réalisé que je détestai tant ma date de mort. Ce n'est pas arrivé du jour au lendemain. C'est une réflexion rebelle, enfoui dans les parois vilaines de mon coeur que j'ai commencé à développer dans mon esprit quand j'avais à peine 12 ans. Au début, j'ai commencé à me demander si ma date pouvait changé , ensuite je me suis demandé pourquoi nous avions de fameuses dates, qui nous les imposait aux corps à la naissance et depuis combien de temps. Et surtout... pourquoi la Mort voulait mon âme à moi . Pourquoi elle voulait celle de mes parents et de notre ville.

Un jour, lorsque je rentrais du collège par un bois, je suis tombé sur une troupe de soldats de la Mort qui marchait aux pas, portant une immense statue en ivoire à leurs dos. Elle portait une faucheuse grise dont la faux recourbé etait vraiment longue et acérée. C'était la faux la plus extraordinaire que j'avais vu dans ma vie. Mais ce qui m'a surtout intrigué, c'était la figure de cet statue. Cette statue de la Mort possédait un sourire . Un sourire terrifiant vraiment inconfortable. Elle me regardait.
C'est comme-ci elle riait.

Et ce jour-là j'ai vraiment réalisé.  J'ai réalisé que je ne voudrais pas donner ma vie à la Mort, à cet être cruel et mystérieux qui passe son temps à croquer des âmes.
Je veux rencontrer la Mort quand je veux.

Voilà comment je me suis mis à la détester.

Mais ça c'est mon histoire.
Mais elle, Néo ?
Et qu'est-ce qui l'amené à se rebeller ?

En plus, on ne nous a jamais enseigné à vivre sans craindre la Mort ici. Je m'en rappelle encore étant petit de notre première sortie scolaire au dépôt mortuaire.
C'était un gigantesque édifice et il ressemblait fortement à une cathédrale. Ma mère m'amenait souvent à l'église, elle voulait vraiment que je me fasse ma propre idée de la mort.
(La chrétienté est la seule religion extérieur autorisé dans Temporia.)
Soit dit en passant, c'est d'ailleurs d'une histoire biblique qui lui plaisait beaucoup qu'elle a trouvé mon prénom : Issac, le fils d'un patriarche qui s'appelait Abraham et qui dans un moment de sa vie a été mis à l'épreuve par Dieu pour offrir son fils en sacrifice. Un récit chargée de profondeur et de symboles mais dont ma mère n'a retenu qu'un mot : Sacrifice.

Pour elle, j'étais son sacrifice à la Mort. Rien de plus.

Le dépôt mortuaire était un grande bâtisse , décorés de vitraux plafonneux lumineux, flamboyants et colorés . On entendait continuellement le son d'une l'orgue qu'un croque mort jouait dans les hauteurs. Je me souviens encore du regard des endeuillés joyeux et de toutes ses tombes déployés comme des monuments.
Ça semblait si joyeux, si joyeux de mourir.
À cet époque là, j'étais encore fasciné par cet événement , j'attendais cela avec impatience avant que...

" Néo : Qu'est ce que t'as ?

Moi :  Rien.

Néo :  Hmm...

Moi : Dis moi , Cléo te manque ou pas ? "

Néo me comtemple aussitôt mais fixe rapidement le sol.

Néo :  Non.

Moi : Je m'en doutais....

Néo :  Pourquoi  ?

Moi : J'ai l'impression que tu avais tout programmé. "

Elle lève les épaules. Un sourire s'affiche sur ses lèvres.

" Néo :  Qui sait.

Moi : Réponds moi.

Néo : Pourquoi ?

Moi :   Je n'ai pas du tout confiance en toi .

Néo :  Je ne t'ai jamais demandé de me faire confiance. "

Elle m'envoie un terrifiant sourire. Un frisson me traverse. Elle considère vraiment les autres comme des outils ? Des doutes commencent à s'installer dans mon esprit.

Moi : Tu avais prévu de rendre Cléo coupable.

Néo : C'est à dire ?

Moi : Ton père est banquier. Tu sais qu'il a souvent de la marchandise de l'Exterieur. Donc voilà mon hypothèse : tu as volé deux Terminaux d'une marchandise et tu en a planqué un sur Cléo quand vous étiez chez moi . Au cas où sa tournerait mal , c'est ça  ? "

Néo lâche un léger rire ,me regarde du coin des yeux puis baisse la tête.

" Néo : Et donc ? Tu as peur qu'un jour je te fasse la même chose ?

Moi : Si tu le joues comme ça , oui.

Néo : Écoutes... Si tu me mets des bâtons dans les roues ou que tu te rebelles , alors ouais... Fais gaffe à toi."

Sa voix est devenue encore plus grave. Une expression sombre a défiguré son visage. J'ai compris.

Soit je marche avec elle , soit je crève.

Et évidemment, je ne peux plus faire marche arrière maintenant. Elle veut jouer au dominant/dominé et pour l'instant malheureusement je ne peux rien y faire.
Elle fait  semblant de me faire les yeux doux.
Je fuis son regard.

" Moi : Tu es  horrible...

Néo : Je sais .

Moi : Ça ne te fait rien qu'elle soit morte  ?

Néo :  Qu'est ce que tu veux que ça me fasse?

Moi:  J'en sais rien ! T'es quand même une femme.

Néo :   Tu en es sûre ?

Moi : Ouais. Je n'ai jamais vu un homme avec une si grosse poitrine . "

Je pince aussitôt mes lèvres.
C'était quoi cet phrase de pervers ?
Heuresement , Néo sourit simplement.

" Néo :  Elle a crevée . C'est comme ça. Elle ne voulait  pas mourir dans le feu. Et, je lui ai permis de mourir dans un lac. C'est bien. Tu as ta réponse ? "

Non, dis-je en hochant la tête. Néo esquive mon regard et accélère le pas .
Elle a l'intention de rester évasive sur le sujet. De dos, ses cheveux noires dominent toute sa carrure.

Je traîne peut être avec un monstre.

***

Nous parvenons jusqu'à la ville. Les rues sont animés par les marchés de formol et l'odeur chimique des solutions s'empare aussitôt de mes narines.

Néo : Tiens. Au fait... Qu'est ce que tu vas dire à ta mère ?

Moi: C'est quoi cet question ?

Néo : Faut bien que tu rentres chez toi maintenant.

Moi : Je crois pas que c'est une bonne idée de rentrer chez moi.

Néo : C'est ce que j'allais te dire... Par contre, ne compte pas sur moi pour t'héberger.

Moi :  Faudrait que je sois ivre pour héberger chez une cinglée comme toi !

Néo : Pfff... Si  c'est vraiment compliqué, tu dormiras chez un de mes amis.

Moi:  Attends, j'égoutte mon oreille... Un quoi ? Ami ? Toi ? Des amis ?

Néo :  Mouais...

Moi : C'est des humains ?

Néo : Ne ne me cherches pas.

- NÉOOOOO !! C'EST TOI ???  "

Brusquement , un petit type dodu d'un certain âge fait irruption dans le marché et se précipite sur nous.

Je recule mais l'homme se dirige droit sur Néo. Il est dans une colère noire.
Sa main se lève. Brutalement, elle s'écrase dans la joue de Néo.

" Donc c'est ça ? Tu veux  mettre la honte sur ton père ????

Néo : ...

- RÉPONDS MOI !!!!! TOUT LE MONDE T'AS VU HIER !!! QU'EST CE QUE TU AS FAIT ???? "

Il scrute Néo de la tête aux pieds .
Mais Néo regarde ailleurs.
J'ai envie de m'enfuir. Cette fois tout le monde nous regarde. L'agitation du marché s'est transformé en un grand calme.
Des "c'est eux ! " S'exclament dans tout les sens. La nouvelle de deux mourants à risques à déjà circuler dans la vie, c'est certain. Les mourants se rapprochent peu à peu de nous.

" Néo : Tu ne peux pas comprendre, Père.

Le père : COMPRENDRE QUOI ????? QUE TU FRÉQUENTAIS CE MISÉRABLE ???

Néo : ...

Le père : Souillon !!!! Souillon que tu es ! Moi ton Père ? Je ne suis pas déjà assez méprisé pour toi ? Il fallait que tu sortes avec un mourant ?

Néo : J'ai mes raisons , Père.

Le père : Tes raisons ? Je vais t'en donner des raisons .. Villageois !!! Vous savez qu'il nous ait interdit de laisser quelconque outrages à la Mort se faire devant nos yeux ! Au Nom de la mort et en qualité de père, je vous déclare Chatieur de ma fille ici présente ! BATTEZ LA !!!! "

Quoi ?
Le père fait deux pas en arrière.
Il ne doit pas savoir que Néo est déjà blessé. C'est peut être permis mais cette fois, il ne doit pas le faire. Les villageois  hésitent mais soudain une dizaine décrochent les câbles au sol soutenant les tentes du marché.
Ils veulent nous battre avec ?
Ils s'approchent.

" Néo : Alors comme ça on me cherche ?  "

Néo se place en posture de combat, les genoux fléchis, les yeux menaçants.
Je me positionne devant elle.

" Moi : Recule !

Néo : Dégage.

Moi :  La ferme ! T'es blessée !!! "

Cette fois, les villageois s'élancent.
Je ferme les yeux.

Mais soudain, le fracas d'un fouet retentit juste devant moi. Je bondit en arrière de justesse . Un grand brun habillé d'un uniforme noire est apparut juste devant moi. Un fouet métallique entre ses doigts retombe au sol. Juste à sa droite, un blond brandit une cravache en métal.

Je fronce les sourcils.
Ce n'est pas la police de la Mort .


PS : Pour une lecture plus fluide de la suite de cet histoire, les noms des personnages remplaçent les tirets des différents dialogues.🌺

* Le nom de Isaac a été modifié en celui d'Izak.

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