Chapitre 23
L'heure pour nous de nous coucher était arrivé très rapidement.
À ma grande surprise, ma mère avait adoré Néo et Cléo.
Après un bon repas , elle a passé l'après-midi à leur étaler les photos des défunts de notre famille sur 4 générations. Mon coeur se soulevait à chaque fois que j'observai Cléo du coin des yeux : ce soir elle allait probablement mourir et ma mère ne l'avait pas épargné puisqu'elle ne parlait que de la Mort.
En même temps elle n'en savait rien.
Mais j'avais le sentiment d'être un monstre. Parler de mort à une future défunte enfant... Avant ça me paraissait normal quand j'étais petit mais maintenant, je trouve ça un peu diabolique.
Ma mère ne sait douter d'absolument de rien. Sans doute parce que Néo a bien joué le jeu... Elle était agréable, pas très bavarde mais respectueuse. Elle a même tenu un long débat avec ma mère sur pour ou contre l'incinération .
Je dois admettre qu'elle a été dinguement forte.
Mais justement je me demandais... Qui lui appris à autant bien jouer un rôle ?
Ici c'est très mal vue de jouer un rôle par exemple dans une pièce de théâtre. Si ce n'est pas pour jouer la mort, jouer un personnage vivant ( un amie, un membre de la famille, un personnage historique etc...) n'est pas vu d'un oeil très flatteur. Il est préférable de découvrir les personnages dans des livres : les personnages d'une histoire sont décrits entre les lignes d'une histoire, ils sont donc en quelque sorte "mort" puisqu'on ne peut pas les voir. On peut même dire que notre cerveau essaie de les faire revivre dans notre insconcient mais en réalité les personnages sont morts. C'est pour ça qu'on aime tant les livres ici.
Mais Néo...
Est ce que Néo vient d'une famille d'artistes ? Ou bien où aurait-elle pu apprendre à jouer un rôle ici ?
Pris de fatigue , je monte dans ma chambre , m'affale sur mon lit et soudain Néo fait éruption avec Cléo dans les bras.
" Purée ! Qu'est ce qu'elle déballe, la vieille... S'exclame t-elle avec sa voix naturelle en étirant ses bras.
- C'est ma mère que t'appelle la vieille ????
- Pfff... Qu'est ce qui ne faut pas faire pour éviter la mort ! Elle m'a parlé de toute ton enfance , comment je devais être une épouse pleine d'amour, comment préparer notre enterrement....
- Isaac !!! A hurlé Cléo en quittant ses bras avant de s'affaler sur mon lit.
- Ça t'apprendra à lui dire qu'on est ensemble idiote !
- Ahahahahah ! Pas le choix coco ! Elle n'aurait jamais cru que je suis une amie de longue date !
- Dans quoi je me suis foutu ? Dis-je en enfouant ma tête dans mon oreiller. Eh ! comment t'as appris à si bien jouer ?
- Tu me fais un compliment ?
- Non. Je trouve ça hyper dangereux que tu saches aussi bien le faire.
- Ah bon ? T'as peur que je te mentes ? Dis t-elle avec un regard maléfique. En effet, tu fais bien de te méfier. Mais pour le moment,je n'ai aucune raison de te la faire à l'envers. En revanche... Si tu fais quelque chose qui ne me plaît pas, tu risques d'être surpris...
- ....
- Grand frère ! Je vais mourir ce soir ? "
Allongé à côté de moi, Cléo me regarde avec ses grands yeux en amande mais d'un air légèrement inquiet. C'est bizarre mais son visage est devenu un peu plus pâle. Les couleurs de ses joues ont disparus. Un frisson me traverse dans le dos. Ce petit ange va vraiment disparaitre ce soir ?
Je ne peux pas lui répondre.
" Bon... j'ai un plan. "
Néo inspire un bon coup et s'assoit face à moi en tailleur , sur le sol. Ses cheveux noires sont si longs et raides qu'ils touchent le sol et son regard est perçant comme celui d'un aigle.
Pendant qu'elle détend ses bras, elle enlève alors sa veste et se retrouve en débardeur. Mes yeux s'écarquillent.
Des seins bien bombés dessinent son décolleté. Purée...
C'est vraiment une femme ?
C'est la première fois que je vois une poitrine aussi grosse !
Je détourne le regard vers le plafond , les joues rouges.
" Vazy envoie.
- On va dormir ici.
- Ça c'est déjà d'actualité !
- Ouais et on va juste faire ça. On va rester ici.
- Mais Néo, je ne veux pas mourir ! Murmure Cléo que je serre plus fort dans mes bras.
- Développe.
- Si on dort simplement ici, je ne vois comment Cléo pourrait mourir et encore moins dans le feu !
- Arh ? "
Je tourne mon regard vers Néo. Mais aussitôt sa poitrine me fait un effet que je ne peux pas maîtriser. J'attrape Cléo et l'a pose sur mes genoux.
" C'est pas bête ce que tu dis....
- C'est jamais bête , c'est toujours intelligent. Si on ne bouge pas, il ne se passera rien. Et tu n'auras pas de problème. Il me suffira ensuite de falsifier la date de Cléo et de faire croire qu'elle n'a jamais été bien enregistré.
- Ça ne marchera jamais. Il faut faire ça depuis une très longue période de temps comme .... Olympe.
- Olympe ?
- Laisse tomber mais c'est dangereux.
- Ok soit ! Mais en attendant on aura prouver que tu n'a pas de circonstance et que tu peux changer celle des autres. Les problèmes je les gère moi même !
- Ok dormons alors.
- Grand frère ! On a pas dit bonjour à ton Papa !"
Papa ? Ce mot là était tellement devenu transparent surtout en ce moment. Et même depuis toujours... Mon père travaille aux pompes funèbres, c'est un croque mort fonctionnaire. Il peut très bien organiser des enterrements tout comme entretenir des tombes ou incinérer des cadavres.
Comme mon père est un pure conservateur, et qu'il travaille tout les jours pour la Mort, on ne se voit que très très rarement. Mon père est quelqu'un de très calme, très réservée, limite timide qui n'aime pas s'exposer en public. Il m'a toujours dit qu'il ne pourrait pas être là pour moi dans ma vie mais seulement 3 jours avant ma mort.
C'était sa façon de montrer qu'il était un bon père... Un bon père pour lui même.
En vrai, je ne l'ai jamais aimé mon père.
" Il n'a pas besoin de bonjour. Répondai-je à Cléo.
- Ohhh !
- Bon, dormez ensemble ! Moi je dors la. Souffla Néo en s'allongeant sur le sol.
- Quoi ? Tu vas pas dormir là ?
- Pourquoi ? Je viens dormir dans tes bras ? Dit- elle avec un sourire malicieux.
- SURTOUT PAS !!
- Alors Ferme la et dors !
- Sans couette ? Comme ça ?"
Sans me répondre, Néo se retourne dans le sens opposé, prête à dormir. Elle est clairement lunatique celle-là...
J'eteins la lumière , m'allonge et attrape Cléo dans mes bras comme ci c'était un crâne jouet d'enfance.
" Allez dors. Demain est un nouveau jour.
- Je serai là grand frère demain ?"
Mon coeur se serre. J'enfonce aussitôt son corps sur ma poitrine. J'ai l'impression d'entendre son petit coeur qui court à la chamade. Les angoisses de la mort sont là, même si c'est diminué chez les enfants, je les entends. Les angoisses. Elle va bientôt angoisser, transpirer, trembler, convulser , tourner des yeux....
Je caresse ses magnifiques cheveux.
" Tu seras là demain."
Elle enfouit sa tête dans mon cou, un sourire s'étire sur ses lèvres. Ses épaules se détendent, je crois qu'elle s'endort.
Elle est tellement mignonne malgré la pâleur.
Quel visage elle devrait avoir à 18 ans ?
Je devrais pas me poser la question.
Je ferme les yeux.
***
" Oh bouffon ! Bouffon ! "
Un oreiller s'écrase dans mon visage. Mes yeux sont rempli de sommeil.
J'aggripe brutalement l'oreiller, le fait basculer et le visage de Néo tombe nez à nez sur le mien.
" T'es folle ou quoi ? Dis-je dans les vappes."
Elle me fait un sourire.
" La police est là."
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