Chapitre 26 : Jay

Roman était allongé confortablement dans le canapé, les jambes écartées pour me laisser la place de me blottir contre son torse.

Ma joue posée sur sa poitrine, j'entendais son cœur battre et le son m'excitait étrangement. Non pas qu'il y ait quelque chose d'excitant dans le battement de son rythme cardiaque, simplement cette proximité me galvanisait. Jamais encore, je n'avais été aussi proche de quelqu'un et ça, ça me plaisait au point de réchauffer mon sang.

Sa main dans mes cheveux me caressait doucement, attisant ce désir en moi.

J'étais carrément en ébullition, complètement obsédé à l'idée de me frotter nu contre lui. Malheur ! Je n'en pouvais plus, je n'avais pas envie d'attendre. Il n'y avait pas eu de possibilité d'approfondir notre intimité lors de notre dernière soirée ensemble. Roman m'avait fait découvrir l'univers des battles et ça avait été magique ! 

Mais cette soirée était propice à plus. Au premier abord, j'avais promis de respecter son choix ; pas de sexe jusqu'à mes dix-huit ans, sans vraiment réaliser à quel point ce serait dur. Se retenir juste pour des « et si » me soulait, étant donné que nous étions consentants, désireux et discrets, pourquoi se retenir ? Roman se bridait pour des risques imaginaires, notre relation n'était ni toxique, ni inégale. 

Et j'étais certain qu'il ne me paierait pas plus si je le suçais entre ses cours de danse. Pfff, il me laisserait jamais faire ça de toute façon. Moi, j'avais envie de sauter le pas ou le sauter tout court. Cette pensée m'arracha un rire.

Ayant besoin de succomber à mon envie, je me soulevai pour atteindre son visage. Lorsqu'il tourna la tête vers moi, je l'embrassai sans attendre. Il comprit rapidement la nature de ce baiser, aucun de mes mouvements n'était chaste ou prude. Mes lèvres, ma langue, mes dents cherchèrent à dévorer Roman et l'ambiance s'électrisa.

Comme souvent lors de nos moments passés ensemble, nos conversations animées étaient passionnantes et toujours intéressantes, mais nos contacts physiques l'étaient davantage. Nous n'arrivions plus à nous retenir. Sachant que nous n'avions droit qu'à des baisers, ils étaient toujours passionnés, empressés, à la limite de l'obscène.

Ce soir-là ne fit pas exception. En plus, je comptais rester dormir. J'avais déjà prévenu ma mère que je passais la nuit chez Hugo ce samedi. Mon plan était simple ; attiser le désir de Roman jusqu'à ce qu'il cède. Personne n'en serait jamais rien.

Mes mains s'insinuèrent sous son haut, touchant ses abdominaux lisses et durs alors que ma bouche traçait un chemin jusqu'à son cou. Roman se laissait faire, nous avions convenu que le pelotage était admis.

Mon désir crevait le plafond, je voulais tellement plus de Roman. Je souhaitais me rapprocher de lui avec plus d'intensité.

Son haut, remonté sur sa poitrine, me permit d'accéder à la peau douce de ses pectoraux, sur laquelle je laissai là aussi des traces. Roman gigotait, son autre main toujours nichée dans mes boucles.

Plusieurs coups de langue sur son torse m'amenèrent vers ses tétons que je titillais avec plaisir. Roman siffla, la tête rejetée en arrière.

— Bordel, Jay...

Ma réponse se traduisit par un geignement éhonté et une morsure possessive. Mon coeur battait à tout rompre, l'excitation me picotait la peau.

Même protégé par ses vêtements, je pouvais sentir son érection naissante. Dans mon propre short, c'était carrément le feu, je bandais à en avoir mal, je me contrôlais moins bien que lui, c'était clair. J'allais jouir dans mon caleçon comme un collégien pré-pubère !

Mais Roman était un aphrodisiaque pour moi. Ses yeux gris aux pépites marrons, ses rictus pincés, sa voix grave et son corps athlétique, évidemment !
Et toutes ces choses que je remarquais, comme sa préférence pour le thé noir plutôt que le café, pour les vestes en jean plutôt que les manteaux, sa tendance à manger des bonbons à chaque pause entre deux cours de danse... Sa manière de hausser les sourcils quand je disais une connerie ou même le qu'il dévorait les frites trois par trois ! 
Tout me rendait dingue de lui.

Et comme à chaque fois que quelque chose m'obsédait, je deviens irréfléchi.
Lentement, mais sûrement, une de mes mains se retrouva sur son entre-jambe, appréciant ainsi le contour de son sexe à demi gonflé.

Une vive inspiration précéda l'interruption inévitable de Roman.

— Jay ! cria-t-il d'une voix rauque en agrippant mon poignet.

Il luttait tellement fort pour garder le contrôle de ses envies, tout ça parce que la bienséance désapprouvait notre relation. Ça n'avait aucun sens, j'étais plus que partant pour coucher avec lui. Et il n'était pas si vieux que ça ! Ça n'avait rien de pervers, d'autant plus qu'il ne me ferait rien que je n'avais pas déjà vécu ! Enfin... je crois ? Peut-être qu'il aurait des choses à m'apprendre étant donné son expérience. C'était encore plus tentant !

Évidemment, j'étais allé trop loin, j'avais profité de la situation. J'en étais conscient. Roman me repoussa et je soupirai, m'écartant de son corps.

Assis sur mes talons entre ses jambes, figé par son regard, une sensation étrange s'empara de moi. Sa poitrine s'élevait et se rabaissait à une vitesse folle.

Nous restâmes ainsi, à nous dévisager un long moment avant que je ne me décide à parler :

— Je suis désolé. Je suis désolé d'avoir autant envie de toi, Roman, mais j'arrive pas à être aussi froid que toi.

— Je ne suis pas froid, je suis raisonnable, asséna-t-il.

— Vois-tu quelqu'un dans ce salon avec nous ? Y a-t-il des témoins ?

Roman fronça légèrement des sourcils.

— Non, mais...

— Mais rien du tout. Il n'y a personne, personne ne sait pour nous. Tu n'as encore rien dit à Théo donc pour le moment, nous sommes seuls à vivre cette histoire. Personne ne saurait. Ce serait juste toi et moi, et j'ai envie de plus. Pas toi ?

— Tu sais bien que oui, Jay, ça n'a rien à voir.

Il se redressa pour s'asseoir, le moment était irrémédiablement brisé. La colère se disputait avec le désir encore sous-jacent.

— Je ne suis pas idiot, Roman, j'ai bien compris où était le problème, m'énervai-je.

— Vraiment ? Et qu'est-ce que tu as compris ?

— Tu as envie de moi alors si tu te retiens tant c'est simplement parce que tu ne me fais pas confiance, déduisis-je avec amertume.

Étrangement, ma déclaration eut le mérite de refroidir la tension de Roman. Son visage changea d'expression et je continuai donc, le cœur tiraillé par la douleur.

— Il n'y a personne pour te dénoncer ici. Personne pour nous juger. Si nous décidions de coucher ensemble maintenant, jamais personne ne le saurait. Mais tu n'as pas confiance en moi, tu as peur que je le dise, que je me retourne contre toi. Pas vrai ?

Le silence qui me répondit m'assena un coup de poing dans le ventre. Ma gorge se comprima sous l'émotion dévastatrice qui s'emparait de moi.

— Jay, c'est plus compliqué... murmura Roman.

— Non ! Arrête de dire ça ! explosai-je. Tu dis toujours que tout est plus compliqué, mais c'est très simple au contraire ! Tu te retiens parce que tu as peur de moi !

— Je suis réaliste, Jay, les choses peuvent mal tourner pour nous, pour moi.

—   Oh, tu anticipes notre rupture alors ?

—   Non, mais tu es jeune, tu pourrais regretter après coup et...

— Regretter quoi ? Ma relation avec toi ? Mon désir pour toi ?

— Oui. Si jamais on se sépare et que tes parents apprennent pour nous, ils pourraient aussi m'accuser d'avoir profité de toi étant donné ma position.

Les épaules de Roman s'affaissèrent et il soupira longuement en fermant les yeux. Le son fut si déchirant qu'une partie de ma rage s'estompa, néanmoins, j'étais toujours blessé. Je n'aimais pas du tout ce que je venais de comprendre rudement.

— Pour que mes parents t'accusent, il faudrait que je me plaigne à eux. Et je ne suis pas du genre à reporter mes choix ou mes fautes sur les autres, je n'ai jamais accusé personne de choses dont ils n'étaient pas coupables.

— Je ne dis pas que c'est ce que tu ferais, s'empressa Roman en secouant la tête.

— Bien sûr que si. Tu as peur que si l'on couche ensemble et que les choses se compliquent, je décide de tout te mettre sur le dos. Tu me prends pour un lâche.

— Non ! tonna-t-il alors avec violence.

Son emportement fut suivi par un silence lourd de sens. Lui-même ne croyait pas en sa propre protestation. J'avais mal à l'intérieur, une douleur que je ne comprenais pas. Alors c'était ça l'image qu'il avait de moi ?

— Tu penses que je pourrais t'accuser de viol ? m'étranglai-je sur les mots. Tu veux faire un enregistrement de ma voix ? Où je cite que je suis consentant, peut-être ?!

La douleur sous mes côtes brûlait mes poumons, j'avais du mal à respirer et la colère n'arrangeait rien.
Mes yeux se mirent à piquer sous l'afflux des larmes que je contenais. Roman s'approcha de moi pour s'emparer de mes mains et les serrer.

— Je suis désolé, Jay. Je... c'est moi le lâche, d'accord ? J'ai peur, peur que notre relation nous explose au visage. Ce serait tellement plus simple de réussir à attendre encore quelques semaines.

— Je n'ai pas envie d'attendre, assénai-je avec sincérité. Je suis égoïste, j'aimerais pouvoir te toucher comme je le veux, dormir avec toi, vivre une relation... normale.

— Moi aussi, murmura-t-il en posant son front contre le mien.

— Alors fais-moi confiance, fais-nous confiance, Roman. Je ne dirais rien à personne et si jamais, on nous découvrait, je serais le premier à crier que je le voulais.

Roman soupira et sans un mot, m'embrassa avec douceur. Malgré l'élan de tendresse que m'inspira cette attention, je me dégageai. Je n'oubliais pas que le cœur du problème était la perception que Roman avait de moi. Quoi que je fasse, son désir et son affection n'enlevaient en rien l'image qu'il avait de moi. À ses yeux, j'étais un gamin. Et plus forte était l'attraction entre nous, plus forte était la culpabilité pour lui.

Notre écart d'âge le perturbait, pourtant, rien ne changerait ce fait.

— Je comprends ta colère, Jay. Mais essaie de comprendre ma peur, s'il-te-plaît.

— Je n'ai pas envie de vivre cette relation à travers ta peur. Je... J'aime ce qui se passe entre nous, c'est important pour moi. J'ai pas envie de voir ça comme un problème.

— Ce n'est pas notre relation le problème, c'est l'image qu'elle renvoie, rectifia Roman en pinçant les lèvres.

— Oui, eh bien, moi, je me soucis plus de ce qu'il y a réellement entre nous, plutôt que ce que les gens pensent ! Surtout que personne ne sait.

— Parce que personne ne comprendrait !

J'entendis l'agacement pointer dans sa voix et cela ne fit que me ronger un peu plus.

— Ça, c'est toi qui le dis.

— Jay... je pensais qu'on était d'accord.

— Je le pensais aussi, mais tes règles n'ont aucun sens. Tu t'accroches à une illusion, un semblant de bienséance.

— Non, ma position envers toi m'interdit d'avoir des relations sexuelles, c'est un fait.

— Tu n'as qu'à arrêter de me payer ! Je viens par plaisir, pour apprendre !  

Je n'obtins aucune réponse après ma tirade. Roman resta figé face à moi, immobile. Peut-être réfléchissait-il à mes paroles, sauf que son silence me pesait.

— Écoute, je... je passe peut-être pour un obsédé en revenant sur notre accord, convins-je. Mais moi, j'ai envie de toi à chaque fois que je pense à toi ! Et ça me soule de voir que c'est un problème alors que ça devrait être normal !

— Je sais, souffla Roman.

— Si vraiment tu veux attendre, ok, mais sache que ce manque de confiance qui règne entre nous me blesse, avouai-je, la voix serrée. Parce que je ne te trahirais pas. Jamais, je ne me retournerai contre toi, Roman.

J'encadrai son visage de mes mains et priai pour qu'il perçoive la sincérité dans ma voix. Roman prit une grande inspiration et hocha faiblement la tête, ses prunelles brillaient sous le faible éclairage de la lampe du salon. Les ombres dessinaient chaque relief de son visage, c'était à couper le souffle. Il était à couper le souffle.

Et je n'avais pas envie d'envisager qu'il ne soit pas apte à me faire confiance parce que c'était si douloureux... Si Roman était incapable de croire en moi alors nous n'avions rien à faire ensemble.

— D'accord, l'entendis-je tout à coup répondre.

— D'accord, quoi ?

— Tu as raison, on doit avoir confiance l'un en l'autre.

Mon cœur bondit, prêt à sortir de ma cage thoracique.

Je fondis sur sa bouche, la joie explosant en moi. Roman fut déséquilibré quelques secondes avant de se reprendre pour me rendre mon étreinte.

— Mais allons-y doucement, d'accord ? J'ai pas envie qu'on se précipite.

— D'accord, step by step.

— C'est approprié, oui.

Roman ricana et embrassa mon front avec tendresse.

— Merci, murmurai-je.

*

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